Entretien avec Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la Transition numérique et des Télécommunications

Delphine Sabattier : Bonjour à tous. Grand entretien aujourd’hui du ministre délégué en charge de la Transition numérique et des Télécommunications. Jean-Noël Barrot [1] est sur le plateau de Smart Tech. Merci beaucoup de nous avoir accordé cet entretien. On va passer une vingtaine de minutes ensemble. Vous êtes ministre chargé du numérique, si je raccourcis, depuis cet été, l’été dernier, 2022, c’est assez récent. Tout le monde ne vous connaît pas forcément, je me disais que ce serait intéressant de resituer un petit peu votre parcours.
Vous avez un profil qui, d’ailleurs, correspond très bien à ce qu’on attend aujourd’hui d’un ministre du numérique puisque vous avez démarré dans une prestigieuse université, le MIT [Massachusetts Institute of Technology] aux États-Unis. Vous êtes aussi économiste, vous avez publié plusieurs travaux dans des revues internationales sur l’économie et l’innovation. Vous avez, je dirais, le profil parfait.
Comment se sont passées vos premières rencontres avec l’écosystème ? Qui avez-vous vu en premier lorsque vous êtes arrivé en poste ?

Jean-Noël Barrot : J’ai vu un certain nombre d’acteurs dans les différentes dimensions de ce ministère. Ce ministère a, parmi ses missions, la protection de nos concitoyens dans l’espace numérique. Un certain nombre d’acteurs sont mobilisés sur ces sujets, en particulier les acteurs de la protection de l’enfance.
Ce ministère a aussi mission l’accessibilité et l’inclusion dans l’espace numérique. Ça passe par la couverture des réseaux de télécommunications et ça passe, ensuite, par l’inclusion de celles et ceux qui sont le plus éloignés des usages numériques ; là aussi un certain nombre d’interlocuteurs à rencontrer.
Et enfin, la troisième mission de ce ministère, c’est évidemment le soutien à l’innovation, le développement de la French Tech [3], le virage vers plus de souveraineté que le président de la République,le gouvernement et moi-même avons à cœur de lui faire prendre. Donc, évidement, un certain nombre de rencontres dans ce domaine-là également.

Delphine Sabattier : C’est vrai qu’il y avait beaucoup d’attentes de tout l’écosystème sur les trois sujets que vous abordez. La bonne nouvelle c’est qu’on avait enfin un ministère délégué auprès du ministre de l’Économie, une importance montante de ce sujet, on le voit bien, au sein du gouvernement.
Je passe très vite parce qu’on va rentrer plus en détail sur chacun des sujets que vous avez abordés. Je passe très vite sur ces premiers mois pour arriver en janvier. Vous avez effectué votre premier voyage aux pays des Big Tech, vous êtes allé voir ces géants du numérique à l’occasion du CES à Las Vegas [Consumer Electronics Show], début janvier.
Comment s’est passée votre rencontre avec Elon Musk ? Vous allez nous offrir les premiers retours en direct.

Jean-Noël Barrot : Je suis allé aux États-Unis d’abord pour accompagner les 170 startups qui figuraient dans le pavillon français du CES.

Delphine Sabattier : Première délégation étrangère.

Jean-Noël Barrot : Première délégation étrangère et la France sacrée championne de l’innovation cette année, qui est le titre le plus prestigieux du classement du CES. Donc une grande fierté et une grande fierté également de voir à quel point la France est reconnue comme une grande nation d’innovation aux États-Unis à une douzaine d’heures.

Delphine Sabattier : Ce qui n’était pas forcément gagné il y a quelques années.

Jean-Noël Barrot : Ce qui n’était pas forcément gagné puisqu’il y a encore 20 ans le président des États-Unis disait que le problème avec les Français c’est qu’ils n’avaient pas de mot pour traduire le terme « entrepreneur ». Il y a évidemment quelque chose de fondamental qui a changé.
Et puis effectivement, juste après le CES, nous sommes allés à San Francisco pour rencontrer un certain nombre d’acteurs et évoquer avec eux la question de régulation à laquelle nous sommes profondément attachés, à commencer par Elon Musk, le patron de Twitter. Je lui ai rappelé notre attachement à ce qu’il puisse, le plus vite possible, se mettre en conformité avec les nouvelles règles européennes du règlement sur les services numériques, le DSA Services Act [2], qui va entrer en vigueur prochainement. Il nous a répondu que c’était bien son intention et que les équipes de Twitter se rendraient, au mois de janvier, aux réunions préparatoires organisées par la Commission européenne, donc des signaux plutôt rassurants, même si nous restons extrêmement vigilants.

Delphine Sabattier : Il avait d’ailleurs dit la même chose à l’époque du déplacement de Thierry Breton, il avait dit qu’il se plierait tout à fait à la réglementation européenne. Là, vous avez même pu lui épingler le coq de la French Tech. N’y a-t-il pas un décalage entre ses déclarations, le fait qu’il se montre effectivement comme tout à fait en accord avec la position française en matière de politique numérique et ce qu’on voit aujourd’hui sur Twitter ?

Jean-Noël Barrot : Le juge de paix ce sera l’application du DSA [2] : soit Twitter se conforme à nos règles et, dans ce cas-là, tout ira bien, soit l’entreprise ne s’y conforme pas et alors elle s’expose à une amende qui ira jusqu’à 6 % du chiffre d’affaires mondial, c’est-à-dire 300 millions d’euros si on s’appuie sur le chiffre d’affaires de l’année dernière. En cas de récidive, elle pourrait être interdite sur le continent européen.
Ceci étant dit, notre souhait c’est que Twitter puisse se conformer et puisse continuer à œuvrer dans les sens des priorités qui sont les nôtres. Je l’ai interrogé sur la protection des mineurs dans l’espace numérique dont il nous a dit avoir fait une priorité première, de même que sur la question de la désinformation et de l’enfermement dans des bulles que des réseaux comme Twitter peuvent provoquer dans l’espace public ; autant de sujets sur lesquels il escompte faire un certain nombre de progrès.

Delphine Sabattier : Comment était-il ? Était-il volubile ou plutôt à l’écoute ?

Jean-Noël Barrot : Il était à l’écoute, mais il était également tout à fait ouvert pour expliquer quelle est sa stratégie. Maintenant, je reste et nous restons particulièrement vigilants et attentifs à ce que ses mots soient suivis d’effets. À l’issue de cette rencontre, je lui ai remis et épinglé à la boutonnière le coq rouge de la French Tech. Elon Musk est avant tout un entrepreneur qui a créé des entreprises d’envergure mondiale extrêmement disruptives et c’était une manière de faire de lui un ambassadeur de notre coq rouge.

Delphine Sabattier : Excellente idée !
Ensuite, je ne sais pas si c’était exactement si c’est dans le même ordre, enfin il y a eu un déjeuner avec un cercle d’investisseurs américains de la baie de San Francisco. Comment perçoivent-ils notre French Tech [3], nos startups et, au-delà même, notre tissu économique autour de la tech en France ?

Jean-Noël Barrot : Je crois qu’il y a une reconnaissance unanime que la France produit des talents, qu’il est difficile de trouver ailleurs qu’en France. D’ailleurs, un certain nombre de ces talents s’exportent et on les retrouve dans la Silicon Valley, j’ai eu l’occasion de rencontrer certain d’entre eux.

Delphine Sabattier : Yann Le Cun [4], par exemple, à l’IA chez Facebook.

Jean-Noël Barrot : Absolument, et d’autres français également chez Facebook qui occupent des rôles, des places très prestigieuses et très importantes.
D’autre part, la reconnaissance qu’il y a quelque chose qui a fondamentalement changé depuis dix ans et, singulièrement, depuis cinq ans avec l’élection d’Emmanuel Macron en France avec l’émergence d’entreprises très prometteuses, de forte croissance, atteignant le statut de licornes dans tous les domaines, à la fois dans les domaines du software, du logiciel, du SaaS [Software as a Service] comme on dit dans le jargon, mais aussi, désormais, dans des secteurs comme la Green Tech. La France est désormais le premier écosystème Green Tech en Europe, le deuxième après les États-Unis et cela se voit depuis les États-Unis.

Delphine Sabattier : Il y a une crispation sur le marché du financement, en particulier très forte du côté des États-Unis. En France on a le ressent peut-être un peu moins mais quand même, quand je reçois des entrepreneurs ici, ils me disent que cette année ça va être beaucoup plus compliqué pour convaincre les investisseurs. Qu’avez-vous retenu justement à ce sujet de votre voyage aux États-Unis justement avec les VC [Venture capitalists] que vous avez rencontrés ?

Jean-Noël Barrot : Nous avons retenu, d’abord, que la situation est effectivement incertaine et qu’elle peut freiner les décisions d’investissements, que ce soient les investissements des entreprises ou celles des investisseurs. Dans ce contexte, les chiffres de la France sont, à ce stade, plutôt rassurants. Avec 13 milliards de fonds levés par les entreprises innovantes en France l’année dernière, nous progressons de 20 % par rapport à l’année 2021 là où l’Allemagne ou les États-Unis régressent de 20 % ou plus.

Delphine Sabattier : Comment l’expliquez-vous ? On a peut-être un temps de retard avec effet de resserrement.

Jean-Noël Barrot : Peut- être un temps de retard ou peut-être, et c’est ma conviction, une forme de maturité atteinte par notre écosystème qui reste relativement jeune par rapport à d’autres écosystèmes ce qui lui permet de résister peut-être un peu mieux à ce qui se passe sur le plan des financements.
Les investisseurs que nous avons rencontrés évoquent évidemment une forme de ralentissement de la levée de nouveaux fonds dans le courant de l’année 2023, mais ils reconnaissent qu’avec les fonds qui ont été levés en 2021 ou 2022 ils disposent d’un certain nombre de ressources qui peuvent leur permettre d’accompagner le développement des entreprises déjà existantes. Se pose une question sur les entreprises à naître et le risque auquel il faut que nous puissions veiller : que cette situation un petit moins favorable sur le plan des financements ne décourage ou ne ralentisse ce grand élan d’entreprenariat qu’on a pu constater ces dernières années. L’un d’entre eux rappelait que c’est pendant ces périodes-là, par exemple au début des années 2000 ou juste après l’année 2008, que ce sont créés certains des plus grands succès entrepreneuriaux mondiaux.

Delphine Sabattier : Exact.
Il y a l’effet Start-up Nation qu’il faut entretenir, continuer à avoir cet élan entrepreneurial en France, certes, mais il faut aussi faire grandir, mûrir toutes ces entreprises très prometteuses françaises et, pour ça, on a besoin de fonds d’investissement beaucoup importants. En France on a la Bpi [Bpifrance, banque publique d’investissement], mais ce n’est pas suffisant, on ne peut pas compter juste sur l’aide publique.

Jean-Noël Barrot : On a la Bpi d’un côté, qui fait évidemment un travail remarquable depuis dix ans, on fête les dix ans de Bpi cette année. À côté de Bpi une initiative a été lancée sous le quinquennat précédent et a porté ses fruits pour mobiliser l’épargne des Français et les fonds des assureurs, notamment pour que les fonds de capital risque, les fonds de capital investissement français atteignent une taille qui leur permet de financer des entreprises innovantes qui atteignent une certaine taille, c’est l’initiative TBI [Transatlantic Business Initiative] sur laquelle nous sommes en train de travailler pour qu’elle se régénère. Elle sera doublée, ce sera annoncé dans quelques jours, de la concrétisation d’un fonds de fonds paneuropéens, publics, voulu par le président de la République, qui s’appelle Scale-Up Europe [5], qui va permettre lui aussi de venir nourrir des fonds d’investissement européens susceptibles d’atteindre la taille nécessaire pour financer ces jeunes mais très grandes entreprises, qu’on appelle les licornes, pour les pousser jusqu’à l’introduction en bourse dont on souhaite, évidemment, qu’elle puisse se produire en France.

Delphine Sabattier : C’est vrai qu’il faut penser à cette échelle européenne et c’est souvent ce qu’on nous dit dans ce secteur des technologies. Ça oblige aussi de penser une politique tech à l’Européenne. On a des textes, on a des règlements, aujourd’hui on arrive des consensus législatifs européens. Est-ce qu’on arrive à avoir une politique économique commune autour de la tech en Europe et comment cette politique numérique se positionne-t-elle par rapport à celle des États-Unis ? La question de la souveraineté est aussi une question qui peut créer de frictions.

Jean-Noël Barrot : Notre ambition c’est de créer un marché unique du numérique pour que, effectivement, les entreprises, qu’elles se créent en France ou dans d’autres États membres de l’Union européenne, puissent rayonner dans l’ensemble de l’Europe et faire levier du marché européen qui reste le premier marché mondial.
Pour ça nous avons, depuis quelques mois, commencé à prendre, au niveau européen, un certain nombre de textes qui vont organiser le marché des données et les marchés numériques. Je parlais du DSA tout à l’heure, c’est vrai du DMA Markets Act [6], c’est vrai du règlement sur les données, c’est vrai du règlement sur l’intelligence artificielle, c’est vrai de MiCA in Crypto-Assets pour le marché des cryptos.
C’est une forme de régulation non pas pour étouffer l’innovation, mais pour harmoniser les règles du jeu au niveau européen de manière à ce que l’Europe devienne véritablement un marché unique, en tout cas pour le numérique.

Delphine Sabattier : Les règles c’est une chose et parfois elles sont tellement strictes et contraignantes que l’écosystème s’inquiète quand même qu’on ne s’étouffe pas avant d’éclore en Europe. Mais s’entendre sur une politique numérique économique, je parle en termes de concurrence, vous évoquez le DMA, comment est-ce qu’on construit ces blocs européens ?

Jean-Noël Barrot : C’est dans la discussion avec nos partenaires. La Commission fait un certain nombre de propositions et ensuite le Parlement européen et les États membres s’en saisissent.
Vous évoquiez les États-Unis. Il est intéressant de constater que sur le sujet des cryptos, sur le sujet de l’intelligence artificielle, les États-Unis sont au point zéro. Nous avançons, ça peut créer quelques inquiétudes, mais un certain nombre d’acteurs sont plutôt satisfaits de voir l’Europe avancer sur un certain nombre de sujets. Quand on innove et quand on bouscule un certain nombre de marchés établis, on a besoin aussi — d’ailleurs les responsables d’OpenAI [7], que nous avons rencontrés, nous l’ont dit très clairement — d’avoir un certain nombre de bornes. S’agissant des cryptos, s’agissant de l’intelligence artificielle, les acteurs, que ce soit en Europe ou aux États-Unis, ont besoin, pour orienter leurs activités, d’avoir un certain nombre de cadres et de bornes. C’est ce que nous avons essayé de mettre en place en Europe. Je crois qu’avec MiCA nous avons trouvé le bon équilibre entre protection des investisseurs dans le Web3] [8], dans les cryptos, et le soutien à l’innovation.

Delphine Sabattier : Ces acteurs du Web3 vous ont d’ailleurs adressé une lettre ouverte [9].

Jean-Noël Barrot : Pour nous encourager et je crois que nous allons dans la bonne direction. Sur les crytos actifs nous avons bien avancé, il faut maintenant que nous puissions avancer sur la question des NFT Token, s’agissant en tout cas du Web3. J’ai été favorablement, je dirais étonné, de voir des acteurs à la frontière technologique nous féliciter, alors qu’ils sont Américains, pour les initiatives que nous prenons sur le plan régulatoire en Europe.

Delphine Sabattier : Aux États-Unis, si je reviens sur votre voyage, vous êtes allés chez OpenAI qui est aujourd’hui sous les feux des projecteurs en matière de déploiement d’intelligence artificielle conversationnelle, avec cette idée qu’on va avoir un langage de plus en plus naturel entre nous les humains et les machines, ce qui pose de grandes questions éthiques. On a eu Microsoft ici en plateau qui disait qu’il avançait en construisant des cadres. Mais chacun a son cadre un peu différent sur ces questions éthiques.

Jean-Noël Barrot : Exactement et c’est la raison pour laquelle les dirigeants, enfin Sam Altman, le CIO Information Officer créateur et dirigeant d’OpenAI, a lui-même, d’une part, salué le règlement sur l’intelligence artificielle en cours de discussion au niveau européen, qui prend le sujet avec une approche par les risques et qui évoque un certain nombre d’usages pour lesquels l’intelligence artificielle est soit interdite, soit très strictement encadrée, soit beaucoup plus libre. Par ailleurs, Sam Altman a aussi évoqué la nécessité, au-delà de ce règlement pour l’intelligence artificielle, que la puissance publique, que les États donnent un certain nombre de lignes directrices, en tout cas de bornes éthiques sur le sujet de l’intelligence artificielle.

Delphine Sabattier : Vous a-t-il semblé que nous étions en phase culturellement sur ces questions éthiques entre les États-unis et l’Europe ?

Jean-Noël Barrot : Vous avez raison, sur les questions éthiques il y a des différences qui peuvent s’exprimer d’une culture à l’autre et d’un continent à l’autre. Il y a aussi un certain nombre de convergences. Nous avons, en France, un Comité national pilote pour l’éthique du numérique [10] qui a, depuis quelques années, rendu un certain nombre de travaux y compris sur les agents conversationnels. Je crois qu’il faut qu’on puisse avancer progressivement vers quelque chose qui ressemble à, je dirais, une appropriation de ces questions éthiques dans le débat public, de la même manière que ces questions se sont posées et ont été appropriées pour la bioéthique.

Delphine Sabattier : Le temps passe très vite. Je voulais qu’on parle, qu’on dise un mot du service universel du très haut débit que vous appelez de vos vœux. Qu’est-ce que ça va changer ?

Jean-Noël Barrot : je veux d’abord rappeler qu’on m’a remis hier un rapport [11], qui fait le bilan de dix années du Plan France Très Haut Débit dont on va, là aussi, fêter le dixième anniversaire cette année et qui montre que c’est un vrai succès. C’est un vrai succès puisque cette politique a atteint ses objectifs sans dépassement de coût et avec des effets très concrets. L’arrivée de la fibre, en tout cas c’est ce que montrent les travaux des chercheurs qui ont rédigé le rapport, a permis de créer des emplois, de créer des entreprises, de créer de la valeur ajoutée. Il reste encore, évidemment, un certain nombre de difficultés à lever en matière de qualité et, bien sûr, de raccordement des derniers logements qui sont les plus difficiles à faire.
Pour parachever ce Plan France Très Haut Débit, il nous faut effectivement ouvrir un droit au très haut débit pour tous.

Delphine Sabattier : Qu’est-ce que ça veut dire ? Qu’est-ce que ça change ?

Jean-Noël Barrot : Ce que ça change c’est que c’est une forme de garantie pour chacun de nos concitoyens d’avoir un débit minimal, d’avoir accès à des tarifs sociaux quel que soit le lieu où il se trouve sur le territoire national. C’est un travail que j’ai annoncé il y a quelques semaines et que nous engageons avec, pour objectif, de le terminer d’ici l’été pour pouvoir lancer une expérimentation sans doute, même si ça reste à affiner, sur les communes qui font partie des premières à être passées du cuivre à la fibre.

Delphine Sabattier : Autre sujet que je voulais qu’on aborde ensemble, c’est sur la cybersécurité. Vous avez annoncé un plan blanc cyber pour répondre aux nombreuses attaques qui ont touché les hôpitaux en France. Quelles ont été les premières actions qui ont été menées depuis le début de l’année ? Ce plan a été annoncé en décembre, je sais qu’on est au tout début.

Jean-Noël Barrot : C‘est un plan qui agrège un certain nombre d’initiatives portées par différents ministères pour apporter effectivement des réponses très concrètes aux hôpitaux. S’agissant du plan de relance qui s’est déployé sous la responsabilité de Bruno Le Maire, ce sont 150 hôpitaux qui ont été ciblés dès 2021 pour pouvoir bénéficier de parcours de cybersécurité. À la suite de l’attaque sur l’hôpital de Corbeil-Essonnes cet été, j’ai annoncé, avec le ministre de la Santé, une enveloppe supplémentaire qui va permettre de couvrir au moins 150 hôpitaux, de doubler le nombre d’hôpitaux qui bénéficient de ces programmes.
Nous avons pu constater que ces programmes produisent leurs effets, puisque, parmi les collectivités qui ont été attaquées cet automne, la mairie de Caen, par exemple, qui avait terminé son parcours, qui s’était dotée d’un EDR Detection and Response, c’est-à-dire d’un antivirus synchronisé sur l’ensemble des équipements, d’ailleurs produit HarfangLab, une entreprise française, a pu résister à l’attaque et limiter les dégâts.
Nous veillons très attentivement au déploiement de ces parcours de cybersécurité pour que des épisodes comme celui qu’on a connu à Corbeil-Essonnes ou, plus récemment, dans ma ville, à Versailles, ne se reproduise plus.

Delphine Sabattier : Sur le filtre anti-arnaque ça avance aussi ?

Jean-Noël Barrot : Absolument. Le filtre anti-arnaque est donc une protection que nous voulons pouvoir octroyer à l’ensemble de nos concitoyens. Il s’agira d’un filtre qui avertira préventivement l’internaute qu’il est en train de se diriger vers un site malveillant et identifié comme tel. Les travaux techniques sont en cours et j’ai bon espoir que nous aurons une version bêta cet été, c’est-à-dire avant la Coupe du monde de rugby, qui sera enrichi et qui pourra être généralisé à l’été 2024, pour les Jeux olympiques.

Delphine Sabattier : JO 2024, excellente nouvelle.
On termine cet entretien par l’interview express. Jean-Noël Barrot, vous répondez comme vous voulez, de manière personnelle ou professionnelle, mais de manière assez rapide quand même, il faut que ça tienne en deux minutes tout ça.
Quels sont vos vœux pour 2023 ?

Jean-Noël Barrot : De santé, de bonheur, de sérénité et de paix.

Delphine Sabattier : Est-ce que vous avez des inquiétudes ?

Jean-Noël Barrot : Je suis toujours inquiet, mais je suis optimiste.

Delphine Sabattier : Votre idée fixe ?

Jean-Noël Barrot : La protection des Français dans l’espace numérique, car c’est un sujet qui m’a beaucoup marqué en ces six premiers mois de ministère.

Delphine Sabattier : Au-delà des inquiétudes, est-ce qu’il y a des choses qui vous font peur ?

Jean-Noël Barrot : Non. Je crois qu’il ne faut pas avoir peur et, comme le président de la République l’a dit, il faut penser printemps.

Delphine Sabattier : Comment imaginez-vous le futur dans la tech d’ici à cinq ans ?

Jean-Noël Barrot : Je l’imagine souverain, inclusif et soutenable.

Delphine Sabattier : Selon vous, quelle sera la prochaine révolution ?

Jean-Noël Barrot : La prochaine révolution sera peut-être la révolution de l’IA et des modèles d’intelligence artificielle génératifs.

Delphine Sabattier : Savez-vous où vous serez dans cinq ans ?

Jean-Noël Barrot : Je serai au service de mon pays, d’une manière ou d’une autre.

Delphine Sabattier : Merci beaucoup Jean-Noël Barrot, ministre délégué en charge de la Transition numérique et des Télécommunications. C’était son grand entretien dans Smart Tech.

Jean-Noël Barrot : Merci à vous.

Delphine Sabattier : À suivre. On va débriefer vos réponses, Monsieur le ministre, avec deux commentateurs fidèles de Smart Tech.