Libre à vous ! Radio Cause Commune - Transcription de l’émission du 21 mai 2019

Titre :
Émission Libre à vous ! diffusée mardi 21 mai 2019 sur radio Cause Commune
Intervenants :
Marie-Odile Morandi - Pierre-Yves Dillard - Vincent Laurent - Véronique Bonnet - Frédéric Couchet
Lieu :
Radio Cause Commune
Date :
21 mai 2019
Durée :
1 h 30 min
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Page des références utiles concernant cette émission

Licence de la transcription :
Verbatim
Illustration :
Bannière radio Libre à vous - Antoine Bardelli ; licence CC BY-SA 2.0 FR ou supérieure ; licence Art Libre 1.3 ou supérieure et General Free Documentation License V1.3 ou supérieure. Logo radio Cause Commune, avec l’accord de Olivier Grieco

Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l’April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

logo cause commune

Transcription

Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.
Frédéric Couchet : Bonjour à toutes. Bonjour à tous. Vous êtes sur la radio Cause Commune 93.1 en Île-de-France et partout dans le monde sur le site causecommune.fm. La radio dispose d’un webchat, donc utilisez votre navigateur préféré, rendez-vous sur le site de la radio causecommune.fm, cliquez sur « chat » et retrouvez-nous ainsi sur le salon dédié à l’émission.

Nous sommes mardi 21 mai 2019, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.

Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre. Je suis Frédéric Couchet, le délégué général de l’April.

L’association dispose d’un site web, april.org, sur lequel vous pouvez trouver une page consacrée à l’émission avec les liens et références utiles, les détails sur les pauses musicales et toute autre information utile en complément de l’émission. N’hésitez pas à nous faire aussi des retours pour indiquer ce qui vous a plu mais également des points d’amélioration.

Nous vous souhaitons une excellente écoute.
Nous allons passer maintenant au programme de l’émission.

Nous commencerons par la chronique « Les transcriptions qui redonnent le goût de la lecture » de Marie-Odile Morandi qui sera avec nous par téléphone dans quelques secondes.

D’ici une quinzaine de minutes, notre sujet principal portera sur des modèles d’organisation d’entreprises du logiciel libre avec la société Easter-eggs et la société 24ème.

En fin d’émission nous aurons la chronique de Véronique Bonnet intitulée « Partager est bon ». Véronique Bonnet est vice-présidente de l’April et sa chronique portera sur le sujet du droit de lire.

À la réalisation de l’émission aujourd’hui Patrick Creusot et Isabella Vanni.
Patrick Creusot : Bonjour.
Frédéric Couchet : Bonjour Patrick.
Patrick Creusot : Bonjour tout le monde.
Frédéric Couchet : Bonjour Isa. Tout de suite place au premier sujet.
[Virgule musicale]

Chronique « Les transcriptions qui redonnent le goût de la lecture », Parcoursup

Frédéric Couchet : Nous allons commencer par une intervention de Marie-Odile Morandi, qui est animatrice du groupe Transcriptions à l’April, pour sa chronique intitulée « Les transcriptions qui redonnent le goût de la lecture. Quels sont tes coups de cœur, quel est le sujet dont tu souhaitais nous parler aujourd’hui ?
Marie-Odile Morandi : Je souhaitais aujourd’hui vous parler d’un sujet qui sera d’actualité chaque année à la même époque, au mois de mai, c’est-à-dire les réponses aux vœux d’affectation que les lycéens de Terminale ont insérés sur la plate-forme Parcoursup les mois précédents, donc les propositions d’admission répondant aux choix qu’ils ont indiqués pour leurs études à venir dans l’enseignement supérieur.

Depuis le 15 mai 2019, les lycéens concernés, presque 900 000, peuvent prendre connaissance des réponses à leurs vœux et certains journaux et réseaux sociaux font déjà état de soucis concernant le fonctionnement de Parcoursup.

Je souhaite donc vous présenter trois transcriptions publiées sur le site de l’April qui traitent de Parcoursup, chacune proposant un angle d’observation différent.
Frédéric Couchet : Première question : qu’est-ce que Parcoursup, Maire-Odile ?
Marie-Odile Morandi : Parcoursup est la plate-forme nationale avec l’application destinée à recueillir et à gérer les vœux d’affectation en première année de l’enseignement supérieur en France des presque bacheliers. Elle remplace l’ancien système d’Admission Post-Bac (APB), très critiqué en 2017, en particulier parce que des étudiants avaient été affectés par tirage au sort, ce qui, évidemment, laisse perplexe.

L’algorithme d’affectation Parcoursup se compose de deux parties : un algorithme national et des algorithmes locaux créés et utilisés par chaque établissement d’enseignement supérieur.
Frédéric Couchet : Dans la première transcription que tu veux nous présenter, de quelle façon est traité ce sujet ?
Marie-Odile Morandi : La première approche est proposée par les intervenants d’un Décryptualité du mois de mai 2018 intitulé « Parcoursup publié en libre sur Framagit ». Ce Décryptualié nous indique que le code source de Parcoursup a été publié le 22 mai 2018 ; il a été déposé sur Framagit, la forge logicielle de Framasoft basée sur du logiciel libre et qui héberge du code source libre. Le projet Parcoursup a été libéré sous licence libre GPL [GNU General Public License], qui lui confère les quatre libertés du logiciel libre.

Les intervenants se complimentent de ce choix à mettre au crédit du ministère, soulignant une bonne volonté derrière cette mise en place : « Le code est libéré, il devient transparent. Connaître le code c’est connaître les critères et savoir comment ça marche. Maintenant, on peut discuter réellement sur des éléments sérieux au lieu d’être dans l’obscurité, puisqu’on va pouvoir étudier ce code », avec un coup de chapeau à l’équipe qui a publié.
Frédéric Couchet : Alors à t’écouter tout va bien, tout le monde est satisfait !
Marie-Odile Morandi : Hélas non ! Dès 2018 ce code de Parcoursup était contesté dans son objectif et dans sa façon de faire ; il ne plaît pas à tout le monde. Il ne plaît sans doute pas aux défenseurs du logiciel libre et aux responsables de la forge Framagit, mais c’est du Libre ! En utilisant d’autres exemples, les intervenants nous rappellent que le logiciel libre peut être utilisé pour des choses qui sont parfois regrettables. On peut l’utiliser pour ce qu’on veut, c’est même une des quatre libertés essentielles.

Autre problème : en mai 2018 seul l’algorithme national a été publié ; les algorithmes locaux ne l’ont pas été, donc la deuxième partie de sélection n’est pas encore publique.
Frédéric Couchet : D’accord. Ça c’est la première transcription. Une autre transcription aborde la méthode de Parcoursup sur le fond ce coup-ci.
Marie-Odile Morandi : Oui. La deuxième transcription que je vous propose de lire ou de relire, les références sont bien sûr sur le site de l’April, sur la page consacrée à l’émission d’aujourd’hui, est une étude de fond très complète. En juillet 2018, aux Rencontres mondiales du logiciel libre à Strasbourg, Judicaël Courant a tenu une conférence intitulée « Parcoursup : un enfer pavé de bonnes intentions ? », avec un point d’interrogation. Ce professeur de classe préparatoire nous parle de son expérience puisqu’il fait partie du jury de son établissement pour choisir les futurs élèves de la section dans laquelle il enseigne. Son expérience lui permet des comparaisons avec le précédent système d’affectation APB. Il expose des simulations de situations qui peuvent se présenter. Son analyse est très complète et il formule des propositions d’amélioration.
Frédéric Couchet : Quels sont les principaux reproches formulés par cet intervenant ?
Marie-Odile Morandi : Il n’hésite pas à qualifier Parcoursup d’usine à gaz car c’est une procédure très centralisée.

Il insiste sur deux problèmes qui sont à envisager de façon disons politique :

  • le premier problème : la sélection. Pour Judicaël Courant, à partir du moment où vous avez plus de bacheliers qui veulent faire des études supérieures que de places disponibles, la sélection reste nécessaire. Ce qu’il souhaiterait c’est qu’on se pose la question des critères divers et variés sur lesquels repose cette sélection. Il est clair qu’aucun algorithme ne peut résoudre le problème du manque de places dans l’enseignement supérieur ;
  • le deuxième problème regarde la hiérarchisation des choix des futurs étudiants que refuse absolument la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Je vous invite à lire les conséquences développées par le professeur Courant que cela entraîne, en particulier le fait qu’il n’y aura plus de statistiques sur lesquelles asseoir une politique publique et le fait que certains postulants vont, en quelque sorte, se censurer, mentir sur leurs préférences, leur objectif étant d’être admis quelque part et bien entendu, cela devient totalement contre-productif.

En tant qu’expert des sujets traitant d’informatique il pose les questions habituelles : est-ce que l’ordinateur sur lequel fonctionne le processus n’est pas défectueux ? Est-ce que le code qui tourne sur cet ordinateur est le bon ? Est-ce que les données en entrée sont correctes, qu’il n’y a pas des oublis ? Est-ce que les résultats qui sont publiés sont bien ceux qui ont été calculés ?
Frédéric Couchet : Donc tu conseilles, on conseille la lecture de cette transcription ?
Marie-Odile Morandi : Tout à fait. Les explications données sont très approfondies. Les améliorations qu’il propose font état d’un algorithme connu des experts, utilisé dans divers pays et qui, selon lui, serait une bien meilleure solution.

En réponse à une question du public, Judicaël Courant indique qu’il a alerté des parlementaires sur le sujet et il souhaite que le débat soit porté sur la place publique.
Frédéric Couchet : Et concernant les algorithmes locaux ?
Marie-Odile Morandi : Eh bien là c’est la troisième approche, celle de Xavier Berne avec les explications données dans sa chronique d’une émission Libre à vous ! de mars 2019. Par une demande CADA, la Commission d’accès aux documents administratifs, le syndicat étudiant UNEF, avait demandé l’année dernière à plusieurs dizaines d’universités de rendre publics leurs algorithmes locaux afin que les candidats sachent sur quels critères leurs dossiers allaient être examinés. Un jugement rendu par le tribunal administratif de Guadeloupe a ordonné à l’université des Antilles de communiquer à l’UNEF son algorithme local de sélection des étudiants ainsi que les codes sources correspondants.

Xavier Berne ne parle pas d’algorithme mais de tableurs utilisés par les universités pour que les jurys locaux effectuent un pré-classement des candidats. Et, nous dit-il, de nombreux observateurs pensent que c’est le cœur de la machine Parcoursup, où se joue en grande partie la sélection des étudiants.
Sur ce dossier Xavier Berne n’hésite pas à parler du bal des faux-culs : plusieurs membres du gouvernement, à diverses reprises, avaient promis la transparence sur Parcoursup pour mettre un terme aux critiques qui avaient concerné APB.

Frédéric Couchet : Admission Post-Bac.
Marie-Odile Morandi : Dans la discussion avec Xavier Berne c’est toi, Frédéric, qui nous rappelle que pour bien comprendre réellement tout le système, il faudrait rendre publiques trois choses : le code source de la plate-forme nationale, les algorithmes locaux et les documents qui expliquent tout cela.
Frédéric Couchet : Si je le dis c’est que ça doit sans doute être exact ! En conclusion, Marie-Odile, sur ce sujet de Parcoursup ?
Marie-Odile Morandi : Nous en saurons certainement davantage dans les semaines qui viennent. La transparence sera-t-elle au rendez-vous ? Et bien sûr, tout cela étant construit avec de l’argent public, tout cela devrait être public.

Comme dit Judicaël Courant : « Il serait indigne de se satisfaire de la solution actuelle eu égard à ce qu’elle fait subir aux bacheliers », et je me permets d’ajouter aussi à leurs familles. Mais il faut le reconnaître, des pas ont été accomplis dans la bonne direction et c’est souvent sur ce qui ne va pas qu’on communique.
Frédéric Couchet : As-tu quelque chose à ajouter en conclusion ?
Marie-Odile Morandi : Pour terminer, je souhaiterais remercier publiquement une personne dont le pseudo est @macousine et qui, toutes les semaines, relit la transcription de l’émission Libre à vous !, entre autres, avant l’ultime lecture que je fais moi-même pour publier. Parmi les auditrices et auditeurs de l’émission, le groupe Transcriptions de l’April recherche ses autres cousins et cousines et les remercie par avance !
Frédéric Couchet : Effectivement, on remercie tous et toutes @macousine qui est d’ailleurs présente sur le salon, c’est son pseudo, ce n’est évidemment pas notre cousine, mais quelque part c’est notre cousine à nous. Sur le site de l’April, april.org, il y a les références pour rejoindre le groupe Transcriptions et soit faire des transcriptions, soit faire des relectures de transcriptions déjà faites ou simplement des corrections orthographiques.

Écoute, je te remercie Marie-Odile, je te souhaite de passer une bonne fin de journée.
Marie-Odile Morandi : Merci. Bonne continuation à vous.
[Virgule musicale]
Frédéric Couchet : Nous allons faire une pause musicale, nous allons écouter Tracing My Steps par Tobias Weber et on se retrouve juste après.
Pause musicale : Tracing My Steps par Tobias Weber.
Voix off : Cause Commune 93.1

Modèles d’organisation d’entreprises du logiciel libre

Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter Tracing My Steps par Tobias Weber. Les références sont sur le site de l’April, c’est en licence Creative Commons Partage. J’en profite pour signaler que cette musique vient d’un extrait musical de la première émission sur Graf’hit, une émission de radio sur la région de Compiègne et également disponible en streaming. L’émission de radio s’appelle La Voix Est Libre et ce sont nos amis de picasoft.net, c’est tous les vendredis de 9 heures à 9 heures 30 sur 94.9 autour de Compiègne et en streaming sur Internet et avec les podcasts.

Vous écoutez toujours l’émission Libre à vous ! sur radio Cause Commune 93.1 en Île-de-France et partout ailleurs sur le site causecommune.fm.
Nous allons poursuivre avec notre sujet principal qui va porter sur des modèles d’organisation d’entreprises du logiciel libre avec nos deux invités : Pierre-Yves Dillard de la société Easter-eggs. Bonjour Pierre-Yves.
Pierre-Yves Dillard : Bonjour.
Frédéric Couchet : Et Vincent Laurent, je ne sais pas si on dit « le 24ème » ou « de l’entreprise 24ème ». Bonjour Vincent.
Vincent Laurent : Bonjour. On dit « le 24ème ».
Frédéric Couchet : Le « 24ème ». D’ailleurs peut-être que tu expliqueras tout à l’heure d’où vient ce terme « le 24ème ».

Nous allons parler dans cette émission pas forcément de logiciel libre en tant que tel, mais plutôt de certains modèles d’organisation d’entreprises du logiciel libre qui, normalement, essayent de rendre, on va dire, en partie du bonheur au travail. Pour finir de préparer l’émission hier j’ai regardé un documentaire qui s’appelle justement Le bonheur au travail, qui avait été diffusé sur Arte il y a quelques années. Dans l’introduction un des intervenants expliquait, c’est de mémoire parce que je n’ai pas noté les chiffres, mais je crois que 10 % des personnes en France qui vont au travail sont heureuses d’aller au travail ; il doit y en avoir 50 % qui y vont mais sans être engagées et le reste est complètement désengagé de leur activité du travail. Donc là on va avoir des expériences de personnes qui sont à priori dans la tranche des 10 %, heureuses d’aller travailler, en tout cas on l’espère.

D’abord une petite présentation individuelle, rapide, de votre parcours à chacun. Pierre-Yves Dillard déjà.
Pierre-Yves Dillard : J’ai participé aux débuts d’Easter-eggs en 1997-1998. Avant j’avais un parcours absolument en dehors de l’informatique puisque j’ai, à la base, une formation d’historien. Je me destinais soit au journalisme soit à l’enseignement, j’ai un peu essayé les deux. Et après des rencontres, des hasards font qu’à un moment on prend un aiguillage et on se retrouve dans une voie comme l’informatique.
Frédéric Couchet : D’accord. Vincent Laurent.
Vincent Laurent : Moi je suis développeur web et je fais aussi de l’administration système. J’ai une formation beaucoup en apprentissage, essentiellement en apprentissage, donc j’ai une licence pro. Ensuite j’ai travaillé cinq ans dans la même entreprise là où j’ai fait toute mon expérience que ce soit travailler en équipe, en méthode agile et j’ai notamment découvert le logiciel libre. Suite à cette expérience qui était dans une entreprise pyramidale, j’ai décidé, avec mes collègues, de fonder le 24ème.
Frédéric Couchet : D’accord. Pierre-Yves, on va commencer par une présentation, on va dire succincte, des grandes lignes du projet d’Easter-eggs, d’organisation du projet initial, des concepts et ensuite on rentrera un peu plus dans le détail, à chaque fois évidemment, sur les différents points, avec des questions et des échanges entre vous. Pierre-Yves, déjà petite présentation du projet Easter-eggs.
Pierre-Yves Dillard : Dès l’origine en fait Easter-eggs était un projet avec deux casquettes. Il y avait un projet économique parce qu’on est une entreprise donc l’objectif c’est de pouvoir vivre de son travail, et il y avait un projet social. Ces deux projets ont toujours été étroitement liés et on n’a jamais essayé de faire en sorte que l’un prenne le pas sur l’autre, dans un sens comme dans l’autre d’ailleurs.

Donc un projet économique, une société de services en informatique, spécialisée dans l’intégration et la mise en place de logiciels, que ça soit en intégration systèmes et réseaux ou en développement spécifique. Ça c’est ce qui permet, en fait, de faire bouillir la marmite, de gagner notre vie.

À côté le projet social avec, comme base, deux principes sur lesquels on reviendra sûrement c’est : une élection du gérant annuel, on va dire de la direction, on pourra aller plus loin sur ce sujet plus tard, et le salaire égal. Ce sont ces deux principes qui ont construit Easter-eggs pendant ces dernières années, plus de 20 ans maintenant.
Frédéric Couchet : La date de la création d’Easter-eggs, tu peux la rappeler ?
Pierre-Yves Dillard : C’est 1997, c’est fin 1997.
Frédéric Couchet : C’est intéressant. Je pose la question parce que c’est un retour d’expérience d’une vingtaine d’années qui va compléter le retour d’expérience plus courte du 24ème. Vincent Laurent, le 24ème c’est quoi le projet initial et pareil, la date de création ?
Vincent Laurent : Comme j’expliquais tout à l’heure, on était une équipe de quatre développeurs, on était très contents de travailler sur nos projets, on était assez indépendants dans l’entreprise dans laquelle on travaillait, mais il se trouve que la structure pyramidale de l’entreprise a fait qu’on a commencé à nous mettre des bâtons dans les roues dans notre travail au quotidien. Du coup, au lieu de partir chacun de son côté, on a décidé de fonder le 24ème. Initialement, le besoin est de travailler dans des bonnes conditions et d’avoir le pouvoir le travailler dans les conditions dans lesquelles on veut travailler.
Frédéric Couchet : D’accord. Est-ce que tu as quelques mots clés justement par rapport à cet objectif de travailler dans des bonnes conditions ?
Vincent Laurent : Oui. C’est le partage du pouvoir, essayer qu’il soit le plus horizontal possible et le plus distribué possible. Ça, ça passe par une grande transparence. On a aussi fait le choix de développer uniquement des logiciels libres, ça participe aussi à la transparence et au partage du pouvoir. Nos méthodes de travail sont de l’auto-organisation et de la méthode agile, donc toujours développer sur du concret, c’est celui qui développe qui décide, donc vraiment de baser sur du concret.
Frédéric Couchet : D’accord. C’est le principe de : celui qui sait fait, quelque part.
Vincent Laurent : Exactement. C‘est ça.
Frédéric Couchet : On va revenir, on a déjà quelques mots clés : élection de la direction, partage du pouvoir horizontal ou en tout cas transparence, on a le terme de l’agilité sur laquelle on va revenir, auto-organisation, logiciel libre. On va évacuer cette question en premier ; Vincent Laurent l’a expliqué dans le cadre du projet du 24ème tout à l’heure. Le mot 24ème vient d’où ?
Vincent Laurent : On était une équipe de développeurs qui étions au 4e étage donc on nous appelait les gars du 4e. Il se trouve qu’on travaille essentiellement pour des viticulteurs donc des projets vin. Du coup ça a fait le 24ème. Il se trouve que c’est aussi l’inverse de 42.
Frédéric Couchet : Je pensais initialement que c’était l’inverse de 42.
Vincent Laurent : Non, c’est une conséquence.
Frédéric Couchet : Je n’avais pas fait le lien avec le vin et 4e parce que je connais un peu l’historique de l’entreprise dans les informations de transparence évidemment ; l’un des associés c’est Tangui Morlier, ancien président de l’April, toujours membre de l’April, quelqu’un qui est déjà intervenu à deux reprises dans l’émission.
Vincent Laurent : Il n’est pas associé, il travaille au quotidien avec nous, mais il n’est pas associé au 24ème.
Frédéric Couchet : Il travaille pour vous, mais il n’est pas associé. D’accord. OK.

Vincent a dit que la partie logiciel libre faisait partie du cœur du projet de la société, d’ailleurs on reviendra peut-être tout à l’heure sur le modèle d’organisation SCOP, etc., si on peut. Côté Easter-eggs je suppose qu’aussi, dès le départ, c’était le principe de base.
Pierre-Yves Dillard : En fait oui, ça a été très vite le principe de base puisqu’à l’époque où on s’est créé c’était aussi un petit peu l’émergence du mouvement du Libre en France. On a pris la vague avec un certain nombre d’entreprises dont certaines que tu connais bien Fred, Alcôve pour ne pas la citer. On était au début de cette vague-là et ça a aussi été un choix. Ça a été un choix philosophique mais c’était aussi un choix d’opportunité, c’était un nouveau marché qui s’ouvrait à nous et il y avait vraiment la possibilité de monter une entreprise sur ce principe-là.
Frédéric Couchet : D’accord. Je pose aussi cette question parce que tout à l’heure, quand on parlera en fin d’émission des autres exemples, je demanderai à mes intervenants des exemples d’autres entreprises qui fonctionnent sur ces modèles-là, l’un de mes questionnements, en fait j’en ai un double, est-ce que c’est le passage à l’échelle ? Est-ce que dans les grandes entreprises, ce mode fonctionnement que vous allez décrire, peut fonctionner ? Et le deuxième : est-ce que c’est aussi valable dans des entreprises qui ne sont pas, on va dire, des entreprises du numérique et autres, dans lequel on a déjà un historique de travail de façon transparente et en collaboration ? Ça on y reviendra en fin d’émission.

On va déjà commencer plutôt par la partie, on va dire, d’un côté Pierre-Yves a cité l’élection de la direction, Vincent a cité le partage du pouvoir, l’horizontalité. Au niveau d’Easter-eggs comment ça fonctionne ?
Pierre-Yves Dillard : En fait on avait un principe au départ, c’était l’élection du gérant. À partir du moment où on fait une élection du gérant, ça veut dire que l’ensemble des salariés va, alors élire, désigner ? À la base c’est une élection. Ensuite, sur ce principe-là, on va pouvoir mettre en place, en fonction du groupe constitué, les salariés, le gérant va mettre une organisation on va dire qui découlera des choix et des personnes en présence. En fait, en fonction du gérant, on peut avoir une vie au quotidien de l’entreprise qui va être différente puisque le gérant va être plus ou moins impliqué dans le suivi, va plus ou moins laisser l’entreprise, on va dire, avec un maximum d’autonomie sur les personnes. Donc ça va dépendre essentiellement de la personnalité du gérant. C’est aussi un apprentissage qui va se faire puisqu’au départ, quand on dit on va élire le gérant, il y a côté démocratique des choses, ça marche très bien, surtout qu’au départ, quand on est une petite entité, on est finalement quatre, cinq, six, il y a un gérant qui est élu, mais on se côtoie au quotidien. Quand on commence à être, comme chez Easter-eggs et comme on l’a été, 24 très rapidement, ou 25 en 2002, donc on a eu une croissance très rapide puisque c’était l’époque des startups et de la bulle, même si nous on n’était évidemment pas financés, mais c’étaient nos clients, les entreprises de la net-économie étaient nos clients. À ce moment-là on avait effectivement une direction relativement forte mais qui était partagée et on s’est très vite aperçus que la croissance qu’on a connue – je ne vais pas empiéter sur le sujet de la fin – fait qu’une organisation comme la nôtre a besoin de beaucoup de communication et, finalement, de beaucoup d’outils pour faire en sorte que cette communication circule, que l’information circule. Donc là, effectivement à un moment, c’est le rôle du gérant de mettre tout ça en place.

Si je prends aujourd’hui et si je prends au départ l’entreprise, aujourd’hui on a fait le choix d’avoir trois gérants ; ça veut dire qu’on a une cogérance de trois personnes dans des services différents : on a un gérant qui est dans la partie administrative et commerciale, un gérant qui est dans la partie administration système et réseaux, un gérant qui est dans la partie développement. Ça signifie aussi, en fait, qu’on a moins besoin de gérant et qu’il y a un principe d’autogestion qui s’est mis en place dans le temps, petit à petit et qu’aujourd’hui on a pris une vitesse de croisière par rapport à tout ça. Finalement il y a moins besoin de se référer à une personne ou à un personnage qui agit un peu comme guide, comme rempart et qui va montrer le chemin puisque aujourd’hui le chemin est tracé.
Frédéric Couchet : D’accord. J’aurai quelques questions par rapport à cette gérance. Comment ça se passe au niveau de 24ème ? Déjà vous êtes plus petits, vous êtes quatre personnes.
Vincent Laurent : On est cinq.
Frédéric Couchet : Cinq. Est-ce que vous avez aussi cette notion de gérance ou ça se passe complètement différemment ?
Vincent Laurent : On a aussi une cogérance à trois. Initialement l’idée c’est qu’on était trois fondateurs. On a eu une discussion dernièrement là-dessus parce qu’on devait renouveler la gérance. L’idée qui en est sortie c’est qu’on conservait la cogérance à trois parce que ça permettait de partager le pouvoir, justement, et qu’il n’y ait pas une seule personne qui se sente de faire toutes les tâches administratives et qu’on évite aussi l’effet : avoir le pouvoir a un effet qui est inhérent ; en fait, avoir le pouvoir a un effet débordant. On s’est dit qu’on ferait une gérance tournante à trois. Là on n’est que cinq, donc elle n’est pas hyper-tournante mais c’est l’idée.

Une des premières approches qu’on a aussi eue par rapport à ce partage du pouvoir, c’est l’approche SCOP. Nous on est une coopérative, je ne l’ai précisé tout à l’heure, donc la première approche c’est un homme= une voix et tout le monde a vocation à devenir associé dans une SCOP [Société coopérative et participative]. On s’est d’abord questionnés là-dessus, ensuite sur la cogérance.
Frédéric Couchet : D’accord. Vas-y.
Vincent Laurent : Pour que ce partage du pouvoir et que cette cogérance fonctionne on s’est surtout accès sur la transparence.
Frédéric Couchet : Justement c’est ma question suivante, mais je vais te laisser poursuivre.
Vincent Laurent : J’avais l’impression d’anticiper.
Frédéric Couchet : Mais c’est très bien ! Ma question suivante effectivement c’est sur la transparence. Dans le documentaire que j’ai regardé hier, je ne sais pas s’il est encore disponible vraiment en libre accès sur Internet, sinon vous pouvez sans doute le trouver, un point essentiel, il y a cet aspect de transparence, d’accès aux informations pour pouvoir, évidemment, prendre les décisions et être informé. Comment ça se passe concrètement déjà au 24ème pour la transparence ? Est-ce que c’est totalement transparent ? Quelles sont les informations qui sont transparentes ? Et comment, techniquement, vous mettez ça en place ? Sachant que vous êtes informaticiens, j’ai une petite idée de la réponse. Vincent.
Vincent Laurent : En gros, les seuls trucs pas transparents ce sont les documents type factures et les documents type administratifs. On partage quand même tous nos modèles de contrats clients et de contrats salariés. Tout le reste est transparent : nos assemblées générales, nos comptes annuels, notre historique bancaire, donc chacune de nos dépenses et chacun de nos revenus sont publics, disponibles sur GitHub, la forge qu’on utilise, on n’a pas encore migré sur une plate-forme libre. En tout cas ces documents sont publics.
Frédéric Couchet : Effectivement, j’ai été voir sur cette plate-forme, la référence est sur le site de l’April et aussi, évidemment, sur le site du 24ème. J’ai oublié de le dire c’est 24eme.fr et Easter-eggs c’est easter-eggs.com. Donc sur ce site, sur cette plate.forme logicielle d’hébergement, j’ai effectivement vu que vous avez les documents, les comptes-rendus d’activité, les comptes-rendus de réunions, la banque, donc une très forte transparence, y compris en interne mais également en externe : c’est en accès public, je le précise.
Vincent Laurent : Oui. Exactement. L’idée c’est vraiment de se protéger du pouvoir. Si l’un de nous décide un jour, pour n’importe quelle raison, de prendre le pouvoir, qu’il ait beaucoup de difficultés à le faire.
Frédéric Couchet : D’accord. Et côté Easter-eggs comment se passe cette transparence ?
Pierre-Yves Dillard : Le principe de transparence, également, a été à un moment un principe, on va dire, de réflexion fort, sachant que pour pouvoir décider, effectivement il faut être informé. Donc il y a une obligation. Nous on ne partage pas trop vers l’extérieur. On partage vers l’extérieur à travers le réseau Libre-Entreprise, dont on pourra parler un peu tout à l’heure, qu’on a créé, donc la transparence entre les entreprises du réseau, c’est-à-dire les entreprises qui fonctionnent comme nous. En interne, au niveau des salariés, tous les partages sont évidemment accessibles à tous. On pousse l’information, on va dire de nature financière, régulièrement pour pouvoir informer les uns et les autres sur l’état des finances de l’entreprise, si ça va bien, si ça va mal et ainsi de suite. Toute communication vers l’extérieur est systématiquement doublée sur des listes de diffusion, donc ça pousse l’information. Qui veut aller consulter ce qui se passe dans la partie commerciale, dans la partie dev, dans la partie admin-sys ou avec tel ou tel client a la possibilité de consulter et de suivre. Il faut savoir que ce principe-là est intéressant mais au quotidien il est assez vite ingérable, donc à un moment on peut faire des pauses. Certains ont plus de facilité, comme ça, à s’aménager du temps pour suivre, il y en a qui y arrivent très bien. Il y en a qui ne prennent pas une seconde pour le faire, pas seulement par manque de temps, mais parce qu’ils considèrent qu’ils font confiance à untel ou untel et ils savent que l’information est à tel endroit, qu’ils pourront aller la consulter si c’est nécessaire.

L’autre outil de transparence qu’on va utiliser vis-à-vis de notre fonctionnement quotidien est plutôt au travail. Aujourd’hui on a développé toute notre activité autour d’un système de ticketing. En fait toute relation avec l’extérieur est gérée sous forme de tickets qui archivent tous les échanges, tous les documents.
Frédéric Couchet : Est-ce que tu peux expliquer juste en une phrase ce qu’est un ticket ?
Pierre-Yves Dillard : Un ticket, en fait, c’est un suivi de mails très précis avec des notions de statuts sur lesquels on peut avoir, après, des tableaux de bord et ainsi de suite ; savoir qui répond, qui fait quoi. Ça permet notamment, on prend l’exemple des développeurs, de travailler en toute efficacité dans leur relation avec le client à travers un ticket. Le ticket va être visible et accessible par tout un chacun. C’est-à-dire que si le développeur décide demain de partir, on a archivé toutes ses informations dans ce ticket et ça lui évite de faire un reporting supplémentaire. On sait aujourd’hui, notamment dans les entreprises pyramidales, qu’il y a un temps fou passé à faire du reporting pour dire à la hiérarchie ce qu’on fait, donc une perte terrible d’efficacité. Chez nous on travaille et on report en même temps ; l’information est accessible directement.
Frédéric Couchet : Justement, par rapport à ça, dans le reportage dont je parlais, un des points clés de ce genre d’organisation c’est la confiance dans l’être humain. Un des intervenants dont je ne me souviens plus du nom, une société peut-être FAVI ou FABI.
Vincent Laurent : FAVI oui.
Frédéric Couchet : FAVI, disait que beaucoup d’entreprises pyramidales perdaient effectivement un temps fou à faire du contrôle. Alors qu’en fait il ne fallait pas faire du contrôle, au contraire, il fallait essayer de faire confiance aux gens et que ça marchait beaucoup mieux. Je vous encourage vraiment à regarder ces exemples-là. Il y a un site qui s’appelle organisationslibérées.fr, les références sont aussi sur le site de l’April, sur lequel vous allez trouver beaucoup de références.

Maintenant j’ai une question ou plutôt deux questions pour tous les deux, toujours sur cette partie on va dire gérance, organisation. Quand ça se passe bien, à priori il n’y a pas de soucis ! Mais prenons deux cas, on va dire différents. L’un c’est une embauche. Comment se gèrent les embauches chez vous ? Est-ce que c’est pareil ? Est-ce que c’est quelque chose sur lequel tout le monde intervient ou est-ce que, finalement, c’est la gérance qui donne son avis ? Et deuxième point plus problématique, c’est quand il faut se séparer de quelqu’un, soit pour des problèmes économiques, tout à l’heure Pierre-Yves tu as cité 2001-2002, la bulle, il y a aussi eu 2008 avec les problèmes économiques qui ont impacté beaucoup d’entreprises, et pour d’autres raisons on peut avoir à se séparer de quelqu’un. Comment ça se passe concrètement ? Peut-être qu’il y a plus d’expérience côté Easter-eggs, mais je vais peut-être laisser commencer Vincent.
Vincent Laurent : Nous la séparation on ne l’a pas encore vécue, donc je n’aurai aucun retour d’expérience là-dessus. Mon intuition c’est que le climat qu’on met actuellement dans l’entreprise, enfin le fait qu’il y ait un partage du pouvoir, la transparence, fait qu’on arrivera très certainement à des départs raisonnés plutôt que des très gros conflits.

Concernant l’embauche, effectivement on s’est posé plusieurs questions au moment où on a embauché le premier salarié non fondateur du 24ème, notamment au niveau de la rémunération, je ne sais pas si on l’aborde maintenant ou si on en fait un point plus tard.
Frédéric Couchet : On finit sur cette partie-là. On fait un point après sur la rémunération, oui.
Vincent Laurent : Nous on a fait une rémunération libre.
Frédéric Couchet : On va en parler.
Vincent Laurent : Ensuite, nous on a fait passer deux entretiens. Un premier entretien où on essaye, à l’aide d’un jeu de cartes, je ne me rappelle plus exactement le nom, c’est une méthode qui a été écrite dans un livre, qui permet d’essayer de voir quelles sont les motivations de cette personne et d’essayer de voir si le 24ème va coller, va répondre aux motivations de cette personne. Le biais, dans les entretiens d’embauche, c’est que tout peut être un peu faussé parce qu’on peut avoir envie de coller, d’essayer de deviner ce que l’entreprise attend, donc on essaie de le faire en début d’entretien. On demande des lignes de code à la fin de ce premier entretien, on demande le salaire souhaité. Au second entretien on fait un feed-back sur les lignes de code, on pose les dernières questions et voilà.
Frédéric Couchet : D’accord. On me précise sur le salon web de la radio, qui est disponible sur le site causecommune.fm, que le jeu de cartes s’appelle Moving Motivators, je ne sais pas comment on peut traduire exactement de l’anglais. En tout cas c’est intéressant de voir, effectivement, que le recrutement n’est pas que technique, il est aussi par rapport au modèle, ce qui est un peu normal, je pense que vous devez attirer des gens qui sont aussi intéressés par le modèle.

Côté Easter-eggs, Pierre-Yves Dillard a plus d’expérience parce que plus d’ancienneté. Comment ça se passe au niveau recrutement et comment ça se passe quand il peut y avoir un problème ?
Pierre-Yves Dillard : On va revenir sur le rôle de la gérance. Effectivement dans une SARL le gérant a tous les pouvoirs. Avant qu’on ait trois gérants, on a toujours eu un et moi je l’ai été pendant une dizaine d’années. Aujourd’hui dans un groupe, quand tout va bien, le gérant n’a aucune utilité particulière, c’est-à-dire que chacun est responsable et les choses avancent.

Quand il y a des difficultés c’est là, en fait, où le groupe attend du gérant qu’il agisse au nom du groupe et qu’il prenne les décisions qui sont difficiles et qui sont difficiles à prendre en termes de groupe. Imaginez une entreprise de 20 personnes et on doit se séparer d’une personne, on ne va pas faire une assemblée générale, mettre le gars au milieu et lui expliquer pourquoi tout le monde pense qu’il devrait partir. Là il faut que ça soit un face à face homme à homme. Le gérant doit consulter plus ou moins officieusement, officiellement, sentir un petit peu les choses, à un moment prendre ses responsabilités et travailler sur pourquoi cette personne va mal, a-t-elle vraiment sa place au sein de l’entreprise. Il peut y avoir de la lassitude. Il y a plein de raisons qui font qu’une personne veut partir.

Moi, de ce que j’ai pu expérimenter, c’est que je suis devenu vraiment gérant au premier licenciement que j’ai dû réaliser parce que c’est très traumatisant, c’est extrêmement difficile. Il y a un engagement qui a été fait, c’est quasiment un engagement moral. Certes il y a un contrat de travail mais quand on rejoint une entreprise comme la nôtre il y a un engagement qui va au-delà d’un contrat de travail et une séparation c’est compliqué.

Donc c’est un point très important et c’est un rôle attendu et important du gérant à partir du moment où on va être sur un groupe un peu plus important de 14, 15, 16, 17, 20 personnes.

Par ailleurs quand en 2002 on a dû passer de 25 personnes à 12, ça a aussi été une aventure.
Frédéric Couchet : 2008.
Pierre-Yves Dillard : 2002 déjà.
Frédéric Couchet : 2002, d’accord.
Pierre-Yves Dillard : En 2008 on a géré différemment. En tout cas on a pu. C’est-à-dire que n’importe quelle autre entreprise, en 2002, serait liquidée. Nous aujourd’hui, avec notre modèle, on a pu organiser les départs, des départs raisonnés, mais ça s’est fait dans la discussion, à chaque fois individuelle. Dans une entreprise, n’oubliez pas qu’on a un engagement économique, on a des clients, donc l’élément, quand on est 24 et que d’un seul coup l’activité s’arrête, eh bien la question c’est qui est à l’arrêt ? Qui ne bosse plus ? Qui n’a plus d’activité et qui travaille ? C’est un moyen pour définir qui part, sachant que derrière un certain nombre de salariés ont créé leur propre structure. On en a incubé un certain nombre et ainsi de suite.

C’est à ce moment-là que le gérant doit prendre ses responsabilités et c’est aussi à ce moment-là que le modèle a montré sa force, puisque si on allait à la liquidation, ce qui aurait été normalement logique par rapport à la situation, ça voulait dire, quelque part, que les gens ne se préoccupaient pas forcément du modèle Easter-eggs, mais se disaient « eh bien s’ils me doivent ça, on va aller chercher, on va aller au tribunal machin, on va récupérer ». Les gens sont partis, on a pu assainir la situation et l’entreprise a pu perdurer, passer cette étape difficile.
Frédéric Couchet : Pour le grand plaisir de tout le monde.

Nous allons faire une pause musicale. Nous allons écouter Otra Vez par Javiera Barreau Ensamble et on se retrouve juste après.
Pause musicale : Otra Vez par Javiera Barreau Ensamble.
Voix off : Cause Commune 93.1
Frédéric Couchet : Otra Vez par Javiera Barreau Ensamble, excusez-moi pour la prononciation, je ne m’améliore pas de ce côté-là ! C’est sous licence Creative Commons Partage à l’identique et les références sont sur le site de l’April, april.org

Vous écoutez toujours l’émission Libre à vous ! sur radio Cause Commune 93.1 en Île-de-France et partout ailleurs sur le site causecommune.fm.
Nous allons poursuivre notre discussion sur la présentation de certains modèles d’organisation d’entreprises du logiciel libre et nous allons maintenant aborder le sujet de la rémunération parce qu’il y a clairement une différence entre vos deux structures. Pierre-Yves Dillard de Easter-eggs, tu as expliqué tout à l’heure que les salariés avaient le salaire égal et Vincent Laurent, pour le 24ème, tu avais parlé, je crois, de salaire libre. On va commencer par Pierre-Yves. Pourquoi le choix de ce salaire égal ?
Pierre-Yves Dillard : Déjà c’est parce que c’était simple, parce qu’au départ ça coulait de source et ça s’imposait. Au départ quand il y a quatre personnes qui fondent une entreprise, il n’y a pas de raison de différencier un salaire plus qu’un autre.
Frédéric Couchet : En plus on n’a pas de salaire au départ, généralement !
Pierre-Yves Dillard : En plus ! Partager rien c’est facile. Partager quand il y a très peu c’est aussi très facile et finalement ça s’est imposé assez naturellement et ça a été très vite un pilier de la cohésion et de la solidarité telle qu’elle s’est installée chez Easter-eggs, puisqu’en fait ça permet un dépassement des fonctions de chacun dans un métier où il y a des rivalités traditionnelles entre ces fameux commerciaux qui vendent n’importe quoi et des développeurs qui doivent développer des choses impossibles.
Frédéric Couchet : Vous êtes dans les métiers de l’informatique, on va le préciser, effectivement c’est assez traditionnel.
Pierre-Yves Dillard : Voilà ! Et puis des admins sys qui sont des ayatollahs et des développeurs qui n’en font qu’à leur tête et qui ne travaillent jamais en stable. Ces conflits-là, aujourd’hui chez Easter-eggs, n’existent pas : chacun écoute attentivement les besoins de l’autre puisque c’est la réussite du projet global qui est attendue par tous. Donc le partage de cette rémunération commune et aussi le partage des fruits, des bénéfices.
Frédéric Couchet : Poursuis sur la répartition des bénéfices, après on verra avec le cas du 24ème.
Pierre-Yves Dillard : Aujourd’hui globalement nous on prend 80 % des bénéfices de l’entreprise, on les répartit en parts égales avec tous les salariés dans la limite qu’autorise la législation à travers des plans d’épargne entreprise, des choses comme ça.

Ça permet aussi de motiver, en clair c’est de la motivation puisque on a tous des familles et des obligations et on est aussi là pour gagner notre vie. Donc c’est quelque chose d’important et à partir de septembre, octobre généralement l’entreprise est à l’équilibre et on sait que tout ce qui va être fait, tout ce qui rentre à partir d’une certaine date, ça devient du bénéfice et ça devient du complément de rémunération, qui fait partie, qui sanctionne, on va dire, un travail réussi et collectif.
Frédéric Couchet : D’accord. Donc ça c’est Easter-eggs et côté 24ème, vous ce n’est pas du tout le même choix.
Vincent Laurent : Pas le même choix, effectivement, au niveau de la rémunération mensuelle. Quand on a démarré, on était trois cofondateurs, donc on s’est évidemment versé le même salaire, on avait le même niveau d’investissement. Quand on s’est posé la question de commencer à recruter, on s’est demandé, justement, comment on allait gérer cette question de la rémunération. Au début on s’est dit on va faire le salaire égal et, en fait, après réflexion on s’est dit que ça pouvait peut-être être intimidant d’arriver dans une entreprisse dans laquelle il y a trois cofondateurs et de gagner le même salaire que ces trois personnes. Du coup on a décidé de faire de la rémunération libre. Donc chacun est libre de décider de son salaire, pas besoin de validation des autres ; de toute façon elle est inhérente, on ne va pas, bien sûr, décider comme ça, du jour au lendemain, de se verser 1000 euros de plus sans en mesurer les conséquences, c’est évident. Quand on a passé les premiers entretiens, les candidats nous donnaient le salaire qu’ils voulaient avoir et c’était, en gros, le salaire qui leur permet de vivre dans les conditions dans lesquelles ils souhaitent vivre.
Frédéric Couchet : Dans chaque cas, ça a correspondu, finalement, aux possibilités de l’entreprise ?
Vincent Laurent : Exactement. Comme les comptes, comme l’historique bancaire est public, tout est public, du coup tout le monde a toutes les cartes en main pour savoir si son salaire est en adéquation avec l’entreprise. Nous on considère l’entreprise comme un bien commun et c’est pourquoi on reverse aussi tous les bénéfices, donc 100 %, hormis ce que les aspects légaux des SCOP nous obligent à mettre en réserve, mais tout le reste est reversé aux salariés. On ne verse pas de dividendes, c’est pareil c’est en participation, en mécanisme de participation. On conçoit l’entreprise vraiment comme un bien commun ; chacun est là pour faire vivre ce bien commun avec le choix du salaire en conséquence.
Frédéric Couchet : D’accord. Ça me fait penser à une question. Tu parles de la question du salaire égal entre anciens et nouveaux qui pouvait être un peu déstabilisant. Ma question c’est : ce qui peut être aussi déstabilisant c’est de rentrer dans une structure où, mine de rien, on dit « une personne une voix », mais il y quand même des gens qui ont peut-être un peu plus de présence, ne serait-ce que d’historique, tout simplement par exemple Pierre-Yves Dillard, un des fondateurs, forcément côté 24ème les trois cofondateurs. Comment ça se passe pour les personnes qui entrent ? Est-ce qu’il y a un certain temps d’adaptation pour passer de personne spectatrice à personne actrice ? Et est-ce que les personnes à l’origine du projet gardent toujours, peut-être, on va dire un avantage ou autre ?
Pierre-Yves Dillard : C’était un sujet important. La question ça a été de se dire à quel moment, chez Easter-eggs, un gérant sera issu d’un salarié non fondateur, ce qui est arrivé il y a maintenant une dizaine d’années, voire plus. Pour moi déjà ça a validé le système. Ça a montré que quelqu’un qui n’avait pas fondé l’entreprise pouvait se l’approprier complètement et pouvait tisser ce lien, on va dire assez charnel : quand on est au début d’un projet, qu’on ne se paie pas de salaire, que c’est compliqué, qu’on y croit, qu’on n’y croit plus, c’est intéressant que des personnes non fondatrices soient devenues gérantes.

Ensuite le statut de gérant ou le statut de fondateur, c’est un statut, de toute façon on ne peut rien y faire. Oui, il y a forcément un rôle légèrement différent, mais il y a aussi un rôle différent des salariés qui eux-mêmes sont passés par la gérance. Aujourd’hui tout salarié qui est passé par la gérance, aujourd’hui chez Easter-eggs on est trois anciens gérants salariés et il y a actuellement trois gérants, eh bien, quand on est passé par la gérance, on a une conscience légèrement différente des enjeux. Ce n’est pas tout à fait explicable, c’est presque irrationnel, mais on a un sens de la responsabilité un peu différent, ça ne veut pas dire que les autres sont irresponsables, loin de là, mais c’est un ressenti qui est assez différent. Et après c’est assez intéressant de partager, sur des prises de décision, avec des gens qui ont pu être aussi proches, justement, de la prise de décision et de la difficulté de certaines prises de décision.

Donc oui, chez Easter-eggs il y a des statuts. On n’est pas inébranlables, mais si on reste là c’est qu’on y est bien. Ça on ne peut rien y faire, mais je pense que c’est inhérent à toutes ces organisations qui maintenant ont un peu vieilli. Je pense que la présidence de l’April et son délégué général peuvent également avoir de temps en temps pas des confusions, en tout cas pour certains on ne peut pas oublier que vous Frédéric, que toi Frédéric tu n’es pas seulement délégué.
Frédéric Couchet : Tout à fait. Mais les statuts et l’organisation avec des personnes fortes permettent que la structure, effectivement, perdure.
Pierre-Yves Dillard : Tout à fait.
Frédéric Couchet : Dans le bien commun, en fait, de l’objectif initial qui pour nous est la promotion et la défense du logiciel libre et qui est, pour vous finalement, de produire ou d’accompagner des structures vers le logiciel libre.

Je crois que tu voulais rajouter quelque chose.
Pierre-Yves Dillard : En fait ce sont nos statuts forts qui vont garantir tout excès par rapport à une position dominante qui pourrait être celle-ci puisque, dans notre système, l’ensemble des salariés incarne l’actionnaire. C’est-à-dire que la personne qui est gérante ou toute personne qui pourrait exercer un pouvoir jugé trop exorbitant pourrait être démise du jour au lendemain par l’ensemble des salariés qui incarne, finalement, l’actionnaire majoritaire.
Frédéric Couchet : Sur cette partie-là on ne va pas rentrer dans les détails parce que l’émission est courte malgré tout, mais je signale une conférence que tu avais donnée à Pas Sage en Seine, je crois que c’était en 2016.
Pierre-Yves Dillard : Oui.
Frédéric Couchet : L’entreprise démocratique. Vous trouverez les références sur Internet, sinon je les mettrai sur le site de l’April tout à l’heure, dans laquelle tu rentres plus en détail dans ce mode de fonctionnement, notamment le statut de SARL et d’association à côté. On ne va pas détailler aujourd’hui parce que sinon on y passera la fin de l’émission.
Pierre-Yves Dillard : Tout à fait.
Frédéric Couchet : Vincent, on va maintenant aborder un sujet que tu as abordé tout à l’heure. Tout à l’heure tu as parlé d’agilité, d’organisation. Justement au quotidien, comment s’organise la société pour les projets et puis pour les décisions à prendre ? Quand tu as parlé d’agilité tu entendais quoi ? Je pense que les gens qui nous écoutent ne savent pas forcément ce qu’est l’agilité.
Vincent Laurent : L’agilité c’est une façon de mener des projets ou de mener un projet à bien. Juste pour expliquer brièvement, le cycle en V classique c’est : on a un besoin, on recueille les besoins. Nous, dans notre activité, on développe le logiciel et à la fin, quand on a terminé, on montre le logiciel au client. Cette méthode fait qu’on a des périodes de développement très longues parce qu’on n’a pas de retours rapides et on se trouve à tout devoir développer très rapidement.

La méthode agile permet de ne pas avoir ces développements en silos où, pendant un an, on ne va pas discuter des besoins qui vont potentiellement avoir évolué.

Nous, concrètement avec la méthode agile, on a deux aspects : en interne et avec les clients, mais ça se rejoint pas mal.

Avec les clients, concrètement, ça s’organise en ce qu’on appelle des sprints, ce sont des réunions qu’on fait environ tous les mois. Le client a un projet ; il nous envoie ses besoins. On commence par développer directement ce qui nous semble pertinent pour démarrer le projet. On fait une première réunion, on lui montre ce qu’on a fait ; la méthode agile c’est de toujours discuter sur du concret. On lui montre ce qu’on a fait, il nous fait des retours, on corrige, on voit si on est partis dans une impasse ou pas. Ensuite on discute de ce qu’on doit développer pour la prochaine fois, toujours sur du concret, sur des interfaces crayonnées sur du papier ou bien sur des choses développées très rapidement. Ça nous permet d’avoir un objectif pour le sprint d’après. On définit la réunion souvent trois semaines ou un mois et demi après, ça dépend justement de la quantité de travail à abattre, et ainsi de suite jusqu’à la réalisation finale du projet.

Il y a plusieurs façons de mener des méthodes agiles, mais nous on utilise beaucoup le management visuel : pour recueillir les corrections de bugs, les petits besoins, on utilise des post-it qu’on accroche au mur et qu’on organise par client.
Frédéric Couchet : D’ailleurs sur votre site il y pas mal de photos très sympathiques avec plein de post-it de différentes couleurs.
Vincent Laurent : Oui. On a des post-it à 360 degrés dans notre bureau, ça nous permet de gérer ça. On a des post-it qui nous permettent de gérer tous les projets en cours, à venir, les deadlines, les attentions particulières des clients, qu’on relit très régulièrement ; ça nous permet de gérer les priorités en fait.

On a aussi la méthode Kanban. La méthode Kanban c’est faire évoluer les post-it. Par exemple on va écrire sur un post-it « faire signer le contrat avec le client untel », on va le faire évoluer et on va le faire passer au statut « à envoyer signer », etc. Donc on utilise des post-it, c’est très visuel. Le but c’est que ça doit très visuel : quand on entre dans le bureau on voit où on en est et la quantité de travail à abattre.
Frédéric Couchet : Tu voulais ajouter quelque chose.
Vincent Laurent : Un des principes forts c’est : c’est celui qui sait qui fait, c’est celui qui fait qui sait et c’est aussi celui qui décide. Donc celui qui développe c’est celui qui va en réunion, c’est celui qui décide. Ça c’est très fort chez nous, on n’a pas de gestion de projet, on n’a pas de Scrum Master, on a tous ce rôle-là.
Frédéric Couchet : Un Scrum Master c’est un responsable de la méthode, on va dire, en termes d’agilité.

Je vois le temps qui avance et je pense qu’on consacrera une autre émission pour poursuivre avec vous sur un certain nombre de sujets. Avant j’aimerais quand même poser quelques questions, notamment une petite question. Tu as parlé des clients, Vincent, donc très rapidement comment vous êtes perçus par vos clients par rapport à votre modèle d’organisation ? Est-ce que vos clients sont informés ? Est-ce que c’est positif ou est-ce que c’est négatif ? Tous les deux. Pierre-Yves.
Pierre-Yves Dillard : Au départ nous, sur certains clients un peu classiques, institutionnels, on se présentait comme une boîte très classique, on ne se présentait pas en fait, on se présentait comme une SARL, point barre. Et puis une fois la relation tissée, à l’occasion d’un déjeuner, d’une rencontre, eh bien on allait plus loin dans le modèle d’organisation, qui on était vraiment, et en fait on s’apercevait qu’à chaque fois ça créait une sympathie, une adhésion supplémentaire. En fait ils avaient rencontré techniquement des gens on va dire doués, et en plus on leur expliquait pourquoi l’investissement, pourquoi en face d’eux ils avaient des gens qui avaient l’air aussi concernés par leur projet. Ils mettaient en relation, finalement, une forme de qualité qu’ils jugeaient intéressante et un modèle d’organisation. Après c’est devenu pour nous une forme de communication. On a complètement assumé, d’ailleurs aujourd’hui ça se voit sur notre site parce que c’est ce qu’on met en avant en premier lieu, c’est notre modèle social, puisqu’on a aussi vocation à travailler pas seulement avec des entreprises on va dire classiques, mais aussi à travailler avec des clients de l’économie sociale et solidaire, avec qui on se sent plus proches et avec qui le travail est souvent plus facile et plus logique. Je vais citer Enercoop ou Mobicoop, en tout cas des clients de ce type-là avec qui on partage naturellement une envie de travailler ensemble.
Frédéric Couchet : Et côté 24ème ?
Vincent Laurent : Nous on ne communique pas trop sur le fait d’être une entreprise libérée auprès de nos clients, on communique plus sur ce qui va les impacter directement : la méthode agile, le fait que c’est du logiciel libre, parce qu’ils peuvent bénéficier de code qui a déjà été payé par d’autres clients et ils sont coauteurs du logiciel ce qui leur offre beaucoup d’indépendance. En fait, notre gouvernance et notre façon de partager le pouvoir c’est plus dans la relation de confiance de long terme avec nos clients qu’on va la mettre en avant, ça va se mettre en avant de façon un peu naturelle par des exemples concrets, par des réunions qu’on fait avec nos clients qui durent plusieurs jours. Voilà.
Frédéric Couchet : D’accord. Autre question. Là vous êtes deux structures, comme on l’a dit tout à l’heure, plutôt type TPE on va dire, avec une vingtaine de personnes dans un cas et cinq personnes dans l’autre cas. Très rapidement, peut-être plutôt Vincent Laurent, est-ce que tu as des exemples d’entreprises qui fonctionnent sur un modèle proche ? Est-ce que le terme c’est « entreprise libérée » ? Est-ce que vous vous reconnaissez dans ce terme-là, entreprise 24ème, parce qu’on n’a pas encore abordé ce terme ?
Vincent Laurent : Oui. On se reconnaît dans le terme « entreprise libérée ».
Frédéric Couchet : D’accord. Sur le site de l’April vous avez des références. De toute façon je pense qu’on consacrera une autre émission ; là, je pense que au-delà du terme, ce qui était important c’est la méthode. Est-ce qu’il y a des exemples d’entreprises dans lesquelles ça marche, mais de taille supérieure et hors du domaine informatique ?
Vincent Laurent : Oui. Je connais des exemples hors du domaine informatique de taille supérieure.
Frédéric Couchet : Super.
Vincent Laurent : Par ici, il y a Sun [Sun Hydraulics], je crois, hors informatique, qui un moment a été libérée, qui a été assez entreprise libérée.
Frédéric Couchet : D’accord.
Vincent Laurent : Sinon les gros exemples sont Buurtzorg. C’est une entreprise néerlandaise de 10 000 personnes, depuis 2006, ils ont eu une croissance très forte. C’est, en gros, une organisation qui permet aux infirmières de s’organiser en petits groupes pour pouvoir exécuter leur travail dans des conditions humaines. C’est parti d’un constat simple que tout était chronométré : faire un pansement c’est cinq minutes, ça coûte tant, etc. La personne qui a fondé Buurtzorg a décidé d’essayer de trouver une organisation qui permette aux infirmières d’avoir une gestion humaine de leurs patients et qui est, du coup, beaucoup plus efficace et beaucoup plus économique pour la sécurité sociale néerlandaise.
Frédéric Couchet : D’accord.
Vincent Laurent : Je peux en citer d’autres.
Frédéric Couchet : Un autre, un dernier.
Vincent Laurent : Oui. Gore. Ce sont eux qui font le Goretex, ce sont ceux qui font la technologie enfin le tissu qui permet aux vêtements d’être étanches et ils font plein d’autres applications. Ils sont 5000 salariés, ils font deux milliards de chiffre d’affaires et eux c’est depuis 1958. C’est pareil, ils sont organisé en petites équipes mais pas fixes : chacun peut décider des projets à mener. Ils ont des médiateurs, enfin en gros chacun peut avoir une sorte de conseiller ; ils sont assez libres.
Frédéric Couchet : Je crois que le terme employé c’est leader.
Vincent Laurent : Il y a les leaders libérateurs.
Frédéric Couchet : Leaders libérateurs.
Vincent Laurent : Ça c’est plus dans le cadre de la transition. Souvent on a un leader libérateur qui va transformer l’entreprise et la rendre plus libre, ce qui peut aussi poser des problèmes à son départ.
Frédéric Couchet : Je précise que je connais Gore parce que c’était dans le reportage que, encore une fois, j’ai regardé hier, on mettra la référence sur le site de l’April. C’est Le bonheur au travail qui a été diffusé sur Arte. Et sur les autres exemples d’organisation qui ont ce même modèle-là, il y a un site que j’ai cité tout à l’heure c’est organisationslibérées.
Vincent Laurent : Au pluriel.
Frédéric Couchet : Au pluriel, point fr.
Vincent Laurent : Avec un accent.
Frédéric Couchet : Avec un accent point fr [organisationslibérées.fr]. Sinon vous allez sur le site de l’April il y a le lien qui vous donne plusieurs exemples, et il y a des exemples, sans doute, d’échecs. J’ai vu par exemple Auchan qui avait tenté ça. Dans le reportage ce qui est intéressant, ce qui est montré, c’est que la parole est aussi donnée à certains syndicats qui pointent évidemment des potentiels problèmes dans ce genre d’organisation, notamment pour les grosses entreprises. Je vous invite vraiment à consulter ça. J’insiste d’ailleurs sur le fait que les deux expériences qu’on vous montre aujourd’hui ce sont deux expériences personnelles et qu’il convient ensuite de voir, dans chacune des structures, comment les adapter à cette ambition d’entreprise démocratique.

J’ai une dernière question qui concerne peut-être votre actualité ou vos besoins. Est-ce qu’il y a du recrutement en cours par exemple ? Pierre-Yves pour commencer.
Pierre-Yves Dillard : Oui. On est désespérément à la recherche d’un développeur Perl et s’il connaît Request Tracker, le fameux logiciel de ticketing qui nous sert tant, c’est un plus. Voilà ! Donc un appel à tous les Mongueurs.
Frédéric Couchet : Les Mongueurs, le surnom des personnes qui développent en Perl. Vincent, pour le 24ème ?
Vincent Laurent : Nous pas particulièrement si ce n’est qu’on n’est que des hommes et qu’on aimerait un peu de parité dans notre équipe de développeurs.
Frédéric Couchet : Très bien. Ça me fait penser que sur le salon web quelqu’un précise que Easter-eggs recherche un développeur ou une développeuse Perl, c’est une précision évidement importante.

Écoutez je vous remercie tous les deux, Pierre-Yves Dillard de la société Easter-eggs et aussi du réseau Libre-Entreprise dont on parlera la prochaine fois, qu’on n’a pas abordé. Vincent Laurent du 24ème donc 24eme.fr, eastereggs.com. C’est, quelque part, un peu le bonheur au travail dans le monde du logiciel libre, mais je voudrais quand même préciser que ce n’est parce qu’on travaille dans le logiciel libre qu’il y a forcément du bonheur. Il y a aussi des entreprises qui sont en souffrance ou plutôt où les salariés sont en souffrance, je ne citerai personne évidemment. Il faut quand même faire attention là où on met les pieds.

Je vous remercie pour cette intervention. On n’a pas abordé tous les sujets qu’on voulait, clairement, on les abordera sans doute dans une seconde émission et d’ailleurs peut-être même dans le cadre d’autres émissions de Cause Commune, je pense notamment à l’émission Cause à effet ou à l’émission Le monde du travail en question, peut-être pour avoir un échange avec des gens différents sur ce sujet qui est vraiment passionnant. En tout cas je vous remercie. Bonne journée.
Vincent Laurent : Merci.
Pierre-Yves Dillard : Merci à vous.
[Virgule musicale]
Frédéric Couchet : Nous allons faire une pause musicale. Nous allons écouter Sur la terre par Sucrepop et on se retrouve juste après.
Pause musicale : Sur la terre par Sucrepop.
Voix off : Cause Commune 93.1

Chronique « Partager est bon », Le droit de lire

Frédéric Couchet : Sur la terre par Sucrepop, en licence Creative Commons Partage à l’identique. Les références sont sur le site de l’April, april.org

Vous écoutez toujours l’émission Libre à vous ! sur radio Cause Commune 93.1 en Île-de-France et partout ailleurs sur le site causecommune.fm.

Nous allons maintenant passer au sujet suivant.
[Virgule musicale]
Frédéric Couchet : Nous allons poursuivre avec une chronique de Véronique Bonnet, professeur de philosophie, vice-présidente de l’April. La chronique s’intitule « Partager est bon » et pour cette nouvelle chronique, Véronique nous commente un texte de Richard Stallman intitulé Le droit de lire.
Aujourd’hui je suis avec Véronique Bonnet. Bonjour Véronique.
Véronique Bonnet : Bonjour Fred.
Frédéric Couchet : Véronique tu es professeur de philosophie et tu es également membre du conseil d’administration de l’April. Tu vas nous faire une nouvelle chronique intitulée « Partage est bon ». Le sujet d’aujourd’hui c’ est un article ancien de Richard Stallman, plus de 20 ans, 1997, qui s’intitule Le droit de lire.
Véronique Bonnet : Cet article est une dystopie. Une dystopie est une fiction. Je pense que vous connaissez Fahrenheit 451 de Ray Bradbury. Il y a quelque chose de cela, puisque dans la fiction de Ray Bradbury, il y a des autodafés. On brûle les livres, on veut absolument que les personnes ne puissent pas accéder au savoir et la seule ressource c’est que les rebelles apprennent par cœur des textes : il y a untel qui tient le chapitre de la physique d’Aristote, le premier chapitre ; il y a un autre qui connaît par cœur un poème de Goethe, etc. Il y a un autre texte qui est le 1984 d’Orwell qui est visiblement aussi dans la même lignée.

On appelle donc une dystopie une fiction qui représente un état du monde épouvantable, ce qui est le cas ici. Le narrateur de cette chronique, de cette fiction, se trouve après une révolte, révolte qui a succédé à un écrasement intégral de l’autonomie d’accéder au savoir, de lire des livres. Il se trouve que le héros qui est évoqué par le narrateur, qui parle depuis 2096, reçoit en 2047 une demande qui émane d’une jeune fille qui s’appelle Lissa ; le héros c’est Dan, Dan Halbert. Il se trouve que Lissa Lenz, qui est très pauvre, lui demande de lui prêter son ordinateur parce qu’elle a besoin de rédiger un rapport universitaire sans quoi elle va échouer.

Il se trouve qu’en 2047 sa demande est choquante puisque ceux qui veulent partager des ordinateurs, des mots de passe, des livres, sont considérés comme des rebelles, des pirates, des délinquants, donc Dan est très choqué parce qu’il sait que s’il prend ce risque dans ce monde crépusculaire de partager avec Lissa simplement cet outil de travail, il va avoir des problèmes de la part SPA, la Software Protection Authority, qui veille sur les copyrights, qui siphonne les données générées par des utilisateurs grâce à un dispositif espion qui enregistre, qui sait qui lit quoi, quand, combien de temps. Je pense que ça vous rappelle des choses ; toute référence avec des situations réelles est évidemment indue ! Il se trouve que Dan réfléchit puisque certes il risque de se faire emprisonner, c’est exactement ce qui est arrivé à l’un de ses amis, Frank Martucci, qui avait utilisé un outil de débogage pour déverrouiller le code du moniteur de copyright, donc pour accéder à un livre.
Dans ce moment extrêmement noir, il se trouve qu’on a même oublié ce qui avait lieu avant 1990. Avant 1990, il y avait un accès libre à des bibliothèques : on pouvait emprunter gratuitement des livres scientifiques ; on pouvait partager des logiciels ; il y avait des noyaux libres, il y avait des systèmes d’exploitation libres qu’on aurait pu installer, mais que désormais on ne peut plus installer étant donné que dans ce lieu qui est très fermé plus aucune possibilité d’accès à du savoir n’existe ou alors il faut payer vraiment très cher. En plus Dan est très embêté puisque s’il prête son ordinateur à Lissa elle pourra regarder ses livres et là c’est terrible puisqu’on ne peut pas, si on a acquis très cher des livres scientifiques, on ne peut évidemment pas les faire lire à quelqu’un d’autre.

Simplement l’amour donne des ailes et il se trouve que Dan aime Lissa. Il va faire un geste inconsidéré, aussi fou qu’au début de 1984 d’Orwell, c’est-à-dire qu’il va non seulement lui prêter son ordinateur mais il va lui donner son mot de passe. Et il se trouve que Lissa, qui aime Dan, ne le trahira pas, parce qu’elle peut évidemment aussitôt le dénoncer et il sera enfermé, comme celui qui a essayé d’utiliser un outil de débogage, à tout jamais dans une prison.
Déjà quand on voit ce qu’il en est de ce scénario, il se trouve que j’ai parlé avec Richard Stallman en lui disant à quel point cette fiction, cette dystopie était propice à un film, à tel point les détails très puissants, ce texte est de 1997, il est presque d’un certaine façon prémonitoire, nous pensons bien sûr aux DRM, les Digital Restrictions Management, la gestion numérique des restrictions. Et là je pense, Fred, que nous pouvons renvoyer à la vidéo de l’April sur les DRM.
Frédéric Couchet : Les DRM qu’on appelle aussi menottes numériques. On peut envoyer à deux choses : il y a une vidéo qui a été faite il y a maintenant deux ans qui montre l’impact des DRM justement notamment sur les livres, vous la trouvez sur le site de l’April, et également une précédente émission Libre à vous ! de 2018 qui était consacrée à cette question des menottes numériques. Vous allez sur le site de l’April, april.org, dans la partie consacrée à l’émission Libre à vous ! et vous retrouvez ça dans les archives.
Véronique Bonnet : Il se trouve que ce récit, cette fiction, est suivie d’abondants commentaires, commentaires qui sont régulièrement remis à jour lorsque, par exemple, Richard Stallman parle des fonctionnalités orwelliennes de certaines liseuses : son assimilation de Kindle à swindel d’Amazon, ce qui espionne, profile le lecteur. On a en tête ce qui s’est passé en 2009 lorsqu’il y a eu effacement de plus de 1000 copies de 1984 sur les liseuses. Les commentaires portent aussi sur la vigilance qui est requise lorsqu’on parle de traités internationaux, puisque dans les traités internationaux il y a vraiment toujours la volonté de transformer des ressources ouvertes à des dispositifs qui privent, qui empêchent, qui rendent le savoir denrée rare et chère ce qui est un extrême paradoxe. Il se trouve qu’Aristote disait que le savoir était aussi nécessaire que l’eau et qu’il fallait qu’il soit gratuit comme l’eau, il fallait pouvoir le partager comme l’eau.
Je pense aussi, Fred je crois que tu serais, me semble-t-il, dans cette même impression que moi, à la directive droit d’auteur qui a été examinée par la Commission européenne, je pense à l’article 13 [devenu article 17, NdT] sur le filtrage automatique des plates-formes. Dans les commentaires, dans ce texte de 1997, Richard Stallman parlait déjà de cette menace sur l’Internet qui allait faire de lui un Internet à plusieurs vitesses. Donc ceux qui disposent d’un redoutable mot de passe que donnent au compte-gouttes les autorités, les outils de débogage étant réservés à très peu – certes il y a les apprentis informaticiens, il y a un usage très restreint, quand vraiment on veut leur faire étudier un petit peu de code, d’outils de débogage protégés par des pare-feux par exemple – donc il y a dans le rapport entre cette fiction et les commentaires – ce texte étant prémonitoire, les commentaires sont constamment mis à jour – l’hypothèse que le droit de lire qui fait partie de la démarche la plus essentielle pour faire de soi quelqu’un qui n’est pas en proie aux illusions, se trouve dans cette dystopie alourdi par des dispositifs architecturaux. Je pense à ce code qui n’est pas libre et si le code n’est pas libre, la société n’est pas libre, quelqu’un a dit « le code c’est la loi ».

Comme ma discipline de prédilection est la philosophie, je rappellerai qu’en 1516 ont été publiés conjointement Le Prince de Machiavel – comment rester au pouvoir par tous les moyens y compris en empêchant ses sujets d’être éduqués, d’apprendre à lire –, mais en même temps, 1516 toujours, il y a ce premier texte qui s’appelle L’Utopie de Thomas More. Dans L’Utopie de Thomas More, qui est exactement aux antipodes du Prince de Machiavel, on essaye de construire une architecture telle que les rapports entre les humains soient confiants, soient proches, soient propices au partage. Et je dirais que toutes proportions gardées, les propositions du projet GNU, qui visent à une architecture informatique propice à l’accès à des documents et à des processus, s’inscrivent dans cette lignée d’une utopie, alors attention parce que parfois on fait de l’utopie une illusion mais l’utopie au sens propre, et c’est un néologisme de Thomas More, « u » eu ça veut dire bon. Et je dirais en conclusion : informatique libre, société libre.
Frédéric Couchet : C’est une belle conclusion, Véronique. Un texte, on va le rappeler, qui a été écrit en 1997, qui est disponible sur le site de GNU, gnu.org, g, n, u point org, « Le droit de lire ». On rappelle aussi qu’une dystopie, comme tu l’as dit, c’est une fiction dans laquelle la société est construite pour empêcher ses membres d’atteindre le bonheur. Évidemment c’est le contraire du projet GNU avec le partage du savoir, la libération, l’accès à l’ensemble des savoirs.

En tout cas merci pour cette chronique dont on va rappeler le titre qui est « Partager est bon » et on se retrouve bientôt pour la chronique. Merci Véronique.
Véronique Bonnet : Au revoir Fred.
Frédéric Couchet : Belle journée.
Véronique Bonnet : Belle journée à toi.
Frédéric Couchet : Comme vous l’avez compris, cette chronique avait été enregistrée il y a quelque temps, ce qui explique la différence de son.

Nous approchons de la fin de l’émission, nous allons terminer par quelques annonces.
Jingle basé sur Sometimes par Jahzzar.

Annonces

Frédéric Couchet : La semaine dernière j’avais évoqué le projet de loi pour une école de la confiance avec notamment un amendement 187 voulant instaurer la priorité au logiciel libre dans l’enseignement public. Malheureusement cet amendement a été déclaré irrecevable par la commission de la culture et de l’éducation au titre qu’il n’aurait pas de rapport direct ou indirect avec le projet de loi. Évidemment nous sommes particulièrement surpris ; il faut savoir qu’en centaine d’autres amendements a subi le même sort. Cependant, vendredi 17 mai, il y a eu un débat sur le logiciel libre à l’occasion d’un autre amendement, de la discussion d’un autre amendement. Sur le site de l’April, april.org, vous pouvez retrouver à la fois la vidéo et la transcription de ces échanges. Nous remercions les sénateurs et sénatrices qui sont intervenus dans le cadre de ce débat, notamment Pierre Ouzoulias, Françoise Laborde et Catherine Morin-Desailly.
Tout à l’heure je vous ai signalé que la première pause musicale était issue d’une nouvelle émission de radio sur le logiciel libre, ça s’appelle La Voix est Libre c’est sur Graf’hit, g, r, a, f, h, i, t, c’est tous les vendredis de 9 heures à 9 heures 30 autour de Compiègne, à la fois sur la FM et en streaming. Ce sont nos amis de picasoft.net qui ont monté cette émission. Picasoft c’est une association de l’université de technologie de Compiègne qui a pour objet de promouvoir et défendre une approche libriste, respectueuse de la vie privée et de la liberté d’expression dans le domaine de l’informatique ; picasoft.net est en fait un chaton, donc ça fait partie du Collectif des Hébergeurs Alternatifs, Transparents, Ouverts, Neutres et Solidaires dont on a déjà parlé dans cette émission.
Les actualités à venir : eh bien demain soir, donc mercredi 22 mai de 19 heures à 22 heures au café associatif La Commune dans le 12e arrondissement de Paris, 3 rue d’Aligre, aura la diffusion de La bataille du Libre. C’est la version longue du documentaire de Philippe Borrel qu’on a présenté la semaine dernière. Je vous invite à y assister, c’est mercredi 22 mai 2019 de 19 heures à 22 heures au café associatif La Commune, les informations sont sur le site de l’April.

Ce week-end à Marseille l’association Debian France, Debian c’est une distribution logiciel libre, organise une DebConf, c’est le terme de cette conférence, le week-end des 25 et 26 mai. Cet événement a pour but de réunir développeurs, développeuses, contributeurs, contributrices, utilisateurs et utilisatrices de Debian et aussi toute personne intéressée par le projet avec une série de conférences, d’échanges consacrés à Debian.

L’April, nous serons présents cette semaine à la Fête du Libre, le 25 mai à Ivry-sur-Seine près de Paris, il y a toute une journée de conférences et d’ateliers.

La semaine prochaine, 31 mai, il y a l’apéro April au local de l’April, que nous partageons avec nos amis d’Easter-eggs de Pierre-Yves Dillard qui est en face de moi.
Notre émission se termine, vous entendez ce magnifique générique.

Je remercie les personnes qui ont participé à l’émission : Marie-Odile Morandi, Pierre-Yves Dillard, Vincent Laurent, Véronique Bonnet.

Aux manettes à la régie je remercie Patrick Creusot qui a été assisté de ma collègue Isabella Vanni. Tout à l’heure on a expliqué que 24ème ce n’était pas l’inverse de 42, mais 42 est un chiffre assez important aujourd’hui. Je souhaite un bon anniversaire à Isabella et on lui souhaite tous un bon anniversaire, évidemment.

Également un grand merci à Oliver Grieco, le directeur d’antenne de la radio, qui s’occupe aussi et avec beaucoup de soin du traitement et de la préparation des podcasts avant leur mise en ligne. Il fait un gros travail qui permet d’améliorer la qualité du son.
Vous retrouverez sur notre site april.org toutes les informations utiles ainsi que sur le site de la radio causecommune.fm. N’hésitez pas à nous faire des retours pour indiquer ce qui vous a plu mais aussi des points d’amélioration.
La prochaine aura lieu en direct mardi 28 mai 2019 à 15 heures 30. Notre sujet principal portera sur le logiciel libre et les collectivités avec des invités de Paris et de Grenoble.
Nous vous souhaitons de passer une belle fin de journée. On se retrouve en direct mardi 28 mai et d’ici là, portez-vous bien.
Générique de fin d’émission : Wesh Tone par Realaze.

Avertissement : Transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant⋅e⋅s mais rendant le discours fluide. Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.