Education au code. Pourquoi ? Comment ?

Informations

  • Titre : Education au code. Pourquoi ? Comment ?
  • Intervenant :Dattaz
  • Date : Juin 2014
  • Durée :16 min 43
  • Slides
  • Média : vidéo ubicast

Transcription

Bonjour.
Je vais vous parler d’éducation au code. Il y a beaucoup de gens qui disent : « Il faut que tout le monde apprenne le code. C’est bien le code. C’est génial le code ». Ouais ! Mais il y a quand même certains critères et certains aspects à voir. Et on va voir comment le faire.
D’abord pourquoi apprendre le code ? Il faut qu’il y ait une raison valide quand même. On peut en voir plusieurs. La première... je suis désolé, j’ai descendu mes notes. Voilà... Pourquoi ? Donc oui on peut apprendre le code, tout le monde peut apprendre le code, mais il faut quand même des raisons. Premièrement, apprendre une logique, une façon de raisonner, qui peut être très utile dans d’autres situations pour résoudre des problèmes ou pour voir justement ces problèmes autrement. Deuxièmement, apprendre la rigueur. Le code ça doit être rigoureux, bien ordonné, bien propre. Mais ça, ça s’apprend aussi et c’est une compétence très importante qui peut resservir dans plein d’autres domaines. Il y a aussi l’initiation, comprendre comment ça marche, simplement. On peut avoir de la collaboration, écrire du code à plusieurs. Donc là, ce serait plus proche de toute la philosophie du libre et de l’open source. On peut voir ça aussi comme l’ouverture de la machine, la comprendre. Et il y a les gens aussi qui voient ça simplement comme un art, pour le plaisir d’écrire du code.
Mais il y a aussi des choses qui font dire que non ! Il n’y a pas besoin d’apprendre le code et la première, la principale, c’est que tout le monde n’a pas besoin d’être codeur et de savoir coder professionnellement et bien, top niveau, etc...
Donc maintenant je vais vous présenter des outils qui permettraient d’apprendre le code, plutôt aux jeunes.
Le premier c’est Scratch. C’est un petit personnage qui se déplace et on le fait bêtement, juste comme ça, en mettant des blocs, en déplaçant des choses. C’est vraiment accessible à tous les jeunes à partir du moment où ils savent lire. Et globalement pour comprendre comment ça marche, toute la structure du code, la logique tout simplement, c’est vraiment bien pour débuter. Et on arrive très facilement à faire des choses vraiment concrètes. Donc là ce sont vraiment des jeunes qui s’en servent. Ils l’ont connecté avec ce qu’on appelle un MaKey MaKey, qui est un dispositif physique qui émule un clavier. Et ça permet vraiment de faire des choses qui peuvent être physiques, directement, et donc on peut arriver à se représenter plus simplement que juste un programme sur un écran. Donc là on a réussi à faire des choses physiques simplement. On a fait un atelier, en une heure et demie, avec des gens qui ne savaient pas faire, on a réussi à coder une petite histoire, tout simplement, et on se rend bien compte que le code ça fait vraiment quelque chose qu’on peut arriver à faire physiquement. Et c’est très bien pour aborder ça dès le départ.
Après on a un deuxième truc. C’est le Webmaker. Je connais quand même un peu plus. C’est un outil qui est fait par Mozilla et qui a pour but d’initier à la création du web et à regarder comment marche le web derrière. Comment on peut faire une page web. Il y a un outil. Voilà ça c’est une lunette à rayon X. Le but c’est de regarder une page. On clique juste sur le début, on clique dessus, ça nous affiche le code qu’il y a derrière. On voit le code mais à partir de ce qui a déjà été créé. Et on peut le modifier, le créer, le remixer, le partager, etc. Le but c’est vraiment d’initier, de passer du statut de consommateur du web à créateur du web, tout en apprenant comment peut être conçu le web, que c’est possible de le faire, et que tout le monde peut le faire.
Il y a deuxième truc qui s’appelle Thimble, pareil toujours dans le Webmaker, qui permet de créer le web mais c’est guidé en fait. On peut créer bêtement du HTML, ou du CSS, ou du JavaScript, et tout ça c’est guidé par des commentaires.
Après, si on veut aller vraiment plus loin dans la création du code et vraiment pousser pour apprendre le code, il y a Code Academy. C’est un site américain qui permet d’apprendre le code de façon active. Donc on contribue, on a des projets et tout est didactique et guidé, pareil. Là j’ai pris du HTML, mais on a un certain nombre de langages différents et de projets différents. Par exemple utiliser des API mais dans différents langages. On peut aller très loin dans l’apprentissage du code. On peut aller de l’initiation jusqu’à devenir plus ou moins codeur professionnel, directement comme ça. Enfin... codeur professionnel !

Pour moi le but d’initier le code dans les écoles et autres, c’est vraiment une initiation, comprendre comment ça marche et éventuellement créer des vocations. Le but ce n’est vraiment pas d’être tous codeurs. Mais récemment, ils ont décidé, il y a un projet de loi qui a été déposé au début du mois, pour qu’on introduise le codage informatique à l’école. Alors je ne pense pas qu’ils voulaient parler d’ASCII et de choses comme ça, parce que codage déjà, ce n’est pas un mot adapté. C’est pour coder l’information, ça n’a rien à voir avec le code. Enfin rien à voir ! Et, dans cette proposition, ils veulent faire que les objectifs prioritaires assignés aux écoles soient l’apprentissage de la langue française, bon, tout ça, tout ça, etc, et l’apprentissage du code informatique. Pourquoi pas ?! Mais, dans cette optique-là, ils veulent faire de ça ? Un outil indispensable et non pas un outil complémentaire. Moi je le vois vraiment comme un outil complémentaire qui peut créer des vocations, mais pas forcément indispensable à tous, tout simplement. C’est utile ! Ça peut être pratique ! Mais on n’a pas besoin de devenir tous codeurs professionnels. Voilà.
Donc sur Paris il y a un projet qui se monte c’est « Les voyageurs du code ». Leur but est justement de venir initier les gens au code, de leur faire comprendre comment ça marche, de leur faire découvrir, et créer des vocations éventuellement.
Applaudissements
Est-ce qu’il y a des questions éventuellement ?

Public
 : Oui, je voulais savoir dans quel contexte tu as abordé la programmation avec des jeunes ? Enfin je suppose que c’était le cas.
Dattaz
 : Je suis jeune aussi. J’ai 17 ans. Moi je code, mais pas du tout dans l’Éducation nationale. Comment j’ai abordé ça ? Tout simplement, moi je suis beaucoup investi dans le Webmaker que je vous ai présenté. En fait on a fait des ateliers et des après-midis où on venait montrer aux gens que eux aussi pouvaient créer du web et faire du code, simplement. Vraiment initiatique. Là je vous ai montré un projet qui n’était pas top, mais c’était vraiment créer des choses simples et qui parlent. Et c’était cool !
Public
 : Justement je suis d’accord. Je t’ai posé cette question parce qu’il y a une chose qui m’a un peu intrigué, c’est quand tu dis « Tout le monde n’a pas besoin, suite à ce que tu nous as présenté de la circulaire ministérielle, tout le monde n’a pas besoin de savoir coder. Effectivement, pas forcément besoin de savoir coder, je suis d’accord, mais...
Dattaz
 : Mais avoir des notions et être initié, oui.
Public
 : Je pense qu’on a un souci, pas qu’en France, pas que chez les jeunes, un peu partout, d’incompétence assez forte vis-à-vis de l’informatique et que le code, même à bas niveau, juste savoir ce que c’est une boucle, tu vois ce que je veux dire ?
Dattaz
 : Tout à fait. En fait, je voulais en venir et j’ai totalement oublié dans mes notes, c’est que sur cette loi pour le code à l’école, moi je pense OK, c’est important, c’est cool. Mais qu’il aurait été beaucoup plus important de mettre dans une loi que, parmi les choses principales, fondamentales qu’on doit apprendre à l’école, c’est savoir se servir vraiment d’un ordinateur, vraiment d’Internet. Ça c’est beaucoup plus important d’abord que le code. Parce que tu peux faire du code, mais si tu ne sais pas te servir d’un ordinateur, c’est beaucoup moins utile.
Public
 : Tu ne trouves pas que les deux sont liés ?
Dattaz
 : Les deux sont liés, mais il y a d’abord apprendre à se servir d’un ordinateur avant de faire du code, pour moi.
Public
 : J’espère ne pas être trop hors-sujet, mais je voulais témoigner de la chose suivante. Je considère que c’est un instrument que tous les jeunes devraient avoir entre les mains de savoir faire un site web. J’ai l’expérience d’avoir enseigné il y a très longtemps, il y a 20 ans, à L’INSTA, vous connaissez peut-être, Institut des Sciences et Techniques Avancées. Je donnais aux étudiants à faire des projets et je leur demandais de me le rendre sous forme de site web. Ils m’ont fait des trucs mais, quand je dis 20 ans, c’était dans les années 2000. Ils m’ont rendu des trucs juste fantastiques, j’ai encore leurs sites à Top(?). Simplement, eux, ils savaient programmer. J’ai enseigné la physique à Sciences Po. J’ai demandé exactement la même chose. Je voulais, à Sciences Po, qu’ils me fournissent, je ne veux pas qu’ils me donnent des feuilles de papier, je veux qu’ils me donnent des sites web comme résultat de leur travail. Eh bien ils ne savent pas faire à Sciences Po et on m’a dit que ce n’était pas à moi de leur apprendre, je n’avais pas le temps ! Et c’était vraiment dommage ! Il faut insister, ça doit être, c’est comme, je ne sais pas, savoir taper à la machine aujourd’hui. Faire un site web, ça fait partie de l’éducation de base.
Dattaz
 : Surtout qu’Internet est un moyen d’émancipation et de création, et vraiment ouvert à tous sans barrière d’entrée, c’est vraiment important qui plus est !
Public
 : Je vais revenir un peu sur des choses que j’ai entendues il y a relativement longtemps dans la bouche de Benjamin Bayart, qui nous présentait justement notre positionnement par rapport à Internet, qui récapitulait les différentes phases, où je suis, au début, enfin il avait un langage particulier pour dire je suis débutant, je ne connais rien, je fais un petit peu n’importe quoi, je progresse, et au final l’objectif c’est de devenir publicateur, justement, raconter des choses sur Internet. Et je pense que plutôt que l’Éducation nationale mette en avant cette notion où on pense qu’on va faire des développeurs Java de tous les petits français, alors qu’effectivement c’est complètement inutile, essayons déjà de leur donner la possibilité d’être publicateur sur Internet en leur expliquant comment ça fonctionne, quelle est la mécanique qui est dessous, et ce sera génial. Et effectivement, les plus motivés, ils creuseront, ils apprendront le HTML, ils feront du CSS comme moi je l’ai fait aussi à 20 ans. J’ai peur que quand on se met dans un contexte où on dit on va apprendre aux gens à coder, où là on soit dès le départ dans une impasse, parce que la finalité, à mon avis, elle n’est pas là. Par contre découvrir, savoir manipuler Internet, savoir faire attention quand je publie sur, je vais dire une énormité, sur Facebook ou sur mon CMS préféré. Mais si je comprends les mécanismes sous-jacents, là, à un moment donné, je vais avoir envie de coder vraiment et puis effectivement, on n’a pas tous besoin d’être codeurs et de savoir toutes ces choses-là.
Dattaz
 : Voilà. Tout à fait. N’hésitez pas, à la limite, à faire des retours à la personne qui a déposé le projet de loi. Peut-être que ça pourra faire avancer le débat. Ça se tente !
Public
 : C’est juste une petite remarque. C’est plus enfin la peur que l’apprentissage du code, du web à l’école, ça crée un rejet en fait. Des gens que ça ne va pas forcément intéresser tout le temps. Après c’est une expérience aussi, mais le code et la technique comme ça, ça peut aussi être mal vu de certaines personnes qui considèrent que c’est un truc de techniciens, que ce n’est pas un truc intelligent. Et j’ai peur que ça crée aussi un rejet comme il y a un rejet sur les maths qui apprennent aussi des idées de logique et de rigueur et qui sont cassées à l’école parce qu’il n’y a pas forcément une bonne compréhension des élèves et parfois ce n’est pas très sexy non plus à apprendre.
Dattaz
 : Oui. C’est un point de vue aussi. Oui, je suis assez d’accord.
Public
 : Je voulais juste rappeler que le premier code normalement que l’école est censée nous apprendre c’est l’écriture, en l’occurrence l’écriture de notre langue française, l’écriture aussi des autres langues. Et avec un petit peu de français et un petit peu de mathématiques, finalement on a toutes les bases pour avoir cette rigueur qui nous permettra plus tard de faire du code.
Dattaz
 : Oui. C’est vrai qu’on n’y pense pas forcément, mais, oui, la langue parlée c’est du code. Il y a aussi des points, des virgules, de la ponctuation.
Public
 : Toute une syntaxe à respecter, c’est exactement la même chose.
Dattaz
 : Exactement.
Public
 : Vous parliez de rejet tout à l’heure, mais il y en a qui rejettent très bien les maths, il y en a qui rejettent le français, pour autant ils sortent de l’école quand même avec des bases. Et même s’ils ont ce rejet finalement du code, ils auront les outils pour avoir autre chose qu’une simple utilisation passive de leur ordinateur, de leur téléphone, de tous les outils numériques qu’on a actuellement. Et ça ira bien au-delà de simplement le certificat d’utilisation, B2i, C2i, qui sont actuellement plus des passages obligés pour faire de bons petits consommateurs, prêts à utiliser les périphériques qu’on souhaite bien leur vendre, sans pour autant qu’ils comprennent. Le rejet, oui il y en aura, il y en a toujours eu. Mais au moins ça aura le mérite d’ouvrir à un plus large panel de personnes.
Dattaz
 : Oui, d’ouvrir, Après, effectivement, il y a peut-être plus de rejet vers le code parce que c’est quand même un peu élitiste, malheureusement. Mais on peut arriver à le rendre vraiment au bas niveau quand même. Peut-être, il faut voir.

Je crois que c’est fini. Voilà.

Avertissement : Transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant⋅e⋅s mais rendant le discours fluide. Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.