Émission Libre à vous ! diffusée mardi 8 février 2022 sur radio Cause Commune


Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Isabella Vanni : Bonjour à toutes. Bonjour à tous.
Le sujet principal de l’émission d’aujourd’hui portera sur l’auto-hébergement. Avec également au programme la chronique « Que libérer d’autre que du logiciel » avec l’association Antanak sur le thème « apprentissages et appropriations » et aussi la chronique « Jouons collectif » de Vincent Calame, bénévole à l’April sur le thème « La chasse aux dépendances ».
Nous allons parler de tout cela dans l’émission du jour.

Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de Libre à vous !, l’émission qui vous raconte les libertés informatiques, proposée par l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.
Je suis Isabella Vanni, coordinatrice vie associative et responsable projets à l’April.

Le site web de l’émission est libreavous.org. Vous pouvez y trouver une page consacrée à l’émission du jour avec tous les liens et références utiles et également les moyens de nous contacter. N’hésitez pas à nous faire des retours ou à nous poser toute question.

Nous sommes mardi 8 février 2022, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.
À la réalisation de l’émission aujourd’hui mon collègue Frédéric Couchet. Bonjour Fred.

Fréric Couchet : Bonjour Isa. Belle émission à vous.

Isabella Vanni : Merci. Nous vous souhaitons une excellente écoute.

[Jingle]

Chronique « Que libérer d’autre que du logiciel » avec Antanak, sur le thème « Apprentissages et appropriations »

Isabella Vanni : Nous allons commencer par la chronique « Que libérer d’autre que du logiciel » avec l’association Antanak. Isabelle Carrère est au studio avec moi et elle nous parlera « Apprentissages et appropriations » par les personnes qui s’adressent à Antanak pour libérer leur informatique.
Bonjour Isabelle, à toi.

Isabelle Carrère : Bonjour Isabella. Merci beaucoup.
Je ne sais pas si c’est trop tard, je ne peux plus dire bonne année aux auditeurs et auditrices de Libre à vous ! ? Si je peux quand même ! On n’est plus en janvier, je n’ai pas pu venir la dernière fois en janvier, du coup je le dis quand même, tous mes vœux à tous et toutes pour beaucoup de bonheur libre.
Pour ce mois de février.
Depuis septembre, mais avec encore plus d’occurrences depuis janvier, on a relancé à Antanak nos ateliers de partage animés par des membres actifs et actives de l’association.
Les uns sont consacrés aux bases de l’utilisation d’un ordinateur, non seulement manuelles si j’ose dire, le maniement du clavier, de la souris, etc., mais aussi les rôles et raisons d’être des extensions des fichiers, les menus déroulants, les icônes, etc. ; tout cela n’est pas du tout évident pour des tas de gens.
D’autres ateliers sont dédiés au traitement de texte, sur LibreOffice Writer bien entendu, parce que tout le monde a besoin, à un moment ou à un autre, d’écrire un texte, un courrier, une réponse à quelque chose, une lettre de « démotivation », ah ! Ah !
Pendant les autres ateliers on travaille sur la navigation sur Internet. C’est souvent le sujet que je pratique, que j’anime, j’aime bien ça.
Pour le moment on n’a pas encore repris les ateliers plus spécialisés, on ne peut pas tout faire ! On espère pouvoir y revenir bientôt, par exemple l’utilisation de Tor ou de tel ou tel autre logiciel. Pour le moment on n‘a pas encore pu reprogrammer ça, mais ça va venir.
En tout cas, à chaque fois, ce sont sept ou huit personnes qui viennent et il y à peu près un ou deux ateliers par semaine en ce moment, c’est plutôt pas mal ! C’est assez compliqué de faire des groupes homogènes en termes de connaissances acquises, mais on se débrouille.

Je reste toujours assez surprise, malgré tout, et c‘est ça que je voulais partager un peu avec vous aujourd’hui, de ce que la curiosité, même si elle n’est pas immédiatement présente, est finalement assez simple à développer à condition de poser les bonnes questions. Mais si on ne démarre pas avec des questions là-dessus, il y a quand même une grande soumission – pardon, je ne trouve pas d’autre terme pour ça –, je veux dire que chaque personne qui vient vers nous se contente majoritairement de ce qui est proposé sur son téléphone ou sur les postes en libre accès, libre service ailleurs, dans les cybercafés, etc. Du coup, quand j’introduis des points comme qu’est-ce qu’un serveur ? Où sont vos données ? Quand vous écrivez un courriel où est-il ? Qui développe les logiciels et applications qu’on utilise ? Qu’est-ce que c’est qu’un moteur de recherche ?, etc., il y a de grands silences !
Je trouve que l’éducation populaire, en matière de numérique, n’est pas assez dynamique. En fait, on prend ce qu’il y a, on clique là où il faut cliquer, là où on a dit de cliquer, de ce fait on est immédiatement pris dans les filets des GAFAM ou autres sans trop se poser de questions. En fait, pour se poser des questions, il faut un minimum d’assurance, d’abord sur le droit qu’on a de les poser et il faut sans doute en avoir sinon l’habitude du moins y avoir accès, intellectuellement certes, mais aussi de manière très politique, c’est-à-dire une possibilité d’interroger les réalités dans lesquelles on se trouve. Et là je me demande quels sont les liens, s’il en est, entre ces façons d’être au monde et la vulnérabilité. Est-ce que c’est une résistance passive dont il est question ? Quelque chose qui dirait « vous me voulez là, OK ! J‘y serai, mais dans une certaine limite, jusqu’à un certain point ».
Auquel cas si on est face à ça ou même dans une résistance passive, on se doit, je me dois moi, en animant des ateliers, de le respecter et je ne peux que lancer des perches, des billes de connaissance que les personnes attraperont ou pas, qu’elles pourront intégrer ou pas dans leurs approches, en tout cas sans mépris de notre part, sans paternalisme, sans protectionnisme et sans jugement. Ce n’est pas si simple à mettre en œuvre dans l’éducation populaire, de proposer sans imposer, de montrer ou de nommer sans assommer.
Je vais prendre un exemple très concret et d’actualité. Les lois qui sortent actuellement sur des outils numériques se basent désormais sur une modalité de consentement à priori. Celle sur l’ouverture et la gestion d’un espace santé par exemple. Elle est passée en catimini en août dernier, 2021, à l’Assemblée. Le texte est assez clair pour peu qu’on s’y attarde un peu, ce que j’ai fait. Le dossier médical partagé, DMP, avait été lancé avec une autre modalité puisque là il fallait demander à ce qu’il soit ouvert et ensuite utilisé par les professionnels de santé. Mais, il n’y a eu que, je crois, j’ai vu un chiffre comme dix millions, je ne sais pas s’il est juste, de demandes d’ouverture et ça ce n’était pas assez pour les tenants du tout numérique. Alors a été inventé l’espace santé !
L‘espace santé est prévu pour être ouvert pour chaque personne, par avance, par un opérateur commandité par l’assurance maladie et il est alimenté par toutes les données de santé individuelles, personnelles, que connaissent les services : assurance maladie, j’imagine complémentaire santé, peut-être les pharmacies, les médecins, les assurances, les hôpitaux, je ne sais pas. En tout cas la grande différence c’est que cette fois-ci il sera ouvert pour tout le monde et seul le refus acté, le geste administratif posé de dire « non, je ne veux pas », peut empêcher cela. Mais qui en parle ? Peu de monde ! Il y a eu un ou deux articles de-ci de-là, une petite annonce mais comme une publicité de l’assurance maladie plutôt dans une radio, etc. Pourtant la loi est d’actualité à compter du premier janvier de cette année.
Selon les textes, l’assurance maladie doit envoyer à chacun/chacune un code provisoire pour s’y connecter et/ou pour refuser qu’il soit existant. En fait on peut aussi anticiper et faire dès maintenant, même sans réception d’un courrier, la démarche de refuser que cet espace soit ouvert. On est plusieurs à l’avoir fait. Il faut avoir une carte vitale avec une photo, le nouveau format de la carte vitale. Mais, pour ça, il faut être au courant de cette affaire ! Avoir donné à l’assurance maladie, via Ameli, une boîte courriel correcte, s’y connecter, ou bien une adresse postale valide, etc. Et puis, il faut savoir qu’à la réception de ce code on a six semaines pour bouger.
Tout ça pour dire que les personnes que nous voyons venir à nos ateliers, toutes celles qui viennent notamment aussi aux permanences des écrivains numériques publics, ne font pas spécialement attention ni aux courriels reçus ni même à ce type d’information. Même si une ou un assistant social a créé une adresse, parfois l’identifiant et le mot de passe pour y accéder ne sont pas connus des personnes. Alors vous imaginez bien que si un code arrive, les six semaines vont largement être dépassées !
En même temps, ce n’est surtout pas à nous de dire « va vite refuser ton espace santé ! ». On ne va pas jouer le même jeu d’imposition en force. La démarche dure très longtemps pour pouvoir partager les enjeux.
Pour moi l’éducation populaire est là aussi, elle est à la fois d’expliquer, d’apporter des connaissances, des choses, mais aussi de pouvoir donner des façons de réfléchir et de faire des choix avec discernement.
Quand j’explique des choses de cette nature dans des ateliers, que je pose la question à chaque personne, en fait il n’y a pas la moitié des gens qui voient ce dont je parle ! Et tous les termes utilisés – un espace personnel, un espace santé, un identifiant, un code provisoire, etc. – sont faits, si ce n’est pour faire peur et perdre la moitié des gens, du moins pour cloisonner, empêcher quand même un accès un peu simple.
Chaque site, chaque administration, chaque vendeur de quelque chose vous fait ouvrir un espace ! En fait, de l’espace il n’y en a pas ! En tout cas pas un espace très joyeux, ni maîtrisé, avec lequel on peut faire quelque chose. Tout est fait pour que les personnes suivent le mouvement, fassent ce qu’on leur dit, au moment où on le leur dit et même considèrent que c’est bon, que c’est bien, voire que c’est pour leur bien et que les experts qui ont inventé tout ça le font évidemment pour de bonnes raisons. C’est très difficile de faire bouger ce type de mentalité et ce n’est pas une question d’intelligence, c’est vraiment une question d’éducation.
Les ateliers que nous animons ont aussi cela pour ambition, ça va de pair pour nous avec la pratique et l’utilisation des logiciels libres, ces ouvertures sur le droit à interroger, s’interroger sur ce avec quoi on est d’accord et sur les enjeux sous-tendus par ces choix. Mais hou, là, là, il y a du boulot !

Isabella Vanni : Merci Isabelle pour cette belle chronique qui nous donne un aperçu très concret. On avait l’impression d’être avec toi aux ateliers, de voir ce qui peut se passer dans un atelier à Antanak. Mon collègue Fred, sur le salon de webchat parlait de dictature de la commodité, en quelque sorte, quand tu parlais, au début, « on fait les choses comme ça, on dit « va là » et on va où on nous dit d’aller. »

Isabelle Carrère : C’est pratique !

Isabella Vanni : C’est pratique ! Merci à Antanak qui fait cet exercice très difficile de proposer sans imposer, exercice très difficile mais aussi très enrichissant, indispensable et enrichissant qui est finalement l’exercice typique de l’éducation populaire.
Merci vraiment pour cette belle chronique et je te dis au mois prochain.

Isabelle Carrère : Oui, au mois prochain. Merci beaucoup.

Isabella Vanni : Merci.
Nous allons maintenant faire une pause musicale.

[Virgule musicale]

Isabella Vanni : Pour cette première pause musicale, je vous propose un titre de SolOrkestar. Il fait partie de la AMMD, une association d’artistes qui publient leurs œuvres sous des licences libres, basée en Sartre. Nous avons déjà diffusé plusieurs titres d’artistes de la AMMD pendant notre émission et j’ai même consacré une chronique « Le libre fait sa comm’ » à cette association en décembre dernier, c’était l’émission 126.
Derrière le projet SolOrkestar il y a un musicien passionné de musique des Balkans qui fait rencontrer avec la technologie du Live Lopping. Qu’est-ce que c‘est ? En gros l’artiste enregistre en direct sur scène des phrases musicales à l’aide d’une machine qui s’appelle Looper et cette machine permet de reproduire la boucle, d’en arrêter ou d’en redémarrer la lecture de la séquence au besoin. Pendant que la boucle tourne, eh bien le musicien est libre de jouer d’un autre instrument. De cette façon, il devient capable de s’accompagner lui-même.
Avec SolOrkestar les phrases musicales se construisent, s’harmonisent en direct, et un orchestre invisible se met peu à peu en place, exhumant des thèmes traditionnels de la culture roumaine et tzigane. C’est un extrait du site de l’artiste.

Après la pause musicale nous entendrons une rediffusion du sujet principal de l’émission Libre à vous ! diffusée en direct le 8 juin 2021 consacrée à l’auto-hébergement.
Nous allons donc écouter Laika în pădure par SolOrkestar et on se retrouve dans quelques minutes. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Laika în pădure par SolOrkestar.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Isabella Vanni : Nous venons d’écouter Laika în pădure par SolOrkestar disponible sous licence Art Libre. À la fin du morceau vous avez entendu un bruit de chariot. En fait l’artiste se déplace sur sa charrette. L’artiste s’appelle Nicolas Fournier et, pour son projet SolOrkestaril, il prend le nom de l’étrange Vlad Lăutarescu. Comme vous l’avez entendu il passe d’un instrument à l’autre. Aux commandes pour SolOrkestar, Vlad s’éprend de liberté, multipliant les improvisations au caval, violon et clarinette des Balkans, revisitant la musique de ses ancêtres d’une façon personnelle et excentrique. Si vous avez aimé cet artiste, sachez que les concerts reprennent à partir de fin avril 2022 dans plusieurs endroits en France. N’hésitez pas à consulter ce site.

[Jingle]

Isabella Vanni : Passons maintenant au sujet suivant.

[Virgule musicale]

L’auto-hébergement. Rediffusion du sujet principal de l’émission Libre à vous ! n° 109 du 8 juin 2021

Isabella Vanni : Nous allons poursuivre par notre sujet principal qui porte aujourd’hui sur l’auto-hébergement. C’est une rediffusion d’un sujet diffusé en direct lors de l’émission du 8 juin 2021. Je propose d’écouter ce sujet et on se retrouve juste après.

[Virgule sonore]

Isabella Vanni : Nous allons poursuivre par notre sujet principal qui porte sur l’auto-hébergement avec nos personnes invitées : Angie Gaudion de l’association Framasoft et Yves-Gaël Chény de l’entreprise Empreinte Digitale. Tous les deux interviennent à distance. Il est par contre ici au studio, avec moi, Laurent Costy, administrateur de l’April qui a préparé ce sujet et qui va animer l’échange.
N’hésitez pas à participer à notre conversation au 09 72 51 55 46 ou sur le salon web dédié à l’émission sur le site causecommune.fm, bouton « chat ».
Bonjour Laurent. Je te laisse donc la parole.

Laurent Costy : Bonjour Isabella. Bonjour à toutes et bonjour à tous.
Effectivement nous allons aborder le sujet de l’auto-hébergement. On a quatre grandes parties pour ce temps. Évidemment on va essayer de définir ce qu’est l’auto-hébergement parce que tout le monde n’est pas familiarisé avec ce concept.
On essaiera de savoir pour quelles raisons il faudrait s’auto-héberger.
Bien sûr, on essaiera de dresser quelques pistes de solutions, ce n’est pas l’objet aujourd’hui d’aborder dans le détail des solutions, il y aura peut-être une émission ultérieurement qui abordera ce sujet-là, néanmoins on évoquera quelques solutions.
Et puis on évoquera aussi, peut-être, les limites de l’auto-hébergement.
Tu as présenté Angie et Yves-Gaël. Angie est-ce que tu es avec nous ? Bonjour.

Angie Gaudion : Bonjour.

Laurent Costy : Merci à toi.
Yves-Gaël Chény est avec nous.

Yves-Gaël Chény : Bonjour.

Laurent Costy : Bonjour. Je crois que ton pseudo c’est hurdman pour ceux qui te connaîtraient sur les réseaux de l’April en particulier, puisque tu avais, je crois, administré un peu les serveurs de l’April à une époque.

Yves-Gaël Chény : Tout à fait, pas très longtemps malheureusement, mais un petit peu, oui.

Laurent Costy : Tu a la parole. Je te laisse te présenter un petit peu, présenter un peu ton parcours et peut-être aussi ce que tu fais au quotidien comme métier.

Yves-Gaël Chény : D’accord. Je travaille dans une SCOP [Société coopérative de production] basée sur Angers qui est également membre de l’April, donc je suis doublement membre de l’April, à titre personnel et à titre pro. Je m’occupe particulièrement du pôle hébergement au sein de cette entreprise de développement logiciel.

Laurent Costy : D’accord. Il y a combien de salariés dans cette entreprise ?

Yves-Gaël Chény : On est une cinquantaine de personnes dont la majeure partie, du coup, est associée dans la SCOP.

Laurent Costy : Très bien. Merci.
Angie, tu es déjà venue dans l’émission mais ce n’est jamais mauvais de rappeler dans quelle association tu contribues au quotidien en tant que salariée.

Angie Gaudion : Je suis salariée de l’association Framasoft où je suis chargée de relations publiques. Du coup, j’ai une partie de mon temps qui est mis à disposition du Collectif des CHATONS, le Collectif des Hébergeurs, Alternatifs, Transparents, Ouverts, Neutres, et Solidaires.

Laurent Costy : On comprendra plus tard dans l’émission pourquoi on t’invite par rapport à ce collectif. Il y a une grande expérience acquise finalement par rapport à la question de l’hébergement et de l’auto-hébergement, ce qui fait vraiment partie des raisons pour lesquelles on t’invite entre autres.

Angie Gaudion : Peut-être une petite précision, désolée de te couper, je ne suis pas une geek, c’est-à-dire que je ne suis pas une technicienne, je ne comprends pas quand les gens parlent de trucs techniques en général. Je pense que nos profils différents, avec hurdman, seront complémentaires.

Laurent Costy : Très bien. Donc il y aura deux profils non techniques au départ, car moi non plus je ne suis pas technique, et Yves-Gaël qui sera un peu plus technique parmi nous trois.
Je vous propose, en essayant d’être le plus pédagogues possible, d’expliquer ce qu’est l’auto-hébergement. On va peut-être donner la parole à Yves-Gaël en tant que technicien, comme ça, après, Angie pourra essayer de préciser peut-être avec des mots moins techniques si Yves-Gaël en utilise trop.

Yves-Gaël Chény : Je vais quand même essayer de ne pas être trop technique.
L’auto-hébergement, avant toute chose, je pense que c’est l’appropriation des outils pour soi et leur utilisation au quotidien, notamment grâce à des briques logicielles fournies par le logiciel libre et grâce à des briques matérielles comme ont pu l’être, par exemple, le Raspberry Pi pour démocratiser cela auprès des différents utilisateurs. Donc je pense que pour moi le mot clé serait d’abord le mot « appropriation ».

Laurent Costy : D’accord. Peut-être qu’on va même remonter un peu plus en arrière, avant de définir « auto-hébergement », finalement, est-ce qu’on ne peut pas définir « hébergement » et parler un tout petit peu de serveurs sans rentrer dans la technique ?

Yves-Gaël Chény : Oui, bien sûr. Je pense qu’on peut reprendre l’adage qui est qu’Internet ce ne sont jamais que des PC d’autres personnes connectés entre eux. L’hébergement, avant toute chose, c’est mettre à disposition pour soi-même ou pour communiquer avec d’autres ou pour offrir des services à d’autres des services, des programmes, qui sont connectés via le réseau qu’est Internet.
Donc un serveur c’est juste une machine qui tourne tout le temps et qui héberge un de ces services.

Laurent Costy : Merci. Peut-être préciser aussi la nécessité d’une disponibilité dans le temps de cet ordinateur qui est connecté en tant que serveur ? Peut-être parler un peu de débit ?

Yves-Gaël Chény : Suivant les usages, bien sûr, les débits peuvent être très variables. Par exemple, si on veut héberger un serveur pour recevoir et envoyer des e-mails, le débit n’a pas besoin d’être trop élevé. En fait, la disponibilité, donc le temps de connexion du serveur au réseau, va dépendre de cet usage et des objectifs que l’on a. Autrefois, par exemple, les plus anciens ont pu connaître des serveurs de mail qui ne se connectaient que quelques heures par jour pour s’échanger les messages. Par contre, si on est sur un serveur de chat on imagine bien qu’il faut qu’il reste connecté le plus souvent possible ou, si on veut exposer un site web pour parler de son association ou de son entreprise, il faut qu’il reste disponible sur Internet pour que les gens puissent venir voir ce que l’on fait.

Laurent Costy : Merci. Angie est-ce que tu veux compléter un peu cette vision de serveur et d’auto-hébergement ?

Angie Gaudion : Peut-être, du coup, pour rendre ça encore plus compréhensible, c’est dire ce que ça n’est pas, à savoir que, globalement, en tout cas quand on ne s’est pas posé la question, justement, de l’auto-hébergement, en fait on héberge ses services web chez des prestataires externes. Par exemple, quand on fait du cloud on va stocker ses données dans un service de cloud qui est externalisé, qu’on ne gère pas. Quand on fait du mail, en général on utilise une boîte mail et, à part si on a fait des choix justement en ce sens, on passe par un prestataire qui, si on n’est pas encore « dégafamisé » peut être Google, Microsoft, voilà ! Si on est plus « dégafamisé », des services comme ProtonMail, Tutanota ou Posteo qui sont, du coup, des services de mail plus éthiques, mais on passe quand même par un prestataire externe.
Dans l’auto-hébergement, on ne passe pas par un prestataire externe puisqu’on héberge, effectivement, son serveur, chez soi ou pas, c’est une vraie question. Il y a toujours, pour moi, un questionnement sur ce qui relève du vrai ou du faux auto-hébergement parce que, finalement, on pourrait considérer que oui, l’auto-hébergement c’est forcément avoir le matériel chez soi, à la maison et, en même temps, peut-être que quand on utilise un serveur qui est proposé par un prestataire externe mais qu’on gère l’intégralité de ce qui se passe sur ce serveur, on est quand même dans une forme d’auto-hébergement avec, du coup, une distance du matériel qui n’est pas à domicile. En tout cas je pense que c’est intéressant d’envisager les deux.

Laurent Costy : Je me souviens que c’étaient des discussions qui circulaient sur la liste CHATONS ; il y avait un grand débat autour de cette question : est-ce que l’auto-hébergement c’est chez soi ou est-ce que ça peut être sur un serveur ailleurs ? Finalement, peut-être que la convergence c’est de dire que l’auto-hébergement c’est quand on maîtrise la confiance qu’on a par rapport à celui qui gère le serveur. C’est peut-être ça. La question centrale c’est bien la question de confiance. Finalement on peut faire héberger ses données ailleurs que chez soi, mais ça veut dire qu’on connaît la personne qui héberge les données, on connaît les services, on est capable d’interagir avec ceux qui gèrent.

Angie Gaudion : Je rajouterai quand même une distinction parce que, pour moi, dans l’auto-hébergement il y a le fait qu’on administre ses services, c’est-à-dire qu’on a un certain nombre de compétences techniques qui font qu’on installe les services sur le serveur, qu’on crée les comptes s’il y a besoin de créer plusieurs comptes, etc. Ce qui est très différent de passer par un prestataire comme un chaton. Effectivement il y a cette confiance envers un tiers, mais là on va carrément, entre guillemets, « transmettre cette confiance » même sur l’administration des services ; on reste utilisateur des services. Donc pour moi il y a deux niveaux dans l’auto-hébergement, entre guillemets, « distincts », il y en a un que je n’appellerais pas auto-hébergement au sens où, pour moi, on ne peut pas auto-héberger si on n’est pas techniquement en mesure d’installer les services qu’on veut utiliser, sinon on est utilisateur d’un service distant.

Laurent Costy : Merci. Voilà. Après on peut être utilisateur d’un service distant sans avoir appréhendé, sans avoir consolidé de confiance avec le prestataire ou la personne. On peut aussi être utilisateur un peu averti et avoir à peu près appréhendé comment ça fonctionne et avoir des contacts. Ça me semble des distinctions importantes parce que finalement c’est bien dans le lien humain que la confiance s’établit et, en tout cas, qu’on peut avoir une appréhension de la manière sont traitées ses données grâce à ça.

Je pense qu’on y voit un peu plus clair maintenant sur ce qu’est l’hébergement et l’auto-hébergement. Évidemment il y a encore des discussions chez les chatons entre autres et ailleurs, néanmoins pourquoi faudrait-il s’auto-héberger ? Pourquoi regarder ces solutions-là ? Pourquoi essayer de comprendre comment ça fonctionne ? Pourquoi essayer d’installer ses propres services sur son ordinateur chez soi ? Yves-Gaël peut-être.

Yves-Gaël Chény : Oui. Avant d’être dans le métier j’ai commencé par m’auto-héberger comme, je pense, beaucoup de gens qui sont venus dans l’infra serveurs, ce sont des motivations de départ. En tout cas dans mon cas c’était déjà de comprendre ces sujets parce que, même dans le monde libre des associations Linux que je fréquentais à l’époque, il n’y avait pas encore une telle angoisse sur la donnée, je pense, que celle qu’il peut y avoir maintenant. Avant toute chose c’était comprendre comment ça marche, en tout cas de mon côté, et s’approprier les processus, les process de traitement de ses mails et aussi, un peu, le défi technique de réussir à faire. Très vite je me suis rapproché des associations pour travailler sur ces sujets-là.

Laurent Costy : Si je résume ta pensée, c’est finalement une volonté, un besoin de comprendre comment ça marche en fait ?

Yves-Gaël Chény : Oui. Au départ, c’était vraiment ça mon idée, c’était avant les années 2000. Je pense qu’on était un peu moins inquiets sur le traitement de la vie privée sur Internet. Je participe encore un peu à des associations, notamment une association sur Clisson qui s’appelle Gullivigne où on aide un peu les gens à prendre en main l’informatique on va dire. On voit que les gens viennent plus, finalement, pour comprendre où vont leurs données. Je pense que c’est une deuxième inquiétude qui est peut-être un chouia plus récente, on parle quand même en dizaines d’années, et qui, du coup, crée un nouveau besoin sur cet auto-hébergement.

Laurent Costy : Très bien. Effectivement, tu remontes à 20/30 ans en arrière et, pendant ce laps de temps, plusieurs scandales ont révélé la vraie question centrale des données sur Internet. Il y a bien sûr eu les révélations d’Edward Snowden en juin 2013 – il n’y a pas eu que ce scandale-là, Cambridge Analytica, etc. ; je pense que si vous écoutez régulièrement les podcasts de l’émission, même si vous n’en écoutez que quelques-uns, vous avez plein d’exemples et de situations dans lesquelles la donnée est devenue un enjeu central en particulier pour les GAFAM –, évidemment cette question-là est venue interroger la nécessité de l’auto-hébergement.
On peut se donner quelques minutes, on ne va pas passer tout le temps sur ce sujet-là, mais peut-être rappeler toute cette problématique liée à la donnée. La question du capitalisme de surveillance que Shoshana Zuboff révèle dans son ouvrage conséquent, 800 pages, qui nous montre finalement vers quoi on va et qui, du coup, alerte sur l’importance de questionner où sont nos données et de questionner la maîtrise de nos données. Je ne sais pas, j’imagine, Angie, que tu as aussi des exemples à nous donner pour illustrer un peu cette importance de la donnée et de la protection de la donnée que nous devons tous avoir.

Angie Gaudion : Peut-être, pour revenir sur une formule que j’ai découverte finalement en arrivant chez Framasoft, que je n’avais jamais entendue, je me suis dit comment c’est possible, qui était « le cloud c’est toujours l’ordinateur de quelqu’un d’autre ». Je trouve que c’est très parlant pour parler de cette histoire des données stockées chez quelqu’un d’autre. Bien sûr, quand c’est une grande entreprise, on est bien au-delà de quelqu’un, un individu, mais on est quand même, du coup, dans une grande entreprise du Web. Aujourd’hui, on se rend compte que le fait que ses données soient effectivement récoltées par les géants du Web pose de nombreuses questions que ce soit sur l’aspect économique : ces entreprises sont quand même les plus grosses multinationales, les capitalisations boursières les plus élevées, elles ont donc un pouvoir d’influence très fort sur le reste du marché numérique. Par exemple elles rachètent à tour de bras toutes les innovations, les entreprises innovantes qui proposent des solutions intéressantes, donc elles tuent le système de la concurrence et elles récoltent des données qu’on éparpille un peu partout pour créer des bases bien plus grandes.
Ensuite, bien sûr, ces données servent à alimenter un système qui est, tout simplement, celui de l’exploitation de ces données pour générer une source d’argent. Ça va dépendre des types d’entreprises, elles ne vont pas toutes faire le même usage de ces données, mais globalement on sait bien que c’est souvent ce qui alimente le modèle de la publicité ciblée. Aujourd’hui c’est un des modèles les plus importants, ce qui fait qu’au regard des données qu’on collecte sur vous dans ces différents services, eh bien on va pouvoir vous proposer de la publicité qui « correspond », entre guillemets, à ce que vous avez dit, diffusé et sur laquelle vous pourrez tout simplement cliquer plus facilement et être des consommateurs plus actifs. C’est le premier élément important.
Mais ça va au-delà de ça puisque, typiquement, le scandale Cambridge Analytca a mis en évidence, dans le cadre de Facebook en l’occurrence, que les données de millions d’utilisateurs et utilisatrices de Facebook avaient été récoltées pour avoir une idée de leur positionnement politique, pour ensuite faire des publications. Ce n’était pas vraiment de la publicité, c’était vraiment adresser certaines publications de certains autres comptes à ces utilisateurs pour essayer de leur faire changer d’avis, en particulier dans le cadre des élections de la présidentielle américaine il y a maintenant cinq ans, enfin quatre ans et demi, et aussi dans le cadre du Brexit, du vote pour le Brexit. Donc il y a eu une influence très forte sur une partie des utilisateurs de Facebook pour leur faire changer d’avis. Là, vous voyez que les données personnelles ne sont pas du tout exploitées pour faire de l’argent, elles sont exploitées pour générer un changement d’opinion politique, en tout cas un maintien dans certaines opinions politiques d’une partie de la population.
Voilà. Il y a plusieurs exemples de ce type, c’est assez variable.
Après, on va avoir tout simplement des structures qui effectivement revendent ces données, des choses un peu obscures pour l’internaute lambda et on se retrouve avec des données qui vont être exposées sur le Web. J’ai regardé un service qui s’appelle Haveibeenpwned où, en fait, on peut voir si son mot de passe a été récupéré un certain nombre de fois et c’est assez indécent de se rendre compte qu’on a des traces laissées il y a 10 ans ou 15 ans en arrière. Donc il y a vraiment un élément fort.
Enfin, et là pour le coup ce n’est pas sur l’exploitation de nos données mais, pour moi, ça participe du capitalisme de surveillance dans sa globalité, c’est l’aspect de la domination culturelle, c’est-à-dire qu’on est face à des entreprises qui relèvent d’un modèle de société qui est lui de l’impérialisme américain avec des choix de modération, des types de contenus possibles ou pas, qui font, en fait, que ça formate nos comportements de manière très forte et, pour le coup, ça nuit effectivement à nos libertés individuelles globalement.

Laurent Costy : Merci. Effectivement ça rejoint ce qu’a pointé Shoshana Zuboff sur la question du surplus comportemental qui alimente des bases de données, qui alimente aussi les IA pour faire de la reconnaissance faciale, savoir où sont les gens, où ils sont passés, ce qu’ils font, avec qui, parce que c’est finalement ça qui est extrêmement important pour ces entreprises qui, à un moment donné, veulent deviner à l’avance ce que vous allez faire, parfois elles savent avant vous ce qui se produit. En préparant l’émission je suis retombé sur la situation d’une jeune fille qui était enceinte et qui recevait déjà des publicités pour des couches, etc., alors que son père n’était pas au courant, c’était au début des années 2010. On est bien dans ces logiques-là où, finalement, on veut prédire ce que les gens feront. C’est une forme de pouvoir extrêmement fort et plus on alimente les bases de données de ces géants et plus on leur donne la matière pour, finalement, nous orienter par la suite.
C’est vrai que tous ces éléments-là nous encouragent à nous poser la question : finalement, j’ai peut-être intérêt à emmener mes données chez moi, à les garder chez moi et à les protéger fortement.
Ça veut dire aussi un peu un retour aux sources puisque, sauf si je me trompe, je ne suis pas un spécialiste de l’Internet, en tout cas quand on commence à se poser ces questions-là et qu’on remonte à l’histoire d’Internet c’était bien une logique décentralisée et c’est là qu’on rejoint un petit peu aussi la logique des chatons. Est-ce que vous pouvez nous parler, nous expliquer un petit peu techniquement comment fonctionnait cette logique initiale ? Yves-Gaël peut-être.

Yves-Gaël Chény : Si vous voulez. En fait ça c’est un peu le yoyo. C’est-à-dire que suivant le coût du matériel et des capacités de traitement, on a connu un peu toutes les phases entre des gros serveurs externalisés et des petits serveurs en interne, ce qui est assez drôle. Pour rebondir un peu sur ce que disait Angie tout à l’heure sur la partie données c’est très intéressant parce que souvent, sur l’auto-hébergement, on se focusse un peu sur les individus, sur les personnes qui traînent autour des associations de gens intéressés, on va dire, par la liberté au sens large. Mais, dans les problématiques de vie connectée actuelle, c’est un peu plus large que ça et c’est vrai que cette réflexion d’auto-hébergement peut intéresser aussi des collectivités qui, par exemple, collectent des données pour leurs citoyens pour des services ou autres.
Pour répondre à cette question, il y a eu un départ en masse, finalement relativement récent, vers le cloud et on voit un repli à l’heure actuelle, il y a une espèce de retour, une réflexion vers ce qui est appelé le edge datacenter, le retour à des machines qu’on peut au moins placer physiquement sur une carte à défaut de tout externaliser. Voilà. Donc on va dire que l’histoire fait le yoyo sur ces sujets-là.

Laurent Costy : D’accord. C’est vrai que le Collectif CHATONS est plutôt sur une logique où on décentralise à nouveau les données, il n’y a pas une structure, une super structure qui, finalement, est capable d’avoir des silos entiers de données, chacun a un tout petit bout de données et ça protège tout le monde.
Je parcours régulièrement le site « Je n’ai rien à cacher » parce que, évidemment, tout le monde a été confronté à une personne qui répond systématiquement qu’elle n’a rien à cacher sur Internet et qu’elle ne fait donc pas attention à ses données. Ce site-là permet justement de trouver des arguments concrets, solides, parce que, finalement, on est toujours un peu sec pour répondre à ça. Je suis retombé sur un article de Laurent Chemla dans Médiapart en 2015, qui expliquait bien que ce n’est pas tant soi-même qu’on veut protéger, mais les autres. J’ai trouvé un exemple avec des animaux. De toute façon on peut trouver des exemples avec des êtres humains aussi. Des gens qui faisaient des safaris en Afrique faisaient des photos géolocalisées et les postaient sur les réseaux sociaux. Les braconniers identifiaient la localisation de ces photos-là et trouvaient beaucoup plus facilement les rhinocéros pour les tuer et s’emparer de leurs cornes.
On voit bien que la question de « Je n’ai rien à cacher » est bien plus large que soi-même, elle doit aller au-delà de soi, et c’est bien pour protéger les autres aussi qu’il faut faire attention. Après, c’est vrai qu’on vide l’océan avec une petite cuillère puisque, quand on envoie un mail avec Gmail on sait bien que même quand on n’a pas un mail avec Gmail on passe généralement par les serveurs de Google, donc, à chaque fois, si vos mails ne sont pas chiffrés eh bien les contenus sont lus, en tout cas les métadonnées sont collectées parce que, finalement, ce sont presque plus les métadonnées qui intéressent que le fond même du mail. Ce sont toutes ces questions-là qui, finalement, encouragent à se poser la question de l’auto-hébergement et à faire l’effort de beaucoup mieux maîtriser ses données.

Angie Gaudion : Je pense qu’il y a aussi un élément assez important auquel je n’avais pas trop réfléchi avant de préparer cette émission, c’est le fait que quand on passe par un hébergeur externe, et particulièrement les hébergeurs GAFAM, en fait on n’a aucune assurance que nos données seront accessibles. C’est-à-dire qu’on peut nous les supprimer, on peut nous supprimer cet accès d’un moment à l’autre. Il n’y a aucun engagement puisqu’il n’y a aucune contractualisation réelle de l’accès à ces données. C‘est aussi une problématique. L’auto-hébergement, bien sûr, règle ça puisqu’on sait quand ses données seront accessibles ou pas puisqu’on gérera le matériel et même si on passe par un tiers un peu plus éthique, souvent on va contractualiser avec un certain nombre de contreparties et on saura, effectivement, ce qui se passera si les données sont perdues. Ça me fait penser à l’épisode de l’incendie d’OVH où on s’est rendu compte que plein de petites entreprises, voire des particuliers, hébergeaient leurs données dans cette entreprise et n’avaient jamais pensé qu’il fallait faire des sauvegardes de ces données pour pouvoir y accéder au cas où il y aurait un souci technique ; on est dans la même logique. Dans l’auto-hébergement il y a aussi la notion, OK, c’est bien d’auto-héberger mais comment on gère l’aspect sauvegarde ? Peut-être qu’on y reviendra.

Laurent Costy : Bien sûr. Finalement l’informatique se résumerait presque à la question de la sauvegarde !
Je me permets de préciser, parce qu’on m’a posé la question en off, ce que sont des métadonnées. Ce n’est pas le contenu même de votre mail qui intéresse forcément les super structures, mais c’est plus, finalement, à quel moment, la géolocalisation, parce que, par exemple en collectant vos données de géolocalisation, on va pouvoir savoir à quel endroit vous passez, donc on va pouvoir prédire à quel endroit vous allez passer ; si on arrive à prédire l’endroit où vous allez passer, on va peut-être pouvoir vous afficher la pub qui va convenir par rapport aux magasins devant lesquels vous passerez. Ce sont tous ces éléments-là qui sont, finalement, presque plus précieux que le contenu. C’est important de préciser ce que sont les métadonnées parce que, quand on dit qu’on n’a rien à cacher, ce n’est pas que le contenu du message qu’on devrait cacher, c’est bien aussi tout le reste, c’est bien aussi quand est-ce qu’on écrit, à qui, parce que, évidemment, des graphes de connexion avec d’autres personnes sont constitués, on sait quelles sont vos relations, donc on peut retrouver très facilement.
Je ne vous cache pas que je me suis même fait peur en préparant l’émission. Je ne sais pas si vous avez en tête la scène dans Blade Runner où, à un moment donné, il est dans son canapé et il essaye de grossir une image qu’il a collectée. À l’époque c’était les vieux magnétoscopes avec des grosses cassettes, des bandes-magnétiques, etc. Il avait déjà un programme qui lui permettait de grossir l’image à la voix. Il faut savoir que maintenant, avec des appareils photos qui font 48 millions de mégapixels et des logiciels qui sont déjà en œuvre, on est capable de grossir la pupille d’un œil et de reconnaître des gens grâce à l’intérieur de leur pupille de l’œil. Ce qu’on trouvait incroyable dans les années 80 devient évidemment réalité. On peut le dire de beaucoup de choses, en tout cas quand j’ai vu ça je me suis dit oui, on a quand même fait un grand bon en avant. Du coup ça veut bien dire, là encore, que si vous ça ne vous dérange pas d’être pris en photo, supposez que vous rencontriez quelqu’un qui doit être protégé, par exemple un journaliste, et que vous êtes pris en photo, on est capable de savoir avec qui vous avez discuté.
Évidemment, tout ça fait un petit peu peur et il ne faut pas générer que de la peur, il y a aussi des belles chose dans Internet, je tiens à le répéter. Néanmoins, c’est important d’insister sur le fait que vos données sont vos données, il faut les protéger.
Est-ce que vous avez des choses à rajouter sur la raison pour laquelle il faut se poser des questions sur l’hébergement de ses données ? Après on peut aussi étayer la question des sauvegardes, mais ce sera peut-être plutôt dans une partie technique. Est-ce que vous voulez ajouter des choses ?

Angie Gaudion : Peut-être par rapport à la décentralisation. Effectivement, l’idée de ne pas avoir toutes ses données auprès d’un récolteur de données massif est importante, mais il y a aussi une notion, pour moi, qui est, comment puis-je dire, plus humaniste au sens où soit s’auto-héberger soit passer par un tiers pour s’auto-héberger, mais un tiers local, a une incidence, du coup, sur la répartition de certaines économies sur le territoire. En fait, plus il y a d’acteurs plus on a de chances de limiter cette centralisation, donc forcément les problématiques liées aux données personnelles et à la vie privée. Voilà, juste une précision rapide.

Yves-Gaël Chény : Je rajouterai un petit point en plus en complément. Quand on parlait de sauvegarde, il faut aussi parler de réversibilité des données, ce qui veut dire qu’on peut récupérer ses données. Comme on est entre fans de logiciels libres on peut aussi parler de formats ouverts et s’assurer sur le fait que les différents opérateurs sur le territoire, avec qui on veut travailler, soient à même de les traiter une fois récupérées. Il y a aussi cette problématique-là : on peut récupérer ses données mais si on ne sait pas les lire ou si le nouveau prestataire ne sait pas les lire, on n’en aura pas l’usage et la pleine propriété.

Laurent Costy : Merci. Effectivement cette précision est importante. Ayant travaillé dans les MJC ancrées sur le territoire, moi aussi je prône le local, la proximité et le lien physique avec les gens.
Je repasse à la parole à Isabella pour la pause musicale.

Isabella Vanni : Merci Laurent. Effectivement nous allons faire une pause musicale. Nous allons écouter Drôle de cadence par ZinKarO, sous Creative Commons CC By SA 3.0. Cette fois on est plutôt sur de la chanson française, c’est un swing d’inspiration manouche. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Drôle de cadence par ZinKarO.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Isabella Vanni : Nous venons d’écouter Drôle de cadence par ZinKarO, disponible sous licence libre CC By SA 3.0.

[Jingle]

Isabella Vanni : Je suis Isabella Vanni. Nous allons poursuivre avec notre sujet principal sur l’auto-hébergement.
Cette émission est consacrée justement à l’auto-hébergement et nous parlons de ce sujet avec nos personnes invitées : Angie Gaudion de l’association Framasoft et Yves-Gaël Chény de l’entreprise Empreinte Digitale. C’est Laurent Costy, administrateur de l’April, qui a préparé et qui anime cet échange. N’hésitez pas à participer à notre conversation au 09 72 51 55 46 ou sur le salon web dédié à l’émission sur le site causecommune.fm, bouton « chat ».
Laurent je te redonne la parole.

Laurent Costy : Merci Isabella. Nous reprenons le fil de la discussion.
Dans un premier temps, nous avons défini ce qu’est l’auto-hébergement, donc on y voit un peu plus clair désormais. Et puis nous avons aussi évoqué, bien sûr, la raison pour laquelle il faudrait potentiellement s’auto-héberger.
Je vous propose maintenant de se poser la question de savoir comment concrètement on peut faire pour s’auto-héberger, quelles sont les précautions, quelles sont les règles à se donner, quelles sont les réflexions à avoir avant de s’auto-héberger, de se jeter sur un ordinateur pour installer un système qui permettrait de s’auto-héberger et quel système le cas échéant. Yves-Gaël peut-être.

Yves-Gaël Chény : Je préfère laisser la main à Angie pour débuter sur ce sujet parce que je suis sûr qu’elle sera plus familiarisée que moi là-dessus.

Laurent Costy : Quel galant homme !

Angie Gaudion : Merci !
Pour moi, quand on envisage de s’auto-héberger, la première étape va être d’identifier ce qu’on veut auto-héberger, c’est-à-dire quels sont les services qu’on souhaite auto-héberger, où est-ce qu’on les a actuellement avant l’auto-hébergement, c’est-à-dire comment on va pouvoir faire la migration des données, c’est un élément important ; combien il y a de données, quel poids ça pèse parce qu’il va bien falloir qu’on définisse la taille de son auto-hébergement. En général on parle tout simplement d’un diagnostic des usages : qu’est-ce que j’utilise comme services numériques en ligne ? Est-ce que, du coup, je peux rapatrier les données pour utiliser ces services ou pas ? Est-ce que je veux auto-héberger tous mes services numériques ou seulement une partie ? Ce sont des choix personnels qu’on peut définir ; évidemment ça influera sur le coût total de cet auto-hébergement puisque plus on va héberger de contenus plus il faudra des supports de stockage élevés, plus ça aura une incidence, forcément, sur le coût.
Bien sûr se poser la question : est-ce que les données qu’on va héberger chez soi seront bien protégées, ça posera effectivement la question du choix du système d’auto-hébergement qu’on va choisir ; on peut même se poser la question du niveau de menaces dont on souhaite se préserver- Ce sont des vraies questions en amont.
Il y a un élément hyper-important pour moi c’est le nombre d’utilisateurs potentiels. Là on parle d’auto-hébergement, si on parle à titre individuel, est-ce que ce n’est que pour soi en tant qu’individu, est-ce que c’est pour soi et sa famille, est-ce que c’est pour soi, sa famille et son groupe d’amis ? En gros il va y avoir aussi une notion de est-ce qu’on crée un réseau de personnes derrière cet auto-hébergement. Et bien sûr, si on est une entreprise ou une collectivité, on va avoir ces mêmes questions, mais là ça semble assez évident. Souvent, à titre individuel, on ne se les pose pas toujours. On le fait pour soi, puis on l’ouvre petit à petit et, des fois, ça peut être bien d’y penser dès le départ en fait. Vraiment faire un diagnostic de ce qu’on a aujourd’hui, ce qu’on voudrait mettre en place, pour qui, en gros.

Laurent Costy : Supposons qu’on se soit posé toutes ces questions-là, n’importe qui avec n’importe quelles compétences en informatique – je sais faire un peu de traitement de texte, j’en fais depuis 20 ans dans mon entreprise ou dans mon association – peut se lancer sur l’installation d’un serveur chez soi ?

Yves-Gaël Chény : C’est le petit complément : combien de temps j’ai à y passer, quelles compétences j’ai actuellement et, du coup, potentiellement, de qui je peux me rapprocher pour avoir de l’aide sur le sujet, association, entreprise ou amis ? Je pense que c’est peut-être le petit détail à ajouter sur toute la bonne analyse d’avant.

Laurent Costy : Oui. Je peux témoigner à titre personnel. Je ne suis pas geek au départ. C’est vrai qu’au fil des années j’ai acquis quelques compétences, donc j’ai expérimenté un petit serveur chez moi, à titre personnel, pour héberger quelques données sans importance, encore une fois plutôt pour expérimenter. Ça peut être très déstabilisant. Par exemple quand il y a une panne, ça reste très compliqué de savoir si c’est moi qui suis incompétent ou si, finalement, c’est une panne réseau qui est extérieure à ma gestion et à mes compétences. C’est vrai, soyons clairs, que n’importe qui ne peut pas se lancer dans de l’auto-hébergement sérieux, surtout s’il souhaite l’ouvrir aux autres. Je pense qu’il faut quand même être assez objectif par rapport à ça et ne pas laisser penser aux gens qu’à partir du moment où ils auront compris et envie d’arrêter de laisser leurs données aux GAFAM ils peuvent, du jour au lendemain, se lancer dans l’hébergement d’un serveur chez eux avec un vieil ordinateur qu’ils avaient dans un coin. Voilà ! Il faut quand même être très clair sur cet aspect-là des choses.
Néanmoins, c’est vrai que les outils ont énormément progressé. J’ai découvert YunoHost il y a maintenant quelques mois – je témoigne, je fais un peu l’animateur et la personne qui témoigne, je ne sais pas si c’est très dans les canons, en tout cas je peux en parler un petit peu –, c’est devenu effectivement assez simple d’utilisation, d’installation quand on a quelques bases. C’est remarquable, ça a été très travaillé aussi sur l’esthétisme, ce qui était toujours un reproche qui était fait à des logiciels libres. Il y a eu un gros effort de convergence sur la mise en page. Pour YunoHost, en particulier, on a des petites briques très colorées, très simples d’accès. Ces services-là ont été simplifiés. On pourra sans doute faire, plus tard dans l’année, une émission spéciale sur ces outils-là, en tout cas je voulais témoigner que ces outils sont devenus quand même beaucoup plus appropriables. Il y a encore, je dirais, une petite dizaine d’années, il fallait systématiquement passer par de la ligne de commande, le terminal, le fameux terminal noir avec des écritures blanches ou même vertes à l’époque, pour pouvoir installer son serveur, l’administrer, le mettre à jour, trouver la panne, etc. Désormais il y a une interface graphique qui est devenue très compréhensible, majoritairement en français, parce que c’est aussi souvent une limite pour les utilisateurs, les logiciels sont créés à l’étranger et, du coup, restent en anglais et, quand on me maîtrise pas l’anglais, ça reste beaucoup plus compliqué, on abandonne très vite.
En tout cas, pour ces outils-là, beaucoup de progrès ont été faits et ils s’améliorent encore tous les jours. Mais, encore une fois, n’importe qui ne peut pas se lancer dans de l’auto-hébergement.
Est-ce que vous pouvez témoigner à titre personnel ? Yves-Gaël, oui bien sûr, tu l’as dit, tu as commencé par de l’auto-hébergement. Angie, tu as dit que tu n’es pas geek, j’imagine que tu ne t’es pas lancée ou que tu n’as pas eu le temps — c’est aussi une question de temps, je le redis aussi, Yves-Gaël l’a dit tout à l’heure. Est-ce que tu as eu l’occasion d’essayer, d’expérimenter ?

Angie Gaudion : J’ai vraiment expérimenté. Je me suis acheté un petit Raspberry et j’ai effectivement installé YunoHost dessus.

Laurent Costy : On va peut-être expliquer. Tout à l’heure Yves-Gaël a aussi évoqué le Raspberry Pi. Peut-être peux-tu expliquer ce que c’est.

Angie Gaudion : En fait, c’est un micro-ordinateur, un ordinateur qui est composé d’une carte sur laquelle il y a beaucoup de petits éléments et qui coûte beaucoup moins cher qu’un ordinateur habituel — je crois que je l’ai payé autour de 60 ou 80 euros — sur laquelle on va rajouter ce dont on a besoin. Typiquement j’ai rajouté un disque dur externe ; il y a un tout petit espace de stockage interne, du coup il faut un disque dur externe si on veut stocker des données importantes. Il n’y a pas d’écran. C’est vraiment une petite carte qu’on va souvent mettre dans une boîte parce que ça permet de la protéger. Une sorte de mini-ordinateur, d’ailleurs un peu ce qu’on a dans nos ordinateurs portables, on est dans les mêmes logiques de matériel miniaturisé qui permet de faire plein de choses, sauf que là on a un truc vide quand on l’achète et il faut installer un système d’exploitation ou une distribution – ce sont déjà des termes un peu plus techniques – pour le faire fonctionner et on peut en faire plein de choses différentes. Voilà en gros pour le Raspberry qui permet de tester de manière aisée sans investir dans quelque chose de très gros.
Pour moi il y a aussi un intérêt au Raspberry Pi : en termes de consommation énergétique ce n’est pas du tout gourmand, donc c’est assez intéressant, je pense qu’on reviendra sur cette question de la consommation énergétique dans l’hébergement.
J’ai donc installé YunoHost, ce que je n’ai pas du tout trouvé simple parce que j’ai eu plein de bugs à l’installation et, bien sûr, je me suis retrouvée avec des trucs, je suivais le tutoriel et ça ne marchait pas. Il y avait des gens autour de moi qui ont pu me le dire « là, en fait, c’est parce que tu as mal paramétré ça avant de faire l’installation. – Oui, mais comment je l’aurais deviné ? ». Pour moi ce n’est pas du tout accessible aux personnes qui n’ont pas un niveau de compétences numériques relativement élevé.
Il y a un autre enjeu aussi assez fort pour moi, que ce soit YunoHost ou les autres, c’est justement le fait de pouvoir réellement se protéger par exemple du spam. Si on auto-héberge un service de mail, c’est un service qui est très compliqué à gérer derrière pas au plan technique mais sur comment s’assurer que tous ses mails sont distribués auprès de ses destinataires, s’assurer qu’on reçoit les mails que les expéditeurs nous envoient, ne pas tomber dans les boîtes spam de tout le monde, ne pas être spammé rapidement, donc avoir un très bon système ; tout ça, techniquement, n’est quand même pas si simple.
Donc ce que j’ai fait, je suis allé chez un des chatons, chez une des structures du Collectif et c’est très bien, j’ai des gens compétents qui gèrent tout ça pour moi.

Laurent Costy : C’est vrai que la distribution de mails est un vrai métier, c’est un point extrêmement important et faire comprendre ça aux personnes qui utilisent simplement le mail habituellement, qui disent « oui, mon mail n’a pas été reçu, etc. », c’est vrai que ça reste d’une grande complexité à expliquer.
C’est bien que tu puisses donner un point de vue d’utilisateur non technicien avancé, on va dire comme ça, je te rejoins sur l’analyse.
Je crois même que pour le Raspberry Pi et pour toutes ces cartes on parle même de nano-ordinateur puisque, finalement, le micro-ordinateur c’était déjà le nom qu’on donnait dans les années 80 au PC, me semble-t-il, on parle même de nano-ordinateur, puisque, effectivement, vu sa taille, la carte tient dans la main. Et puis on a limité, je crois, toute la consommation, ce ne sont pas des disques durs mécaniques qui consomment un peu plus à cause du moteur, etc. Tout ça a été effectivement pensé pour pouvoir consommer un petit peu moins.
Un peu dans les projets de nano-ordinateurs, pour faire un petit témoignage, j’ai acheté ce qu’on appelle une Brique Internet, c’est un service qui est mis en place, je crois que la FDN, French Data Network, propose ce service-là. Pour l’occasion je l’ai achetée en Belgique, c’est vrai qu’ils paramètrent le système au départ et après on vient ajouter des services assez simplement. Il y a un magasin de logiciels qu’on peut ajouter sur son serveur et puis on ajoute plein de services, on peut ajouter un blog assez simplement. Il y a énormément de services possibles, on peut même, justement, rajouter une petite brique qui permet de créer des mails temporaires. Je trouve ça assez pratique, par exemple quand il faut donner son mail à une structure commerciale qui va systématiquement nous renvoyer derrière du spam, et puis on lui dit « ce mail-là va durer trois mois et après tu l’écrases », en trois mois on a fini les échanges avec la structure du coup ça peut disparaître.
Si on doit résumer, je dirais que c’est vrai que la plus grosse difficulté c’est bien la question technique, il faut bien mesurer ses compétences techniques. Par contre, ce que j’ai trouvé assez jouissif dans cette expérimentation-là, c’est qu’on acquiert très vite des compétences. On comprend, on assoit des compétences qu’on avait déjà testées avec un système GNU/Linux au quotidien, on apprend vite et les tutoriels sont bien faits, encore une fois en français. Oui, des fois on bloque. On peut aller sur les forums, je me suis fait beaucoup aider sur le forum de YunoHost, ils sont très réactifs. Ça aussi c’est extrêmement intéressant dans le lien et dans l’échange.
Évidemment, si jamais on se lance, le seul et unique conseil qu’il faut peut-être donner c’est finalement de maîtriser ses sauvegardes. Si on maîtrise ses sauvegardes on finit toujours par s’en sortir.
J’espère que cette synthèse-là vous satisfait. Je ne sais pas si vous voulez compléter. On a déjà évoqué un peu les points, mais on pourra peut-être parler des limites de l’auto-hébergement. On vient d’en évoquer une grosse qui est la question de la compétence, on pourra peut-être passer en revue les autres éléments.

Yves-Gaël Chény : Je rebondis juste sur ce que tu as dit à propos de La Brique. Ce n’est pas exactement le même matériel que le Raspberry Pi, c’est un matériel un peu plus ouvert que le Raspberry Pi. Le Raspberry Pi a l’intérêt d’avoir une grosse communauté actuellement, mais ce n’est pas forcément la carte la plus ouverte en termes de format d’un point de vue électronique.

Laurent Costy : Oui, je crois que c’est une carte Olimex.

Yves-Gaël Chény : Tout à fait. C’est un OLinuXino.

Laurent Costy : C’est vrai que ça s’est multiplié dans le commerce, il y en a qui sont plus ou moins ouverts, c’est important de le préciser.
Par rapport aux limites de l’auto-hébergement, on a évoqué la question de la compétence qui est centrale, si vous ne vous sentez pas à l’aise ne vous lancez pas dans de l’auto-hébergement et, du coup, rapprochez-vous des chatons.
Angie a un peu évoqué la sécurité. Yves-Gaël, peut-être que tu peux nous en dire plus puisque cette question de la sécurité c’est presque ton quotidien, d’autant plus quand on doit penser, en tout cas pour une entreprise, à la question du RGDP [Réglement général sur la protection des données].

Yves-Gaël Chény : Tout à fait. C’est clair. On va dire que c’est un des points noirs de l’auto-hébergement, c’est l’un des gros sujets sur lesquels c’est « dangereux », entre guillemets, d’y aller seul. Sans vouloir faire de l’alarmisme, mais si on veut protéger ses données en s’auto-hébergeant et que, finalement, on ouvre un peu trop grand les portes, que quelqu’un de mal intentionné ou d’un peu trop curieux vient fouiller dans ses affaires personnelles, ce n’est jamais très agréable. Les backups nous protégeront des pertes mais ne nous protégeront pas des fuites. Donc oui, le sujet de la sécurité est un sujet qui est de plus en plus complexe. On l’a vu, il y a même des structures très sérieuses, étatiques, type Afnor ou autres, qui ont été piratées sur la dernière année, ont eu des logiciels qui sont venus chiffrer l’intégralité de leurs données. Ça demande de faire des audits réguliers, ça demande d’être bien à jour sur ses versions de Linux ou de packages pour être sûr d’avoir corrigé les failles existantes ; ça demande de faire des paramétrages en fonction du service que l’on héberge, quand je dis service j’entends un page web, un service de mail comme ça a été évoqué.
C’est vrai qu’il y a toute cette technique-là qui est finalement assez pointue à appréhender quand on décide de s’auto-héberger.

Laurent Costy : Merci.
En préparant l’émission on a aussi évoqué la question de l’énergie, de la consommation ; Angie l’a un petit peu évoquée en disant que les nano-ordinateurs étaient un peu moins consommateurs. Finalement, si on remplace actuellement tous les serveurs centralisés des gros GAFAM par autant de serveurs individuels même avec des nano-ordinateurs, est-ce que c’est quelque chose de réaliste sur le plan énergétique ?

Yves-Gaël Chény : J’ai fait deux/trois petits calculs vite faits justement avant l’émission pour être sûr.
Au niveau d’un Raspberry Pi on tourne autour de six watts, de mémoire. Sur un serveur tel que ceux qu’on utilise, on n’est pas des GAFAM, on est un petit centre d’hébergeur très humble à côté de ce qui peut exister, mais on va dire que sur un serveur type deux gros processeurs avec plein de cœurs et beaucoup de mémoire sur laquelle on va faire tourner par exemple 80 sites web, on va arriver à une consommation autour de 70 watts, une consommation moyenne sur une journée. Il y a des pics, forcément. On va se rendre compte assez vite que finalement ça ne représente que 10 Raspberry Pi. En termes de puissance, les Raspberry Pi vont être à peu près 100 fois en dessous. Donc on peut se dire qu’en termes d’efficacité énergétique on a peut-être un petit ratio autour de 10. Ce n’est pas ouf ! Ce ne sont pas non plus les mêmes usages, bien sûr, c’est certain. [Un Raspberry Pi consomme environ 6 watts et a une capacité de 1000 millions d’informations par seconde (Mips). Un Bi-Xeon récent consomme 70 watts en moyenne mais il est 100 fois plus efficace. En combinant les deux, on a un facteur 10 en faveur du Bi-Xeon. Cependant il faut bien sûr étudier chaque situation et adapter aux besoins. Note de l’orateur].

Laurent Costy : Et puis le temps qu’on remplace tous les serveurs des GAFAM par des nano-ordinateurs, on a le temps de voir venir, c’est le cas de le dire. Il ne faut pas se freiner à cause de l’énergie pour l’instant. La question doit se poser, il faut systématiquement penser à la sobriété de notre matériel informatique. Néanmoins il ne faut pas s’interdire de réfléchir à ces situations-là et après, peut-être, réfléchir à des logiques plutôt chatons justement, chercher un chaton si on n’est pas à l’aise techniquement. C’est peut-être, finalement, le conseil qu’on pourrait donner. Angie,

Angie Gaudion : Oui. Que ce soit sur le plan technique ou, justement, sur la question énergétique, les chatons, enfin les structures qui sont membres du Collectif, sont composées de personnes qui, en tout cas, réfléchissent à ces questions et essayent de faire au mieux.
J’ai aussi un autre élément sur l’aspect énergétique qui me semble assez intéressant. J’ai lu à plein d’endroits que l’auto-hébergement c’était cool, on pouvait récupérer son ancien ordinateur et installer son serveur dessus. J’émets une énorme réserve au sens où les anciens ordinateurs consomment vraiment beaucoup d’énergie. C’est-à-dire que ceux qui ont dix ans, qui pourraient très bien être utilisés en tant que serveurs, souvent il n’y a pas besoin d’avoir une machine de guerre pour un serveur en auto-hébergement, mais attention parce que ce sont souvent des machines qui, pour le coup, n’ont pas été pensées, au moment de leur conception, avec cette régulation énergétique.
C’est bien parce qu’on recycle. En fait, tout dépend de ce qu’on entend dans l’énergie. On utilise du matériel qui n’est plus utilisé, en termes de recyclage, de toute façon on sait bien qu’on ne peut pas en faire grand-chose pour un usage, mais, en même temps, on consomme plus d’énergie ; c’est le paradoxe. En tout cas, quand on calcule un coût écologique, c’est toujours compliqué de savoir sur quels aspects on va.

Laurent Costy : Il ne faut pas non plus oublier l’énergie grise. J’allais recommander aux gens, justement, de recycler leurs appareils, c’est bien que tu mettes ce petit bémol-là. Néanmoins il ne faut pas non plus négliger l’énergie grise, je crois que c’est comme ça que ça s’appelle, toute l’énergie qui est nécessaire à la fabrication de l’appareil qui, finalement, est bien supérieure à tout le temps d’utilisation de l’appareil.
Tout ça se pèse, ça se met dans la balance. Peut-être que vous pouvez utiliser votre vieil appareil pour expérimenter, ne serait-ce que pour acquérir les compétences, pour tester, sans le faire tourner 24 heures sur 24, mais au moins vous allez pouvoir tester quelques fois la fonction de mise à disposition de fichiers, etc. C’est peut-être une bonne approche pour essayer avant d’acheter, par exemple, un nano-ordinateur si vous avez l’intention de laisser un serveur tourner longtemps. C’est peut-être un peu cette logique-là.

Angie Gaudion : Pour rebondir, tu parlais de 24 heures sur 24, peut-être qu’on n’a pas besoin que ses données soient accessibles tout le temps, donc on peut aussi mettre en place des programmateurs qui, du coup, allument et éteignent son serveur auto-hébergé en fonction de ses besoins. Ça dépend de combien on est dessus, ça dépend du type de contenu qu’on a à diffuser, mais je trouve que c’est quelque chose qu’on oublie parfois et qui peut être assez intéressant. On peut peut-être aussi penser, du coup, à avoir de l’énergie renouvelable. On trouve des tutoriels comment connecter, par exemple, un Raspberry à un panneau solaire en direct. Là, pour le coup, on a encore un autre rapport écologique sur l’alimentation de son auto-hébergement.

Yves-Gaël Chény : C’est vrai que sur ce sujet du Raspberry Pi branché à un panneau solaire, les curieux de la cartographie et fans d’OpenStreetMap peuvent aller jeter un petit coup d’œil du côté des projets autour des balises RTK ou autres qui utilisent ce procédé de façon assez heureuse.

Laurent Costy : Très bien. Merci pour ces précisions.
C’est vrai que si on met un serveur pour les photos familiales, peut-être que ce serveur n’a pas besoin d’être connecté entre 23 heures et 7 heures du matin, personne ne va aller consulter les photos du serveur pendant la nuit, pour illustrer un peu ce que disait Angie.
Après, effectivement, si on veut héberger ses données de manière un peu réfléchie, le Collectif CHATONS est là pour nous. J’ai cherché sur Internet avant, je crois que c’est quand même la plus grosse communauté dans la galaxie d’hébergeurs ouverts et transparents. Je n’en ai pas vu ailleurs, en tout cas dans le système solaire, je n’ai pas vérifié dans la galaxie ; je crois que vous pouvez avoir confiance là-dedans.
Une dernière question à tous les deux avant de se quitter, c’est peut-être la question bonus que je ne vous ai pas fait préparer : comment voyez-vous l’évolution de l’auto-hébergement dans les années à venir ? Angie.

Angie Gaudion : Avec ma casquette et mon prisme chaton je ne revendique pas l’auto-hébergement, en tout cas au sens d’héberger chez soi. Pour moi il y a vraiment ce truc d’avoir, dans une proximité, des collectifs, des structures qui vont héberger les données de tout un chacun.
Je pense qu’on va, effectivement, vers de plus en plus de relocalisation. On parlait tout à l’heure de décentralisation, mais, du coup, ça va aussi, pour moi, avec une notion de relocalisation, de pouvoir rencontrer le prestataire qui va gérer les services auxquels je souhaite accéder, mes données, pouvoir faire avec. Cette notion de transmission de compétences en se tournant vers des personnes qui ont les ont déjà et qui vont pouvoir, entre guillemets, « nous les transmettre », donc faire partie d’un projet plus collectif. Je pense que c’est assez intéressant. Je suis tombée sur un truc : si on veut monter un auto-hébergement, je pense qu’il faut le penser de manière collective, essayer de trouver des voisins qui sont intéressés, certains ayant les compétences, certains ayant la disponibilité, et trouver la façon d’organiser tout ça. En gros, même si ce n’est pas forcément une démarche qui sera validée, en tout cas faire une sorte de chaton autour de soi.

Laurent Costy : Merci.

Yves-Gaël Chény : Je joins mes vœux à ceux d’Angie là-dessus. Je vois vraiment cela comme des actions collectives, qu’elles soient professionnelles ou associatives, ce côté à la fois distribué, réparti sur le monde entier, espérons, mais au moins en France, sur des systèmes ou des services interopérables, open source, ouverts, avec des gens qui sont prêts à partager leurs connaissances. Travailler tous ensemble, ce serait vraiment magnifique !

Laurent Costy : Merci beaucoup pour ces mots de la fin.
Je vais vous remercier tous les deux pour cet échange au cours duquel j’ai beaucoup appris. J’espère qu’on a donné envie aux gens d’essayer, en tout cas de se questionner par rapport à leurs données. Merci à tous les deux. Je repasse la parole à Isabella.

Isabella Vanni : Merci à Angie à Yves-Gaël. Je remonte juste quelques remarques intéressantes qu’on a eues sur le salon de webchat. Une personne dit : « Je suis content de YunoHost, je l’ai depuis plusieurs années, je ne suis pas informaticien à la base et j’en suis content ». Une autre personne dit que la partie la plus compliquée c’est avec l’opérateur de la box. Voilà, pour revenir sur le même sujet, c’est-à-dire que c’est hyper-intéressant et on vous invite, si vous en avez envie, d’expérimenter avec, visiblement, un petit point de vigilance sur la partie box.
Merci Laurent pour avoir préparé et animé ce sujet.

[Virgule sonore]

Isabella Vanni : Vous êtes de retour en direct sur radio Cause Commune. Nous allons maintenant faire une pause musicale.

[Virgule musicale]

Isabella Vanni : Après la pause musicale nous entendrons la chronique de Vincent Calame qui est déjà arrivé au studio, sur le thème « La chasse aux dépendances.

Nous allons écouter un titre de Ollo, Lóstrego !, un groupe rock espagnol avec des influences post-rock, rock alternatif et rock progressif ou progrock. C’est un morceau que nous avons déjà eu l’occasion de diffuser par le passé. Nous l’avons aussi diffusé à l’occasion de la Playlist de Libre à vous ! n°3, donc commenté par Valentin qui est un autre animateur de la radio Cause Commune. De mémoire c’est l’un des morceaux préférés de mon collègue Étienne Gonnu.
On va maintenant écouter Caducifolia par Ollo, Lóstrego !. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Caducifolia par Ollo, Lóstrego !

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Isabella Vanni : Nous venons d’écouter Caducifolia par Ollo, Lóstrego !, disponible sous licence libre Creative Commons By SA 3.0.

[Jingle]

Isabella Vanni : Je suis Isabella Vanni. Nous allons passer au sujet suivant.

[Virgule musicale]

Chronique « Jouons collectif » de Vincent Calame, bénévole à l’April, sur le thème « La chasse aux dépendances »

Isabella Vanni : Nous allons poursuivre avec la chronique « Jouons collectif » de Vincent Calame, bénévole à l’April, sur le thème « La chasse aux dépendances ».
Bonjour Vincent. À toi la parole.

Vincent Calame : Bonjour Isabella.
Dans ma chronique d’aujourd’hui, je vais parler un peu « tambouille de codeur ».
C’est parti d’une brève que j’ai vu passer la semaine dernière : un tribunal régional de Munich, en Allemagne, aurait condamné un éditeur de site web pour avoir divulgué l’adresse IP d’un visiteur en utilisant le service de téléchargement de polices de caractères de Google qui s’appelle Google Fonts. Pour faire court, je rappelle que l’adresse IP c’est ce qui identifie votre ordinateur quand vous naviguez sur la toile et c’est considéré comme une donnée personnelle. Si vous voulez utiliser le service Google Fonts dans votre site web, par exemple pour mettre une police différente à votre titre de page par rapport à votre texte principal, vous allez mettre, dans votre code, une instruction qui va aller télécharger la police sur les serveurs de Google. Ce faisant, l’internaute transmet son adresse IP à Google sans le savoir. Eh oui ! De là, cette condamnation. Pour le moment, je n’ai pas lu beaucoup de commentaires sur cette brève et je ne sais pas quelles vont en être les implications. Mon impression personnelle c’est qu’elles peuvent être énormes tant il est fréquent, dans un site, d’utiliser ce type de service.

Isabella Vanni : Mais pour quelle raison utiliser un service comme Google Fonts ?

Vincent Calame : D’abord pour des raisons bêtement pratiques. Il faut reconnaître que ce service est bien fichu et fait gagner du temps quand on est dans la phase de développement d’un site, quand il n’est pas encore public et que les desiderata du client changent régulièrement. Il veut telle police de caractères à tel endroit ? Hop !, en insérant la simple ligne de code fournie par Google Fonts, elle est prête à être utilisée. Si le client change d’avis parce qu’il se rend compte que la police de caractères est illisible sur petit écran, là aussi le changement se fait rapidement par copier-coller.
Google n’est pas le seul, loin de là, à proposer ce type de service. De nombreuses bibliothèques JavaScript, libres ou non, proposent un mécanisme pour les insérer rapidement grâce à un lien direct sur leur serveur. Pour rappel, JavaScript est un langage informatique qui permet d’animer une page web. Par exemple, sur le site de notre émission préférée, libreavous.org, le lecteur audio d’une émission propose plusieurs options comme l’accès à un chapitre directement ou une vitesse de lecture plus ou moins rapide et ce lecteur fonctionne grâce à un logiciel libre appelé Podlove. Quand nous avons fait les premiers essais d’utilisation de Podlove, nous avons naturellement utilisé la version du logiciel proposée sur les serveurs. C’est ensuite, une fois que les tests ont été concluants, et que nous avons confirmé l’utilisation du logiciel, que nous avons hébergé la bibliothèque sur le serveur de libreavous.org.

Isabella Vanni : Donc utiliser un tel service pendant la phase de développement est compréhensible, c’est lorsque le site est proposé au public qu’il faut éviter ?

Vincent Calame : Oui. Exactement. D’ailleurs une des dernières étapes avant l’ouverture d’un site web au public doit être ce que j’ai pris comme titre de ma chronique « La chasse aux dépendances », c’est-à-dire vérifier que la lecture de la page n’est pas accompagnée d’accès à des serveurs extérieurs. Au fond, le jugement du tribunal, dont je parlais au début de la chronique, ne fait que rappeler une bonne pratique, la seule différence c’est qu’elle passe du statut de simplement vertueuse à celui de carrément obligatoire, sauf consentement explicite de l’internaute. Du coup, après la lecture de la brève, j’ai fait un petit balayage des différents sites web que j’ai codés ces dernières années et j’ai pu me rendre compte qu’un certain nombre faisaient appel au service de Google Fonts. Résultat, j’y ai passé mon après-midi mais maintenant c’est bon, c’est carré, je n’ai plus aucun appel à ce service-à.

Isabella Vanni : Ouf !

Vincent Calame : Oui, ouf ! Il faut d’abord balayer chez soi ! Cela dit, on a parfois des surprises. Pour reprendre l’exemple de Podlove, nous nous sommes rendu compte que l’hébergement du script principal sur le serveur de Libre à vous ! ne suffisait pas, car le script lui-même faisait appel directement à d’autres scripts hébergés sur le serveur de Podlove. C’est d’ailleurs Frédéric Couchet qui a trouvé la solution pour que libreavous.org soit exemplaire.
Autre exemple, en faisant une recherche dans mon propre code sur toutes les occurrences de l’usage de Google Fonts, je me suis rendu qu’une bibliothèque libre que j’utilisais faisait elle-même appel à ce service dans un cas très particulier. Autrement dit, héberger une bibliothèque ne suffit pas, il faut aussi contrôler ce qu’elle fait et bien vérifier qu’elle ne fait pas des appels intempestifs à des éléments extérieurs.

En conclusion, j’ignore quelle sera la suite de ce jugement à Munich. Fera-t-il des petits ? Sera-t-il cassé en appel ? Quelle conséquence va-t-il avoir sur la jurisprudence ? En tout cas c’est à suivre parce que ce sont quelques pratiques de programmation qui risquent de se trouver chamboulées.

Isabella Vanni : Merci beaucoup Vincent pour cette chronique effectivement plus informatique aujourd’hui. À suivre, bien évidemment, ce qui concernera la jurisprudence par rapport aux dépendances.
Merci et au mois prochain.

Vincent Calame : Oui. Au mois prochain

Isabella Vanni : Nous approchons de la fin de l’émission. Nous allons terminer par quelques annonces.

[Virgule musicale]

Quoi de Libre ? Actualités et annonces concernant l’April et le monde du Libre

Isabella Vanni : L’appel à présentations est ouvert pour la prochaine rencontre internationale OW2 qui aura lieu les 8 et 9 juin 2022 en ligne. OW2 est une communauté internationale et indépendante spécialisée dans le développement de logiciels libres pour les entreprises. Le thème central de l’édition de cette année est « Des logiciels libres, fiables et sans surprise ». Vous avez jusqu’au 27 février pour soumettre vos propositions qui doivent être rédigées en anglais. Le site est ow2.org.
Demain, mercredi 9 février 2022, le Sénat se réunit en séance publique pour discuter d’une proposition de loi visant à encourager l’usage du contrôle parental sur certains équipements et services vendus en France et permettant d’accéder à Internet. Sans qu’il soit ici question de discuter du fond de la proposition de loi, sa rédaction actuelle pourrait laisser craindre des atteintes aux libertés informatiques des consommateurs et consommatrices. L’April a transmis des propositions d’amendements, notamment pour garantir le droit d’acheter du matériel informatique sans système d’exploitation.
L’April a lancé une nouvelle édition de l’initiative Libre en Fête, des évènements de découverte du logiciel libre partout en France autour du 20 mars. Toute organisation ayant à cœur la promotion du logiciel libre et de la culture libre est invitée à proposer un ou plusieurs évènements à destination du grand public. Les dates retenues pour l’édition 2022 vont du samedi 5 mars au dimanche 3 avril. Bien sûr, un évènement peu avant ou peu après le 3 avril est aussi le bienvenu.
Je vous invite à consulter le site de l’Agenda du Libre, agendadulibre.org pour trouver des évènements en lien avec le logiciel libre ou la culture libre près de chez vous.

Notre émission se termine.
Je remercie les personnes les personnes qui ont participé à l’émission : Laurent Costy, Angie Gaudion, Yves-Gaël Chény, Isabelle Carrère d’Antanak, Vincent Calame.
Aux manettes de la régie aujourd’hui mon collègue Frédéric Couchet.
Merci également aux personnes qui s’occupent de la post-production des podcasts : Samuel Aubert, Élodie Déniel-Girodon, Lang1, bénévoles à l’April, et Olivier Grieco, le directeur d’antenne de la radio.
Merci aussi à Quentin Gibeaux, bénévole à l’April, qui découpera le podcast complet en podcasts individuels par sujet.

Vous retrouverez sur notre site web, libreavous.org, toutes les références utiles ainsi que sur le site de la radio, causecommune.fm.
N’hésitez pas à nous faire des retours pour indiquer ce qui vous a plu mais aussi des points d’amélioration. Vous pouvez également nous poser toute question et nous y répondrons directement ou lors d’une prochaine émission. Toutes vos remarques et questions sont les bienvenues à l’adresse contact@libreavous.

Nous vous remercions d’avoir écouté l’émission. Si vous avez aimé cette émission, n’hésitez pas à en parler le plus possible autour de vous et également à faire connaître la radio Cause Commune, la voix des possibles.

La prochaine émission aura lieu en direct mardi 15 février 2022 à 15 heures 30. Nous ne sommes pas encore en mesure de vous annoncer ce sur quoi portera notre sujet principal.

Nous vous souhaitons de passer une belle fin de journée. On se retrouve en direct le 15 février et d’ici là, portez-vous bien.

Générique de fin d’émission : Wesh Tone par Realaze.