Émission Libre à vous ! diffusée mardi 19 octobre 2021 sur radio Cause Commune


Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Isabella Vanni : Bonjour à toutes. Bonjour à tous.
Le système d’information géographique libre QGIS c’est le sujet principal de l’émission du jour. Avec également au programme la chronique « Le libre fait sa comm’ » sur l’association CartONG, spécialisée en gestion de l’information, et aussi la chronique « À cœur vaillant, la voie est libre », de Laurent et Lorette Costy, sur le thème du magasin d’applications F-Droid.
Nous allons parler de tout cela dans l’émission du jour.

Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de Libre à vous !, l’émission qui vous raconte les libertés informatiques, proposée par l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.
Je suis Isabella Vanni, coordinatrice vie associative et responsable projets à l’April.

Le site web de l’April est april.org, vous pouvez y trouver une page consacrée à cette émission avec tous les liens et références utiles et également les moyens de nous contacter. N’hésitez pas à nous faire des retours ou à nous poser toute question.

Nous sommes le mardi 19 octobre 2021, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.

À la réalisation de l’émission aujourd’hui mon collègue Étienne Gonnu. Bonjour Étienne.

Étienne Gonnu : Salut Isa.

Isabella Vanni : Nous vous souhaitons une excellente écoute.

[Jingle]

Chronique « Le Libre fait sa comm’ » d’Isabella Vanni, coordinatrice vie associative et responsable projets à l’April, sur CartONG

Isabella Vanni : Nous allons commencer par la chronique « Le Libre fait sa comm’ » qui porte aujourd’hui sur CartONG, une organisation non gouvernementale spécialisée en gestion de l’information, qui diffuse une grande partie de ses ressources sous licence libre Creative Commons Attribution, CC By. Nous avons avec nous aujourd’hui Martin Noblecourt, responsable des projets en cartographie participative et open data chez CartONG. Martin intervient via l’outil libre d’audioconférence Mumble. Bonjour Martin.

Martin Noblecourt : Bonjour.

Isabella Vanni : Merci d’être avec nous aujourd’hui pour parler de CartONG.
Pour commencer je te propose de nous présenter CartONG. Qu’est-ce c’est ? Quels sont ses objectifs ? En quoi ça consiste ?

Martin Noblecourt : Déjà merci pour l’invitation. Je vais présenter rapidement CartONG.
CartONG est une association qui est basée en France, à Chambéry, qui a été fondée en 2006, et qui a pour objectif d’utiliser les outils de la gestion de l’information notamment géographique, donc la cartographie mais pas que, au service de projets de solidarité. Au départ c’étaient beaucoup des projets de solidarité internationale, essentiellement humanitaires. On a travaillé et on travaille toujours beaucoup avec des grandes ONG comme Médecins Sans Frontières ou plusieurs agences des Nations Unies et, petit à petit, ça c’est ouvert à des projets de plus long terme, voire à des projets qu’on pourrait qualifier de sociaux en France. Maintenant, on essaie de couvrir, on va dire, tout le champ de la solidarité et d’appuyer différentes organisations associatives ou publiques avec nos outils qui vont de l’édition de cartes à la collecte de données sur le terrain, en passant par l’organisation d’ateliers de cartographie participative, etc.
CartONG étant une association a à la fois une équipe permanente, qui travaille plutôt, on va dire, pour les grandes organisations qui contribuent à notre financement, mais aussi une équipe de bénévoles, ce qui nous permet de venir en aide à des petites structures qui n’ont pas forcément de budget pour ça.

Isabella Vanni : Merci pour cette présentation. La première question que j’ai à l’esprit c’est comment est-ce que faisaient les ONG avant 2006, avec que CartONG existe ?

Martin Noblecourt : De toute façon, quand on travaille sur des outils de type SIG [Système d’Information Géographique] et cartographie, les gens se débrouillaient toujours avant et ils se débrouillent avec d’autres moyens même actuellement. C’est très rare qu’on fournisse une carte à une organisation sur le terrain qui ne puisse pas se déplacer sans, puisque les gens qui travaillent pour les ONG sont essentiellement des personnels locaux, ce qui est très bien, donc ils connaissent leur propre territoire. On amène surtout des outils supplémentaires en termes d’analyse, de remontée d’informations, qui permettent d’avoir plus de vue d’ensemble, d’aller plus vite et aussi de faciliter la coopération entre acteurs.

Isabella Vanni : Si j’ai bien compris, vous vous appuyez, en fait, sur les acteurs locaux pour la récolte, on va dire, des informations et à Chambéry vous apportez votre expertise pour compléter ?

Martin Noblecourt : Nous sommes vraiment ce qu’on appelle une ONG support, c’est-à-dire que nous ne développons pas le fond des projets, on va aider des organisations qui vont travailler, par exemple, sur les thématiques médicales, sur de l’aide alimentaire ou sur des projets d’environnement. En fait on leur apporte des outils pour être plus, on va dire, efficaces, plus complets, plus inclusifs dans leur travail. Après ça va vraiment dépendre des thématiques, on s’adapte. La plupart de ce qu’on fait concrètement c’est de la formation, c’est-à-dire qu’on accompagne ces organisations, on les aide à définir leurs besoins, à comprendre, à identifier les outils qui leur sont utiles, on les forme, on les accompagne, des fois on les aide un peu dans la mise en œuvre et après elles sont censées se débrouiller pour utiliser ces outils durablement dans la mise en œuvre de leurs activités.

Isabella Vanni : Si on va sur le site de CartONG – on a mis la référence sur la page consacrée à l’émission – on peut voir que vous avez vraiment des projets dans tout le monde. On avait dit que vous mettez la plupart de vos ressources sous licence libre Creative Commons Attribution, CC By. Pourquoi ce choix ?, même si je m’en doute bien, mais je pense que c’est important de le rappeler. Quelles sont les ressources que vous mettez sous CC By et pourquoi ?

Martin Noblecourt : C’est vrai que ça fait quelques années qu’on fait systématiquement cette demande à nos bailleurs et partenaires, c’est-à-dire, quand on développe de la documentation, de pouvoir la publier en licence libre. Dans la très grande majorité ils acceptent, les rares fois où on ne fait pas ça, c’est parce qu’il y a un peu des dimensions de confidentialité ou de vie privée.
On a fait ce choix-là déjà parce que ça nous paraissait naturel, pour en faire bénéficier au plus grand nombre. En plus, étant une association, même quand ce sont des partenaires ONG qui nous financent, la quasi-totalité du financement qu’on reçoit c’est, en fait, de l’argent public directement ou indirectement. Ça nous paraissait aussi tout à fait naturel que ce soit remis au service de l’intérêt général.
Donc effectivement, depuis quelques mois, on a lancé un portail qui s’appelle IM Resource Portal [Information Management Resource Portal]. On est en train de compiler toute notre documentation et, normalement, toutes les ressources qui sont dessus sont sous licence libre.

Isabella Vanni : Merci. Nous allons rajouter cette référence, elle n’y est pas encore, mais il y a déjà un lien pour ce portail j’imagine ou pas encore ?

Martin Noblecourt : Oui. Cet outil-là est quand même plutôt destiné à un public professionnel du secteur humanitaire, on va dire.

Isabella Vanni : D’accord. Je m’en doute bien.
Pour faire la cartographie, vous utilisez un outil, un projet, une initiative dont on a déjà parlé à plusieurs reprises dans notre émission qui est OpenStreetMap. Je voulais te demander quel est le lien entre CartONG et OpenStreetMap ? Comment s’articulent vos relations ?

Martin Noblecourt : Ce qu’il faut déjà voir c’est qu’OpenStreetMap est un projet qui est énormément utilisé à l’international, je pense que vous avez déjà eu l’occasion d’en parler, parce qu’il permet de compléter, en fait, et de remplir l’absence, dans de nombreux pays de bases de données géographies existantes de qualité. Au-delà de l’aspect, on va dire, philosophique c’est déjà opérationnellement une nécessité pour énormément d’organisations qui travaillent dans le secteur de la solidarité internationale. Pour nous c’était un petit peu un choix naturel.
Au-delà de ça, ça fait plusieurs années que nous essayons de soutenir l’écosystème OpenStreetMap dans la mesure de nos moyens. Il y a de très nombreuses organisations aujourd’hui dans l’humanitaire qui utilisent, qui soutiennent, qui appuient OpenStreetMap ; c’est d’ailleurs assez débattu, c’est un écosystème très riche. Au niveau de CartONG ça a pris notamment la forme d’une participation à un projet qui s’appelle Missing Maps qui, comme son nom l’indique, vise à cartographier les endroits dans le monde à où il n’y a pas de données en utilisant OpenStreetMap plutôt dans une logique, on va dire, de préparation aux catastrophes et de projets de développement. C’est-à-dire qu’on va être sollicité soit par un acteur humanitaire international, soit par une organisation plus locale qui va nous dire « j’ai besoin de données cartographiques sur mon territoire », donc on va cartographier, à distance, ce qu’on peut et les appuyer pour collecter de la donnée sur place.

Isabella Vanni : Missing Maps est un projet qui est né à l’initiative de CartONG ou vous l’avez rejoint ?

Martin Noblecourt : Au départ c’est une initiative de Médecins Sans Frontières, de plusieurs branches de la Croix-Rouge et d’une ONG qui s’appelle Humanitarian OpenStreetMap Team, qui est justement spécialisée sur la thématique. On l’a rejoint assez rapidement et, en fait, c’est un peu devenu le réseau des acteurs humanitaires qui veulent soutenir OpenStreetMap, avec, encore une fois, la richesse d’OSM. Vous avez une fondation OSM qui est un peu le truc tutélaire qui régule, on va dire, le projet, mais en fait, après, c’est extrêmement divers. Vous allez avoir plein de groupes locaux dans le monde entier, y compris beaucoup de communautés OpenStreetMap qui se sont développées dans les pays qu’on dirait du Sud. Généralement, quand nous développons un projet, nous essayons au maximum de nous connecter avec cette communauté locale, de la soutenir, de la mettre en avant vis-à-vis des acteurs locaux, notamment institutionnels, puisque c’est toujours un combat pour ces acteurs d’avoir une visibilité, de paraître crédibles vis-à-vis de leurs acteurs institutionnels nationaux. Il y a aussi une foultitude d’entreprises privées, d’ONG, etc., qui utilisent ce projet. C’est vraiment la logique du commun numérique qui fait qu’on peut se retrouver, dans certains pays, à avoir des entreprises comme Apple ou Facebook qui cartographient sur OpenStreetMap à côté de grandes ONG internationales, d’agences gouvernementales ou de la communauté de base. Chacun a un peu sa perspective sur le projet, son approche. Le modèle de données étant très libre, on peut aussi venir y ajouter des informations qui intéressent plus ou moins tel angle. Par exemple, il y a beaucoup d’associations qui travaillent sur l’accessibilité ou sur ce genre de choses, mais, à côté de ça, vous pouvez avoir aussi des usages tout à fait privés, normalement tout le monde met au pot commun et ça se régule parfois un petit peu avec du conflit, mais la licence ODbL [Open Database Licence] d’OSM permet normalement de réguler tout ça.

Isabella Vanni : Notre émission raconte les libertés informatiques et donne aussi des idées pour agir aux personnes qui souhaitent contribuer. L’intérêt du projet Mising Maps c’est que n’importe qui peut contribuer ou je me trompe ?

Martin Noblecourt : Oui, effectivement. On utilise les outils d’OSM et on utilise, de préférence, les plus accessibles. On organise des événements qui s’appellent des « mapathons ». CartONG en organise normalement à peu près toutes les semaines, c’est le lundi soir en ligne. On en fait aussi régulièrement en présentiel, il y en a un ce soir à Lyon par exemple. On tourne en France, il y en a à peu près un par mois. On en fait aussi régulièrement en université pour sensibiliser les étudiants. Pendant ces événements, on vous apprend à utiliser les outils de base d’édition sur OpenStreetMap, donc en éditant sur de l’imagerie satellite, ce qu’on voit à distance. Ça fait une première initiation qui nous permet à la fois de sensibiliser sur le travail qu’on fait, les causes qu’on soutient et l’usage de la cartographie, de faire découvrir OpenStreetMap à un plus vaste public et on espère aussi, comme ça, mobiliser des gens qui deviendront des bénévoles qui, ensuite, se formeront on va dire sur des outils plus avancés de collecte, à la fois de collecte de terrain, de travail à distance et même après d’aller plus sur des outils du SIG et d’analyse cartographique plus avancée.

Isabella Vanni : Tu as parlé d’événements à distance. J’ai vu sur votre rapport d’activité 2020 – qui est super bien fait, si vous voulez aller plus loin dans la découverte de CartONG, je vous recommande vraiment de le consulter – que la pandémie, qui vous a empêchés de faire « mapathons » en présentiel, a finalement été une occasion – voyons le positif – de recruter de nouvelles personnes, de nouveaux bénévoles. Est-ce que c’est bien le cas ?

Martin Noblecourt : Oui. Tout à fait. La limite de l’approche qu’on avait jusqu’à présent c’est qu’en faisant en présentiel on faisait ça dans les villes où on est le plus présents, plutôt en Rhône-Alpes et à Paris. Là, ça nous a permis d’ouvrir à un vaste public ailleurs en France et aussi à l’étranger. Au niveau international il y a plein de choses équivalentes, de ce type, mais c’est vrai qu’en francophone on est un petit peu les seuls, donc ça nous a permis d’accueillir pas mal de monde. Maintenant on aimerait aller plus loin dans cette articulation entre des gens qui viennent nous voir, font un « mapathon » chez nous, mais, en fait, sont basés dans un pays x, y, en Afrique ou en Asie et qui auraient plein de choses à faire chez eux, mais ce n’est pas forcément évident de les accompagner pour aller rencontrer les acteurs de leur territoire, peut-être des associations, ce genre de choses, qui auraient besoin de cartes et à qui ils pourraient venir en aide directement. Ça fait un petit peu partie de la feuille de route stratégique qu’on s’est fixée pour les prochaines années. On va le faire en toute modestie, dans la limite de nos capacités évidemment, mais c’est vers ça qu’on aimerait aller, vraiment aider ces contributeurs OSM ou cartographiques en général, il y a aussi plein d’autres outils locaux, à pouvoir venir en aide aux projets d’intérêt général de leur territoire.

Isabella Vanni : Donc de nouvelles perspectives s’ouvrent, comme quoi quand il y a un problème il y a une solution, on peut aller encore plus loin.
J’imagine, effectivement, qu’il y a déjà une grande satisfaction, pour les personnes qui participent à ces « mapathons », de pouvoir contribuer à OpenStreetMap, une grande satisfaction aussi de pouvoir contribuer à des projets humanitaires. Je vois, toujours sur votre rapport d’activité, que vous avez cartographié au moins 50 sites de réfugiés ; ça fait toujours partie du projet Missing Maps, des sites qu’on a du mal à voir et à rendre visibles.
Le temps file très vite. Est-ce qu’il y aurait quelque chose que tu souhaiterais ajouter par rapport à CartONG, par rapport à Missing Maps ?

Martin Noblecourt : Simplement repréciser aux gens qu’ils peuvent venir s’inscrire aux « mapathons ». On met de la comm’ sur nos réseaux sociaux et sur notre site. C’est tous les lundis, c’est une excellente occasion de découvrir OpenStreetMap, CartONG et, pourquoi pas, de s’engager plus avant dans le bénévolat. S’il y a des gens que le sujet intéresse tout particulièrement, on organisera aussi l’an prochain, on le fait tous les deux ans, un plus gros événement qui s’appelle GéONG, à Chambéry, ça sera l’automne. Si des gens sont intéressés par la cartographie humanitaire, c’est le gros événement sur le sujet en Europe.

Isabella Vanni : Merci beaucoup Martin et bonne continuation.

Martin Noblecourt : Merci à toi.

Isabella Vanni : Nous allons maintenant faire une pause musicale.

[Virgule musicale]

Isabella Vanni : Nous allons écouter un morceau d’un groupe anglais qui s’appelle Vienna Ditto. Ils décrivent leur musique comme du drum machine gospel ou du voodoo sci-fi – pour science-fiction – blues. Vous aurez compris, il y a de la batterie électronique, des sonorités blues bien revisitées. J’ajoute que la guitare électrique joue aussi un rôle important dans leur musique et que la voix féminine est particulièrement envoûtante. Je vous laisse découvrir le morceau. Voici donc Liar Liar par Vienna Ditto sous licence libre CC By 3.0. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Liar Liar par Vienna Ditto.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Isabella Vanni : Nous venons d’écouter Liar Liar par Vienna Ditto. À un moment, dans le morceau, on entend une séquence de notes qui rappelle pas mal le thème des génériques de James Bond, je ne sais pas si vous avez remarqué. Ça m’a fait sourire, car il y a un film de James Bond qui est sorti au cinéma tout récemment. Je précise que j’ai découvert ce morceau tout récemment. J’avais hâte de vous le proposer, donc mon choix n’a rien à voir avec la sortie du film, c’est vraiment le hasard. Vous retrouverez les références sur april.org et sur causecommune.fm. Ce morceau est disponible sous licence libre Creative Commons Attribution, CC By, qui permet la réutilisation, la modification, la diffusion, le partage de cette musique pour toute utilisation y compris commerciale à condition de créditer l’artiste, d’indiquer la licence et d’indiquer si des modifications ont été effectuées.

[Jingle]

Isabella Vanni : Passons maintenant au sujet suivant.

[Virgule musicale]

Le système d’information géographique libre QGIS. Rediffusion du sujet long de l’émission du 9 mars 2021

Isabella Vanni : Lors du premier sujet nous avons parlé de cartographie, de données sous licence libre. Le sujet principal d’aujourd’hui traite aussi de ces thèmes car il porte sur le système d’information géographique libre QGIS. Nous vous reproposons un échange qui a été diffusé lors de l’émission du 9 mars 2021. Je vous propose donc d’écouter ce sujet et on se retrouve juste après.

[Virgule sonore]

Frédéric Couchet : Nous allons poursuivre par notre sujet principal qui va porter sur le système d’information géographique libre QGIS avec nos invités, Régis Haubourg et Vincent Picavet. La discussion va être animée par Jean-Christophe Becquet, vice-président de l’April, auquel je passe la parole en espérant que les trois soient sur le pont téléphonique. C’est à vous.

Jean-Christophe Becquet : Bonjour à tous. Bonjour à toutes. Je suis Jean-Christophe Becquet, le vice-président de l’April et je suis ravi d’animer cette émission avec Régis Haubourg, président de l’OSGeo-FR et Vincent Picavet, gérant d’Oslandia.
Je vais leur passer la parole tout de suite pour les inviter à se présenter, à nous en dire un peu plus sur leurs structures respectives. On commence par toi, Régis, si tu veux bien.

Régis Haubourg : Avec plaisir. Bonjour à tous. Régis Haubourg, je suis géomaticien, un métier qu’on a toujours beaucoup de mal à expliquer à l’extérieur. Je gère des données géographiques depuis assez longtemps, venant de métiers de l’agronomie et, de fil en aiguille, en tombant dans le jeu de l’open source dans mes différents métiers, je suis arrivé à contribuer au sein d’une grande famille qui s’appelle l’OSGeo, qui est une fondation mondiale qui rassemble tous les promoteurs du logiciel libre géomatiques et open source évidemment. Je suis actuellement président de l’association francophone qui promeut ces actions dans laquelle le groupe QGIS des utilisateurs français, est hébergé. On essaie de faire des actions de promotion et de soutien de ce projet et du financement.

Jean-Christophe Becquet : Et par ailleurs, tu travailles actuellement dans une collectivité en tant que géomaticien. C’est ça ?

Régis Haubourg : Dans mon parcours j’ai commencé par un établissement public de l’État dans lequel j’ai conduit des migrations de bases de données et de systèmes d’information géographiques vers du Libre pendant assez longtemps. J’ai passé quatre très belles années en société de service en logiciel libre que pourra vous présenter par la suite Vincent Picavet. Là, je suis retourné à mes amours de proximité avec les utilisateurs pour continuer ce beau projet, en métropole.

Jean-Christophe Becquet : Merci Régis.
Vincent Picavet, tu es le gérant d’Oslandia, une entreprise spécialisée dans la géomatique libre. Est-ce que tu peux nous en dire un petit peu plus ?

Vincent Picavet : Bonjour tout le monde. Effectivement, je dirige Oslandia depuis maintenant plus de dix ans. Pour la petite histoire j’ai commencé l’open source avec Debian Slink, ça ne rajeunit personne, c’est quand même un peu vieux. Et puis, au fur et à mesure de mes différentes expériences, j’en suis arrivé à me spécialiser dans les systèmes d’information géographique et, plus spécialement, autour de PostGIS initialement et j’ai créé Oslandia il y a maintenant un petit peu plus de dix ans, que je dirige toujours. Pour la petite histoire, dans « Oslandia », le « OS » c’est Open source, « land » c’est le pays, le territoire. On fait donc des systèmes d’information géographique open source et aujourd’hui on se positionne en tant qu’éditeur QGIS et pure player open source. On est vraiment dans le développement de cette solution-là et de toute la gamme de services autour de ce projet.

Jean-Christophe Becquet : OK. Merci à tous les deux.
On a parlé de géomaticien et de QGIS. Pour commencer, j’ai envie de vous demander : qu’est-ce que QGIS et à quoi sert ce logiciel ? Régis.

Régis Haubourg : QGIS est un logiciel qui contient « G, I, S » dans le nom, c’est un Geografic Information System. Pour le « Q », je laisserai la parole à Vincent pour expliquer l’origine informatique, c’est plus son domaine que le mien.
C’est un système qui est extrêmement transversal, qui permet d’observer le monde, c’est pour ça que je suis tombé en passion de ces outils-là, venant du monde de l’agronomie, l’agriculture, parce que j’en avais besoin juste pour comprendre les territoires, comprendre les écoulements d’eau, comprendre comment fonctionne l’agriculture sur un territoire, l’interaction avec la ville. On manipule des données pour spatialiser des forêts, des routes, etc., les caractériser. En fait, ce sont des bases de données, on les représente dans l’espace et sur un écran en les projetant, en prenant en compte toutes les questions compliquées de géodésie, de rotondité de la terre. On les analyse et puis ça peut finir par de la cartographie orientée papier, de la cartographie orientée numérique sur des serveurs web pour faire des cartes interactives.
Au milieu de tout ça, QGIS est un peu le couteau suisse qui vraiment s’impose, qui permet de faire du travail bureautique essentiellement au départ et qui, maintenant, s’étend vers le Web, qui sait lire la majorité des formats de données et de bases de données qu’on peut manipuler, donc des données vectorielles — des points, des lignes, des polygones —, des images, ça peut être des nuages de points, etc.
On retrouve des usages de ce type d’outil dans tous les domaines. J’ai parlé d’agriculture, d’environnement ; on peut parler d’urbanisme, de cadastre, de réseaux d’eau. Il y en a qui s’amusent à cartographier Mars avec ce type d’outil ou le scalp des cheveux chez certains fabricants de shampoings, si j’ai bien compris. C’est incroyable !

Jean-Christophe Becquet : Ah oui ! En fait, QGIS va beaucoup plus loin que juste dessiner des cartes.
Vincent, tu souhaites ajouter quelque chose ?

Vincent Picavet : C’est vrai que c’est un usage qui est, en général, très majoritairement professionnel. Aujourd’hui on s’adresse vraiment à des gens qui utilisent cet outil dans leur métier et le métier peut être très varié. Comme disait Régis, les deux anecdotes d’utilisation vraiment les plus atypiques que j’ai vues de QGIS c’est une grande entreprise, que je ne citerai pas, qui a réalisé des cartographies de la peau humaine pour analyser l’effet des cosmétiques. C’est intéressant, on ne s’y attendait pas. J’ai également rencontré, complètement par hasard, un utilisateur qui faisait de la cartographie de la pensée de Deleuze sur QGIS. Là on est complètement dans des choses très conceptuelles, mais qu’on peut rattacher, quelque part, au territoire. On voit qu’on est vraiment sur un outil qui a spectre d’utilisation qui est très large et pour des domaines super variés. C’est aussi ce qui fait beaucoup l’intérêt des systèmes d’information géographique et de nos métiers.

Jean-Christophe Becquet : Une question d’un auditeur. Je la pose maintenant parce que je pense que c’est vraiment lié à ce que vous venez de raconter : est-ce que QGIS a un lien avec OpenStreetMap ? Régis.

Régis Haubourg : QGIS est un client OpenStreetMap. À la différence de beaucoup d’autres clients, on peut télécharger les données OpenStreetMap et les analyser en local ; ce n’est pas une appli web, une fois que vous l’avez chez vous, vous faites un peu ce que vous voulez. Il y a des extensions QGIS qui sont très spécialisées à venir consommer les données OpenStreetMap. En revanche, ce n’est pas encore un outil pour éditer les données OpenStreetMap, tout simplement parce que les modèles de données qu’on utilise en système d’information géographique sont assez différentes des primitives qu’on trouve dans les bases OpenStreetMap. Dans un système d’information géographique on hérite du monde des bases de données, donc avec des tables, des champs, des enregistrements et puis des objets géographiques qui sont une caractéristique comme une autre pour présenter ces objets-là sur une carte. Dans OpenStreetMap il y a des primitives avec une structure un peu différente, donc le passage de l’un à l’autre n’est pas si simple.

Jean-Christophe Becquet : Merci.
On va faire maintenant d’histoire, Vincent, est-ce que tu peux nous raconter un petit peu comment a démarré le projet QGIS et, du coup, nous expliquer le « Q » de QGIS ?

Vincent Picavet : Le projet QGIS démarre dans les années 2000 à peu près. C’est Gary Sherman, un résident d’Alaska perdu au fin fond des montagnes, qui a l’initiative de développer un outil qui va lui permettre de visualiser les données qui sont intégrées dans PostGIS. PostGIS c’est l’extension qui permet de traiter de la donnée cartographique à l’intérieur de la base de données que vous connaissez certainement, qui est PostgreSQL. On pouvait stocker ces données, on pouvait les analyser dans la base de données, mais on ne pouvait pas vraiment les visualiser. Gary Sherman s’est dit je vais développer un visualisateur de ces données PostGIS, qui pourra se connecter sur la base et m’afficher la cartographie de ce qu’il y a à l’intérieur. Il l’a fait sur une base en utilisant QT qui est le framework C++ qui permet de faire de l’interfaçage graphique. Donc le « Q » de QGIS vient de « QT ». Gary Sherman ne contribue plus vraiment maintenant au projet, mais, pour la petite histoire, toutes les classes C++ de QGIS commencent par « Qgs ». En général, on pense que ça veut dire QGIS, qu’il manque le « I ». En fait, ça veut dire « QT Gary Sherman », ce sont ses initiales qui traînent encore dans tout le code. Donc il y a l’ombre de Gary Sherman qui plane là-dessus, qui est toujours présente. Donc le « Q » de QGIS vient de QT.
C’est développé en C++, c’est un outil qui est multiplate-forme. Initialement, quand les premières versions sont sorties, tous les logiciels SIG open source étaient plutôt orientés Java. Il y avait OpenJump, il y avait gvSIG qui étaient des choses assez lourdes avec des interfaces un peu à l’ancienne. Au fur et à mesure QGIS a évolué pour avoir de nouvelles fonctionnalités, pour avoir des nouvelles capacités de visualisation, de traitement de données et, au fur et à mesure, a commencé à grossir. Au départ on a eu une première vague de contributeurs qui étaient plutôt des bénévoles, on va retrouver des gens comme Tim Sutton, Paolo Cavallini, Sandro Santilli, qui sont maintenant des gens assez connus dans la communauté QGIS. Ce projet qui, dans les années 2006 à peu près, était encore un peu balbutiant, pas trop de fonctionnalités, a vu, au fur et à mesure, son écosystème grandir, a vu aussi un marché de services associés qui arrivait avec des sociétés qui ont commencé à apparaître, Sourcepole, OPENGIS, Oslandia c’est 2009, Camptocamp, Kartoza, Lutra Consulting, un certain nombre de boîtes se sont montées dans le monde, ont commencé à proposer du service autour de QGIS. Tout ça a fait grossir l’écosystème de façon assez forte et on a vu de nouveaux contributeurs arriver au fur et à mesure par l’intermédiaire du Google Summer of Code, par l’intermédiaire d’autres initiatives.
Puis il y a un peu eu un tournant dans le développement de QGIS qui a été le fait qu’on puisse développer des plugins sur QGIS. QGIS est aussi une plateforme de développement, on peut l’étendre avec des plugins en Python. Ça a fait exploser le nombre d’utilisateurs et de contributeurs de l’écosystème, pas forcément directement de la solution QGIS, mais de l’écosystème, en fournissant des solutions, des outils pour régler tout un nombre de problèmes très spécifiques, très génériques parfois, avec une liberté qui était très forte dans la capacité à prendre cette base informatique pour en faire ce qu’on voulait.
Au fur et à mesure, ça a donc donné un projet qui a gagné une dynamique très forte et qui, aujourd’hui, est encore en accélération avec une augmentation du nombre d’utilisateurs mais aussi du nombre de développeurs et du nombre des prestations qui sont aussi autour, tout l’écosystème économique qui s’y trouve.

Jean-Christophe Becquet : Merci Vincent.
Juste pour préciser pour nos auditeurs qui ne sont pas familiers avec le domaine du développement de logiciels, un framework est, en fait, un ensemble de composants logiciels sur lequel on s’appuie pour développer et ça permet de bénéficier d’un certain nombre de fonctions génériques pour ne pas, à chaque fois, réinventer la roue. C’est-à-dire que plusieurs logiciels partagent, par exemple, la fonctionnalité « ouvrir une boîte de dialogue pour accéder à l’arborescence des fichiers sur le disque dur », le framework va offrir cette fonctionnalité et ça va éviter aux développeurs de devoir tout réécrire à chaque fois. Donc le framework QT, QT en français, est un des grands frameworks libres sur lequel on peut s’appuyer pour développer des logiciels.
Donc on parle d’un logiciel qui a aujourd’hui une vingtaine d’années. Tu as dit que ce logiciel est effectivement aujourd’hui très dynamique, avec un grand nombre de plugins, d’extensions, qui viennent compléter les fonctionnalités du logiciel. En fait, aujourd’hui QGIS est un peu plus qu’un logiciel, c’est un logiciel mais c’est aussi tout un écosystème de développeurs, d’utilisateurs. Régis.

Régis Haubourg : Oui. Je reviens un peu sur ce qu’a dit Vincent, la phase de transition. J’ai débarqué dans le projet QGIS à cette époque-là, en tant qu’acheteur public qui devait faire évoluer un système d’information géographique pour s’appuyer sur des bases de données solides. On avait choisi PostgreSQL à cette époque-là. QGIS était encore très immature, c’était un outil qu’on utilisait sans le donner aux utilisateurs. À ce moment-là on s’est dit « tiens, on va essayer de voir si on peut financer des petites évolutions pour que ça devienne un outil dans un coin qui nous permette de visualiser les données facilement ». On s’est rendu compte qu’avec cette communauté de développement extrêmement accueillante, dynamique et réactive, on a pu, en l’espace de moins d’un an, en quelques financements, combler des manques fonctionnels qu’on avait par rapport aux outils en place, les outils propriétaires en place. En fait, cette dynamique s’est accélérée d’elle-même parce qu’on voyait que chaque euro financé qu’on injectait déclenchait des financements à l’autre bout du monde sur des thématiques similaires. On est rentré dans une boucle vertueuse extrêmement vite. C’est cet aspect-là, plus que l’aspect informatique, qui m’a fait tomber amoureux du projet, à la fois l’accueil, l’ouverture de cette communauté et l’efficience de l’argent qu’on injectait dedans. On recevait beaucoup plus que ce qu’on mettait dedans.
Sur la communauté QGIS, il y a effectivement une explosion du nombre d’utilisateurs, dont on n’a absolument aucune idée du chiffre car on ne collecte pas de statistiques et on ne veut pas le faire. Du coup, ça aboutit souvent à ces indicateurs. On essaye d’estimer combien de personnes utilisent QGIS avec les nombres de visites de pages, de téléchargements. On est sur quelques millions, mais on sous-estime très largement le nombre d’utilisateurs réels. En entreprise, il peut y avoir un téléchargement qui sera déployé sur 2000 postes. On parlait tout à l’heure de la Gendarmerie. La Gendarmerie a déployé QGIS sur sa distribution Genbuntu et également sur ses postes Windows, et ça dessert potentiellement 9000 postes, je ne sais pas combien d’utilisateurs. Voilà, une grosse vitalité de l’écosystème.

Jean-Christophe Becquet : Oui. Vincent.

Vincent Picavet : Sur la dynamique j’ai aussi une anecdote. Je crois que c’était en 2006, j’étais à l’OSGeo-FR à cette époque-là, un peu à la place de Régis. Le ministère de l’Environnement vient nous voir en disant : « QGIS nous intéresse, on voudrait bien s’y mettre, c’est potentiellement une solution pour le ministère. On cherche des informations. On voudrait faire une étude dessus. On vous tient au courant ». Ils reviennent six mois après et ils nous disent : « on a étudié le logiciel, c’est super, mais il y a ça, ça, ça, et ça qui ne marche pas. » Ils nous avaient fait une belle liste, ils avaient interrogé tous leurs utilisateurs, ils avaient fait des tests. Ils avaient fait une grosse liste, ils avaient dit « ça, ça manque, aujourd’hui ça nous empêche de passer le logiciel comme étant quelque chose qui est recommandé ». En fait, le temps qu’ils fassent les tests, la liste était complètement obsolète. Tout ce qu’ils avaient donné, toutes les problématiques qu’ils avaient rencontrées étaient déjà corrigées. Ça donne une idée de la dynamique du projet. On va en reparler, ça donne aussi des indications sur comment on fait pour s’intégrer correctement dans un projet open source avec une nécessité d’interaction forte entre les utilisateurs, les développeurs, le projet et son écosystème en tant que tel.

Jean-Christophe Becquet : Il y a Nordine sur le chat de l’émission qui nous dit : « Je confirme. Au ministère de l’Environnement on a laissé tomber MapInfo, le concurrent privateur de QGIS, à la faveur de QGIS ». [Il parle de 90 000 postes « potentiels » pour la Gendarmerie, 5 à 10 000 postes pour le ministère de l’Écologie, NdT].
Du coup j’ai envie de vous demander, maintenant, si vous avez des exemples de déploiement de QGIS à grande échelle, dans des structures, que ce soit public ou privé. Régis.

Régis Haubourg : Oui. On n’en manque pas. Il y a un certain nombre d’exemples que j’ai vécus moi-même, par exemple la Gendarmerie. J’ai suivi ce projet de déploiement et surtout de configuration de QGIS pour qu’il réponde facilement aux utilisateurs. Déployer c’est une chose, mais comme tout outil un peu complexe, un peu professionnel, il y a des boutons partout et on ne sait pas forcément quoi en faire. L’essentiel de l’enjeu c’est de bien l’adapter pour que ça s’utilise simplement.
J’ai moi-même participé au déploiement au ministère de l’Environnement, j’étais dans un établissement associé et j’ai cofinancé avec le ministère de l’Environnement à cette époque-là, avec les deniers de mon employeur. Ça représente plus de 90 000 personnes puisqu’il y a tous les établissements associés, il y en a une bonne partie qui a basculé aussi.
On a vu de très grands comptes du domaine privé arriver. Vincent, tu nous diras, il y a peut-être cinq ans que ça a commencé à arriver et puis à prendre vraiment son essor depuis trois ans. Il y en a qui en ont parlé publiquement, comme Orange, qui a refondu toute son infrastructure géomatique sur des briques libres. On en a d’autres dont je ne peux pas trop parler.
On a surtout des exemples en Suisse où il y a un mouvement massif. On va dire qu’une grande partie des financements de QGIS vient de Suisse où il y a énormément de cantons, de communes, de grandes structures publiques et privées qui ont basculé.
Et puis on a des opérateurs que, parfois, on ne soupçonne pas, qu’on voit arriver simplement parce qu’ils se mettent à publier des plugins, des extensions, du coup on se dit « tiens, ils utilisent QGIS ». C’est notamment le cas du gouvernement fédéral américain côté armée, côté NSA. Il y a des choses qu’on apprend nous-mêmes de l’extérieur puisque rien de les oblige à dire ce qu’ils font. Ils prennent la licence, ils en font ce qu’ils veulent.
On pressent, en fait, que le déploiement est bien plus grand que ce qu’on connaît. On a des exemples qu’on trouve un peu au hasard des rencontres et des indices qu’on trouve sur le Net.

Jean-Christophe Becquet : Si je peux compléter, ce qui est intéressant avec QGIS, et c’est vraiment lié à son caractère libre, c’est que non seulement on le retrouve dans des très grandes structures, déployé à grande échelle, comme la Gendarmerie ou le ministère de l’Environnement, mais on le retrouve aussi dans des toutes petites structures. Je travaille plutôt avec des petites collectivités, en zone rurale ; dans une mairie dans laquelle il n’y a pas de géomaticien, il n’y a pas de service dédié au système d’information géographique, on peut se trouver à avoir un QGIS installé pour visualiser le cadastre, pour gérer un plan pour des travaux ou pour des demandes d’urbanisme. C’est aussi un logiciel qui se prête très bien à une très grande diversité d’utilisations.
Je vous propose, avant de parler un petit plus en détail de la communauté QGIS, du rôle joué par l’OSGeo-FR et comment ça fonctionne, comment tout ça s’organise, de prendre une petite pause musicale. Je laisse la parole à Fred pour présenter le choix de la programmation.

Frédéric Couchet : Merci Jean-Christophe.
Nous allons écouter Follow me par Vendredi. On se retrouve dans trois minutes. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Follow me par Vendredi (feat Paps).

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter Follow me par Vendredi, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution. Vous retrouverez les références sur april.org et sur causecommune.fm.
Vous écoutez toujours Libre à vous ! sur radio Cause Commune, la voix des possibles, 93.1 FM et en DAB+ en Île-de-France, partout dans le monde sur le site causecommune.fm.
Nous parlons, au cours de cette émission, du système d’information géographique libre QGIS. Je vais repasser la parole à nos invités Régis Haubourg, Vincent Picavet et Jean-Christophe Becquet.
Je rappelle que si vous souhaitez participer à notre conversation c’est sur le salon web dédié à l’émission, sur le site causecommune.fm, bouton « chat », salon #libreavous.
Jean-Christophe, c’est à toi.

Jean-Christophe Becquet : Merci Fred.
Pour faire écho à la discussion qui se déroule effectivement sur le chat, un auditeur posait la question de la licence utilisée par QGIS et Vincent répond que QGIS est sous licence GPL v2 [GNU General Public License ], ainsi que ses plugins.
Je propose maintenant qu’on poursuive notre conversation autour de QGIS en parlant de la structure de la communauté. Je vais peut-être passer la parole à Régis pour qu’il nous explique un petit peu le rôle joué par l’OSGeo-FR et comment fonctionne la communauté QGIS.

Régis Haubourg : Le rôle de l’OSGeo-FR est relativement modeste. On ne fait que relayer des actions de l’OSGeo internationale qui fédère tous les outils géomatiques. Il faut bien voir que QGIS s’appuie sur des briques communes à beaucoup d’autres logiciels, on va utiliser des librairies d’accès aux données, de conversion des formats de données, des librairies de reprojection, on va s’appuyer sur des bases de données comme PostgreSQL pour tirer la pleine puissance de QGIS et puis il y a QGIS par-dessus qui s’appuie sur les épaules des géants, qui s’appuie également sur les épaules de QT. Là-dedans la structuration de l’OSGeo va appuyer tous ces projets.
QGIS, en soi, est devenu tellement dynamique qu’il a créé sa propre structure assez récemment, il y a deux ans et demi, qui s’appelle QGIS.ORG, qui est une association, qui s’est hébergée sur du droit suisse parce que c’est l’endroit où c’était le moins compliqué pour faire de l’administratif qui, jusqu’à présent, n’existait pas. On avait un projet qui est passé de l’informel au semi-formel. Pour l’instant il y a un petit bureau de six personnes dans un comité de pilotage qu’on appelle le Project Steering Committee. Il y a des budgets relativement faibles pour QGIS.org, en fait, parce que quasiment l’intégralité des moyens et des ressources passe directement des utilisateurs vers les développeurs qui veulent faire évoluer le logiciel. C’est un peu le modèle économique d’Oslandia. Donc, pour fluidifier tout ça, pour maintenir les sites web, maintenir les serveurs, faire toutes les tâches qui sont très difficiles à financer, on a l’association QGIS.ORG qui a un budget qui est en assez forte croissance, mais qui dépend essentiellement de dons, de sponsoring, maintenant d’adhésions de collectivités, d’entreprises, etc., qui ont la capacité de le faire. Donc on a un budget d’environ 200 000/220 000 euros qui monte de 15 à 20 % par an, qui reste mini, c’est d’une frugalité et d’une efficience terribles.
Là-dedans l’OSGeo-FR et le groupe QGIS francophone essayent de valoriser les actions QGIS.ORG, donc relayer au niveau francophone tout ce qui se discute sur les listes internationales, relayer les initiatives de choix d’allocation de budgets. On a une structure démocratique où, quand il y a des fonds à allouer pour des innovations, pour consolider la documentation, pour des tâches de fond, par exemple pour faire des versions pour Mac, eh bien il y a des votes démocratiques et les groupes d’utilisateurs de chaque pays ont des droits de vote. Donc l’OSGeo-FR relaye tout ça, essaye de prendre l’attache des utilisateurs et de créer un réseau d’utilisateurs et également d’entraide autour de tout cela.
En France, par ailleurs, on a déjà des réseaux d’entraide qui existent, donc l’OSGeo-FR n’est pas trop positionnée là-dessus, est plus positionnée sur l’organisation d’évènements comme les journées QGIS utilisateurs qui ont lieu tous les ans depuis huit ans, à Montpellier jusqu’à présent, cette année à distance. On va probablement partir sur une logique de tour de France et se rapprocher des régions, plutôt appuyés par Rhône-Alpes-Auvergne ces temps-ci, mais on va tourner.
Que dire de plus ! J’étais encore ce midi en réunion visio avec le groupe QGIS-FR. Il y a quand même pas mal de gens qui ont envie de donner la main, envie de faire des groupes locaux. Voilà comment ça fonctionne.

Jean-Christophe Becquet : Mutualisation, dynamisme. Vos témoignages font rêver !
Peut-être, avant de passer la parole à Vincent pour parler des aspects au-delà du logiciel dans la communauté QGIS, une réponse rapide à une question qui a été posée par un auditeur : quelle différence entre QGIS et JOSM ?
JOSM est un des principaux éditeurs pour contribuer à la base de données libre OpenStreetMap. C’est vraiment un éditeur dédié à la contribution OpenStreetMap qui fonctionne aussi avec un système de plugins, qui est aussi un logiciel libre, mais qui est vraiment spécialisé sur la contribution à OpenStreetMap. QGIS est un logiciel dont les fonctionnalités sont beaucoup plus larges et étendues. Dans QGIS, on peut consommer des données ou des fonds cartographiques OpenStreetMap, entre autres, mais ça fait plein d’autres choses encore, comme on l’a expliqué un petit peu en début d’émission.
Vincent, le Libre ce n’est pas que du logiciel et c’est un aspect important et parfois complexe dans la communauté QGIS. Est-ce que tu peux nous en dire deux mots ?

Vincent Picavet : Effectivement, le logiciel libre est toujours un sujet au-delà de QGIS à proprement parler. On a souvent des communautés qui sont centrées sur les développeurs parce que ce sont souvent eux qui sont à l’origine des projets. Il y a d’ailleurs quelque chose qui est assez significatif : il y a des rendez-vous de la communauté des développeurs QGIS chaque année, hors période Covid, et historiquement c’était des developer’s meeting, c’était vraiment le rendez-vous des développeurs. On a changé le nom pour faire des community meetings pour être beaucoup plus inclusifs parce qu’un logiciel tel que QGIS c’est très loin d’être uniquement du code. Il y a des aspects qui sont également très importants mais qui sont souvent, de façon très ingrate, un peu invisibilisés. On parle évidemment de la documentation. La documentation de QGIS est assez complète, il y a beaucoup de choses dedans. La contribution à la documentation est quelque chose qui est assez difficile parce que ça évolue en permanence, il faut suivre les évolutions techniques justement des développements. Le système technique de documentation n’est pas forcément super évident, parce que non seulement il faut documenter, mais il faut ensuite également traduire la documentation. Donc ce sont des choses qui demandent une certaine technicité, ça passe par du Markdown, du Sphinx, du Git, des pull-requests, etc., des tests unitaires de documentation. Il y a beaucoup de choses qui sont nécessaires. Le ticket d’entrée pour documenter QGIS est assez élevé, donc c’est difficile de trouver des rédacteurs ; il faut évidemment être à l’aise en anglais et il faut connaître le logiciel assez bien.
Donc la documentation est un gros aspect de QGIS, c’est aussi quelque chose qui est difficile parce qu’on a du mal à trouver des gens qui se dédient à ça. C’est moins reconnu que le travail de développeur, on essaie de faire des efforts mais force est de constater que c’est plus difficile pour les documentaires que pour les développeurs de prendre leur place.
Au-delà du code, la documentation n’est pas le seul aspect important pour un projet tel que QGIS, il y a un aspect infrastructure qui est important aussi. Qu’est-ce qui se passe quand vous développez une nouvelle fonctionnalité ? Vous allez ajouter votre code dans le logiciel et, à partir de ce moment-là, on va reconstruire le logiciel, on va faire tourner tous les tests unitaires de façon automatique, on va construire des paquets de distributions d’installeurs et tout ça ce sont des choses qui demandent énormément de temps, qui sont également difficiles, qui sont peu visibles, mais surtout qui ne sont pas financées. Financer de la fonctionnalité, c’est assez facile, des clients vont venir en disant « j’aimerais bien que QGIS fasse ce bouton-là en bleu plutôt qu’en vert » ; en général c’est plus complexe mais ça peut ressembler ça. On va dire « OK, je vous développe ça, ça va coûter tant. — Très bien. — Voilà, je vous l’ai développé. » Vous avez votre changement de couleur, vous êtes content, tout le monde est content. Par contre, leur dire « vous allez payer quelques milliers d’euros pour que les serveurs tournent pour pouvoir faire un build automatique à chaque fois qu’il y a quelqu’un qui va committer, déjà ils ne comprennent plus rien, ils ne voient pas l’intérêt immédiat pour eux. Ça va, certes, augmenter la qualité du logiciel, mais il n’y a pas une boucle de rétroaction qui soit suffisamment efficace et visible pour que ça draine du financement.

Jean-Christophe Becquet : Est-ce que tu peux juste nous dire que c’est qu’un build automatique quand quelqu’un a committé ?

Vincent Picavet : Quand on prend le code source, on va rajouter des lignes au code source et, une fois qu’on a rajouté ces lignes au code source pour faire une nouvelle fonctionnalité, il faut reconstruire le logiciel. On prend le code source et on va faire ce qu’on appelle un binaire, un installeur. Pour les gens qui ont l’habitude d’être sous Windows, c’est quand on clique sur suivant, suivant, sans lire ce qui est écrit, ça c’est l’installeur. On a à peu près les mêmes techniques sur les systèmes libres tels que Linux ou d’autres. Ce build, cet installeur-là, il faut qu’il soit construit. Aujourd’hui, la construction est automatique à chaque fois qu’on va prendre un nouveau code source, à chaque fois que quelqu’un va faire une modification, on va construire une nouvelle version de ce logiciel pour pouvoir le mettre à disposition. C’est ce qu’on appelle le packaging, c’est faire la boîte autour du logiciel avec l’installeur à l’intérieur.
Ce sont des tâches qui sont assez difficiles à faire, qui demandent une grosse technicité, qui ne sont pas forcément très rigolotes et qu’on a aussi souvent du mal à financer.

Jean-Christophe Becquet : Pour apporter à nouveau un témoignage de l’extérieur sur les deux aspects que tu viens de développer par un utilisateur non spécialiste de la géomatique, la documentation de QGIS est effectivement parfaitement traduite en français et elle est d’une qualité remarquable, y compris pour la mettre entre les mains d’utilisateurs dont ce n’est pas le métier premier d’être géomaticien. Sur le côté distribution du logiciel, QGIS, bien sûr, est multiplate-forme, tu l’as évoqué, il fonctionne sur la plupart des systèmes d’exploitation les plus courants et il est livré sous une forme facile à installer : sous Windows ça va être un exécutable pour installer le logiciel ; dans les distributions GNU/Linux ça va être des paquets intégrés à la distribution. C’est effectivement un travail invisible, n’empêche qu’il est réalisé de manière très qualitative et très accessible.
Tu l’as dit, ce travail de documentation, d’infrastructure, de packaging du logiciel, ne se fait pas sans difficultés. Est-ce que dans la communauté ça se passe bien ? On arrive quand même à recruter des gens pour faire ce travail ? C’est compliqué ?

Vincent Picavet : Oui et non. Ce n’est pas toujours facile.
Il faut déjà voir que QGIS n’est pas tout seul. Il va se baser sur un grand nombre de bibliothèques logicielles qui vont effectuer des tâches sous-jacentes, par exemple PROJ qui va faire tout ce qui est version des systèmes de projection, GDAL qui va faire toute la gestion des formats de fichiers, des formats d’accès à la donnée. Ce sont des communautés qui sont très liées à QGIS mais qui sont aussi indépendantes.
Au-delà du code de QGIS il y a aussi tout le code de l’écosystème de OSGeo qui est intéressant et qui est important pour QGIS.
Ensuite, pour répondre à ta question sur les difficultés rencontrées, oui, clairement, il y en. On est passé d’un logiciel qui était un logiciel de hobbyistes, utilisé dans un coin avec très peu de fonctionnalités, à quelque chose qui est utilisé par des millions de personnes, avec énormément de fonctionnalités et une dimension qui est largement plus grande que ce qu’elle était avant. Avec l’évolution du logiciel, il faut donc une évolution du fonctionnement de la communauté.
Régis a parlé un peu de l’organisation de la communauté, la création de QGIS.ORG.
C’est vrai aussi dans le contenu du logiciel, c’est-à-dire qu’on va avoir besoin de plus de qualité, donc de plus de process technique dans l’évolution du logiciel. On va avoir besoin de plus d’automatisation, je parlais du packaging, de l’infrastructure et ça, parfois, ça crée des oppositions dans la communauté parce que ça complexifie le travail des développeurs, ça ralentit aussi l’évolution du logiciel. Il y a, par exemple, des gens que tout ça dérange parce qu’ils n’ont pas envie d’évoluer, ils sont bien dans leur situation confortable de développeur, dans leur cadre, et ils n’ont pas forcément envie que ça évolue. Heureusement et malheureusement, je ne sais pas, de toute façon c’est un état de fait, le logiciel et la communauté évoluent, l’écosystème évolue, donc il faut s’adapter. Ça peut parfois provoquer des tensions dans la communauté avec des visions qui sont différentes, des gens qui veulent aller plus vite, des gens qui veulent aller moins vite. Ce n’est pas forcément facile, ça demande de la discussion, des rencontres de préférence en live pour pouvoir échanger autour d’un verre. C’est quelque chose qui est important.
Aujourd’hui, la plus grande difficulté du projet c’est aussi la résilience, c’est-à-dire qu’il faut que le projet ne dépende pas d’une personne, de quelques personnes. On voit assez régulièrement, dans le logiciel libre en général et dans l’écosystème QGIS en particulier, ce qu’on appelle la fatigue du mainteneur : des gens sur qui la responsabilité du projet finit par reposer et qui, au bout d’un moment, font un burn-out parce qu’ils ont trop de responsabilités, trop de pression, trop de travail. C’est ce qu’on appelle le bus factor : si votre projet ne dépend que d’une personne ou de deux personnes, il y a danger pour la résilience. Il faut travailler ça en permanence et il faut le travailler dans sa dimension humaine, dans l’aspect des rapports sociaux, dans l’aspect de la considération de la personne et du travail qui est réalisé. Ce sont des choses qui sont difficiles à faire dans une communauté, d’autant plus dans des communautés qui sont des communautés techniques de développeurs.

Jean-Christophe Becquet : En tout cas, ce que tu dis rejoint vraiment les témoignages que j’avais eus dans la première émission que j’avais animée sur le logiciel libre Geotrek, un logiciel libre pour la gestion des itinéraires de randonnée, avec les parcs des Écrins et des Cévennes. Les intervenants nous expliquaient effectivement l’importance de ce contact humain au sein de leurs communautés, la difficulté à financer ce qui ne se voit pas comme les changements de version dans le framework sur lequel on s’appuie pour développer et la solitude de l’animateur de la communauté. Ce sont des choses que je retrouve.
Régis, tu voulais ajouter quelque chose.

Régis Haubourg : Oui, j’insiste là-dessus. On est passé en moins de dix ans d’un logiciel où les gens venaient coder pour se faire plaisir à un logiciel qui s’est professionnalisé, avec énormément de demandes. La plupart des bénévoles ont fini par se mettre à travailler à leur compte là-dessus, par plaisir mais aussi parce que la demande était là. Ça ne cesse d’augmenter et maintenant on voit de nouvelles catégories d’acteurs arriver alors même qu’on a encore des bénévoles. Je rends hommage à Harrissou Sant-anna qui est français, qui fait un travail monumental de coordination et de documentation, en bénévole. À côté, on a des très grands acteurs, comme SAP, qui arrivent et qui veulent influencer l’avenir de QGIS, de très gros dont on ne peut pas trop dire le nom, dont on sait qu’ils tirent énormément parti de cet outil-là, ils le déploient chez eux. Notre enjeu, actuellement, et ce n’est pas vrai que pour QGIS, c’est vrai pour toutes une partie des librairies sous-jacentes, c’est de tirer une partie des revenus qu’ils tirent de ces logiciels-là pour les faire vivre. La pression sur les développeurs est aussi liée au niveau de pression et d’exigence que ces très grands acteurs ont sur les développeurs. Les gens qui sont dans ces entreprises-là, par exemple IBM dernièrement, n’ont pas conscience du modèle économique open source et c’est impossible de discuter avec leur hiérarchie.
On a des grandes structures qui ont une prise de conscience par le haut de la stratégie open source, comme Orange, et il y en a d’autres qui arrivent juste un peu en opportunistes. Il y a enjeu à éviter que ça mette trop de pression sur tout le monde, mais quand même accepter cette croissance-là pour faire que le projet soit plus résilient.

Jean-Christophe Becquet : J’ai envie de dire que l’opportunisme n’est pas forcément gênant quand il se cantonne à utiliser le logiciel sans contribuer. Mais lorsqu’on cherche à influencer l’évolution du logiciel, à exiger certaines orientations ou l’ajout de certaines fonctionnalités, si on ne participe pas effectivement à l’effort, ça pose rapidement des problèmes.
Tu as parlé de gros acteurs privés comme Orange ou IBM. Il y a aussi un rôle important des acteurs publics. Est-ce que l’un de vous souhaite aborder la question de QGIS et des marchés publics ?

Régis Haubourg : Avec plaisir.

Jean-Christophe Becquet : Aller, c’est pour toi Régis.

Régis Haubourg : C’est toujours un plaisir les marchés publics !
C’est un peu un des sujets par lequel j’aborde le plus le projet QGIS. Je ne suis ni développeur, ni très impliqué dans la documentation et la traduction. Par contre, ce qui m’intéresse c’est trouver un écosystème économique viable, y compris pour les acteurs publics, et ça passe forcément par les marchés publics.
Il faut bien comprendre qu’on n’intervient pas de la même manière sur un logiciel libre que sur un logiciel privateur. On n’achète pas une boîte toute prête. On intervient et on prend la main sur sa destinée quand on vient intervenir sur un logiciel libre, sur QGIS par exemple.
Du coup, il faut qu’on ait des marchés qui s’adaptent à la communauté qui le fait vivre, parce qu’on ne va pas lui imposer des choses qu’elle ne veut pas. Il faut être capable, dans ces marchés-là, de prévoir de quoi discuter en amont, de prendre en compte qu’on fait du transversal. Il faut prévoir de quoi assumer les tâches difficilement finançables dont parlait Vincent.
J’ai toujours passé mes marchés avec de la documentation incluse et, au moins, la traduction française associée, des tests unitaires. J’avoue qu’à l’époque je ne comprenais pas les notions de packaging, de faire les installeurs sous Windows, sous Mac, etc. ; maintenant, avec la maturité et le recul, j’inclurai ces systèmes-là parce que ce sont des tâches cachées qu’il faut financer.
En fait, on a des solutions dans les marchés publics. Souvent, on a eu peur d’attaquer l’achat de services en mode traditionnel, sur des objets qu’on comprend mal, mais on a tous les outils qu’il faut, avec des marchés-cadres qui permettent de passer des petits marchés, rapides, itératifs, agiles, avec pas trop de lourdeur administrative.
J’ai, par exemple, fait des accords-cadres, inspirés d’ailleurs de ceux de l’Institut géographique national, qui a un grand savoir-faire dans l’intervention sur le logiciel libre depuis des années, et on avait trouvé une façon de faire intervenir chacun des spécialistes du domaine dans son cœur de métier. C’est aussi ça derrière. On n’a pas une grosse société, on a une galaxie de gens avec leurs domaines spécialisés. Donc si on veut intervenir sur les librairies GDAL et PROJ, on a la chance, en France, d’avoir le lead développeur qui est d’une efficacité extrême, Even Rouault. Si on veut faire du QGIS qui est tellement large, de la 3D, on ne va pas aller chercher la même personne que si on veut faire du QGIS pour faire faire des applications métiers. On va essayer de ne pas s’associer qu’à du service d’achat, on va aussi essayer de mettre du support.
Je me suis rendu compte qu’il faut quelques années pour rentrer dans la culture d’un projet libre, comprendre ses codes, suivre les discussions, savoir à quel moment aller proposer quelque chose. Parfois on est trop avance, on a raison trop tôt et ça ne convient à personne. Il faut apprendre à prendre ce temps, ce rythme. Les rencontres avec les développeurs sont absolument importantes et, à mon sens, faire en sorte que si on est un financeur de QGIS, il faut pouvoir y aller et laisser la chance à quelques participants d’y aller et venir faire diffuser cette culture au sein des services publics ou des collectivités.

Jean-Christophe Becquet : En tout cas, j’ai l’impression, du coup, que tu nous expliques que les outils juridiques pour faire des marchés qui fonctionnent avec le logiciel libre existent. Le problème c’est de maîtriser de manière fine ces outils, d’adopter la bonne méthode et de connaître de l’intérieur le fonctionnement des communautés.
Vincent, tu voulais ajouter quelque chose.

Vincent Picavet : Mon point de vue de prestataire et éditeur de logiciel libre. Là-dessus, effectivement on a les outils juridiques, par contre, ils sont rarement utilisés. Même si les équipes techniques, les équipes métiers ont bien exprimé leurs besoins fonctionnels, sont bien conscientes du logiciel, ont bien la compréhension de l’écosystème, des besoins, etc., parfois, et la plupart du temps, ça coince au niveau des achats et des services des marchés, qui eux, vont faire des marchés qui sont tout ce qu’il y a de plus classique, comme s’ils achetaient du logiciel privateur. Dans ce cas-là on ne s‘y retrouve pas, parce qu’on va se retrouver dans une situation où ça va être majoritairement basé sur le prix. Si on commence à faire la course au prix, nous en tant que société de service en logiciel libre, OK, on va pouvoir faire le développement qui est demandé, par contre on ne pourra jamais financer la documentation, on ne pourra jamais financer l’infrastructure et on ne pourra jamais faire avancer le projet avec une qualité suffisante. Donc on va rajouter des fonctionnalités, on va augmenter la dette technique. À terme, ce n’est pas bon pour le client qui a commandé, pour l’organisme public, et ce n’est pas bon pour nous parce que ce n’est pas soutenable et ce n’est pas bon pour le projet QGIS non plus.
Il faut effectivement continuer à convaincre notamment les services de marchés qu’ils ont les outils et qu’il faut qu’ils les utilisent pour aller dans le sens du projet.
On essaie de faire des choses du type vendre de la maintenance informatique qui est quelque chose qui est compris des marchés, qu’on ne trouve pas dans la même case, qui, pour le coup, ouvre des capacités plus importantes de financement de tout ce qui est difficile à financer par ailleurs, donc tout ce qui n’est pas nouvelles fonctionnalités par exemple.

Jean-Christophe Becquet : Merci Vincent.
On approche de la fin. Je propose à chacun de prendre deux minutes maximum pour conclure, si vous avez envie d’ajouter quelque chose, d’insister sur un point qui vous tient particulièrement à cœur. Régis s’il te plaît.

Régis Haubourg : Ce que je retiens de QGIS c’est que c’est avant tout une communauté extrêmement accueillante. Si vous pouvez accueillir un évènement, participer à un évènement, allez-y, vous allez voir à quel point c’est dynamique et efficace.
Ensuite n’ayez pas peur de venir contribuer directement via vos marchés, c’est la zone d’inconfort des géomaticiens. On sait faire de la technique, on n’ose pas faire des marchés publics. Les solutions existent pour y aller.
Dès que vous rencontrez un problème faites-le remonter, venez discuter avec la communauté QGIS-FR, avec les prestataires ou directement en anglais, si vous êtes à l’aise, avec les développeurs sources. C’est le circuit court. Le Libre est le bio de l’informatique, vous pouvez discuter en direct avec le développeur, c’est une chance phénoménale, donc saisissez-là et n’oubliez pas de prendre le temps d’apprendre un écosystème, ne plaquez pas les réflexes précédents, y compris pour les marchés publics et privés.

Jean-Christophe Becquet : Le Libre c’est le circuit court de l’informatique. Ça restera !
Vincent à toi, quelques mots de fin.

Vincent Picavet : J’espère qu’on a donné envie aux gens de découvrir un peu ce qu’est le SIG et QGIS en particulier. C’est un domaine qui est très sympa parce que ça va amener à toucher à des métiers totalement divers. Il y a des petites images, il y a des cartes, il y a quand même un côté très attractif de ce domaine-là. N’hésitez pas à plonger là-dedans. En plus il y a du boulot, on est toujours à la recherche de nouveaux développeurs dans le projet QGIS, et pas que des développeurs, aussi des documenteurs, des gens qui font de l’infrastructure ; on a besoin de forces vives. La dynamique du projet est là, la bienveillance est là aussi dans la communauté en général.
Pour conquérir le monde et finir de remplacer ESRI et AutoCAD un peu partout on a besoin de forces vives, donc rejoignez la force !

Jean-Christophe Becquet : Régis Haubourg, Vincent Picavet, un immense merci d’avoir accepté l’invitation à participer à cette émission. Merci pour votre temps, merci pour votre passion, merci pour votre énergie. Je ne peux que confirmer ce qui vient d’être dit : QGIS est un projet extrêmement ouvert, extrêmement abordable. Même si vous n’êtes pas géomaticien, même si vous n’êtes pas développeur, vous pouvez faire des choses avec QGIS. C’est même un logiciel que je qualifierais de ludique. Avec tout ce qui se passe en ce moment autour de l’open data, QGIS est un couteau suisse qui permet d’ouvrir les fichiers libérés par les collectivités pour les visualiser, pour les traiter et je pense que tout ça laisse entrevoir des perspectives énormes.
Merci encore à tous les deux et je rends l’antenne.

Frédéric Couchet : Merci Jean-Christophe.
Nous avons donc parlé du système d’information géographique libre QGIS. Le site web principal est qgis.org. Vous retrouverez toutes les références citées dans l’émission sur causecommune.fm et sur april.org.
Un grand merci à Régis Haubourg et Vincent Picavet. Un énorme merci à Jean-Christophe pour avoir préparé et animé ce sujet long.
Je vous souhaite une belle fin de journée et que la force soit avec vous !

[Virgule sonore]

Isabella Vanni : Vous êtes de retour en direct sur radio Cause Commune. Je suis Isabella Vanni. Nous venons d’écouter une rediffusion d’un sujet du 9 mars 2021 sur le système d’information géographique libre QGIS.
Nous allons faire maintenant une pause musicale.

[Virgule musicale]

Isabella Vanni : Nous allons écouter un morceau de piano de Loik Brédolèse, artiste d’origine néo-calédonienne. Le morceau voit la participation du DJ Fadewell, donc vous vous en doutez bien, il n’y aura pas que du piano. Je vous laisse donc découvrir A piano theory (ft. Dj Fadewell) par Loik Brédolèse sous licence libre CC By 3.0 et on se retrouve juste après. Belle journée à l‘écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : A piano theory (ft. Dj Fadewell) par Loik Brédolèse.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Isabella Vanni : Nous venons d’écouter A piano theory par Loik Brédolèse, disponible sous licence libre Creative Commons CC By 3.0 et, comme le disait mon collègue Étienne sur le salon de web-chat de Libre à vous !, il y avait du scratch, ça veut dire qu’il y avait une action humaine sur des disques vinyles pour changer la vitesse et faire le son que vous avez entendu à deux moments. Étienne ajoute que ça lui fait penser un peu à Nujabes ; je ne connais pas ce groupe ou artiste, mais n’hésitez pas à vérifier vous-même.

[Jingle]

Isabella Vanni : Je suis Isabella Vanni. Nous allons passer au sujet suivant.

[Virgule musicale]

Chronique « À cœur vaillant, la voie est libre », de Laurent et Lorette Costy, sur le thème du magasin d’applications F-Droid

Isabella Vanni : Nous allons poursuivre par la chronique « À cœur vaillant, la voie est libre » de Laurent et Lorette Costy, qui porte aujourd’hui sur le magasin d’applications F-Droid. Le sujet a été enregistré il y a quelques jours. Je vous propose donc d’écouter ce sujet et on se retrouve juste après.

[Virgule sonore]

Laurent Costy : Hello Lorette ! Ici le service d’accompagnement F-Droid qui vient prendre des nouvelles et savoir si tout se passe pour le mieux !

Lorette Costy : Allô le service post-installation F-Droid ! C’est gentil de prendre des nouvelles ! Et le service d’accompagnement F-Droid va être fier de moi, car je suis parvenue à l’installer toute seule, comme une grande, avec les références que tu m’avais données !

Laurent Costy : Effectivement, j’en suis heureux ! Ceci étant, être obligé de faire une émission de radio pour réussir à te convaincre concrètement de passer sur d’autres outils, ce n’est pas de l’optimisation fille-caille. Mais ça me donne une idée : on va faire une chronique tous les deux sur l’importance de ranger sa chambre. Qu’en penses-tu ? Tu es partante ?

Lorette Costy : Soudain, je trouve les logiciels libres moins intéressants. Sinon, tu sais être sérieux des fois ? Parce qu’en fait, je suis vénère de ouf là. Plus tu me fais creuser ces sujets, contre mon gré et contre grasse rétribution d’argent de poche d’ailleurs, et plus je me rends compte à quel point on se fait empapaouter du genou sur le Web. C’est agaçant, je vais finir par croire que tu n’étais pas aussi illuminé !

Laurent Costy : Ou tu vas le devenir aussi, ma pauvre !

Lorette Costy : Oh mon Dieu non ! J’espère que jamais, dans un moment d’égarement, je ne mettrai un short orange !

Laurent Costy : Ce n’est pas un short, c’est un bermuda !

Lorette Costy : Oui, ça laisse plus de place pour mettre du orange quoi !

Laurent Costy : On peut revenir à ton retour d’expérience d’installation et d’utilisation de F-Droid ou tu as décidé de dénigrer cette très belle couleur qu’est le orange ?

Lorette Costy : Comme je te l’ai dit au début de cette chronique, avant que tu n’enfiles ton bermuda orange, j’ai désormais F-Droid sur mon téléphone. Au début je ne voyais pas vraiment l’intérêt, mais je me surprends de temps en temps à chercher des alternatives au magasin d’applications dominant de Google.

Laurent Costy : En me disant ça, c’est le plus beau cadeau que tu pouvais me faire pour le jour de tes 18 ans !

Lorette Costy : Normalement c’est l’inverse ! Chez les gens normaux, on reçoit des cadeaux pour son anniversaire. Mais, revenons à F-Droid, il faut que je te raconte depuis le début.

Laurent Costy : Vas-y, je ferme les yeux, je prends mon doudou contre moi, comme tu le faisais quand tu étais petite. Toi c’était un lapin, moi, c’est mon bermuda orange que je frotte sur ma joue.

Lorette Costy : Déjà, je n’ai pas cherché longtemps le magasin F-Droid dans le Play Store de Google ; il n’y est pas et on comprend vite pourquoi !

Laurent Costy : Évidemment ! F-Droid va permettre d’installer des applications alternatives indépendantes de Google et va donc limiter la collecte de données. Google a donc tout intérêt à rendre compliquée cette installation pour décourager et limiter les fuites d’utilisateurs et d’utilisatrices-vaches-à-données. Et on va voir qu’il ne lésine pas sur les moyens pour décourager.

Lorette Costy : Donc, je suis allé sur le site f-droid.org, j’ai téléchargé le programme sous une forme exécutable par Android. C’est une extension « apk ». C’est un peu l’équivalent du « .exe » sous Windows.

Laurent Costy : Ils ne se sont pas foulés : « apk » c’est pour Android Package en anglais.

Lorette Costy : Tu aurais préféré quoi comme signification ? Apple Pour Kangourou ? Je crois que Kangourou était déjà pris de toute façon. Ça aurait été la porte ouverte à toutes les fenêtres pour des procès !

Laurent Costy : En gros, c’est donc un dossier qui contient tout ce qu’il faut pour ranger les éléments utiles dans Android et faire fonctionner ensuite le programme. J’imagine qu’après tu as suivi le processus alambiqué qui nécessite d’autoriser l’installation de logiciels de source inconnue et que tu as deviné toute seule qu’il fallait aller dans les « Paramètres système » puis « Options pour développeurs » et enfin, cocher la case « Sources inconnues » dans la catégorie « Gestion de l’appareil ».

Lorette Costy : Tout à fait. J’ai alors voulu lancer l’installation de F-Droid.apk. Et là, tu ne m’aurais pas donné cette capacité à être un peu solide dans les tuyaux de ma tête, je crois que j’aurais abandonné. Figure-toi que ce Tartuffe d’Android m’explique texto que, je cite : « Ce type de fichier peut vraiment endommager votre appareil. Voulez-vous vraiment installer le fichier F-Droid.apk ? »

Laurent Costy : Je me demande bien pourquoi, à ce moment-là, ils ne nous mettent pas plutôt un message du type : « Utiliser nos services peut endommager votre vie privée. N’hésitez pas à essayer des alternatives et à ne pas mettre vos données dans le même panier ».

Lorette Costy : C’est vrai, ce serait un joli message. Ils n’y ont peut-être tout simplement pas pensé ? Là, j’applique leur slogan Don’t be evil, je ne suis pas vraiment malveillante à leur égard.
Bon, plus sérieusement, un message plus neutre comme « si vous êtes sûr de votre source, du site sur lequel vous avez téléchargé le fichier, vous pouvez poursuivre » serait quand même plus honnête, moins malveillant non ?

Laurent Costy : Carrément ! Mais ça fait flipper et c’est bien le but. Bien sûr, il y a une part de vérité : installer un fichier apk téléchargé sur un site Internet louche et sans bien comprendre ce que l’on télécharge comporte un risque. Mais c’est quand même bien pratique de s’appuyer sur ce risque pour faire flipper les gens et les maintenir au maximum dans un silo de données. Et tous cas, depuis le site en https f-droid.org, le risque est très faible. Donc, tu as poursuivi et osé braver le sinistre message ! Je suis une nouvelle fois très fier de toi !

Lorette Costy : Pas si vite papa ! J’ai là, ici, présentement, le devoir de t’annoncer la mort de mon téléphone portable. Il va falloir que tu me files au moins 300 euros pour en racheter un nouveau. En effet, alors que l’installation était sur le point de se terminer, mon téléphone s’est mis à fumer, l’écran s’est fendillé et mes yeux, ont pleuré ! C’était terrible ! Ils avaient raison, l’installation a endommagé définitivement mon appareil. Je ne veux plus revivre ça. Je veux rester chez Google [NdT : prononcé en pleurnichant].

Laurent Costy : Bien essayé ma fille ! J’y ai presque cru. Tu es mûre pour faire du théâtre ou, a minima, des chroniques radiophoniques. Après, c’était comment ?

Lorette Costy : Plus simple que je ne l’aurais imaginé en fait. La première fois qu’on lance F-Droid, il faut juste être un peu patient parce qu’il charge la liste de toutes les applications disponibles. Ensuite, on se sent envahi d’un sentiment de grande liberté, on flotte entre ciel et terre, au-dessus de la baie de San Francisco, frôlant même le flambeau de la statue de la liberté !

Laurent Costy : C’est légèrement excessif et géographiquement très approximatif.

Lorette Costy : C’est ce que j’ai ressenti papa, en toute sincérité ! Mais peut-être que je confonds la baie de San Francisco avec l’île de la Cité.

Laurent Costy : Raconte, quelles applications as-tu installées en premier ? En échange, je te dirai celles qui ont ma préférence.

Lorette Costy : D’abord, je voulais vérifier que le temps numérique était cohérent avec le temps météorologique. J’ai donc installé Geometric Weather. Il pleuvait dans la réalité et il pleuvait aussi sur mon écran, j’étais comblée ! J’aurais pu alors chercher une application de parapluie, mais j’ai préféré prendre le mien pour sortir.

Laurent Costy : Parfois, il est sage de choisir la simplicité ! Tu as noté au passage que F-Droid te signalait une anti-fonctionnalité pour cette application ? En l’occurrence, ici, F-Droid t’informe que Geometric Weather « fait la promotion ou dépend d’un service non libre sur le Web ». Tu peux aussi avoir un avis éclairé sur une application en utilisant le service Exodus Privacy. Ils font un excellent travail de recherche de pisteurs et partagent ces informations !

Lorette Costy : Oui, c’est vrai. J’ai vu cette anti-fonctionnalité et c’est donc en toute connaissance de cause que j’ai choisi de l’installer. J’ai estimé que je pouvais tolérer cet écart à la liberté. Je ne suis pas un Tatayola comme toi ! Je préfère m’émanciper à mon rythme plutôt que de m’auto-contraindre pour des outils pour lesquels je ne suis pas prête. Par contre, je ne perds pas le cap et j’essaie de monter une petite marche régulièrement, après l’autre !

Laurent Costy : Tu as la sagesse du Dalaï-lama en toi ma fille ! C’est juste sublime ! Mais tu ne voulais pas savoir quelle était mon appli préférée ?

Lorette Costy : Oh si, bien sûr, c’est jaune et ça attend, Jonathan que ça !

Laurent Costy : Je m’en réjouis et je partage alors de ce pas : je te recommande vivement d’installer Shattered Pixel Dungeon ! En français, « Brisé Pixel Prison ». Je sais, ça ne veut rien dire, mais c’est toujours bien de traduire !

Lorette Costy : Mais que fait donc cette merveilleuse application libre sous licence GPL v3 ?

Laurent Costy : Selon le site, c’est un Roguelike Dungeon Crawler RPG with pixel art graphics ! Je vais le dire avec mes mots à moi : c’est un super jeu qui me rappelle les jeux de rôle de mon enfance où tu choisis un personnage - ici, guerrier, magicien, voleur ou chasseresse - et où tu dois réussir à sortir du Donjon. Ça fait déjà plusieurs années que j’y joue, mais comme c’est aléatoire et que le jeu continue d’évoluer, je ne m’en lasse pas.

Lorette Costy : Mon Papa le gamer fou ! Ça ne te plairait pas de faire du streaming ? Moi aussi je fais du jeu de rôle avec mes potes, mais dans la vraie vie ! Ah ! Le jeu de rôle ce n’est plus ce que c’était !

Laurent Costy : Bon, c’est pas tout ça, je dois sortir du Donjon ! D’ailleurs, avant de rejouer je vais contribuer financièrement, car l’auteur a fait le choix de ne pas gaver les joueurs avec des pubs ou de ne pas les pister sans qu’ils le sachent. Donc, il faut soutenir financièrement quand on le peut ! Taïaut ! Sus aux gobelins et squelettes blancs de jalousie devant ma cotte de mailles !

Lorette Costy : Bon !, je te laisse mon papounet car je te sens chaud bouillant pour essayer de sortir de ce donjon ! Bonne chance et si ça se passe bien, rendez-vous à la prochaine chronique !

[Virgule sonore]

Isabella Vanni : Vous êtes de retour en direct sur radio Cause Commune. Nous venons d’écouter un sujet enregistré il y a quelques jours consacré au magasin d’applications F-Droid.

Nous approchons de la fin de l’émission. Nous allons terminer par quelques annonces.

[Virgule musicale]

Quoi de Libre ? Actualités et annonces concernant l’April et le monde du Libre

Isabella Vanni : Aujourd’hui, notre premier sujet portait sur l’association CartONG qui participe au projet de cartographie participative Missing Maps. Un mapathon Missing Maps aura lieu à Lyon ce soir de 18 heures 30 à 2o heures 30 à la Géothèque Centre Berthelot. Cette rencontre a lieu dans le cadre du « Tour de France des Mapathons », le but étant d’avoir un mapathon en présentiel à chaque fois dans une ville française différente. Je vous encourage à consulter l’Agenda du Libre pour vous renseigner sur les prochaines étapes du Tour ou sur le site Missing Maps.
Une nouvelle réunion du groupe de travail Sensibilisation de l’April aura lieu jeudi 17 octobre de 17 heures 30 à 19 heures 30 en ligne. Nous continuerons l’élaboration du projet la Boussole du Libre, un outil pour orienter les personnes souhaitant reprendre le contrôle de leur informatique à l’aide d’une sélection de liens web. À l’occasion de la réunion de jeudi prochain nous allons finaliser la sélection des meilleurs liens web pour le thème ou besoin « M’initier aux logiciels et services libres ». Les réunions du groupe Sensibilisation sont toujours annoncées sur april.org et sur l’Agenda du Libre. Elles sont ouvertes à tout le monde que vous soyez membre de l’April ou pas, donc n’hésitez pas à participer.
Si vous habitez Quimper ou les alentours c’est encore l’occasion d’aller voir l’exposition des « Ordis libres – Partage et solidarité dans le numérique » qui sera affichée dans l’espace associatif Maison Waldeck-Rousseau jusqu’au 29 octobre.
Pour tous les autres événements, je vous invite à consulter l’Agenda du Libre.

Notre émission se termine.

Je remercie les personnes qui ont participé à l’émission : Martin Noblecourt, Jean-Christophe Becquet, Régis Haubourg, Vincent Picavet, Laurent et Lorette Costy.
Aux manettes de la régie aujourd’hui Étienne Gonnu.
Merci également à l’équipe qui s’occupe de la post-production des podcasts, Samuel Aubert, Élodie Déniel-Girodon, Lang1, bénévoles à l’April, Olivier Grieco, le directeur d’antenne de la radio.
Merci aussi à Quentin Gibaux, bénévole à l’April, qui découpera le podcast complet en podcasts individuels par sujet.

Vous retrouverez sur notre site web, april.org, toutes les références utiles ainsi que sur le site de la radio, causecommune.fm.
N’hésitez pas à nous faire des retours pour indiquer ce qui vous a plu mais aussi des points d’amélioration. Vous pouvez également nous poser toute question et nous y répondrons directement ou lors d’une prochaine émission.
Toutes vos remarques et questions sont les bienvenues à l’adresse contact chez libreavous.org.

Nous vous remercions d’avoir écouté l’émission.
Si vous avez aimé cette émission, n’hésitez pas à en parler le plus possible autour de vous et à faire connaître également la radio Cause Commune, la voix des possibles.

La prochaine émission aura lieu en direct mardi 26 octobre 2021 à 15 heures 30.

Nous vous souhaitons de passer une belle fin de journée. On se retrouve en direct mardi prochain et d’ici là, portez-vous bien.

Générique de fin d’émission : Wesh tone par Realaze.