Émission Libre à vous ! diffusée mardi 7 juin 2022 sur radio Cause Commune


Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Frédéric Couchet : Bonjour à toutes. Bonjour à tous.
La diversité de genre dans les projets logiciels libres, ce sera le sujet principal de l’émission du jour avec le retour d’expérience de trois informaticiennes libristes. Également au programme une interview de l’avocat d’Anticor, l’association anticorruption, sur un dossier de soupçons de favoritisme dans l’attribution d’un marché de l’Éducation nationale. Et, en fin d’émission, la chronique de Luk intitulée Errare humanum est, perseverare diabolicum.

Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de Libre à vous !, l’émission qui vous raconte les libertés informatiques, proposée par l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.
Je suis Frédéric Couchet, le délégué général de l’April.

Le site web de l’émission est libreavous.org. Vous pouvez y trouver une page consacrée à l’émission du jour avec les liens et références utiles et également les moyens de nous contacter. N’hésitez pas à nous faire des retours et nous poser toute question.

Nous sommes mardi 7 juin 2022, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.

Plutarque aurait dit que la barbe ne fait pas le philosophe. Il a la barbe bien fournie et il a le talent de réalisateur, je ne sais pas si la barbe fait le réalisateur, en tout cas Étienne Gonnu est aujourd’hui à la réalisation de l’émission. Bonjour Étienne.

Étienne Gonnu : Salut Fred.

Frédéric Couchet : Nous vous souhaitons une excellente écoute.

[Jingle]

Interview de Jean-Baptiste Soufron, avocat d’Anticor dans le dossier de soupçons de favoritisme dans l’attribution d’un marché de l’Éducation nationale : Anticor saisit le PNF

Frédéric Couchet : Nous allons commencer par une interview de Jean-Baptiste Soufron, l’avocat d’Anticor, l’association anticorruption, sur le dossier de soupçons de favoritisme dans l’attribution d’un marché de l’Éducation nationale. Pour cette interview je passe le micro à mon collège pour la conduite de cet échange.

Étienne Gonnu : Merci Fred.
Nous avons fait un test avec Jean-Baptiste Soufron qui, malheureusement, ne semble pas avoir pu rappeler tout de suite. On attend son appel d’un instant à l’autre. Je peux déjà, peut-être, présenter un petit peu notre sujet.
Si vous suivez les actions de l’April vous avez sans doute suivi cette action-là.
Par un communiqué du 12 mai 2022, l’association Anticor, une association bien connue pour la lutte contre la corruption, a expliqué qu’elle avait déposé une plainte auprès du Parquet national financier portant sur des soupçons de favoritisme dans l’attribution d’un marché public de l’Éducation nationale à l’entreprise américaine Microsoft. Une action que l’April a, bien sûr, fortement saluée, qu’elle a prise comme une excellente nouvelle, parce que ça fait des années qu’à l’April on constate, malheureusement, l’état de dépendance de l’État en général, notamment du ministère de l’Éducation nationale, une dépendance aux logiciels privateurs de la multinationale américaine Microsoft.
Anticor a déposé cette plainte, une plainte qui permettrait, si elle aboutissait, qui contribuerait à faire un petit peu la lumière et à assainir cette situation ; on en a besoin étant donné les rapports de force favorables à Microsoft dans lesquels on se situe. Par ses solutions logicielles privatrices Microsoft enchaîne, lie pieds et poings les administrations à ses logiciels, elle crée des dépendances d’utilisation, des dépendances techniques, donc on a besoin de décisions fortes, d’actions fortes, comme cette plainte, pour renverser tout cela.
Puisqu’on parle d’Éducation nationale, on se souviendra qu’en 2015 il y avait déjà eu une affaire qui avait fait grand bruit, qui a d’ailleurs débordé sur 2016. Un partenariat avait été signé en grande pompe entre l’Éducation nationale et Microsoft, un partenariat d’une valeur affichée de 13 millions d’euros. On a appris plus tard, par différentes actions – il y a encore un grand défaut de transparence sur ces contrats-là, on se savait pas bien de ce dont il s’agissait – qu’il s’agissait d’un contrat de mécénat. Donc Microsoft offrait gracieusement, notamment, des formations et des tablettes à l’Éducation nationale pour que les jeunes élèves, très tôt, s’habituent aux outils, car ce n’est bien sûr pas neutre d’apprendre l’informatique à travers des solutions privatrices plutôt qu’à travers des solutions libres qui sont, par essence, émancipatrices, alors que les solutions privatrices aliènent et ne permettent pas d’avoir un rapport crique à l’informatique que l’on apprend.

Frédéric Couchet : Je vais essayer de combler en attendant que l’avocat d’Anticor rappelle, en tout cas j’espère qu’il sera à l’heure pour l’audience !
Je crois que ce n’est pas la première fois qu’Anticor se saisit d’un dossier autour du logiciel libre, autour de l’informatique et des libertés. Si je me souviens bien, mais peut-être que je commets une erreur, ils ont aussi saisi concernant le Health Data Hub. Est-ce que ça te dit quelque chose ?

Étienne Gonnu : Je ne serais pas en mesure. Je ne sais plus si c’est Anticor, en tout cas il y avait eu une action. Le Health Data Hub est un autre énième exemple de ces contrats, on va dire de ces situations de dépendance de l’administration française et de l’État français à Microsoft. Health Data Hub est un grand projet de plateforme d’accès aux données de santé pour permettre la recherche sur ces données. Dans un premier temps c’est Microsoft qui avait été retenue comme solution pour héberger ces données, avec beaucoup de problématiques. Maintenant ce n’est plus Microsoft, il a dû y avoir machine arrière, notamment suite à certaines décisions de justice.
Je crois que tu as retrouvé la référence.

Frédéric Couchet : Effectivement Anticor a déjà saisi le Parquet national financier sur ce dossier du Health Data Hub, en mars 2021, c’est sur le site d’Anticor, anticor.org. Anticor rappelle que « le marché public a été attribué sans mise à concurrence, en faisant prétendument appel à l’UGAP – la Centrale d’Achat Public – qui le conteste, dans l’urgence et au motif que seule Microsoft aurait les capacités technologiques de fournir une telle infrastructure. La Caisse nationale d’assurance maladie a d’ailleurs exprimé à l’époque son désaccord sur cette solution. Ce choix a également été critiqué par le Sénat.
Anticor rappelle aussi qu’une centaine de chercheurs et chercheuses avaient alerté l’opinion sur les enjeux de ce choix. Il s’agit d’un marché public particulièrement important tant de par son objet que de par son montant.
En effet, il porte sur des données personnelles de santé, qui sont des données sensibles, comme l’a rappelé la CNIL, ce qui implique la sécurisation de ces données et donc une technologie coûteuse.
Une telle opération exigeait un haut niveau de transparence et une procédure de mise en concurrence irréprochable, relayée par le biais des canaux d’information réglementaires.
C’est pourquoi l’association Anticor a décidé de saisir le Parquet national financier sur le volet non ministériel du dossier. Parallèlement, la Cour de justice de la République est saisie du volet ministériel », ce que je ne savais pas, en tout cas dont je ne m’en souvenais pas.
C’est très rassurant et très intéressant de voir qu’une association nationale anticorruption comme Anticor se saisit de ces dossiers-là.
Par contre, comme on n’a pas l’avocat d’Anticor sur ce dossier-là, Jean-Baptiste Soufron, est-ce que les informations, les détails de la plainte au PNF, au Parquet national financier ont été publiées ou pas ?

Étienne Gonnu : Il ne me semble pas. C’est vrai que nous avons pris contact avec Anticor un peu dans cette perspective. Après, on peut comprendre qu’en termes de stratégie de défense il vaille mieux garder un petit peu certaines de ces données, si ce n’est secrètes, du moins confidentielles. On verra si ça prospère. Quand on s’intéresse un peu à ces questions politiques, il est vrai qu’on peut saluer le travail vraiment sans relâche d’Anticor sur ces questions. Je m’exprime à titre personnel, je trouve que c’est une association qui fait vraiment un travail remarquable. D’ailleurs je pense qu’il est possible d’aller les aider ne serait-ce que financièrement. J’invite les personnes qui s’intéressent à ces sujets à ne pas hésiter à le faire.

Frédéric Couchet : Est-ce que tu souhaitais ajouter quelque chose ?

Étienne Gonnu : Oui, mais j’ai oublié d’où mon hésitation.

Frédéric Couchet : Je vois bien à travers la glace que tu as oublié quelque chose. Si tu t’en souviens, sinon on passera au sujet suivant.

Étienne Gonnu : Et le temps qui reste serait un peu court.
Simplement, peut-être pour reposer un petit peu les choses en termes de politique publique et de politique générale, c’est vrai qu’on choisit des solutions qui nous enferment et, du coup, on est enfermé dans une situation avec Microsoft qui nous oblige à renouveler, parce qu’on a des situations de dépendance technique, on a des situations de dépendance on va dire dans les usages courants. Pour cela aussi faut des décisions fortes pour pouvoir renverser un peu tout cela.
Parallèlement on sait qu’il y a maintenant des politiques publiques qui se veulent plus favorables au logiciel libre. Pour qu’elles puissent prospérer, pour qu’elles puissent produire leurs effets, il faut aussi, matériellement, s’intéresser à la situation actuelle donc faire la lumière sur ce qui se passe à l’Éducation nationale, ce qui se passe dans les choix tels qu’ils sont formulés sur le Health Data Hub, vis-à-vis du ministère de la Défense — on sait qu’il a une grande dépendance, même une très grande dépendance aux outils de Microsoft. Il faut que cet effort soit holistique, on va dire, de la part de la puissance publique.

Frédéric Couchet : Très bien. Je vais juste rappeler, et je le rappellerai en fin d’émission, qu’il est aussi possible en ce moment de sensibiliser les candidats et les candidates aux élections législatives aux libertés informatiques à travers le Pacte du logiciel libre que nous proposons sur candidats.fr. C’est un pacte qui permet à la fois de signer son engagement en faveur du logiciel libre et c’est aussi une manière de mettre en relation des personnes dans une circonscription et les candidats et les candidates aux élections législatives des 12 et 19 juin.
Étienne, merci pour cet échange.
C’était la plainte d’Anticor, l’association anticorruption, sur un dossier de soupçons de favoritisme dans l’attribution d’un marché de l’Éducation nationale. Les informations, en tout cas la communication presse d’Anticor est sur anticor.org. Je pense qu’assez rapidement, peut-être quand on aura un peu plus de détails, on aura l’occasion de réinviter Jean-Baptiste Soufron, peut-être d’enregistrer l’échange pour être sûrs de l’avoir. Ce sont les joies du direct, ce sont les joies de la radio !
Est-ce que tu souhaites ajouter quelque chose avant qu’on fasse la pause musicale ?

Étienne Gonnu : J’attends impatiemment le sujet suivant.

Frédéric Couchet : Nous allons faire une pause musicale.

[Virgule musicale]

Frédéric Couchet : Après la pause nous parlerons de la diversité de genre dans les projets logiciels libres. En attendant nous allons écouter Late as usual par The Freak Fandango Orchestra. On se retrouve 3 minutes 36. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles et préparez-vous à danser.

Pause musicale : Late as usual par The Freak Fandango Orchestra.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter Late as usual par The Freak Fandango Orchestra, disponible sous licence libre Creative Commons Partage dans les mêmes conditions, CC By SA.

[Jingle]

Frédéric Couchet : Nous allons passer au sujet suivant.

[Virgule musicale]

La diversité de genre dans les projets libres avec Agnès Crepet, responsable de l’équipe informatique et de la longévité logicielle de Fairphone, Anne-lise Martenot du projet SPIP et Zineb Bendhiba, ingénieure logiciel libre chez RedHat

Frédéric Couchet : Nous allons poursuivre par notre sujet principal qui va porter sur la diversité de genre dans les projets logiciels libres avec le retour d’expérience de trois informaticiennes libristes.
Avec moi au studio Zineb Bendhiba, ingénieure logiciel libre chez RedHat. Bonjour Zineb.

Zineb Bendhiba : Bonjour.

Frédéric Couchet : Et sur Mumble, à distance, normalement nous avons avec nous Agnès Crepet, responsable de l’équipe informatique et de la longévité logicielle de Fairphone. Bonjour Agnès.

Agnès Crepet : Bonjour.

Frédéric Couchet : Et Anne-lise Martenot qui est informaticienne indépendante et qui participe également au projet SPIP. Bonjour Anne-lise.

Anne-lise Martenot : Bonjour.

Frédéric Couchet : Super. Vous êtes là toutes les trois. N’hésitez pas, auditeurs et auditrices, à participer à notre conversation sur le salon web dédié à l’émission, sur le site causecommune.fm, bouton « chat ». Je surveille le salon, donc je peux relayer vos remarques ou vos questions.
Une étude Stefano Zacchiroli, enseignant-chercheur à Télécom Paris montre que les femmes seraient de plus en plus actives dans la production de logiciels libres pour atteindre environ, attention !, on s’attache, 10 % de contributrices actives sur la planète. Oui, 10 %, il reste beaucoup de chemin à parcourir ! On parlera de cette étude avec Stefano la semaine prochaine, mardi 14 juin, puisqu’on continuera cette discussion, également avec Isabelle Collet qui est informaticienne et enseignante-chercheuse à l’université de Genève. Aujourd’hui on va donner la parole à trois femmes pour parler de leur expérience justement dans les projets libres, d’ailleurs pas forcément libres, dans leur expérience informatique en général. Cette émission d’aujourd’hui c’est plus retour d’expérience, la semaine prochaine c’est plus, on va dire, une approche académique et autre.
Première question pour chacune à la fois de présentation personnelle sur ce que vous êtes mais également, peut-être en deux minutes maximum, un petit résumé de votre parcours pour que les gens vous connaissent un petit peu mieux avant qu’on aborde les différents sujets. On va commencer par Zineb qui est avec moi au studio.

Zineb Bendhiba : Je suis ingénieur logiciel chez RedHat. Je travaille depuis 14 ans. Je précise que je suis chez RedHat depuis deux ans et je ne travaille dans le logiciel libre que depuis deux ans en tant que contributrice. Je contribue sur un projet qui s’appelle Apache Camel sur lequel je suis contributrice reconnue et membre du comité de management du projet.
Pour mon parcours. J’ai fait mes études au Maroc et j’ai commencé à travailler au Maroc. Je suis arrivée en France il y a 11 ans. Le Maroc est un peu différent de la France. Au Maroc on a d’autres problématiques, on n’est pas tous égaux par rapport à l’accès à l’éducation suivant où on habite et le milieu où on naît. Pour ce qui est de mon cas, j’ai grandi dans les années 80/90 dans des grandes villes, dans la classe moyenne et chez nous, quand on naît dans ces milieux-là, qu’on soit fille ou garçon on est beaucoup poussé vers les maths. On aime bien les maths et on est beaucoup poussé pour aller vers des filières scientifiques, des métiers de l’ingénieur, des métiers de la médecine, peut-être par rapport au fait qu’on est un pays pauvre et que ces domaines-là pourraient, peut-être, déboucher sur un travail avec lequel on aura un niveau de vie agréable. En tout cas on est beaucoup poussé vers ça et on n’a pas, au niveau des études, cette différence qui existe en France et dans d’autres pays. Juste pour souligner que chez nous, en fait, dans les études pour les métiers d’ingénieur on est plutôt entre 30/40 %, à peu près, de femmes. J’ai étudié là-bas dans ce contexte-là. Ce n’était pas du tout bizarre d’être une femme qui étudie les maths ou l’informatique. J’ai découvert il y a quelques années, en faisant ma première conférence technique en France, qu’il n’y a pas beaucoup de femmes, ce que je ne m‘imaginais pas en venant dans un pays un peu plus développé, je pensais qu’il allait y avoir plus de femmes. Du coup j‘ai commencé un petit peu à m’intéresser à ça et j’ai rejoint l’association Duchess.
Personnellement, je ne pourrai pas donner mon avis sur l’éducation. J’étais dans un pays où c’était différent, il y avait plus de femmes au niveau éducation.

Frédéric Couchet : C’est très intéressant. Je vais juste préciser que RedHat est une entreprise américaine qui édite une distribution GNU/Linux notamment orientée pour les entreprises. Je précise que même si tu es chez RedHat, tu n’interviens pas au nom de RedHat aujourd’hui ; on va parler de ton retour d’expérience personnelle. C’est très intéressant.
On va poursuivre la présentation personnelle, un petit peu votre parcours, avec Anne-lise Martenot. Anne-lise à toi. Sinon on va passer à Agnès Crepet.

Agnès Crepet : Bonjour. J’espère que vous m’entendez. C’est bon ?
Je m’appelle Agnès Crepet, j’ai 44 ans, ça fait une vingtaine d’années que j’ai commencé de bosser. J’ai un parcours assez classique, je suis sortie d’une école d’ingénieur avec une formation un peu spécialisée en développement logiciel. Dans cette école d’ingénieur nous étions deux filles dans ma promo, déjà à l’époque il y avait très peu de filles présentes sur les bancs des écoles. Par contre, la chose un peu spécifique et agréable qui m’est arrivée quand j’ai commencé de bosser – vu que j’ai 44 ans, je suis un peu plus vieille, peut-être, que les filles qui parlent avec moi aujourd’hui – j’ai eu la chance de côtoyer pendant deux/trois ans des femmes développeuses qui ont commencé leur carrière dans les années 60/70. En fait, quand j’ai commencé de bosser en 2000/2001, ces femmes-là étaient en fin de carrière. Donc j’ai eu la chance d’avoir, on va dire, des mentors, des filles qui avaient 40 ans de métier de développeuse derrière elles, même si ce n’était pas tout à fait le même genre de métier, elles-mêmes se considéraient plus sur des métiers on va dire à basse valeur ajoutée plus que comme des Software Engineers Rockstars, etc., on reviendra, justement, sur ce stéréotype autour du métier de développeur et de développeuse. On va dire que quand j’ai vraiment fait mes premières armes dans l’industrie j’avais pas mal de filles.
Je rejoins tout à fait Zineb sur le fait de se dire que c’est quand même ça chez nous, dans beaucoup de pays occidentaux. Quand on sort un peu de nos pays on voit que d’autres choses vachement intéressantes se passent ailleurs. Au bout de dix ans de carrière j’ai fait un break pro pendant un an. Avec mon copain nous avons voyagé dans plein de pays dans le monde à la rencontre de développeuses et de développeurs et, ce que tu décris Zineb, je m’en suis aperçue à 30 et quelques années. Je suis arrivée en Afrique, en Indonésie, dans certains pays d’Asie du Sud-Est et là j’ai pris une grosse claque parce qu’il y avait plein de filles. Plein de filles à la fois sur les bancs de l’école mais aussi dans les entreprises. Nos discussions étaient assez tournées autour des stéréotypes et de la technique. Les filles indonésiennes que j’ai rencontrées, qui avaient choisi de faire des études en informatique, me disaient que la problématique est plus globale : « On ne nous a jamais empêchées de faire de la technique quelle qu’elle soit, que ce soit de l’informatique ou pas. Quand nous étions petits papa et maman réparaient des voitures et mon frère et moi apprenions à les réparer ».
Je pense que dans non pays occidentaux il y a une certaine propension à mettre les filles un peu de côté s’il s’agit de faire des choses un peu trop tech et je pense qu’on aurait tout intérêt à s’inspirer de pays non occidentaux. Dans notre monde biberonné par les modèles de la Silicon Valley on a tendance à honorer ces modèles des western countries et je pense vraiment que sur la diversité de genre on aurait tout intérêt à complètement casser ce modère inspirationnel complètement biaisé ; il y aurait d’ailleurs d’autres intérêts.

Frédéric Couchet : Merci Agnès. Tout à l’heure on reparlera sans doute un petit peu des rôles modèles, je pense que c’est ce à quoi tu faisais référence au début, de Duchess parce que tu fais aussi partie de Duchess, on en parlera dans la deuxième partie, et aussi de l’éducation non genrée dont il est question.
J’en profite pour saluer les gens qui sont sur le salon web, notamment Guillermo qui nous dit que c’est un plaisir d’avoir l’opportunité de vous réécouter en direct. Visiblement cette personne a la chance de pouvoir nous écouter en direct aujourd’hui et Marie-Odile qui est toujours présente, qui fait nos transcriptions, qui rappelle qu’il s’agit d’éducation dès l’enfance.
On va finir le tour de table de présentation initiale des parcours par Anne-lise Martenot si on l’a récupérée. Anne-lise.

Anne-lise Martenot : C’est intéressant d’écouter Agnès et Zineb. C’est vrai que mon parcours commence aussi dans mon enfance puisque j’ai un grand-père qui est musicien électronicien, donc c’est aussi un intérêt pour les nouvelles technologies qui surgit à ce moment-là avec le côté artistique.
Je suis autodidacte. J’ai commencé par faire les Beaux-Arts et, pour des raisons politiques, je suis passée au code informatique. Assez tôt j’ai fait des effets spéciaux pour le cinéma et pour la télévision et, à ce moment-là, j’ai rencontré énormément de femmes. Un des premiers stages que j’ai fait, j’étais encore mineure, c’était à l’American Center avec Michel Jaffrennou, avec Cécile Babiole, des gens comme ça et, les premières machines à effets spéciaux c’était avec une super nana qui était à Mikros Image, qui s’appelait Ève Ramboz, je ne sais pas ce qu’elle est devenue, mais je me souviens que j’avais été impressionnée parce que c’étaient des nanas derrière les machines.
Même si Agnès a dit « je suis peut-être la plus vielle » , pardon !, c’est moi ! J’ai 56 ans, donc ça fait un petit bail que je fais de l’informatique, que je me bagarre aussi, que je déprime un peu de voir qu’il y a de plus en plus de femmes qui quittent les lieux, notamment des femmes jeunes. J’ai une fille de 24 ans qui a des copines qui ont essayé le milieu informatique pendant un ou deux ans après avoir fait des écoles d’informatique et qui ont abandonné. Donc il y a réellement quelque chose à résoudre là et je pense que ce n’est pas seulement au niveau des femmes, mais c’est peut-être au niveau de l’accueil et toujours toutes les questions féministes et aussi de la façon dont les hommes pourraient avoir un petit peu un profit. Baldwin disait que les Blancs auraient aussi un profit de pouvoir considérer les Noirs correctement, comme des êtres humains. Des fois j’ai l’impression d’être un lapin et de réapprendre qu’il y a des chasseurs. C’est un petit peu ma position de femme et je me bats assez souvent avec ça.
Voilà mon parcours, qui est surtout autodidacte, contrairement aux deux grandes dames devant moi qui sont ingénieures ; je fais du développement web, ça ne porte pas autant à conséquence mais c’est quand même intéressant.

Frédéric Couchet : Merci Anne-lise. Le développement web est important. On a justement consacré la dernière émission à la qualité web, c’est l’émission 145 à laquelle je renvoie les personnes intéressées : comment améliorer le Web tout simplement pour améliorer l’expérience d’utilisation des services web. Il ne faut pas du tout réduire ce que tu fais et le mettre en bas, en dessous de ce que peuvent faire Zineb et Agnès. En tout cas c’est mon point de vue personnel.

Agnès Crepet : Je peux juste préciser un truc sur le fait que tu disais que ton choix de rentrer dans l’informatique était politique. C’est rigolo. Je crois, c’est ce qui a été dit, que tu développes sur SPIP. C’est ça ?

Anne-lise Martenot : Oui, c’est ça. Absolument.

Agnès Crepet : Sache que tu fais partie des gens qui m’ont inspirée, je ne savais pas que tu es plus âgée que moi, on a quelques années d’écart, pas beaucoup. Quand j’ai commencé à me dire que je voulais faire des études d’informatique c’est grâce à SPIP. Je faisais des études, quelles qu’elles soient, et des médias indépendants se lançaient un petit peu partout dans le monde après un des sommets mondiaux de l’OMC à Seattle, ce qu’on appelait des médias alternatifs avec Indymedia, etc. Dans la ville où j’habitais en France, on a voulu monter ce média-là, SPIP arrive et je découvre un peu la magie de l’open source, qu’il y a plein de gens qui bossent là-dessus, je n’étais pas très bonne en PHP, bref ! Je découvre ce truc-là. Eh bien figure-toi que c’est grâce à des gens comme toi que je me suis dit ça vaut le coup de faire des études là-dedans. Ce qui se passe à travers un outil comme SPIP est concrètement dingue pour moi et ultra inspirant pour des personnes qui peuvent ne pas être forcément que sur la partie technique de l’informatique et qui ont envie de rejoindre l’informatique juste pour la technicité. Juste pour souligner. Je ne savais pas, mais je viens d’apprendre que tu as été impliquée dans un produit, dans un projet qui m’a vachement motivée.

Frédéric Couchet : Merci Agnès pour cette précision. Je vais préciser que Anne-lise est intervenue dans l’émission consacrée à SPIP avec Arnaud, un des fondateurs de SPIP, l’émission 123, donc vous faites libreavous.org/#123 et vous apprendrez que SPIP n’est pas qu’un projet technique, c’est aussi un projet politique. Je vous laisse découvrir tout ça dans l’émission 123 de Libre à vous !.
Dans cette introduction un certain nombre de sujets ont pu être évoqués sur lesquels on reviendra tout à l’heure. Comme c’est un retour d’expérience, j’aimerais avoir un petit peu votre constat plutôt sur les problèmes que vous avez pu rencontrer, que ce soit dans le cadre de votre formation, de votre expérience professionnelle, de vos contributions à des projets libres, de conférences ou autre, un petit peu une synthèse ou, en tout cas, les principaux problèmes que vous avez rencontrés. On va commencer par Zineb Bendhiba.

Zineb Bendhiba : Les problèmes vont plus être par rapport aux biais que certaines personnes peuvent avoir sur les femmes. Je vais parler de mon expérience dans l’informatique en global, parce que, sur 14 ans, je n’ai pas tout le temps été dans le logiciel libre.
On va dire que ce qui me dérange c’est quand certaines personnes ne m’écoutent pas lors de la première intervention que je fais dans une réunion ou un meeting, à cause de leurs biais, peut-être parce que je suis une femme, je ne sais pas, en fait j’ai du mal à comprendre. Ou bien c’est d’assumer certaines choses, assumer que comme je suis une femme je vais plus être intéressée par ce projet-là ou ce projet-là sans me demander mon avis.
Il y a aussi, des fois, des remarques sexistes qu’on ne voudrait pas entendre.
Ceci dit ce n’est pas une globalité. En global j’ai été dans des environnements qui sont bienveillants, accueillants et inclusifs. Des fois ce sont des environnements accueillants, mais pas tout à fait inclusifs ; ça va être accueillant par des managers, des personnes que j’ai rencontrées au début, des fois peut-être même toute l’équipe, mais pas forcément tout le monde dans l’environnement, ou bien pas inclusifs dans le sens où je n’aurais peut-être pas d’opportunité d’évolution ou de travailler sur des projets. Après il y a des environnements qui sont très toxiques, qui ne sont ni accueillants ni inclusifs et je vais partir de ceux-là assez rapidement. Voilà en global.
Il faut faire attention aux biais. Si j’avais des choses à dire c’est de faire attention, quand on communique avec une personne, que ça soit la même chose quel que soit le genre. Il y a quelques semaines j’ai rencontré une personne qui m’a dit qu’une personne voulait lui faire un feed-back constructif pour lui indiquer quelque chose qui n’allait pas sur son travail et elle a commencé la phrase par « j’ai quelque chose à te dire, mais j’ai peur que tu pleures. »

Frédéric Couchet : Parce que la personne à qui elle s’adresse est une femme.

Zineb Bendhiba : Voilà ! Parce que la personne à qui elle s’adresse est une femme. C’est un gros biais parce que la personne devrait préparer son message pour le feed-back constructif – ce sont un peu des règles quand on fait des formations sur le feed-back. Si la personne est diverse, si elle n‘a pas l’habitude de parler à une personne de ce genre ou de cette culture, cette personne doit surtout réfléchir et se dire « si je dois faire le même discours à un homme blanc de l’équipe, prenons cet exemple, est-ce que je vais tenir le même discours ? ». En fait, de par mes propres biais, je pense que la personne ne dirait pas la même chose si c’était en homme en face. Si le message va être différent selon qu’on s’adresse à une femme ou à un homme c’est qu’on a un biais, qu’on doit faire l’exercice soi-même de se dire qu’on a biais et qu’il faut qu’on travaille dessus.
Il y a beaucoup d’autres exemples. Si on va dans un meeting ou dans une conférence qui est donnée par une femme et un homme, quand on a des questions est-ce qu’on ne va s’adresser forcément qu’à l’homme et pas à la femme ? Si on se trouve dans ce cas-là, se demander « est-ce que j’ai un biais ? ». C’est beaucoup travailler sur les biais et s’assurer de ne pas assumer les choses sur les genres de par les biais qu’on a soi-même de son enfance et de son vécu. Laisser les gens dire eux-mêmes ce qu’ils veulent faire comme évolution, quels projets ils voudraient faire, ne pas assumer à leur place et ne pas avoir une discussion qui soit différente envers un homme ou une femme. Ce sont les choses qui me marquent.
J’aime bien être dans des équipes où les gens assument que j’ai le niveau qu’il faut pour le poste. En général je m’assure, pendant les entretiens, que ça matche bien avec les managers, les décideurs que j’ai en entretien. Si, dans l’équipe, quelqu’un va prétendre, par ses biais, que mon niveau est très bas juste parce que je suis une femme, ça va me mettre mal à l’aise dans cette équipe. Si je reste longtemps dans une équipe c’est quand j’arrive, que tout le monde assume que je fais du mieux que je peux, que mon niveau est bien le bon et qu’on me fait confiance dès le début.

Frédéric Couchet : D’accord. Agnès, de ton côté ?

Agnès Crepet : Je décris un peu les difficultés que j’ai pu avoir. On va dire qu’au démarrage, à part cette expérience pro où j’avais beaucoup de filles autour de moi, celles qui sont parties en retraite au début des années 2000, après, quand il y a eu beaucoup moins de diversité, on va dire que ce sont les mêmes difficultés que plein de filles peuvent avoir dans un milieu quasi non mixte où il y a beaucoup d’hommes. Donc du sexisme, hélas, un peu ordinaire et qui ne va pas forcément, effectivement, convaincre les personnes nouvelles, qui arrivent dans ce métier-là, de rester.
Ça va de choses qui peuvent paraître plus ou moins anodines. Je donnais plein de formations sur Spring Framework open source et je me souviens être entrée dans des salles en demandant « c’est bien là la formation Spring ? » et les personnes me répondent « oui, d’ailleurs ce serait bien si vous pouviez nous apporter le café » alors que c’était moi qui donnais la formation ! J’ai plein d’exemples comme ça. Vous pouvez les prendre en rigolant, c’est ce que j’essaye de faire, mais c’est vrai qu’au bout d’un moment c’est un peu lassant. Il y a toujours cet effet, il faut montrer qu’on connaît, etc., et j’avoue que je suis un peu lassée de ça. Il y a peut-être une période de ma vie où je voulais montrer que je savais, maintenant j’ai plutôt tendance à déserter – je ne dis pas que c’est bien, je ne suis pas forcément fière de ça, mais je ne vais pas m’épuiser. On pourra parler, par exemple, du fait qu’on a fermé le slack public de Duchess ; si ça vous intéresse on pourra en parler.

Frédéric Couchet : Explique simplement ce qu’est un slack, s’il te plaît.

Agnès Crepet : Un slack c’est une plateforme de communication qui n’est pas libre, pour le coup. C’est une plateforme sur laquelle tu as des channels de communication sur différents sujets, par exemple on a une association avec Zibeb qui s’appelle Duchess, pour parler de différents sujets, soit d’emploi soit de conférences. Pour chaque thématique il y a un channel de communication, ça classe un peu les communications et ça fait vivre une communauté pour que les membres de cette communauté puissent échanger de manière asynchrone. Dans cette communauté on avait voulu être mixtes, c’est-à-dire que même si c’était une communauté de filles il y avait toujours eu l’ambition d’être mixtes, de dire oui à certains hommes. En fait, au bout d’un moment on s’est fait déborder, c’est-à-dire que les filles passaient plus de temps à expliquer pourquoi à certains mecs – pas la majorité des gars non plus – qui posaient toujours des questions un peu pénibles. Au bout d’un moment nous avons été lassées, vraiment ! On en a marre de passer plus de temps à expliquer à certains mecs pourquoi on a besoin de discuter de certains sujets qui sont potentiellement adressés plus aux filles.
C’est un peu mon statut aujourd’hui. Ce n’est pas que je veux pas me battre, mais je vais plus essayer me concentrer sur le fait de parler à des filles. J’ai quelques années d’expérience, avec Duchess on fait beaucoup de marrainage, le fait de proposer à des personnes arrivées plus récemment dans l’informatique de pouvoir discuter dans un endroit un peu safe et tout ça, je préfère me concentrer sur des actions comme ça que me battre dans des milieux où beaucoup d’hommes ne comprennent et ne comprendront jamais ! Aujourd’hui j’en suis un peu arrivée à ce stade.
Des évènements moins drôles aussi. Je me souviens avoir fait une conférence à Lyon, en 2007, qui s’appelle BlendWebMix – je ne mets pas en cause les organisateurs et organisatrices qui avaient été plus ou moins bien, on va dire qu’ils avaient essayé de bien réagir –, mais des masculinistes sont venus à cette conférence, se sont mis au fond de la salle, ont commencé à faire chier : chaque fois qu’il y avait une fille speaker ils commençaient à crier du fond de la salle « vous avez fait une politique de quotas, la speakerine est nulle ». Ce sont des évènements moins joyeux parce que là on parle plus d’attaque directement envers les filles. Je ne voyais pas ça il y a 20 ans, je le vois de manière un peu plus courante aujourd’hui en France, donc c’est un peu dommage.
J’essaye aussi de choisir mon milieu professionnel pour être confrontée à des gens qui sont agréables, en fait ça fait partie de mes choix. Je choisis mon environnement et je n’irai plus forcément m’épuiser à convaincre des hommes qui ne seront peut-être jamais convaincus.

Frédéric Couchet : D’accord. Avant de passer la parole à Anne-lise, je vais juste préciser que Duchess France est une association destinée à valoriser, à promouvoir les développeuses et les femmes avec des profils techniques. On en reparlera sans doute tout à l’heure. En tout cas on mettra toutes les références sur le site de l’émission sur libreavous.org.
Même question pour Anne-lise. Est-ce que Anne-lise est encore avec nous ? Il y a peut-être un délai. Elle s’est déconnectée. Je vous donne un petit peu les coulisses de l’émission. Zineb est avec moi au studio, Agnès et Anne-lise sont à distance avec un outil qui s’appelle Mumble, un outil d’audioconférence libre qui nous permet d’intervenir à distance. Anne-lise est en train de se reconnecter. On la laisse se reconnecter. Normalement on a récupéré Anne-lise. Même question pour toi. Je te laisse parler.

Anne-lise Martenot : Évidemment, je pense, comme beaucoup de femmes, puisqu’on parle depuis la France, en tout cas en France j’étais assez désespérée, depuis longtemps, du système patriarcal en place.
Quand j’ai commencé à contribuer à SPIP ma fille était petite, c’était en 2002, et les fois où je m’exprimais sur SPIP je m’exprimais en français neutre, c’est-à-dire que je passais pour un homme pour m’éviter des remarques ou quoi que ce soit, même si l’équipe de SPIP était très sympa, finalement je ne les avais jamais rencontrés. Quand je les ai rencontrés c’était assez drôle « ah tiens, c’est toi ! »
Il y a un moment où j’ai assumé d’être une femme, j’ai fait un peu mon coming out, c’est ce que j’ai raconté la dernière fois, j’ai dit « OK, j’assume mon genre, je suis une femme et ce serait bien que les autres femmes… » Et là, d’un côté je me suis ramassé une volée de bois vert et, de l’autre côté, énormément de soutien. Il y a quand même vraiment eu une prise de conscience à ce moment-là. J’ai fait une micro-conférence à Sud Web sur les représentations, les personnages, les icônes du Web, c’était une micro-conférence n’empêche que l’année suivante, à Sud Web, il y a eu autant de femmes conférencières invitées que de conférenciers. J’étais contente que mes petites piques aient été entendues, comme s’il fallait, tout d’un coup, faire que les gens ouvrent les yeux. Après, il y a des gens qui n’ouvriront jamais les yeux.
Il y a aussi le fait qu’on est dans un bain patriarcal et nous subissons nous-mêmes, en tant que femmes, ce bain patriarcal, en tout cas moi je le subis, parce que je vais avoir le syndrome d’imposture, je vais me sentir diminuée si je trouve que des gens sont meilleurs que moi. Je vais pouvoir prendre des projets en indépendante et les mener jusqu’au bout alors que si je suis confrontée à des hommes ça va être beaucoup plus difficile, mais c’est mon propre ressenti qui fait que je me diminue. Donc il y a vraiment un travail à faire là-dessus pour redonner confiance aux femmes, notamment quand elles sont plus jeunes, et leur dire que si, c’est possible.
Aujourd’hui je travaille beaucoup avec des femmes, que ce soit des graphistes ou avec des copines en SEO [Search Engine Optimization], en référencement, du coup on fait équipe parce que c’est très important de faire équipe et de ne pas être uniquement en indépendante. C’est un truc que je voulais souligner.
Dans les anecdotes il y a des trucs assez marrants. J’ai un client qui me demande si je peux le former au PHP pour qu’il puisse faire comme moi. C’est quelqu’un qui prend Dreamveawer, un logiciel spécial, pour faire du HTML. J’ai parfois le sentiment, ça me saute aux yeux, qu’on imagine que si une femme peut le faire alors soi aussi on peut le faire, on n’a pas besoin de formation. J’essaye de dire que c’est une professionnalisation, c’est un métier, ce sont des années de travail, pour moi ce sont 20 ans de travail, ça ne va pas s’apprendre en six mois. J’adore partager, j’adore montrer, j’adore vulgariser l’informatique, mais ce n’est pas parce que je suis une femme que tu vas pouvoir me remplacer dans mon travail.
Parfois, quand je contribuais, que j’avais en retour « si tu as déposé ta contribution sur le serveur c’est parce que tu avais besoin de notre aide ». C’est humiliant déjà parce que c’étaient des projets en production et on ne sait plus par quel bout prendre les choses. C’est vrai qu’on cherche plus des alliés qu’à combattre parce que, comme dit Agnès, on se fatigue, on se fatigue très vite. Donc maintenant oui, je cherche des alliés et j’essaye de continuer à intervenir chaque fois que quelque chose est de l’ordre du féminisme, c’est-à-dire de la nécessité que des femmes entrent à égalité avec les hommes dans des projets libres, de manière à ne pas baisser les bras. Des fois c’est dur parce que ça veut dire qu’après des gens vont se fâcher contre moi parce que je défends cette position et ils vont me refuser du travail. C’est le prix à payer, c’est aussi ce prix-là à payer quand on est une femme. Après, il faut aussi que je dise que je ne suis pas représentante des femmes. Voilà mon petit mot là-dessus.

Frédéric Couchet : Merci Anne-lise.
De toute façon ce qui est intéressant ce sont vos retours d’expérience qui sont différents mais qui se rejoignent sur certains points. Tout à l’heure on va reparler des alliés. Je relaierai une question qu’on a eue en introduction.
Suite à ton intervention, Anne-lise, j’avais une question pour Zineb et Agnès. Tu as parlé du syndrome d’imposture que tu as, cette impression de se penser pas suffisamment à la hauteur et de douter de soi en permanence. Zineb et Agnès, est-ce que vous avez eu aussi ou vous avez encore, toujours, ce syndrome d’imposture ? Zineb.

Zineb Bendhiba : Moi oui. J’ai l’impression que ce n’est pas rapport au fait que je suis femme, mais plus par rapport à la culture dans laquelle j’ai grandi et qu’on a mis la barre très haut sur mon niveau d’études. Ceci dit j’ai remarqué que du fait que je suis une femme dans la tech et qu’on me demande de montrer tout le temps que je…, ça n’a fait qu’aggraver les choses. Si je ne contribue pas dans le logiciel lire depuis des années, ce que j’avais dit dans mon intervention à Open Source Experience, c’est à cause de mon syndrome de l’imposteur. Je ne savais même pas, avant, que ça existait, c’est grâce à Duchess France que je l’ai appris, que je travaille dessus. J‘estime que je l’ai toujours aujourd’hui, je vis avec, des jours je l’ai et des jours non, du coup j’avance. En tout cas s’il y a quelque chose qu’on me propose de faire, que je veux absolument faire comme venir parler aujourd’hui ici, même si ça me fait peur je le fais, je vais avoir un petit stress avant. Il y a deux ans j’aurais dit non, ça ne va pas, je n’ai rien à apporter. En travaillant dessus, en entendant beaucoup de gens et en discutant, grâce aux communautés, avec beaucoup de personnes, je vois que beaucoup l’ont et ça me fait avancer. Effectivement oui, je connais et je vis avec.

Frédéric Couchet : D’accord. Et de ton côté Agnès.

Agnès Crepet : Je l’ai toujours chaque fois que je rejoins une conférence très tech. J’ai changé un petit peu de boulot, depuis que je bosse chez Fairphone je fais un petit peu plus de choses relatives au Linux Kernel, des choses que je ne connaissais pas il y a dix ans, il y a cinq ans même, et je découvre une communauté qui est encore plus masculine que celle où j’étais avant, avec un inconfort technique parce que je ne connaissais rien au Linux Kernel y a encore cinq ans, donc ça vient aussi de là aussi. Le fait d’être une fille ça n’aide pas, même moi qui ai 20 ans d’expérience, je n’ai pas l’impression que ces 20 ans d’expérience m’aident beaucoup là-dessus.
Un exemple récent tout con, un exemple très niche sur une pull request, peu importe ! De manière consciente je pense que je n’étais pas très à l’aise sur le fait de pousser un changement en open source. J’avais peur de subir du fait d’être une fille parce que je n’utilise pas de pseudo, bref !, on voit que je suis une fille, de par mon nom, quand je pousse quelque chose et je me suis vue demander à un collègue de pousser pour moi, alors que c’est débile, je dois pousser moi-même cette pull. Je me vois encore avoir ce genre de réflexion, disant « ce sera peut-être plus simple si Lucas pousse et pas moi ». Donc oui, j’ai toujours le syndrome de l’imposteur, 20 ans après je l’ai toujours !

Frédéric Couchet : Je vais juste préciser que quand tu parles de pousser, en gros c’est proposer une modification sur un projet libre ou autre. Peut-être que les gens qui nous écoutent ne connaissent pas cette terminologie et pourraient se demander ce que veut dire pousser. En gros c’est proposer une modification que ce soit un rajout de fonctionnalité ou corriger un bug.
Je vais relayer une question qu’il y a eu sur le salon web, la deuxième – Marie-Odile j’ai bien vu ta question et je la relaierai tout à l’heure. Étienne demande si vous avez le sentiment que sur le nombre de femmes qui travaillent dans les métiers de l’informatique il y a une proportion plus importante de femmes qui ont une conscience politique féministe que dans la société en général ou c’est à proportions équivalentes ? Est-ce que quelqu’un veut répondre à cette question. Agnès, vas-y.

Agnès Crepet : Je peux peut-être répondre de mon point de vue.
Je vais prendre l’exemple de Duchess. Je n’ai pas monté Duchess France, j’ai rejoint le groupe six mois après, j’étais très impliquée dans les milieux féministes et, bizarrement, je séparais ces deux mondes-là. Je me souviens que les filles qui l’ont monté et d’autres qui sont venues par ailleurs plus tard étaient plutôt – et je respecte ça, pas de souci – pas très politiquement ancrées dans le féminisme on va dire. On avait toujours toutes cette habitude de dire « on reste très inclusives, on est ouvert aux garçons », le mot féminisme faisait un peu peur, pas à moi mais à certaines de mes potes de Duchess. Dix ans après je trouve qu’on est vachement plus confortables à parler de féminisme, ce n’est plus un mot qui fait peur à certaines. Par exemple le fait de fermer ce fameux slack public dont je parlais tout à l’heure de Duchess : lisez le contenu des explications, il n’est pas radical mais quand même, il y a un propos un peu plus clair qu’avant. À l’heure actuelle je dirais que les communautés de filles ont moins de tabou sur le féminisme, je trouve que c’est moins le cas qu’il y a dix ans.

Frédéric Couchet : D’accord. Anne-lise ou Zineb vous voulez ajouter quelque chose ? Zineb.

Zineb Bendhiba : Ça ne va pas être une généralité mais juste mon expérience. Effectivement dans les communautés où je suis, où il y a des femmes soit des groupes qu’on a créés entre copines dans le logiciel libre ou via Duchess France, c’est très différent de mes potes en général, je vais voir beaucoup plus de féminisme. Sur le slack Duchess, on a carrément un channel féminisme où on va avoir beaucoup d’informations relayées.
Après c’est ma vision, je ne connais pas tous les milieux pour savoir, mais, de ma propre expérience, entre ma vie perso et mon côté communautaire, même si ce n’est pas forcément pendant mon temps de travail, communautaire dans ma vie pro, j’ai l’impression que dans ces groupes-là de femmes dans l’informatique ou de femmes dans l’informatique logiciel libre, il y a beaucoup plus de féministes. Même moi qui étais féministe depuis mon enfance, j’ai l’impression que ces dernières années j’ai beaucoup grandi grâce au fait que je suis dans ces communautés-là.

Frédéric Couchet : Anne-lise, est-ce que tu veux apporter quelque chose sur cette question ?

Anne-lise Martenot : Oui. Par rapport à ce que disait Agnès tout à l’heure, je pense que le féminisme est devenu une valeur dans le Libre on va dire. Quelqu’un qui sortira aujourd’hui des propos sexistes se fera plus rapidement rembarrer qu’il y a 10 ans ou il y a 20 ans. Ce n’était pas possible, il y avait tellement de choses à modifier que c’était difficile quand on était en minorité comme on l’est encore aujourd’hui. Maintenant c’est quand même devenu quelque chose d’acquis, en tout cas je parle toujours pour les alliés, et si quelqu’un dit une connerie ce seront les alliés masculins qui vont intervenir.
Après, quand on parle de diversité, la diversité de genre ce n’est pas seulement homme et femme, il y a non genré, il y a des bisexuels ou des transgenres, etc., bref ! C’est quand même assez large donc c’est aussi une demande d’ouverture qui est nécessaire parce que je pense que c’est social.
Pour répondre précisément à la question, je pense que quand on est une femme dans l’informatique ce n’est pas possible de ne pas prendre conscience de ça parce que c’est tellement violent que si on ne résiste pas en étant féministe on n’a plus qu’à plier bagage et repartir. J’ai l’impression qu’il faut quand même avoir une grande gueule !

Frédéric Couchet : Est-ce qu’il y a une évolution sur la prise de conscience de ces questions de genre dans le monde de l’informatique et du logiciel libre ces dernières années ? C’est mon impression, mais je sais pas quelle est l’impression que vous avez, si vous en avez une. Est-ce qu’il y a vraiment une prise de conscience de l’importance, notamment de la part des garçons de changer leur comportement, de faire des choses ?, que ce soit dans les projets libres ou dans les entreprises. Zineb.

Zineb Bendhiba : Déjà ce sont maintenant des sujets desquels on discute pas mal dans des conférences, dans des meetups. Si on voit les guides des projets open source [Open Source Guides], par exemple le site opensource.guide, je prends un peu au pif, vu que la communauté est au cœur de l’open source on va parler de l’importance d’avoir des communautés qui soient accueillantes, d’avoir un code de conduite et de pouvoir l’appliquer. Des fondations ont déjà mis ça en place, après ça va changer d’un projet à un autre. J’ai l’impression que c’est important pour une partie des gens.
Des fois des personnes vont faire un commentaire négatif s’ils arrivent dans une conférence où il n’y a que des hommes, je vais parler au sens large et pas forcément que dans l’open source. Des personnes sont maintenant sensibilisées et n’acceptent pas, en tant que participant, de participer à un évènement qui n’est pas mixte, où les genres ne sont pas représentés.
Maintenant, j’ai l’impression qu’une grande partie des gens reste toujours neutre. Peut-être que les gens sont d’accord, peut-être qu’ils ne sont pas d’accord, on ne sait pas, en tous les cas ils laissent les choses se faire. J’ai l’impression que même si ça avance il y a une grande majorité de personnes qui ne vont rien faire et qui se disent « je suis neutre, ce n’est pas mon problème ».

Frédéric Couchet : Je vais rebondir et après je laisserai la parole à Agnès et Anne-lise pour réagir. Est-ce qu’on peut rester neutre sur un tel sujet ?, ce n’est pas possible ! Si on reste neutre sur un tel sujet c’est que, de facto, on valide la situation actuelle ? Non ?

Zineb Bendhiba : Oui. Je ne sais pas si ça fait peur aux gens de se positionner sur ça. C’est à peu près ce qu’on avait dit sur le slack de Duchess. Il y a beaucoup d’hommes, on n’a pas de problèmes avec une majorité, on n’en a qu’avec une minorité, du coup ce sont les femmes, entre elles, qui vont répondre. Les autres vont peut-être se dire « ce n’est pas ma cause, je suis là parce que je suis pour la diversité », d’ailleurs je ne sais pas s’ils sont actifs ou pas, peut-être que c’est juste qu’ils n’étaient pas actifs, mais ces personnes ne vont pas prendre la défense d’autres personnes parce que, peut-être, ce n’est pas leur problème. J’ai l’impression qu’il y a une grande partie des gens qui est encore un peu neutre. En tous les cas pour moi, du fait que je suis dans Duchess, plus de personnes vont venir me voir dans les évènements. Des hommes vont venir dans des évènements et discuter diversité avec moi de par eux-mêmes, me dire qu’ils veulent faire des choses pour améliorer les choses dans leurs équipes et qu’ils voudraient en savoir un peu plus. Je ne sais pas si c’est juste parce qu’ils sont dans des communautés ; je ne sais pas ce que ça donne pour le reste du monde dans l’informatique, je ne sais pas si c’est juste une minorité ou pas.

Frédéric Couchet : D’accord.Agnès puis Anne-lise sur cette question de la prise de conscience de l’importance de faire quelque chose, est-ce que vous avez noté une évolution, d’ailleurs qu’elle soit positive ou négative ? Agnès.

Agnès Crepet : Je suis partie trois ans au pays-Bas, je suis revenue l’été dernier, il y a bientôt un an. J’étais assez optimiste quand j’étais aux Pays-Bas parce que ce n’est pas tout à fait la même culture, culture anglo-saxonne protestante, bref !, où il y a peut-être une prise de conscience un peu plus poussée, j’avais l’impression que le monde changeait dans le bon sens. Et puis je suis revenue en France, je me suis dit « eh bien non en fait ! » Je caricature, mais c’est un peu ça !
Je fais la distinction entre les deux, je trouve qu’aux Pays-Bas, même si tout n’est pas simple, j’ai l’impression qu’il y a quand même une prise de conscience qui est beaucoup plus forte. Dans la boîte dans laquelle je bosse, quand on poste une annonce de poste on se pose la question « est-ce qu’on n’irait pas parler avec des communautés qu’on a l’impression qu’on ne touche pas vraiment ». Récemment, par exemple, on voulait envoyer une offre de poste tech sur les communautés trans. Cette question de l’ouverture, en fait, et de l’effort à faire sur l’ouverture, sur comment on peut être plus divers. Alors qu’en revenant en France et en discutant dans des milieux dont on parle – je bosse en remote [en télétravail] pour Fairphone, je n’ai pas de milieu professionnel en France, mais je fréquente des évènements français –, il y a moins cette volonté, en tout cas je trouve, d’action, de remise en question de ce qu’on peut faire pour que ça change.
J’étais récemment à une conférence, on me posait la question « pour les Call for papers, jamais aucune fille ne propose des papiers, qu’est-ce qu’on peut faire ? ». Si on s’arrête à se dire qu’il n’y pas de filles qui proposent des sujets au Call for papers et si on dit « c’est comme ça, c’est dommage ! », c’est sûr que ça ne va pas faire grand-chose !
Je ne trouve pas que ça ait beaucoup changé ces dernières années, en France, sur la capacité des gens à s’interroger réellement sur ce qui pourrait changer. Par exemple, typiquement, ça peut passer par le fait de se réinterroger soi-même. Isabelle Collet cite tout le temps l’exemple de l’Université de Carnegie Mellon, à Pittsburgh, qui avait identifié 7 % de femmes dans sa filière d’informatique. Ils ont fait des sondages, ils sont allés voir des sociologues, ils se sont réinterrogés sur tout leur enseignement, ils ont donné des cours sur le genre, ils ont vraiment essayé de revoir tout leur processus de recrutement, etc., au bout de deux/trois ans ils sont arrivés à 40/45 % de filles. Bref ! Il y avait cette volonté de se réinterroger sur ses pratiques.
Je trouve qu’en France il y a vachement ce défaitisme, « c’est comme ça, ça ne s’arrange pas ! » Si on ne fait pas d’efforts pour aller chercher des personnes différentes rien ne changera. Je ne trouve pas la politique des quotas merveilleuse mais, en même temps, ça peut marcher à un moment donné. Je fais partie de l’organisation d’une conf qui s’appelle MixIt, on revendique le fait qu’on va chercher des filles, on le dit, ça peut ressembler à une politique de quotas parce que, volontairement, on va chercher des filles, eh bien on se fait encore défoncer. Il y a encore des gens qui nous disent : « Dis donc, à Mixit, la politique des quotas et tout ça », et je trouve ça un peu triste.

Frédéric Couchet : Je vais juste préciser que Call for papers ce sont des appels à conférences et MiXiT, tu vas me corriger si je fais une erreur, c’est à Toulouse, c’est ça ?

Agnès Crepet : Non c’est à Lyon. On vient de fêter nos dix ans il y 15 jours, une conférence tech et éthique sur Lyon.

Frédéric Couchet : À Lyon.
Touti, c’est son surnom, Anne-lise, sur cette question de l’évolution de la prise de conscience, cette question de genre ?

Anne-lise Martenot : Je partage beaucoup le point de vue d’Agnès. J’ai repris des études à 43 ans, j’ai fait Hypermédia à Paris 8, master 2, je suis partie à Sarajevo, j’ai tenté de faire le site du Musée national de Bosnie-Herzégovine, je suis revenue. Il y a un peu moins de 15 ans que j’ai passé ce master parce que, en fait, je voulais quitter la France parce que j’en avais marre de son patriarcat, j’en avais ras-le-bol d’avoir un plafond de verre à chaque fois. J’ai bossé dans des grosses boîtes, j’étais technicienne et, à partir du moment où j’ai eu un enfant, je n’allais pas être chef de projet, je n’avais plus le temps, on me le reprochait et si on ne me le reprochait pas c’était moi qui me le reprochais parce que les autres travaillaient 14 heures par jour, ce sont des boîtes où c’est l’ultra-libéralisme, ce sont des grosses boîtes de post-production cinéma, effets spéciaux, à chaque fois j’ai dû changer. J’étais vraiment fatiguée de ça, non pas que je voulais faire carrière, ce n’était pas ça qui m’intéressait, j’ai été longtemps RSA, etc., parce que j’ai suivi des projets libres, j’ai soutenu des projets politique où j’étais bénévole ou payée des cacahuètes. J’avoue que je voulais partir à Berlin ou à Montréal et c’est pour ça que j’ai repris des études. J’ai renoncé, je suis restée en France, mais aujourd’hui je ne vois pas d’amélioration, même avec #MeToo, etc.
Ce que je vois comme amélioration au niveau de SPIP, que je connais le mieux, c’est l’usage de l’écriture inclusive, qui est quand même un petit pas d’invitation aux femmes, considérer qu’il n’y a pas que des hommes, au moins ! Je trouve que le fait que tu nous invites c’est super, qu’il y ait un petit plus de visibilité pour les femmes et qu’on se questionne. On a l’impression que ce sera toujours aux femmes de trouver des solutions, mais ce n’est pas aux femmes de trouver des solutions parce que tout le monde profiterait qu’il y ait plus de femmes dans des boulots d’informatique, dans la structuration même.

Frédéric Couchet : J’ai une question presque finale, le temps passe très vite, et je précise vous l’avez peut-être remarqué, qu’on n’a pas fait de pause musicale contrairement à ce que j’avais dit.
Vous avez employé tout à l’heure le terme « allié », je relaie une question qu’on a eue en préparant l’émission, réponse courte si possible : quelles actions concrètes peuvent faire les garçons libristes pour que les femmes viennent dans leurs projets ? Est-ce qu’il y a une ou deux actions prioritaires ou des comportements qu’il faut avoir pour qu’effectivement les femmes libristes se sentent accueillies ? Comme tu avais la parole, Anne-lise, je te laisse déjà répondre sur cette partie-là en premier.

Anne-lise Martenot : Cette question me gêne vraiment parce que moi je n’ai pas à expliquer aux mecs ce qu’ils ont à faire ! Merde ! C’est comme si on disait aux chasseurs « on va t’expliquer, pose ton fusil mec ! ». Comment dire, la déconstruction masculine, s’intéresser, lire, regarder sur Internet ce que les femmes disent, de quoi les femmes se plaignent. Je ne sais pas ! Ça va élargir au-delà du Libre. De toutes les femmes de ma génération je n’en connais pas une qui n’ait pas été violée quand elle était enfant ! Ce n’est pas possible ! Tu apprends où le respect, comment, à l’école, par des publicités ? Il va falloir inventer des choses, mais c’est aussi aux mecs de trouver. Voilà !

Frédéric Couchet : D’accord. Cette réponse me va. En tant qu’homme j’en profite pour citer un podcast qui m’a beaucoup appris, qui s’appelle Les Couilles sur la table de Victoire Tuaillon. Il y en a d’autres qu’on citera peut-être à la fin.
Même question, et la réponse peut être la même, à Agnès et Zineb. Agnès.

Agnès Crepet : C’est rigolo que tu mentionnes Les Couilles sur la table parce que c’est vraiment dans la bouche de plein de garçons. Je pense que Victoire Tuaillon a eu une belle réussite là-dessus, inviter des garçons à s’intéresser à ça.
Je pense que le fait que vous nous invitiez aujourd’hui c’est typiquement le genre d’action qu’il faut faire.
Je pense aussi qu’il faut réinterroger les organes qui représentent un peu le milieu de l’informatique aujourd’hui en France, les conférences, les employeurs ; il faut revoir les process de recrutement, pourquoi pas jouer l’anonymat pour le genre, ce genre de choses qui pourraient faire changer énormément les pratiques. Et puis je pense qu’il y a énormément de choses à faire au niveau de l’éducation, primaire, collège, etc. ; énormément de choses sur les process de recrutement des filles sur les filières scientifiques. Je citais l’université qu’avait étudiée Isabelle Collet. Elle a aussi étudié une université norvégienne, qui s’appelle NTNU, qui a fait des quotas. Bref ! Je pense qu’au niveau éducation il y a aussi beaucoup de choses à faire. Concernant la nouvelle option informatique NSI, d’après les derniers papiers que j’ai lus dans Le Monde, le pourcentage de filles est très faible. Ça veut dire que dès le lycée on est déjà sur ds problématiques. Et ce qu’a fait Carnegie Mellon, la fameuse université de Pittsburgh, c’est qu’ils ont essayé, justement, sur la présentation de ce genre d’option, d’être le plus inclusifs possible et pas de jouer sur des termes techniques qui, de facto, vont pouvoir éliminer des gens qui sont potentiellement éloignés de la technique. Ils ont plutôt fait une présentation de leur option informatique en disant « si vous ne savez pas programmer c’est pour vous », parce qu’ils ont observé que beaucoup plus de garçons entre 14 et 15 ans avaient des bases de programmation, des bases de choses tech, parce qu’ils jouaient plus aux jeux vidéo, bref !, il y a plein de raisons à ça. Du coup ils ont changé leur présentation d’option en la rendant, quelque part, plus ouverte à des personnes qui n’ont pas de background, on parle de personnes de 14/15/16 ans, 18 ans, de jeunes personnes. Typiquement ce serait super. Il faut réinterroger ces process.

Frédéric Couchet : D’accord. Je vais juste préciser que NSI veut dire Numérique et sciences informatiques,si je me souviens bien.
Zineb, toujours la même question.

Zineb Bendhiba : Je n’ai pas de recette miracle.
Il n’y a pas peut-être pas assez de femmes au niveau senior, mais déjà, je dirais, réduire la barre pour l’entrée dans des sociétés comme la mienne qui recrutent des gens dans l’open source. J’ai déjà vu, dans le passé, des offres de certaines sociétés avec des petites étoiles qui disaient que si on n’était pas contributeur ou contributrice ça ne servait à rien de postuler. Du coup, ça ferme un petit peu pour avoir plus de diversité. Je n’étais pas une contributrice pourtant je suis arrivée avec un niveau senior dans mon projet, dans ma boîte, pour travailler dans l’open source, parce que même si je ne contribuais j’ai quand même 12 ans d’expérience, j’ai quelque chose à apporter, j’ai un point de vue qui est divers, je suis différente des autres et j’apporte quelque chose à l’équipe.
On a certains projets, mon projet, mais beaucoup de projets qui vont participer à des programmes de stage du style Outreachy pour avoir des jeunes stagiaires issus des milieux qui sont sous-représentés.
Pour les sociétés qui utilisent l’open source et qui ne contribuent pas, encourager les gens à contribuer sur le temps de veille. Ça permettra déjà à ces sociétés de redonner un petit peu à ces logiciels libres qu’elles utilisent souvent gratuitement, mais ça permettra aussi de faire monter en compétences les personnes qui travaillent dans leurs équipes parce que si elles contribuent dans le projet elles apprendront encore plus sur les librairies qu’elles utilisent.
Ne pas hésiter, des fois, à se poser la question : a-t-on vraiment besoin d’une personne qui a 20 ans d’expérience ? Ne pourrait-on pas prendre une personne junior et la former ? Il y a beaucoup de femmes juniors, mais surtout, ces dernières années, on a vu beaucoup de femmes en reconversion qui ont du mal de trouver un travail. Si vous êtes des leaders techniques c’est peut-être aussi une façon de ramener ces personnes-là sur vos projets et, si vous êtes sur des projets open source, ne pas prendre forcément bac + 5 parce qu’il y a de place pour tout le monde dans l’open source et dans l’informatique.
Et surtout, le plus important. Nous, les femmes, sommes minoritaires et c’est souvent nous qui prenons de notre temps personnel pour aller essayer de chercher des femmes, etc. Nous ne pouvons pas faire ça tout le temps, toute l’année, parce qu’on a aussi nos projets persos et pros et on ne peut pas, toute l’année, tout le temps, à tous les moments, essayer d’aller chercher d’autres personnes, de les mentorer. C’est un peu le travail de tout le monde de prendre sur son temps pour travailler sur la diversité dans les projets, pour mentorer des juniors sur leurs projets, etc. Ce ne sont pas les femmes, qui sont en minorité, qui doivent faire ça tout le temps. C’est un peu mon petit point.

Frédéric Couchet : D’accord. Dernière question pour chacune d’entre vous, je vais regrouper deux questions, on va déborder un peu mais ce n’est pas très grave. En moins de deux minutes chacune, à la fois si vous avez des conseils de lecture, des annonces à faire ou autre et surtout quels sont, selon vous, les éléments clefs à retenir de cet échange ? On va commencer par Anne-lise Martenot.

Anne-lise Martenot : On parlait de diversité, diversité de genre mais ça peut être diversité sociale ou culturelle. C’est aussi pas mal important.
Concernant les femmes, oui il y avait beaucoup de femmes dans les années 80 en informatique. C’est quelque chose qui peut changer, ce sont des espaces de pouvoir à repartager. Comme dit Zineb, toute personne, de tout niveau, peut effectivement participer ne serait-ce qu’en remontant des bugs ou des problèmes qu’il y a à utiliser un logiciel. La participation au Libre est ouverte à toutes et à tous.

Frédéric Couchet : Super. Agnès Crepet.

Agnès Crepet : Ce que je retiens c’est qu’on a touché des points qui dépassent l’informatique. J’ai bien aimé le fait de dire que l’informatique est aussi systémique, on a parlé de patriarcat et l’avancée de la prise en compte de ces problématiques au niveau du système, donc de l’environnement de la cité, quelque part, ça sera peut-être clef par rapport à la diversité dans l’IT [Information Technology]. On n’avancera que si le reste avance. Je suis courte !

Frédéric Couchet : Très bien. Merci Agnès. Zineb Bendhiba.

Zineb Bendhiba : Essayer d’avoir une safe place pour tout le monde dans l’informatique, que tout le monde ait sa place dans l’informatique.
La seule chose dont on n’a pas parlé, si jamais on a des auditeurs ou auditrices qui ne sont pas encore dans le logiciel libre, qu’ils et elles n’hésitent pas à faire leurs premières contributions et, si vous êtes une femme, n’hésitez pas à venir nous voir à l’association Duchess France si vous avez besoin d’être mentorée ou aidée pour votre première contribution. J’espère qu’on aura plus de femmes dans le logiciel libre !

Frédéric Couchet : Nous l’espérons aussi. Un nom a été souvent cité, notamment par Agnès, celui d’Isabelle Collet. Je rappelle que la semaine prochaine, mardi 14 juin 2022, nous recevrons Isabelle Collet qui est informaticienne, enseignante-chercheuse à l’université de Genève, spécialiste de cette question, qui sera en compagnie de Stefano Zacchiroli qui est professeur à Télécom Paris et qui vient récemment de publier une étude sur l’évolution de la diversité de genre dans le monde du logiciel libre, les fameux 10 %, dont on a parlé tout à l’heure, c’est dans l’étude de Stefano. La semaine prochaine nous continuerons à parler de ce sujet avec Isabelle Collet et Stefano Zacchiroli.
En tout cas c’était un grand plaisir de vous avoir et peut-être qu’on pourra poursuivre cette conversation dans une prochaine émission. J’ai été ravi que vous soyez là, Zineb Bendhiba qui est ingénieur logiciel libre chez RedHat, Agnès Crepet qui est responsable de l’informatique et de la longévité logicielle chez Fairphone et qui est déjà intervenue dans l’émission et Anne-lise Martenot, indépendante libriste, qui participe au projet SPIP et qui est aussi déjà intervenue dans l’émission pour parler de SPIP. Vous retrouverez toutes les informations sur le site Libreavous.org.
Je souhaite à toutes de passer une belle fin de journée et à bientôt.

Agnès Crepet : Merci.

Zineb Bendhiba : Au revoir.

Anne-lise Martenot : À bientôt. Merci.

Frédéric Couchet : Merci Anne-lise.
Exceptionnellement on ne va pas faire de pause musicale. On va enchaîner directement par le sujet d’après.

[Virgule musicale]

La pituite de Luk, chronique intitulée Errare humanum est, perseverare diabolicum

Frédéric Couchet : Nous allons poursuivre par la chronique de Luk. La pituite de Luk est une chronique rafraîchissante, au bon goût exemplaire, qui éveille l’esprit et développe la libido. Il a été prouvé scientifiquement qu’écouter la pituite augmente le pouvoir de séduction, augmente le succès dans les affaires ou aux examens et décuple le sex-appeal, retour de l’être aimé, il reviendra manger dans votre main comme un petit chien. Ce texte n’est absolument pas de moi, c’est la description choisie par Luk.
Le titre de la chronique du jour de Luk est Errare humanum est, perseverare diabolicum, « L’erreur est humaine, persévérer dans son erreur est diabolique ». On l’écoute et on se retrouve dans 3 minutes 30.

[Virgule sonore]

Luk : Errare humanum est, perseverare diabolicum, comme disent les gens qui essaient de se convaincre qu’ils n’ont pas perdu leur temps à apprendre une langue morte. Ça se traduirait par « L’erreur est humaine mais persévérer dans l’erreur est diabolique ». Existe-t-il une antique maxime, en latin, en grec ou en Cobol qui parle de ceux qui constatent les erreurs ? Car constater ça chez les autres génère chez moi des sentiments pas toujours très nobles. Par contre, quand c’est moi qui me goure, c’est parce que je suis sympathiquement distrait ou que c’était piégeux. Forcément !
Nous avons tous tendance à voir la paille dans l’œil de la poutre de l’hôpital mais pas dans celle de la charité. Finalement le diable habite peut-être celui qui constate l’erreur plutôt que celui qui la commet. Donc si on a l’ambition de devenir de meilleures personnes, il faut savoir dire à quelqu’un qu’il se fourvoie en se défaisant de ses mauvaises dispositions. Mais comment faire ? Récemment, j’ai échoué deux fois.
La première fois dans mon RER quotidien où j’ai constaté qu’au premier jour de levée du masque obligatoire des gens continuaient à le porter sous le nez. Avant je pensais qu’ils étaient irresponsables et égoïstes mais là j’ai senti l’influence diabolique pointer son nez. Quelle meilleure explication qu’une rigoureuse stupidité à leur comportement insupportablement irrationnel ? J’ai préféré garder le silence plutôt que leur dire à quel point je les trouvais cons.
La seconde fois, ensuite, quand je suis descendu dans le hall d’accueil de mon boulot et que j’ai vu un mec assis sur un pouf. Il exhibait un magnifique plombier. J’avais envie de lui dire, pour son propre bien, qu’offrir son postérieur à la vue de ses pairs était une méthode de socialisation qui marche bien chez les babouins, mais beaucoup moins chez les costards cravates. J’aurais pu lui sortir, d’un air entendu, un message codé du genre « le vent souffle dans la rue du quai », mais pas sûr qu’il aurait capté. Encore une fois j’ai renoncé, je l’ai laissé exhiber sa raie.

En lisant la presse je constate que le reste du monde ne fait pas nécessairement mieux que moi. Par exemple certains se lancent dans des procès. C’est le cas d’Anticor qui s’attaque aux appels d’offre sur mesure pour Microsoft ou de certains actionnaires d’Amazon qui font un procès à la boîte pour contester ses projets de reconnaissance faciale. OK, un procès est dépassionné et objectivé par le cadre juridique mais bon !, il s’adresse généralement à quelqu’un qui ne fait pas d’erreur si on le considère dans son référentiel malfaisant. Ça reste très hostile pour faire admettre à quelqu’un qu’il se fourvoie ; il risque de se braquer.

L’inaction serait une autre façon de faire. Aux US, la remise en cause de l’avortement au niveau fédéral semble inéluctable, mais des discussions portent sur l’autorisation à utiliser les données personnelles pour traquer les femmes qui organiseront leur avortement dans un État voisin. Maintenant que les choses tournent suffisamment mal, l’hostilité de la critique est globalement plus faible que l’hostilité de la situation. Et puis ça permet de placer un petit « je te l’avais bien dit » mesquin qui fait toujours plaisir, mais voilà !, à quoi bon signaler une erreur si ce signalement est entendu trop tard.

Mais c’est sur Mastodon que j’ai découvert l’exploitation la plus brillante et la plus pragmatique de ce principe. Une personne expliquait que quand elle posait une question sur un forum quelconque d’informatique, elle se reconnectait avec un « Alt » pour répondre quelque chose d’insupportablement faux à sa propre question. Excellente manœuvre qui motive des gens, qui n’auraient pas bougé le petit doigt sur leur clavier autrement, à se démener pour corriger cette personne qui a tort sur Internet. Mais au final, il n’y a pas de correction puisque l’erreur est volontaire.

L’espoir vient peut-être du journaliste Steven J. Vaughan-Nichols qui explique, dans une chronique, que tous les leaders de l’open source ne sont pas des connards. Il précise même que ce sont des Bisounours comparés à de nombreux leaders du propriétaire. Pour lui, parce qu’ils doivent composer avec des contributeurs plutôt que de se payer des développeurs ou des concurrents, ils ne peuvent pas être aussi détestables que leurs homologues du privateur. Il affirme que les codes de conduite, malgré toutes les accusations d’être le cheval de Troie des social justice warriors, ont des effets bénéfiques. Même Torvalds, réputé être le connard en chef de l’open source, s’est remis en cause.
Je ne suis qu’à demi consolé à l’idée que les open-sourcistes ne soient que moins pires que les autres mais au moins voilà une petite lumière au bout du tunnel.

[Virgule sonore]

Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter la chronique de Luk intitulée Errare humanum est, perseverare diabolicum, « L’erreur est humaine, persévérer dans son erreur est diabolique ». Nous espérons évidemment retrouver Luk dans sa prochaine chronique en juin et à la rentrée pour la saison 6 de Libre à vous !
Nous approchons de la fin de l’émission, nous allons terminer par quelques annonces.

[Virgule musicale]

Quoi de Libre ? Actualités et annonces concernant l’April et le monde du Libre

Frédéric Couchet : Vous écoutez notre émission Libre à vous !, évidemment parce que vous êtes à l’écoute actuellement et peut-être d’autres émissions diffusées sur la radio Cause Commune. Vous voulez découvrir les visages derrière les micros ? Faire plus ample connaissance, échanger, découvrir le studio ? Venez participer l’apéro Cause Commune qui aura lieu vendredi 10 juin 2022 à partir de 19 heures au studio de la radio, au 22 rue Bernard Dimey, 75 018 Paris. L’apéro est ouvert à toute personne qui souhaite venir et la présence d’auditrices et d’auditeurs nous ferait chaud au cœur. Pour faciliter l’organisation de cet apéro, vous pouvez vous inscrire sur le bloc-notes qui est indiqué sur le site de la radio, causecommune.fm.
Tant qu’on est dans les aspects festifs, l’April fête ses 25 ans et nous organisons, proposons divers pique-niques. Il y a déjà eu un pique-nique à Montpellier samedi 4 juin et il y aura un pique-nique à Saint-Denis samedi 11 juin midi, Saint-Denis dans le 93, un pique-nique à Beauvais le 2 juillet et il y en aura un à Marseille, je n’ai pas noté la date, mais ça doit être le 19 juin. En tout cas vous allez sur le site april.org, vous retrouvez toutes les informations pour participer à ces pique-niques qui sont évidemment ouverts à toute personne. Que vous soyez, ou pas, membre de l’April, vous êtes les bienvenus.
À Nantes, cette fin de semaine, du 10 au 12 juin 2022, il y a la conférence State of the Map France. Des contributrices, contributeurs, utilisateurs, utilisatrices, représentants et représentantes de collectivités et d’entreprises gravitant autour du Web et de l’information géographique, mais aussi des personnes curieuses de découvrir cette « carte libre du monde » que représente OSM, se retrouveront pour partager leurs expériences, se tenir informé, se former, découvrir l’écosystème et les multiples applications – existantes ou à imaginer – autour d’OpenStreetMap. On a déjà parlé deux fois d’OpenStreetMap dans les émissions 29 et 37 de Libre à vous !, vous retrouverez podcasts et transcriptions sur libreavous.org/29 et libreavous.org#37.
Ce week-end, le 12 juin, c’est le premier tour des élections législatives et nous proposons aux candidats et candidates de signer le Pacte du logiciel libre pour montrer leur engagement envers les libertés informatiques. Vous retrouverez tous les informations sur le site candidats.fr. Si vous voulez contacter des candidats et des candidates pour leur proposer de signer le Pacte du logiciel libre, n’hésitez pas. Je vous rappelle que c’est le 12 et le 19 juin 2022.

Notre émission se termine.

Je remercie les personnes qui ont participé à l’émission du jour : Agnès Crepet, Zineb Bendhiba, Anne-lise Martenot, Luk.
L’émission a été mise en ondes par Étienne Gonnu.
Merci également aux personnes qui s’occupent de la post-production et de la découpe des podcasts : Samuel Aubert, Élodie Déniel-Girodon, Lang1, Quentin Gibeaux, bénévoles à l’April, et Olivier Grieco, le directeur d’antenne de la radio que vous rencontrerez vendredi 10 juin si vous venez, eh oui !

Vous trouverez sur notre site web, libreavous.org, toutes les références utiles, ainsi que sur le site de la radio, causecommune.fm.
N’hésitez pas à nous faire des retours pour indiquer ce qui vous a plu mais aussi des points d’amélioration. Vous pouvez également nous poser toute question et nous y répondons directement ou lors d’une prochaine émission.Toutes vos remarques et question sont les bienvenues à l’adresse contact chez libreavous.org.

Nous vous remercions d’avoir écouté l’émission. Si vous avez aimé cette émission, n’hésitez pas à en parler le plus possible autour de vous et à faire connaître également la radio Cause Commune, la voix des possibles.

La prochaine émission aura lieu en direct mardi 14 juin 2022 à 15 heures 30. Notre sujet principal portera de nouveau sur la diversité de genre dans le logiciel libre avec Isabelle Collet et Stefano Zacchiroli.

Nous vous souhaitons de passer une belle fin de journée. N’oubliez pas, apéro Cause Commune vendredi 10 juin à partir de 19 heures au 22 rue Bernard Dimey Paris 18e. Cela nous ferait réellement chaud au cœur que vous participiez à cet apéro. Toutes les infos sur le site causecommune.fm.

On se retrouve en direct mardi 14 juin à 15 heures 30 ou en podcast où vous voulez, quand vous voulez, comme vous voulez. À très vite dans vos oreilles et d’ici là, portez-vous bien !

Générique de fin d’émission : Wesh Tone par Realaze.