Libre à vous ! Radio Cause Commune - Transcription de l’émission du 23 juin 2020

Titre :
Émission Libre à vous ! diffusée mardi 23 juin 2020 sur radio Cause Commune
Intervenant·e·s :
Véronique Bonnet - Isabelle Carrère - Joyce Markoll - Isabella Vanni - Frédéric Couchet - William Agasvari à la régie
Lieu :
Radio Cause Commune
Date :
23 juin 2020
Durée :
1 h 30 min
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Page des références utiles concernant cette émission

Licence de la transcription :
Verbatim
Illustration :
Bannière de l’émission Libre à vous ! de Antoine Bardelli, disponible selon les termes de, au moins, une des licences suivantes : licence CC BY-SA 2.0 FR ou supérieure ; licence Art Libre 1.3 ou supérieure et General Free Documentation License V1.3 ou supérieure. Logo de la radio Cause Commune utilisé avec l’accord de Olivier Grieco.

Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l’April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

logo cause commune

Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.
Frédéric Couchet : Bonjour à toutes. Bonjour à tous.

Le réemploi informatique ou, autrement dit, le reconditionnement pour la réutilisation, ce sera le sujet principal de l’émission du jour, avec également au programme une chronique de Véronique Bonnet sur le thème « Dire non à l’informatique injuste, même une seule fois, est une aide » et aussi la chronique d’Isabella Vanni sur son retour d’expérience sur la recherche d’un outil adapté pour les projets de notre groupe de travail Sensibilisation.

Nous allons parler de tout cela dans l’émission du jour.
Vous êtes sur la radio Cause Commune, la voix des possibles, 93.1 FM en Île-de-France. En FM c’est de midi à 17 heures puis de 21 à 4 heures en semaine, du vendredi 21 heures au samedi 16 heures et le dimanche de 14 heures à 22 heures et c’est 24 heures sur 24 en DAB+ et partout dans le monde sur le site causecommune.fm.
Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre. Je suis Frédéric Couchet, le délégué général de l’April.

Le site web de l’April c’est april.org et vous pouvez y trouver une page consacrée à cette émission avec les liens et références utiles, les détails sur les pauses musicales et toute autre information utile en complément de l’émission.
Nous sommes mardi 23 juin 2020, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.
Je précise que l’émission est diffusée dans des conditions exceptionnelles suite à la situation sanitaire en France. Toutes les personnes participent depuis chez elles. D’un point de vue technique nous utilisons l’outil d’audioconférence Mumble, mais la qualité finale dépend fortement des conditions matérielles de chaque personne. Nous vous prions donc de nous excuser pour la qualité audio moins bonne par rapport à la qualité habituelle des émissions diffusées depuis le studio de la radio.
Si vous voulez réagir, poser une question pendant ce direct, n’hésitez pas à vous connecter sur le salon web de la radio. Pour cela rendez-vous sur le site de la radio, causecommune.fm, cliquez sur « chat » et retrouvez-nous sur le salon dédié à l’émission #libreavous.

Nous vous souhaitons une excellente écoute.
Tout de suite place au premier sujet.
[Virgule musicale]

Chronique « Partager est bon » de Véronique Bonnet, professeur de philosophie et vice-présidente de l’April, sur le thème « Dire non à l’informatique injuste, même une seule fois, est une aide »

Frédéric Couchet : Une lecture d’informations et de mise en perspective de la philosophie GNU, c’est la chronique « Partager est bon » de Véronique Bonnet, professeur de philosophie et vice-présidente de l’April.

Bonjour Véronique.
Véronique Bonnet : Bonjour Fred.
Frédéric Couchet : GNU c’est le projet fondateur du logiciel libre, le site c’est gnu.org, et le thème du jour de ta chronique est « Dire non à l’informatique injuste, même une seule fois, est une aide ».
Véronique Bonnet : En effet, c’est un texte qui a été très récemment traduit par Trad-Gnu de l’April à partir de Saying No to unjust computing even once is help. Si tu veux bien, Fred, je vais commencer par un bref détour au 6e siècle avant notre ère, en Grèce, chez un certain Pythagore. Pythagore c’est celui qui a inventé le mot, le néologisme « philosophie », parce qu’il voulait s’opposer aux sophistes qui étaient des affairistes et je dirais qu’il était libriste à sa manière puisqu’il défendait la cause de l’autonomie, de la réflexion. Il ne voulait pas du prêt à penser. Il voulait aussi bien que les mathématiciens que les philosophes se fassent des objections à eux-mêmes, s’interrogent. Voilà ce qu’il dit : « Les deux mots les plus brefs et les plus anciens, oui et non, sont ceux qui nécessitent, pour être prononcés, le plus de réflexion ». Il faut y réfléchir à deux fois avant de dire oui, avant de dire non.

C’est vrai que dans l’enfance il y a une période où on dit non à tout, pour s’affirmer, systématiquement on dit non.

En grandissant, c’est vrai que dans la vie sociale et professionnelle on a intérêt à dire plutôt oui, à devenir consentant, et c’est vrai que le bouton « Accepter » de nombreux sites fait des utilisateurs qui n’ont pas regardé ce à quoi ils s’engageaient, d’une certaine façon, ceux qui disent toujours oui.

L’informatique propriétaire voudrait nous transformer en utilisateurs consentants ou même nous ôter tout choix, faire en sorte que nous n’ayons plus notre mot à dire et on sait bien que qui ne dit mot consent.

Richard Stallman, celui qui a dit non en 1983 aux atteintes aux libertés des utilisateurs, commence dans le texte sur lequel porte la chronique par évoquer l’objectif à atteindre pour examiner ensuite des moyens. On est toujours dans le cadre que j’ai déjà évoqué de l’idéalisme pragmatique. On commence toujours par être intransigeant sur le but, l’autonomie des utilisateurs, pour ensuite se demander, dans tel contexte en particulier, comment faire avec les outils. Je lis le début du texte : « Notre but final est la liberté numérique pour tous, un monde sans logiciel privateur. »

C’est vrai que parmi les libristes il y a ceux qui se fixent le but, comme Richard Stallman, et ceux qui sont dans un refus systématique, sans compromis, de l’informatique injuste, ce qu’explique Richard Stallman : « Certains d’entre nous, qui avons fait de la campagne pour la liberté numérique notre but, rejettent tous les logiciels privateurs. »

Pour autant, est-ce qu’il faut dédaigner les efforts de ceux qui disent non à un logiciel, à un usage, pas toujours, pour commencer, pour essayer, pour voir, pour suivre les conseils que peut par exemple donner l’April ? Là, Richard Stallman fait l’hypothèse que tout rejet qui va dans un sens émancipateur est bon à prendre. Il y a un malentendu qui voudrait que ça soit tout ou rien ou encore que l’informatique libre soit à prendre ou à laisser globalement. Or, dire non de temps en temps peut être une aide. Voilà l’argumentaire : « Toutefois, en pratique, même un petit pas dans cette direction est bon à prendre. Une marche d’un millier de kilomètres est faite de nombreux pas. »

On est à la fois dans un optimisme, chaque pas a un effet, chaque fois qu’on dit non à Zoom, chaque fois qu’on dit non à un logiciel privateur alors quelque chose se passe, ne serait-ce que dans l’esprit de celui auquel on dit non parce qu’on va l’expliquer, on va dire pourquoi si on entre dans cet engrenage alors il va y avoir des effets désagréables pour nous. Et, en même temps, Richard Stallman évoque une marche d’un millier de kilomètres. Bien sûr la tâche est lourde. Si vous êtes pris dans une toile de logiciels privateurs vous cherchez sans doute un moyen d’en retirer quelques fils de votre corps. Retirer quelques fils de votre corps. Ceci impacte notre personnalité même, notre être, ce qui est le plus intime, ce qui est le plus subjectif est affecté par les logiciels privateurs. Donc il faut retirer les fils, il faut éviter que cette toile de l’araignée ne nous concerne tout entier.

C’est vrai que savoir dire qu’on ne se connectera pas avec Zoom ou Skype pour alerter les autres de cette toile de l’araignée qui noue ses fils pour s’emparer des données, c’est faire avancer l’autonomie. WhatsApp, Facebook, Slack, Google Docs peuvent faire l’objet de refus ponctuels mais qui sont déjà constructifs. Idem pour Eventbrite, Meetup et c’est vrai que parfois il y a des effets de groupe qui font que si on est le seul à dire « non, désolé, on ne pourra s’inscrire à cet événement parce qu’il faut passer par Eventbrite » ou alors si on est le seul à dire « eh bien non, on ne pourra pas assister à cette réunion parce que, pour ça, il faudrait se connecter à Zoom et qu’on n’en a aucune envie », il est important, et là c’est le texte qui continue, « d’adopter une fermeté bienveillante » parce que « les refus s’additionnent », se renforcent. Faire remarquer que tel logiciel peut avoir des effets indésirables est certainement plus compliqué que dire oui directement. Peut-être que si on a réussi à dire non, on pourra dire non une seconde fois, ce sera plus simple que de le dire la première fois.

On voit que Richard Stallman désigne ici toute une série de logiciels et de plateformes dont les noms paraissent inoffensifs et positifs pour une grande partie de la population. Ce qui veut dire que chaque non, même s’il est isolé, même si c’est pour voir ce que ça fait quand on refuse d’entrer dans ce jeu, a un effet qui est intense – déjà il peut surprendre, déjà il va y avoir quelque chose d’un peu surprenant de la part de celui qui renonce à des outils qui ont l’air si anodins, si conviviaux et si utiles – et il est certain qu’il faut mettre les formes. Par conséquent, dites à quelqu’un « merci de m’avoir invité mais ou Skype ou WhatsApp est un programme liberticide qui épie ses utilisateurs… Je veux vivre dans un monde différent, et en refusant d’utiliser ce programme aujourd’hui, je fais un pas dans ce sens. »

C’est vrai que c’est encore mieux si on peut faire une contre-proposition et c’est vrai que pendant ces mois où je faisais cours à distance à mes étudiants il m’est arrivé plusieurs fois de proposer des alternatives libres. C’est vrai que si on est capable de faire une contre-proposition, si on est capable de dire à l’autre qui nous interpelle « si je n’utilise pas Zoom, qu’est-ce que je peux faire ? », il est certain que là l’autonomie, la cause de l’autonomie, avance encore davantage. Si on est capable de dire à l’autre que si nous avions cette conversation sur un autre logiciel, je pourrais me joindre à vous, c’est un premier pas et après il y en aura un autre et puis un autre.

Dire que c’est pour respecter soi-même, c’est dire à ceux auxquels on dit non qu’on les respecte, que s’ils font comme nous alors ils se respecteront eux-mêmes encore davantage. D’où cette conclusion : « Non seulement vous aurez gagné en liberté, mais vous aurez également aidé votre communauté en lui faisant prendre conscience de cet enjeu. »

Donc allez sur le Chapril, utilisez le Mumble de l’April, le Jitsi de l’April.

Il se trouve que l’un des slogans de l’April a été Liberté je code ton nom. Fred, je ne sais pas ce que tu en penses et bien sûr tu peux me dire non, moi je dirais volontiers : liberté, dans mes pratiques et dans mes usages, en ton nom, j’essaye dans la mesure du possible, le plus souvent, de dire non à ce qui me dépossède de moi-même. Et c’est pourquoi il est bien d’avoir toujours en tête un logiciel alternatif. Se tenir tout à fait au courant de ce qui, dans le monde du logiciel libre, avance, permet des supports pédagogiques qui ne sont pas offensifs, qui ne sont pas dangereux pour nos étudiants et non seulement Liberté je code ton nom, mais, en ton nom, je n’hésite pas à dire non.
Frédéric Couchet : Véronique je suis tout à fait d’accord. C’est une belle conclusion de chronique.

Tu cites le Chapril, le site c’est chapril.org. Vous y trouverez des services libres et loyaux que vous pouvez utiliser librement. Par exemple, actuellement nous utilisons un serveur Mumble qui est un serveur d’audioconférence. Vous pouvez utiliser le même sur le Chapril si vous avez envie par exemple de faire des conférences ou simplement des discussions. Jitsi c’est de la visioconférence. On a reçu le créateur de Jitsi il y a quelques semaines dans Libre à vous !, vous retrouverez les podcasts sur causecommune.fm et sur april.org.

Tu as également cité Trad-Gnu. Trad-Gnu est un de nos groupes de travail qui traduit la philosophie GNU. Les textes qui sont en anglais sur gnu.org sont traduits en français. N’hésitez pas à rejoindre ce groupe, c’est un groupe qui est ouvert à toute personne, vous retrouverez les références sur april.org et causecommune.fm de la même façon. Nous en reparlerons la semaine prochaine lors de l’émission consacrée à l’April, la deuxième édition de « Au cœur de l’April ».

Véronique, je te remercie pour cette belle chronique qui clôt la saison 3, en tout cas pour tes chroniques et on se retrouve à la rentrée pour la saison 4 des chroniques « Partager est bon ».
Véronique Bonnet : Avec grand plaisir Fred. Très bonne journée à toi.
Frédéric Couchet : Bonne journée. Passe un bel été.

Nous allons faire une pause musicale.
[Virgule musicale]
Frédéric Couchet : Nous allons écouter Grand Orrery par StellarDrone. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.
Pause musicale : Grand Orrery par StellarDrone.
Voix off : Cause Commune, cause-commune.fm, 93.1.
Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter Grand Orrery par StellarDrone, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution, CC By. Vous retrouverez les références sur le site de l’April, april.org et sur le site de la radio, causecommune.fm.

Je précise que StellarDrone est un compositeur originaire de Vilnius en Lituanie. Le site auboutdufil.com sur lequel on a trouvé cette musique nous dit que « cet artiste n’en est pas à son coup d’essai puisqu’il a déjà composé une dizaine d’albums dans le genre depuis 2007. On pourrait qualifier son style musical de drone ambiant ou encore soundscape, sous-genre de la musique électronique », je cite auboutdufil.com. N’hésitez pas à consulter ce site pour trouver de la musique libre de qualité.
Vous écoutez toujours l’émission Libre à vous ! sur radio Cause Commune, la voix des possibles, 93.1 FM en Île-de-France et partout dans le monde sur le site causecommune.fm.

Nous allons passer maintenant au sujet principal.
[Virgule musicale]

Le réemploi informatique, le reconditionnement pour la réutilisation avec Isabelle Carrère d’Antanak et Joyce Markoll de l’Atelier Orditux Informatique

Frédéric Couchet : Notre sujet principal va porter sur le réemploi informatique avec nos deux invitées, Isabelle Carrère d’Antanak et Joyce Markoll de l’Atelier Orditux Informatique. Isabelle, Joyce vous êtes bien avec nous ?
Isabelle Carrère : Absolument.
Joyce Markoll : Oui, je suis là.
Frédéric Couchet : OK. Super. Je précise en introduction que Isabelle d’Antanak anime aussi des émissions sur Cause Commune, notamment Un coin quelque part, je crois que ce sont les deuxième et quatrième lundis à 14 heures, en tout cas vous trouverez évidemment toutes les informations sur le site causecommune.fm, donc Isabelle est une collègue de radio et les locaux d’Antanak sont situés juste à côté des studios de la radio même si aujourd’hui, comme je l’ai expliqué en introduction, on intervient chacun de chez soi sauf Isabelle qui est au studio exceptionnellement.

On va parler aujourd’hui de réemploi informatique. J’emploie ce terme-là même si très rapidement je pense qu’Isabelle va employer un autre terme.

Si vous souhaitez participer à notre conversation ou poser des questions, n’hésitez pas à venir sur le salon web dédié à l’émission sur le site causecommune.fm, bouton « chat », salon #libreavous.

Première question, on va commencer par Isabelle, une présentation personnelle et un petit peu de la structure en quelques mots. Isabelle Carrère.
Isabelle Carrère : Merci beaucoup Fred de cette invitation, je suis ravie d’être parmi vous aujourd’hui.

Présentation de l’association. Antanak est une petite asso qui est dans sa sixième année d’existence. Je suis vraiment très contente de ce qu’on vient d’entendre, de ce que Véronique a dit, a décrit dans sa chronique, juste avant la musique, parce que c’est un des axes vraiment très fort au moment de la création d’Antanak : j’aime l’idée de l’idéalisme pragmatique, d’une part, et la capacité à dire oui et non. La question du discernement que tout un chacun, chacune peut avoir en face des outils ou de la technologie ne peut se faire que s’il y a une vraie appropriation. L’appropriation du numérique par tous et toutes est un des axes essentiels d’Antanak, le second étant la lutte contre l’extractivisme forcené et les D3E [déchets d’équipements électriques et électroniques], on y reviendra, le tout soutenu évidemment grâce au Libre qui permet tout ça. Voilà, pour faire bref. Donc c’est une association de quartier mais qui voit venir vers elle des tas de gens de beaucoup plus loin, avec diverses activités qu’on pourra développer un peu plus tard.
Frédéric Couchet : Merci. On précise que le quartier c’est le quartier du 18e, rue Bernard Dimey, juste à côté des studios de la radio. On y reviendra.

De ton côté, Joyce Markoll, de l’Atelier Orditux Informatique.
Joyce Markoll : J’ai 61 ans, j’ai commencé à utiliser un ordinateur au quotidien à 40 ans passés. L’ordinateur m’a bien embêtée au début. J’ai mis tous les problèmes sur le compte du système. J’ai décidé de passer à Linux dont j’avais entendu dire que c’était stable, que c’était fiable, que c’était un truc pour les professionnels. Je me suis dit professionnels, je ne vois pas trop ! Un jour je me suis retrouvée dans un magasin de la presse en train d’acheter deux magazines Linux (GNU/Linux) et grâce aux communautés du logiciel libre en ligne je me suis retrouvée trois mois plus tard sous une distribution Linux. Par la suite j’en ai essayé plusieurs pour des raisons différentes, par curiosité, par goût de la découverte, pour essayer d’avoir quelque chose qui corresponde mieux à mes ordinateurs et je me suis mise à en reconstruire.

Entre temps j’ai évolué, j’ai eu des opportunités de rendre des services, des prestations de services numériques et informatiques. J’ai toujours gardé en tête que le Libre ce n’est pas juste de la sécurité, de la stabilité, ce sont aussi des gens qui s’entraident de manière spontanée et naturelle au travers de la toile et en réel. J’ai assisté à des rencontres in situ, dans un garage au début, en Bourgogne, c’était une fois par mois le dimanche. J’ai assisté à des rencontres à diverses reprises dans diverses conditions, une fois dans un écovillage. Je m’intéressais, j’avais un diplôme en bio fraîchement acquis, agriculture bio. Et puis, au fil du temps, j’ai complètement plongé dans la marmite. Il y a deux ans, après avoir été plusieurs années free-lance en portage salarial toujours dans le service informatique et numérique orienté, fortement orienté logiciel libre, je me suis installée à mon compte en 2018. J’ai pu dépanner beaucoup plus de gens, en faire passer beaucoup plus au Libre. J’ai aussi initié et cocréé l’association Linux Ariège en 2016. L’association a eu un temps où ça a bien marché. Ça s’est un peu endormi à la suite de diverses problématiques – accès facile à une salle, accès à Internet – qui ont mis beaucoup de temps à se résoudre et puis beaucoup de personnes de l’association se sont aussi retrouvées un peu trop prises par leurs activités professionnelles et personnelles. Le magasin, la boutique Atelier y a fait beaucoup pour inciter les gens à passer au Libre. Ils ont vu que ça pouvait être simple, que ça fonctionnait et c’est tout ce qu’ils veulent ; ils veulent que ce soit simple et que ça marche. C’est mon leitmotiv. Au final, quand ils s’aperçoivent que c’est simple et que ça marche, après ils posent les autres questions. Il m’est arrivé d’avoir quelqu’un qui reparte avec un PC en disant « et l’antivirus ? »
Frédéric Couchet : Joyce, je me permets de te couper. Là c’est l’introduction de présentation, on ne va pas rentrer tout de suite dans les arguments, on va y revenir après, sinon je pense que tu peux faire l’émission toute seule ce qui serait très bien, mais…
Joyce Markoll : Vas-y je t’écoute, je suis.
Frédéric Couchet : On va préciser qu’Antanak c’est dans le 18e à Paris et l’Atelier Orditux Informatique c’est à Pamiers donc au sud de Toulouse, deux régions totalement différentes.

Je vais aussi préciser que tu as souvent cité le nom Linux qui est un noyau de système d’exploitation. Nous on préfère, et la chronique de Véronique Bonnet en parle souvent, appeler le système du nom GNU/Linux parce que ça reconnaît le rôle important que joue la liberté informatique dans ce projet, dans la construction de ce système et des communautés, et ça aide le public à reconnaître l’importance pratique de ces idéaux. Je renvoie d’ailleurs à la chronique de Véronique Bonnet « L’importance d’utiliser la dénomination GNU/Linux », je crois que c’était fin avril, le 28 avril 2020. C’était juste une précision.

Maintenant on va rentrer un petit peu dans le cœur du sujet sur le réemploi informatique. Avant de parler de la partie logiciel libre qui est évidemment fondamentale pour nous, j’aimerais que vous nous expliquiez ce qu’est le réemploi informatique. Est-ce que c’est le bon terme d’ailleurs ? Quels sont les principes, quels sont les types de structures qui interviennent ? On va commencer par Isabelle Carrère. Isabelle.
Isabelle Carrère : C’est intéressant effectivement de redonner quelques définitions dans les termes parce qu’on utilise beaucoup, un peu partout, le réemploi ou bien la réutilisation et nous on parle aussi de reconditionnement et après il y a le recyclage. Ça fait beaucoup de termes tout ça.

Ce qu’on dit très souvent c’est que réutiliser ça permet, en fait, d’utiliser une deuxième fois un matériel aux mêmes fins que celles pour lesquelles il a été créé. Donc un ordinateur, si je fais un travail de reconditionnement c’est-à-dire que je le répare ou bien je change quelques pièces ou bien je change son système d’exploitation ou, etc., là je fais de la réutilisation.

Le réemploi, pour nous, ça va plutôt être d’arriver à employer à nouveau des pièces pour autre chose. D’accord ? À la limite peu importe. Ce qui est très important de voir, en tout cas ce qu’on essaye de pousser vraiment chez Antanak, c’est de dire et de promouvoir le fait que plus on arrive à réutiliser plusieurs fois de suite un ordinateur, plus on agit à la fois pour que les gens prennent conscience, toute personne puisse prendre conscience de ce qu’on n’a pas besoin d’avoir toujours le dernier appareil, dernier cri, ça dépend de l’utilisation qu’on en a. Deuxièmement, quand je parlais tout à l’heure de la lutte contre les D3E, les déchets électroniques, ça permet aussi de redonner une vie plus longue à des pièces qui, sinon, se retrouvent malheureusement dans des déchetteries à des tas d’endroits, forment des amalgames avec d’autres produits et des matériaux très rares. En fait c’est ça la vraie question, c’est d’arriver à bien connaître de quoi est fait un ordinateur, et c’est ce qu’on commence toujours par faire avec les personnes qui ont envie de suivre ces choses-là avec nous à Antanak, c’est de bien expliquer, de montrer par l’expérience, par le démontage d’une unité centrale ou d’un portable, de quoi c’est fait.
Frédéric Couchet : D’accord. Joyce est-ce que tu veux compléter sur cette partie introductive au niveau de la terminologie ou peut-être des concepts de base ?
Joyce Markoll : Je suis totalement d’accord dans les grandes lignes. L’importance de préciser que, par exemple, le recyclage c’est beaucoup plus cher sur le plan de l’écologie que le réemploi et que le reconditionnement. Rajeunir un ordinateur, rénover un ordinateur, le faire durer, c’est ce qui coûte le moins cher pour la planète, c’est aussi ce qui est le plus économique au final pour le porte-monnaie du consommateur.
Isabelle Carrère : Absolument.
Joyce Markoll : Après, au niveau du monde du reconditionnement, il faut connaître deux sites web importants qui ne sont pas si connus que ça : ordi3-0.fr qui est un site initié par un acteur du gouvernement. Ce n’est pas le gouvernement, ce n‘est pas l’État, c’est un des acteurs de l’État qui a initié cela il y a longtemps. Il y avait ordi2.0, il y a maintenant ordi3-0.fr, il y a un annuaire avec des points sur la carte de France. Cet annuaire gagnera à être encore plus fourni par le nombre de personnes qui sont donc dans le reconditionnement d’ordinateurs.

Il y a, au niveau du Web, un endroit très intéressant, planetoscope.com, où on peut lire des statistiques sur le gaspillage des ordinateurs. Les statistiques sont un petit peu anciennes, elles datent d’il y a au moins trois/quatre ans, mais c’est quand même intéressant.

Enfin, pour toutes les personnes qui, comme moi, sont installées en nom propre ou en entreprise, nous pouvons être au Commerce, nous pouvons aussi être à l’Artisanat, je suis donc aux deux, à la Chambre des métiers également. Les Chambres des métiers en France ont créé des plateformes avec également des cartographies où on peut trouver les coordonnées des personnes qui font de la réparation tous domaines confondus.
Isabelle Carrère : Joyce, du coup si je peux me permettre, si on en est à donner des adresses et des liens internet, on peut aussi citer celui qui s’appelle donordi, tout simplement, et qui permet de voir sur le territoire français notamment mais aussi ailleurs, quelles sont les structures dans lesquelles, auprès desquelles on peut se procurer, avec des moyens différents selon les modèles économiques ou pas des structures en question, des ordinateurs libérés, reconditionnés, en réutilisation et majoritairement avec des systèmes d’exploitation GNU/Linux.
Joyce Markoll : C’est donordi.fr, d, o, n, o, r, d, i point fr, c’est bien ça ?
Isabelle Carrère : C’est cela même.
Frédéric Couchet : Je vais juste vous préciser qu’on mettra toutes les références évidemment sur le site de la radio, sur causecommune.fm, pour les personnes qui ne peuvent pas noter toutes les références. En tout cas, votre échange introductif montre déjà qu’il y a différents types de structures qui interviennent sur le reconditionnement pour la réutilisation et qu’on peut trouver partout en France et même, évidemment, partout dans le monde des structures qui font du reconditionnement.

Tu voulais ajouter quelque chose Isabelle ?
Isabelle Carrère : Oui, parce que, du coup, on n’en a pas parlé, Joyce vient de parler du recyclage, pour bien expliquer là aussi. C’est important de comprendre ce qu’est le recyclage. Le recyclage c’est ce qui permet, une fois qu’on a bien séparé des matières, par exemple si j’enlève complètement tout ce qui est plastique, je le mets à part, je mets à part le métal, les objets ferreux, les autres matières, etc., là on peut recycler des matériels. Et c’est pour ça que c’est vrai, je suis d’accord avec ce que disait Joyce, c’est plus coûteux, plus cher. Beaucoup de structures, d’organismes, y compris les grandes boîtes qui s’occupent théoriquement des D3E, parfois rechignent à vraiment faire un démontage très fin, donc on se retrouve, c’est pour ça que je parlais d’amalgame tout à l’heure, avec un mélange, en fait, de choses qui ne devraient pas rester ensemble pour le recyclage ; elles ne font pas un bon tri des déchets. C’est une vraie problématique dans la suite pour le recyclage alors qu’on le fait très bien, par exemple, pour l’automobile mais ça a pris du temps, ça a pris 30 ans à se faire dans l’automobile. Ça ne fait pas encore, de manière suffisamment correcte, avec les ordinateurs, les serveurs, etc.
Joyce Markoll : Oui, c’est compliqué.
Frédéric Couchet : Avant de passer la parole à Joyce, juste préciser que D3E c’est déchets d’équipements électriques et électroniques, pour les personnes qui se poseraient la question.

Joyce, est-ce que tu veux ajouter quelque chose sur cette partie introductive, donc sur le reconditionnement ?
Joyce Markoll : Nous pouvons faire état que le site web greenit.fr fait également un énorme travail et est totalement pro-libriste. C’est important de le dire parce qu’ils ont énormément de chiffres très intéressants. Leur rôle c’est de retransmettre des chiffres, de publier de l’information sur tout ce qui permet de faire bien et mieux en matière de ré-usage, en matière de faire durer les choses quand il s’agit d’outils numériques et d’outils informatiques.
Frédéric Couchet : Je vais préciser, comme tu le dis, qu’on a eu le plaisir de recevoir Frédéric Bordage, le fondateur de Green IT. Green IT c’est un peu la communauté des acteurs et actrices du numérique responsable dans les pays francophones. On l’a reçu dans l’émission du 17 septembre 2019, justement sur le projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et l’économie circulaire. Évidemment le podcast est en ligne.

Avant de passer au deuxième point, on va dire les arguments pour le public, pour la société, sur le salon web de la radio il y a une question. Évidemment vous pouvez nous rejoindre sur le salon web, vous allez sur causecommune.fm, bouton « chat » et salon #libreavous. Marie-Odile demande « ce reconditionnement, c’est ouvert à tout le monde ? Faut-il justifier de quelque chose ? ». Je suppose que Marie-Odile parle pour le grand public. Est-ce que n’importe qui peut ou est-ce que la question concerne les entreprises, je ne sais pas en fait. Vas-y Joyce. Joyce Markoll.
Joyce Markoll : Je peux répondre à ça. Quand je me suis inscrite sur ordi3.0 j’ai répondu à tout un questionnaire qui est relatif à la charte. Ce qui est notamment important pour les personnes qui donnent des ordinateurs pour que ceux-ci soient réutilisés, soient remis à neuf, c’est l’assurance pour elles que leurs données ne seront jamais récupérées, récupérables. Donc il y a une question concernant le logiciel ou les logiciels utilisés pour effacer les disques durs.
Frédéric Couchet : D’accord. J’ai récemment commandé des ordinateurs d’occasion, justement sur un site qui fait ça, Ecodair, et sur le site il est précisé qu’ils utilisent effectivement un outil spécialisé pour l’effacement des données.

Le temps avance, on va passer au deuxième point, les arguments pour le public, la société. En préparant l’émission vous m’avez parlé d’écologie, vous m’avez parlé de coûts, vous m’avez parlé de liberté. Quels sont les arguments forts pour le grand public ? Je pense vraiment à la personne qui veut utiliser ou se procurer un ordinateur ou un téléphone mobile, on reviendra tout à l’heure un petit peu sur la différence, quels sont les arguments forts pour le public ? Joyce Markoll.
Joyce Markoll : Concernant les personnes qui vont se procurer un ordinateur, il faut préciser une question : veulent-ils un ordinateur neuf ou un ordinateur d’occasion ? Si elles veulent un ordinateur neuf sous GNU/Linux, elles peuvent trouver de très bons appareils chez divers prestataires en France, chez un prestataire en Suisse, il y a du choix parmi, on va dire, peut-être quatre, cinq ou six professionnels qui sont totalement aguerris pour procurer des PC faciles à réparer soi-même, faciles à remettre en état et où le suivi des pièces est assuré pendant plusieurs années.

Quand il s’agit de matériel d’occasion, de matériel de réemploi, nous avons également des entreprises qui sont spécialisées, qui ne font que ça. Si on prend l’exemple des Ateliers du Bocage, ils peuvent avoir quelqu’un qui est formé en trois jours pour remettre en état quelque chose comme 400 ordinateurs par mois ; c’est énorme, c’est monumental !

Pour un petit atelier comme le mien, j’ai fait une statistique. Je ne fais pas que de la réparation, du réemploi et de l’installation de systèmes, je fais aussi de la formation, je reçois aussi des personnes qui viennent pour surfer sur Internet, qui se retrouvent automatiquement sous GNU/Linux – elles ne le savent même pas, elles veulent un navigateur web c’est tout – et de la démonstration, etc. Au final, sur la première année, juste moins d’une centaine d’ordinateurs qui sont partis sous GNU/Linux soit en réparation soit en revente, ça a représenté, en prenant justement les chiffres fournis par Green IT et en faisant un calcul, plus de 28 tonnes d’équivalent carbone.
Frédéric Couchet : Selon toi, l’aspect vraiment écologique, impact environnemental, est l’un des critères importants pour le public qui s’adresse à du reconditionnement du réemploi ?
Joyce Markoll : Ce n’est pas le tout premier critère. Le tout premier critère pour eux, il faut que ce soit simple et que ça marche. Le deuxième critère, il faut que ce soit économique. En matière d’informatique, ce que je peux constater avec tous les chiffres que j’ai lus, avec tous les calculs qui ont été présentés, Green IT et d’autres, c’est justement que économie rime avec écologie, ça va de pair.
Frédéric Couchet : D’accord. Isabelle, de ton côté ?
Isabelle Carrère : L’expérience qu’on a à Antanak depuis plusieurs années, c’est que, outre le fait qu’effectivement les gens s’habituent très vite à utiliser un système d’exploitation GNU/Linux ou des logiciels libres sans aucun souci, on voit que les personnes qui viennent avec une volonté soit d’avoir un nouvel ordinateur mais reconditionné, soit qui viennent nous demander de les aider à passer à autre chose avec leur propre ordinateur, s’aperçoivent vite du fait que dès lors qu’on a pu réparer quelques pièces, rajouter un peu de mémoire vive, etc., on a immédiatement une meilleure performance dès qu’on a mis un système d’exploitation libre. C’est-à-dire que là où par exemple pour Windows 10 il va falloir déjà 40 gigas, on n’a encore rien fait, mais il y a déjà 40 gigas du disque dur qui sont utilisés, alors qu’une distribution va être à un, deux, allez trois grand max pour certaines, pour les plus gourmandes. On a des choses qui sont vraiment aidantes pour le reconditionnement grâce au Libre. C‘est-à-dire que c’est un vrai argument qui est « je veux garder ma même machine – on a par exemple beaucoup de gens qui viennent comme ça – là, du coup, comment je peux faire ? C’est trop long. En fait, je ne voulais pas Windows 10, mais c’est comme si j’avais été forcé pour le mettre ». Les gens ont tous des tas d’histoires diverses et variées comme ça, sur des mises à jour un peu fallacieuses qu’ils ont faites en fait sans savoir qu’ils étaient en train de la faire et ils s’aperçoivent que, du coup, ça ne marche pas avec la machine qu’ils avaient. Donc parfois le réemploi ou la réutilisation vient de la vie des gens et de la vie de l’ordinateur. La relation d’une personne avec son ordinateur c’est vraiment un truc très intéressant qu’on voit et qu’on analyse avec des tas de gens.

Ceux qui viennent en disant déjà « je voudrais un ordinateur autrement », il y a la raison économique et ça on va y revenir parce qu’à Antanak, par exemple, on se positionne sur la chaîne du don. De la même manière que ce sont des entreprises et/ou des particuliers qui nous donnent du matériel on travaille dessus soit le noyau des membres actifs et actives de l’association, soit avec d’autres gens également, et ensuite on donne ces ordinateurs reconditionnés, réparés, etc., à des adhérents, à des adhérentes. Donc cette chaîne-là, d’un point de vue économique, est évidemment appréciable et les gens l’apprécient, mais aussi parce qu’on a tous à y gagner d’un point de vue environnemental, d’un point de l’environnement dans lequel on veut vivre demain. Est-ce qu’on veut continuer à promouvoir, en achetant du neuf, des destructions phénoménales ? Et quand je parle de nature ces sont également les hommes et femmes qui y vivent, la nature ce n’est pas que les arbres et les oiseaux, ce sont aussi les gens sur des territoires plus ou moins proches de nous ici, en France, qui sont, en quelque sorte, expulsés de leurs terres parce que ce qu’on va y faire une mine pour avoir les matériaux qui sont nécessaires pour avoir des ordinateurs neufs et très beaux et très fins et très plats et très légers, etc. C’est tout ça.

Je pense qu’il y a une vraie meilleure conscientisation là maintenant de ces événements, de ces sujets-là. Ça c’est le début de la chaîne, l’extractivisme, et à l’autre bout il y a donc les D3E, les déchets et des pièces qui se retrouvent n’importe comment ou qu’on envoie très loin de nous pour qu’elles soient démantelées parce que chez nous ça coûte trop cher.

C’est toute cette chaîne-là qu’on essaye de mettre en exergue et en pratique à Antanak, c’est-à-dire comment on fait pour que réellement on arrive à être dans d’autres usages et d’autres pratiques. Et le Libre est vraiment un atout là-dessus.
Frédéric Couchet : On va revenir justement après sur la pratique de vos structures. On va rappeler que l’extractivisme c’est l’exploitation massive des ressources de la nature.

On a bien compris, effectivement, les aspects, les arguments. J’ai juste une précision. Joyce est intervenue tout à l’heure sur les ordinateurs neufs, elle disait que c’était facile de se procurer des ordinateurs neufs avec des systèmes libres, etc. Je vais quand même rappeler que se procurer des ordinateurs avec des systèmes d’exploitation préinstallés avec du Libre c’est juste impossible aujourd’hui parce que la vente forcée existe toujours. Même si la Cour de justice de l’Union européenne a considéré que ce n’est pas une pratique abusive, déloyale, ça reste aujourd’hui très compliqué de se procurer un ordinateur préinstallé avec du logiciel libre. Les gens qui vont dans n’importe quel magasin aujourd’hui c’est préinstallé avec du Windows ou du Mac. C’était juste une précision.

On va revenir un petit peu maintenant sur vos structures. Comment vous faites en pratique et j’ai quand même cru comprendre dans vos introductions respectives que le choix du logiciel libre était un choix fondateur pour la « libération », entre guillemets, des ordinateurs et des pratiques. Joyce, est-ce que c’est le cas ?
Joyce Markoll : Oui, tout à fait. Tout ce que disait Isabelle m’a rappelé pas mal de choses dont je peux parler maintenant.

Lorsque j’ai débuté, je voyais surtout la nécessité d’avoir un ordinateur fonctionnel et qui n’ait pas des ratés pendant l’utilisation. Une fois que j’ai été sous Linux je me suis dit « ça c’est formidable, il n’y a pas de problèmes de sécurité, je ne vais pas avoir besoin de faire la chasse aux logiciels malfaisants, aux malwares, je ne vais pas avoir besoin de prendre du temps pour protéger le château et chercher les intrus qui rentrent, je vais pouvoir prendre le temps d’apprendre ». Au final, on gagne un temps phénoménal avec un ordinateur sous GNU/Linux pour plusieurs raisons. D’abord il y a beaucoup de familles de distributions. Il y a un choix qui permet d’adapter l’ordinateur et le système l’un à l’autre ainsi qu’à l’utilisateur, en fonction de ce que l’utilisateur veut faire. Je vais donner un exemple extrême : demain il y a un gars qui me dit « je produis de la musique, j’ai besoin de Cubase, mon ordinateur c’est ça et puis ça, il y a trois gigas de RAM, trois gigas de mémoire vive, un disque dur de 120 gigas, admettons, ou de 150 gigas ». Je vais dire « oui d’accord, oui mais non. Je ne peux pas intervenir dans ces conditions-là, ce n’est pas possible ». Par contre, si la personne me dit « c’est compliqué, je ne suis pas bon en informatique », je dis « vous voyez cet ordinateur, là ». On a des choix dans les systèmes GNU/Linux, on a antiX, on a Ubuntu, on a Debian, on a encore Mandriva et Mageia, on a un choix phénoménal. Tout le problème, pour l’utilisateur final, c’est qu’il n’y connaît rien et il a besoin qu’on l’aide à choisir en fonction de ce qu’il fait, en fonction de l’ordinateur qu’il a et en fonction de l’aide qu’il pourra trouver près de chez lui quand il aura ce système en main.

Quand je fais passer quelqu’un à GNU/Linux, je lui offre une heure à une heure et demie de formation avec la prestation de service. De la sorte, je suis sûre que la personne ne va pas se sentir perdue, elle va se sentir en familiarité, en confiance avec son ordinateur rénové.

Ensuite, il y a des ordinateurs pour lesquels j’ai fait un article. J’ai entre les mains un appareil, un portable Toshiba de 2008 que j’ai rajeuni, j’y ai changé la mémoire, j’y ai changé aussi le processeur et puis j’ai mis un support de stockage moderne, rapide, un SSD, grâce à quoi maintenant, avec un système super léger dedans, une dame qui n’avait plus d’ordinateur fonctionnel peut s’en servir tous les jours et elle doit revenir dans quelques jours pour entamer une série de formations car, à 70 ans passés, elle n’avait jamais vraiment touché à l’ordinateur.
Frédéric Couchet : D’accord. On comprend bien que ce que toi en tant que prestataire ce que tu « factures », entre guillemets, c’est le reconditionnement de l’ordinateur, l’installation du système et tu offres, en plus, une heure de formation gratuite pour que la personne s’y mette, et après tu peux faire des formations.
Joyce Markoll : Excuse-moi de t’interrompre. En fait, dans ce cas-là, l’ordinateur je l’avais eu gratuitement, j’ai fait des frais dessus et je l’ai vendu. Cette dame était intéressée, je lui ai fait essayer, elle l’a trouvé bien, donc j’ai vendu ça à un prix très raisonnable puisque j’avais changé le processeur, etc., et, au final, elle est repartie très contente. J’ai vendu l’ordinateur mais, en fait, je me suis payée, j’ai payé les services que j’ai mis dessus comme si on me l’avait apporté, comme si on me l’avait confié pour le remettre en état.

Mais c’est pareil : que la personne achète un ordinateur sous GNU/Linux ou qu’elle le fasse passer à GNU/Linux, j’offre systématiquement un cours pour que la personne puisse commencer avec. Ce cours comportera des informations telles que comment on installe un programme, comment on met à jour, comment on désinstalle un programme, comment on range ses fichiers, comment on s’y retrouve, comment on trouve des choses dans les menus. Si les menus c’est trop compliqué, ça arrive, eh bien je vais lui mettre des lanceurs rapides sur le tableau de bord ou, si elle veut vraiment des icônes sur le bureau, elle aura des icônes sur le bureau. Tout ce qui fait que la personne va pouvoir s’en sortir au quotidien sans se sentir prise en défaut.
Frédéric Couchet : D’accord. Parfait. C’est tout à fait compréhensible.

De ton côté à Antanak, comment ça fonctionne avec le public qui vient te voir pour se faire reconditionner un ordinateur ou acheter ? Comment ça se passe ?
Isabelle Carrère : On est assez proches, en fait. En écoutant Joyce je me dis que ce sont à peu près les mêmes choses que nous faisons, en tout cas nous avons une base commune d’activité, avec la grosse différence qu’on n’a pas l’axe économique puisqu’Antanak ne vend rien. Pour le moment, en tout cas, on n’est pas du tout sur un modèle économique, il n’y a pas d’argent entre nous à part une cotisation des membres comme pour toute association, bien sûr. Pour être dans cette logique-là il faut adhérer à l’association, mais l’adhésion est libre et on n’a jamais dit à quelqu’un « non, tu ne pourras pas avoir d’ordi parce que tu n’as pas d’argent pour le faire ». Les gens font ce qu’ils peuvent.

En tout cas, ce qui est sûr, c’est qu’on est là-dedans aussi, c’est-à-dire qu’on a, d’une part, ouvert une salle qu’on a appelée la salle OLAA, Ordinateur en Libre Accès Accompagné, dans laquelle nous avons mis une douzaine de postes. N’importe qui peut venir et utiliser. Chaque poste a une distribution différente, je ne vais pas les citer à nouveau puisque Joyce l’a fait tout à l’heure, chaque poste est différent de manière à ce que la personne qui vient se rende compte que même si elle va sur ce poste-là ou plutôt sur l’autre, etc., elle ne va pas être perdue, elle va retrouver majoritairement des icônes qu’au bout d’un moment elle va connaître, donc il n’y a plus l’angoisse de « oh là, là, je ne retrouve pas les choses que j’avais déjà vues une fois en formation ». Non, pas du tout. En fait, les gens s’y retrouvent très bien. On a beaucoup de public qui n’avait jamais utilisé un ordinateur et pour qui c’est la première fois et pas simplement à 70 ans, on a des tas de gens qui viennent et qui étaient éloignés du numérique, comme disent les politiques. Donc ça c’est une première chose.

On a des permanences d’écrivains publics. Ça n’a rien à voir avec notre sujet mais juste pour dire que ça permet aussi une entrée. C’est-à-dire que quand on vient d’abord pour être aidé, pour faire une actualisation Pôle emploi ou pour faire une démarche administrative des impôts ou pour la préfecture ou que sais-je, on passe par là et, petit à petit, la fois d’après on revient, peut-être qu’on va faire soi-même les choses, et voilà. On accompagne aussi les gens sur une trajectoire puisqu’un des objectifs de l’appropriation numérique est là, il est aussi de pouvoir faire les choses soi-même en se sentant autonome, en ne se sentant pas complètement perdu. Et puis on fait des ateliers, des formations, des ateliers de partage et d’entraide, un truc qu’on a appelé le chemin numérique où on commence par proposer aux gens de venir d’abord démonter un ordinateur et puis on va le remonter, ça va marcher, on va faire ça ensemble. Le tout toujours dans une optique d’entraide et de partage avec les principes qui sont ceux du Libre et les nôtres aussi. Ça ce sont les activités historiques en fait.
Joyce Markoll : Isabelle, pardon je voudrais parler à Isabelle. Vous agissez dans votre association pour l’inclusion numérique. Je me suis inscrite à un endroit qui ne m’a rien apporté pour l’instant mais j’y suis et j’y reste, ça pourrait vous intéresser aussi, cela ça se nomme aptic.fr, a, p, t, i, c point fr comme aptitude pour les technologies de l’information et de la communication.
Isabelle Carrère : Je vois ce que c’est, Joyce.
Joyce Markoll : En deux mots, vite fait, APTIC n’a pas encore suffisamment d’informations sur les logiciels libres et, bien entendu, c’est un message pour peut-être plus tard communiquer avec eux sur des questions autour du Libre, faire un peu plus la part belle au Libre dans leur questionnaire d’introduction. Quand on s’inscrit on répond à, je ne sais pas, peut-être 200 questions. J’ai dû répondre non à un tas de questions qui concernaient des logiciels non-libres alors que je connais leur équivalent en Libre qui n’étaient pas cités. Ça m’a un petit peu frustrée.
Isabelle Carrère : Je comprends Joyce, mais tu vois, déjà pour moi le terme « inclusion numérique » ! Je sais qu’on nous met beaucoup dans cette affaire-là et on nous met dans ce grand mot valise dont personnellement je me méfie comme de la peste. On ne se vit pas, à Antanak en tout cas, comme des véhicules pour faire de l’inclusion numérique et pour forcer encore plus que ne le font déjà les politiques et autres institutions à ce que tout le monde soit tout le temps sur le numérique et que c’est vachement bien, c’est super, il faut y aller. On n’est pas là-dedans. On est vraiment sur la question que les gens arrivent à le faire avec discernement. Justement, qu’est-ce qu’on essaie de faire ? Il y a d’une part les injonctions. On essaie de dire aux gens « OK ! Vous êtes obligé pour les impôts maintenant. D’accord, on va faire ça ». Mais ensuite, sachons ce que nous faisons, choisissons ce que nous voulons faire, choisissons là où on dit oui, là où on dit non, pour revenir à ce que disait Véronique. Notre idée est vraiment de donner un maximum, de soutenir un maximum de recherche sur le discernement qu’on peut avoir en utilisant tel GAFAM ou tel site ou telle façon de faire, telle pratique.

Donc inclusion numérique, pff !, oui mais non ! Je ne dis pas toujours non. Quand il s’agit effectivement d’aller chercher une subvention quelque part pour nous aider sur un projet, OK, on va dire que oui. Mais là, entre nous, à Cause Commune, je vais dire que ce n’est pas notre terme de prédilection.
Joyce Markoll : La terminologie c’est une chose, par contre l’objectif de faire passer les gens au Libre en leur en montrant les avantages aussi sur le plan de la pérennité des données, aussi sur le plan de la préservation de la vie privée, sur tous ces plans-là, je pense que c’est quand même un message à faire passer à des entreprises comme APTIC qui sont soutenues par l’État depuis 2015 je crois, parce que, en passant par eux, en passant aussi par lesbonsclics.fr, on permet à l’information de traverser de manière horizontale.
Isabelle Carrère : Bien sûr. Je te rejoins.
Joyce Markoll : Est-ce que je peux prendre la parole ?
Frédéric Couchet : En fait, depuis trois minutes j’essaye de prendre la parole pour dire qu’on va faire une pause musicale pour permettre aux gens de respirer.
Joyce Markoll : On est obligé ?
Isabelle Carrère : Oui. Il faut que les gens respirent.
Frédéric Couchet : On est obligé. Si tu ne veux pas faire de pause musicale, si tu veux tu peux aussi raccrocher et revenir un autre jour, je n’en sais rien. À la radio, les gens ont aussi besoin de pauses éventuellement pour bien assimiler ce qui est dit. On reviendra sur ce sujet.
Joyce Markoll : On reprend dans combien de minutes à peu près ?
Frédéric Couchet : Tu écoutes la pause musicale et tu verras.

[Virgule musicale]
Frédéric Couchet : On va écouter The rest of the world par The Imaginary Suitcase. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.
Pause musicale : The rest of the world par The Imaginary Suitcase.
Voix off : Cause Commune, cause-commune.fm, 93.1
Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter The rest of the world par The Imaginary Suitcase, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution, CC By. Vous retrouverez les références sur le site de l’April, april.org, et sur le site de la radio causecommune.fm.

Je précise que The Imaginary Suitcase c’est Laurent Leemans, un artiste belge que nous avons reçu dans l’émission Libre à vous ! du 21 avril 2020. C’est l’ancien chanteur du groupe Ceilí Moss duquel nous avons diffusé de la musique libre. Je vous invite à écouter le podcast. J’entends énormément de bruit dans le casque, j’espère que ce n’est pas diffusé à l’antenne.

Vous écoutez toujours l’émission Libre à vous ! sur radio Cause Commune, la voix des possibles, 93.1 FM en Île-de-France et partout dans le monde sur le site causecommune.fm.

Nous discutions avec Isabelle Carrère d’Antanak et Joyce Markoll de l’Atelier Orditux Informatique, je vais d’ailleurs indiquer les sites web. Antanak c’est antanak.com avec un « k » à un Antanak et Orditux c’est orditux.org. Nous parlons de reconditionnement informatique pour la réutilisation.

Juste avant la pause il y avait une discussion entre Joyce et Isabelle. Je crois, Joyce, que tu voulais poursuivre. Vas-y.
Joyce Markoll : Il y a longtemps de ça, ce que je voulais au départ, c’est que ce soit simple et que ça marche. Ensuite, quelques années plus tard, je me suis retrouvée avec des personnes qui voulaient aussi la même chose mais qui ne savaient pas trop comment. Par la suite je me suis rendu compte que ce que je voulais et ce que j’avais ça marchait aussi pour d’autres. J’ai commencé en 2009 à apprendre à reconstruire des systèmes. En 2011 ça a mené à la création d’un site collaboratif qui se nomme, pardon pour le GNU qui est manquant, linuxvillage.org. Sur ce site on peut trouver les entrées vers un forum, vers des téléchargements, vers de la documentation. Je contribue par la reconstruction de systèmes en les rendant plus légers pour les ordinateurs tout en les conservant simples. J’avais découvert que léger ça existait mais ce n’était pas simple, du moins moi je trouvais, à mon niveau, que ça n’était pas simple à l’époque. Facile, je trouvais que ça existait mais que ce n’était pas léger pour les ordinateurs. J’ai voulu que ce soit les deux, ça a donné une recette Bento Openbox et Bento Openbox c’est simple et c’est rapide. Tout le monde peut se procurer les versions à partir du téléchargement. L’intérêt que tout le monde puisse se le procurer c’est que les associations peuvent l’avoir, les particuliers peuvent l’avoir, toutes les personnes qui souhaitent le tester et l’utiliser peuvent l’avoir et c’est largement diffusé maintenant.
Frédéric Couchet : OK. Merci Joyce. Vas-y Isabelle.
Isabelle Carrère : Je voulais réagir parce que ce que dit là Joyce c’est génial, à condition que les gens soient déjà dans l’optique d’aller chercher et de savoir ce qu’ils vont chercher, là, sur le Libre. En fait, ce sont des gens qui sont déjà peu ou prou engagés dans cette démarche et/ou qui s’interrogent.
Joyce Markoll : Tout à fait.
Isabelle Carrère : Du coup, ce que j’ai trouvé très intéressant dans la période que nous venons de vivre, c’est que nous avons à Antanak, en un mois et demi, deux mois, donné presque autant d’ordinateurs qu’en une année « grâce », entre guillemets, au fait que la continuité pédagogique aidant, tous les enseignants et l’Éducation nationale, etc., ont demandé à chaque enfant, chaque jeune, chaque étudiant, d’avoir un ordinateur et bien sûr une caméra pour pouvoir suivre les choses. Du coup, ils se sont retrouvés tous à dire que oui, bien sûr ça allait marcher très bien sauf qu’il y avait un manque d’équipement phénoménal. Pourquoi je dis ça maintenant ? C’est qu’avec nos petits ordinateurs reconditionnés, avec dessus une distribution libre, nous avons pu « inonder » entre guillemets – pour répondre à ce que tu disais tout à l’heure Joyce, il faut faire connaître, etc. – nous, à Antanak, on est assez pragmatiques et là on a été très contents en fait d’inonder les familles, notamment dans le 18e arrondissement mais aussi au-delà, d’ordinateurs, de postes qui sont libres. Quand les gens venaient chercher l’ordinateur qu’on leur donnait, on passait une petite demi-heure à expliquer, je raconte l’histoire des trois frères, il y avait Apple, il y avait Microsoft et puis il y avait les autres et voilà. Donc on raconte, on explique, on démontre et là les gens accrochent tout de suite, il n’y a pas de souci. On n’a pas eu de retours, on a eu quelques personnes qui ont dit : « Ça comment ça marche ? Je n’ai pas compris. – Très bien. – On me demande vraiment d’utiliser Zoom, est-ce qu’on peut ? – Oui, tu peux. – D’accord, OK. », mais on n’a pas eu de refus, on n’a pas eu de « non, ça ne marche pas », on n’a pas eu tout ça parce que c’est simple, en fait c’est simple maintenant. Je te rejoins, il y a eu une époque où c’était peut-être moins simple, où il n’y avait pas toutes les interfaces graphiques que nous avons maintenant et on a pu penser, à une époque, que c’était simplement pour des libristes ou simplement pour des geeks ou simplement des informaticiens, des informaticiennes, ça n’est plus le cas. Je pense qu’on est maintenant sur un autre terrain sur lequel on peut se battre, il faut y aller !
Frédéric Couchet : Joyce, je pourrais poser une question ? Après tout je peux vous laisser aussi. Il n’y a pas de problème !

Je vous ai signalé qu’il nous restait dix minutes il y a déjà deux minutes, donc le temps file, il y a des sujets qu’on n’a pas encore abordés. Je voulais revenir par rapport à ce que tu venais de dire Isabelle, et la question est pour vous deux. En introduction, je ne sais plus quel terme tu as employé, mais les problématiques des personnes qui, en fait, ne savaient pas utiliser un ordinateur, ce qu’on appelle l’illettrisme numérique, et ma question à toutes les deux est : est-ce que c’est quelque chose qui est vraiment répandu aujourd’hui dans le public que vous voyez, et comment, concrètement, vous faites pour traiter cette question-là ? Isabelle et ensuite Joyce.
Isabelle Carrère : C’est effectivement très répandu et pas simplement parce qu’on est là dans un quartier dit populaire, politique de la ville, etc., au Nord de Paris. Je vois bien qu’il y a des tas de gens qui viennent de partout et, même à d’autres endroits, on se retrouve avec les mêmes situations quand on parle avec d’autres associations ou d’autres gens qui travaillent un peu de la même façon que nous. Oui, il y a beaucoup de gens qui sont éloignés. Pourquoi ? On va dire « tout le monde a un téléphone ». Oui, beaucoup de gens, une majorité de gens a maintenant même un smartphone. Sauf qu’utiliser un smartphone et utiliser un ordinateur, ce n’est pas pareil ! On croit, on fait croire aux gens que c’est pareil parce qu’on essaye de mixer un peu les applications et puis on te fait une application qui est pareille sur le téléphone et sur l’ordi mais en fait ce n’est pas vrai, ce n’est pas la même chose, ce n’est pas la même relation physique et il y a des tas de gens qui, en plus, « se sont faits », entre guillemets, installer des trucs sur un téléphone sans maîtriser. Ça, c’est ce sur quoi on essaye vraiment de lutter, on continue de lutter là-dessus. Il y a une assistante sociale, un jour, quelque part, qui a installé, qui a ouvert une boite mail pour une personne, en lieu et place. La personne n’a même pas son mot de passe, peut-être même que l’assistante sociale ne l’a plus parce que sur le téléphone ce n’est pas grave, c’est tout le temps ouvert ! D’accord ? Le Wifi aussi est tout le temps ouvert, la géolocalisation aussi et puis et j’en passe et des meilleures ! Tout ce qu’on essaie de faire, grâce aussi à l’ordinateur, c’est de remontrer les chemins par lesquels c’est passé et de faire en sorte que les gens se réapproprient leur machin et puissent dire oui ou non à telle ou telle chose. Mais oui, l’illettrisme numérique existe, bien sûr.
Frédéric Couchet : Joyce, de ton côté ?
Joyce Markoll : C’est une vaste problématique. Le monde, dans son ensemble, n’a pas eu le temps de s’habituer, de s’adapter. Tout un chacun et chacune depuis 20, 30 ans ou 40 ans est surbooké·e, c’est la maladie du siècle. On veut toujours en mettre plus dans la liste des choses à faire, le boulot, la famille, les sorties et puis faire du boulot dans la maison et puis bricoler et faire un deuxième job si on peut. Avec tout ça, beaucoup d’utilisateurs, même qui emploient l’ordinateur déjà depuis plusieurs années, n’ont pas encore trouvé la différence entre le clic gauche et le clic droit. J’ai eu la chance, quand j’ai commencé à 40 ans passés, de tomber au bon endroit où c’est la première chose qu’on m’a montrée, du coup je croyais que tout le monde avait appris la même chose, ce qui n’est pas le cas. La majeure partie des individus ne sait pas se servir de plus de deux à trois doigts, quatre doigts peut-être, pour saisir un message ou faire une lettre avec le clavier. Finalement, tout part des bases qui sont manquantes. Dans un lieu pour apprendre l’informatique, on vous montre une fenêtre, on vous montre à enregistrer un fichier, on vous montre Word, Excel, donc vous croyez que vous faites un fichier Word, vous croyez que vous faites un fichier Excel, alors que vous pourriez utiliser n’importe quel traitement de texte ce serait la même chose. Les gens n’ont pas appris sur un principe, ils ont appris sur des recettes et ça c’est bien dommage.
Isabelle Carrère : Des recettes et des marques. Effectivement, le nombre de gens qui viennent en disant « il faut que je fasse un texte en Word ». Je dis « de quoi tu me parles ? » Et on apprend le terme de traitement de texte et après on va pouvoir parler d’un tableur, etc. Oui, c’est ça !
Frédéric Couchet : OK. Vas-y Joyce.
Joyce Markoll : Je voulais revenir sur ce que j’ai dit tout à l’heure. Isabelle a raison de dire qu’aujourd’hui il y a beaucoup d’interfaces graphiques et que c’est facile. Vous prenez un bureau simple comme on a chez Ubuntu avec Lubuntu ou dans d’autres distributions avec le bureau LXDE, c’est simple, c’est rapide. Ce que j’ai fait ça va plus loin, donc je vous invite à l’essayer.
Frédéric Couchet : OK. Merci. Le temps file, il va falloir passer à notre sujet d’après. Si, en une minute et 30 secondes, vous avez des annonces à faire ou simplement des projets à annoncer, allez-y. Vas-y Isabelle.
Isabelle Carrère : Oui. Je voulais quand même dire un truc. On a l’air de dire que notre monde est vachement beau et que tout ce qu’on fait à Antanak marche bien. C’est vrai, mais en même temps le sujet de base, celui que tu avais choisi pour nous inviter, c’était la question du reconditionnement, donc une partie très matérielle en fait. Je voulais juste dire un truc c’est que le frein majeur au développement de cela, et les difficultés que nous pouvons avoir, du coup ça fait aussi un appel pour les gens, les auditeurs et auditrices qui peut-être nous écoutent là, c’est « il nous manque du matériel ». C’est-à-dire que si vous connaissez une entreprise qui n’a pas encore un contrat, une convention déjà passée avec les gros, Emmaüs Connect ou Artisans sans Frontières ou autres, il y a plusieurs grosses structures comme ça qui récupèrent du matériel, on est preneurs, on est demandeurs. Pour le moment ce sont les PME, PMI de Paris ou d’Île-de-France qui nous donnent leur matériel pour qu’on puisse le reconditionner et le donner pour une nouvelle utilisation, ou des particuliers. Il nous manque du matériel. On doit encore avoir une liste de presque 100 personnes, là où on est, qui nous ont fait une demande d’un ordinateur portable avec une caméra et nous n’en avons quasi plus. On a tout donné, on a relancé des structures [un peu partout, mais pour le moment on n’a pas assez de retours, Note de l’orateur]. Oui, c’est une annonce que je peux faire, effectivement une demande !
Frédéric Couchet : Donc annonce passée, c’était Isabelle Carrère d’Antanak. Joyce, en 30 secondes, si tu veux ajouter quelque chose.
Joyce Markoll : Je suis en train de préparer un nouveau projet qui est issu du confinement et qui est issu d’autres choses, de mes expériences. Ce projet va consister à proposer en ligne et par formation et par cooptation et par bouche à oreille par la suite un kit modulaire pour que chacun et chacune, même sans connaissances techniques, puisse remettre en état son ordinateur soi-même. Il aura entre les mains tout ce qu’il faut en premier module pour pouvoir faire le diagnostic même sans rien y connaître, c’est un travail qui est en cours de route, qui est presque prêt. Le deuxième module ce seront des ensembles qui seront déjà prêts à l’emploi pour brancher et démarrer sur l’ordinateur, pas juste des clefs USB, mais ça ira beaucoup plus loin, avec un petit manuel papier pour qu’une personne qui sait lire puisse le faire, qu’une personne qui sait même lire et utiliser un tournevis n’ait pas peur de remplacer ce qu’elle a dans l’ordinateur par une autre chose qui sera prête à l’emploi.
Frédéric Couchet : OK. Merci.

C’était Isabelle Carrère d’Antanak, antanak.com, et Joyce Markoll de l’Atelier Orditux Informatique, orditux.org. Je rappelle qu’Isabelle anime également une émission sur Cause Commune, Un coin quelque part, vous retrouverez les podcasts sur causecommune.fm.

Merci à vous et passez une belle fin de journée.
Isabelle Carrère : Merci à toi Fred. Merci pour cette opportunité et merci à l’April.
Joyce Markoll : Merci beaucoup Fred.
Frédéric Couchet : Nous allons faire une petite pause musicale.
[Virgule musicale]
Frédéric Couchet : Nous allons écouter Lovers lane par Sucrepop. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Lovers lane par Sucrepop.
Voix off : Cause Commune, cause-commune.fm, 93.1.
Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter Lovers lane par Sucrepop, disponible sous licence libre Creative Commons Partage dans les mêmes conditions, CC By SA. Cette musique douce fait beaucoup de bien. Vous retrouverez les références sur le site de l’April, april.org, et sur le site de la radio, causecommune.fm.

Vous écoutez toujours l’émission Libre à vous ! sur radio Cause Commune, la voix des possibles, 93.1 FM en Île-de-France et partout dans le monde sur le site causecommune.fm.

Nous allons passer au sujet suivant.
[Virgule musicale]

Chronique « Le libre fait sa comm’ » d’Isabella Vanni, coordinatrice vie associative et responsable projets à l’April, sur son retour d’expérience concernant la recherche d’un outil adapté pour les projets du groupe de travail Sensibilisation

Frédéric Couchet : Nous allons parler avec ma collègue Isabella Vanni qui est coordinatrice vie associative et responsable projets à l’April de son retour d’expérience sur la recherche d’un outil adapté pour les projets du groupe de travail Sensibilisation de l’April.

Bonjour Isabella, je te passe la parole.
Isabella Vanni : Bonjour à tout le monde.

Je prends la parole et bien sûr, Fred, tu m’interromps, tu me poses des questions.
Frédéric Couchet : Tu as vu, je suis très fort pour interrompre les gens. Vas-y Isabella, raconte-nous un petit peu ce retour d’expérience.
Isabella Vanni : C’est vrai. En fait, historiquement on va dire, dans le groupe de travail Sensibilisation, on a l’habitude d’utiliser un outil qui s’appelle Etherpad. Il s’agit d’un éditeur de texte collaboratif. En gros, c’est une page web, on peut s’y connecter depuis son navigateur et dès qu’on arrive sur la page, on peut directement taper dedans. La seule manipulation qu’on demande à la personne qui souhaite contribuer à ces pages collaboratives c’est de préciser son nom ou son pseudonyme, ce qui permet, en fait, d’identifier facilement qui écrit, parce que chaque personne connectée est identifiée par une couleur différente. C’est la seule manip qu’on demande. Pourquoi ? Parce que, si on n’écrit pas son pseudo, eh bien ce qu’on écrit c’est en fait anonyme. Mettons qu’il y ait une bonne idée qu’on veut approfondir ou alors mettons qu’on ait besoin d’une source ou d’une référence qui n’est pas présente dans la page, si on ne sait pas qui a écrit c’est un peu dommage parce qu’on ne peut pas solliciter la personne ultérieurement. Normalement c’est tout. Après, il faut juste utiliser son clavier et apporter ses contributions.
Frédéric Couchet : C’est simple en fait ! Où est le problème Isabella ?
Isabella Vanni : L’utilisation de l’outil, on a dit le nom de ce logiciel libre qui est Etherpad, quand on ouvre une page en fait on l’appelle pad. Je ne sais pas si vous avez déjà entendu « ouvre ce pad », « je ne trouve plus le lien du pad ! ». Quand on dit « pad », c’est vraiment la page qu’on ouvre grâce à ce logiciel. On peut aussi parler de bloc-notes pour utiliser un terme alternatif.

L’utilisation, telle que je l’ai décrite, parait plutôt simple. En fait, ça se complique dans le cas d’un document particulièrement long, un document qui va prendre plusieurs lignes.

Ce qui est intéressant dans le pad, dans la page qui est crée grâce à l’Etherpad, c’est que chaque ligne est numérotée ce qui est très pratique parce que, comme ça, on peut dire aux personnes qui contribuent à un projet « j’ai mis une modification, va voir à la ligne, je ne sais pas, 37 ». On peut facilement indiquer où aller dans le pad.

Il se trouve que, à présent, le groupe de travail Sensibilisation travaille sur deux projets : le quiz Enjeux de l’informatique et le jeu coopératif Jeu du Gnou, qui utilisent tous les deux des pads longs, mais longs c’est un euphémisme, ce sont vraiment des pads avec beaucoup de lignes, on dépasse largement les 1000 lignes, voire plus. Ce qui se passe c’est qu’une personne qui souhaiterait contribuer et qui arrive sur ce pad, elle est un peu perdue parce que l’Etherpad, le logiciel qu’on utilise aujourd’hui premet, en fait, une mise en forme très basique. C’est-à-dire qu’il est possible de mettre un texte en gras ou en italique, il est possible aussi d’utiliser des titres, mais on ne peut pas faire beaucoup plus. Ce que je veux dire c’est que, même si écrire dans un pad est facile, naviguer dans le pad tel qu’on le connaît aujourd’hui, ce n’est pas du tout évident. Je m’en suis rendu compte en fait quand j’ai sollicité des personnes pour participer à nos projets, suite à des ateliers par exemple du Jeu du Gnou – on a fait des ateliers notamment lors d’une Ubuntu Party à Paris en novembre 2019, l’Ubuntu Party est un évènement organisé par Ubuntu-fr, la distribution GNU/Linux Ubuntu – j’avais des personnes très enthousiastes pour ce jeu, qui avaient envie de contribuer, qui m’ont dit « écrivez-moi, j’ai envie de faire ma part, d’apporter ma pierre à l’édifice ». Une fois envoyé le lien du pad, je n’ai plus vu personne. Du coup je me suis posé une question, je me suis dit peut-être qu’on utilise un outil et, nous qui l’utilisons tous les jours, même assez régulièrement, on ne se rend pas compte que ce n’est pas si évident que ça finalement pour les autres. Donc j’ai demandé un peu de retours d’expérience à des personnes qui ne connaissaient pas nos documents de travail actuels. Comme vous le savez j’aime bien lire les citations parce que c’est plus parlant, j’ai noté : « Pour l’instant, c’est effectivement le volume du projet avec des liens partout qui me fait un peu peur ». Voilà une personne qui a décidé de ne pas contribuer et elle a donné ses raisons. Ou bien « j’avoue que je n’ai rien compris sur le pad classique », ou encore « il est difficile de passer d’une section à l’autre du pad. » Voilà. J’ai eu ma réponse. Ou bien, j’ai eu une confirmation : quand c’est trop long et quand il y a des liens partout, l’Etherpad classique on va dire, la version qu’on utilise aujourd’hui à l’April, n’est pas l’outil le plus adapté pour attirer de nouvelles personnes contributrices.

Donc je me suis demandé qu’est-ce qu’on peut faire ?

Déjà voir s’il y a d’autres outils qui peuvent répondre à nos besoins, voire, éventuellement, faire évoluer l’outil qu’on a aujourd’hui en sachant que les besoins qu’on a identifiés sont la facilité d’utilisation, comme je disais tout au début, la facilité de navigation, c’est-à-dire la possibilité de retrouver l’information facilement, que les personnes ne soient pas frustrées et qu’elles restent sur le pad et aussi une mise en forme agréable. Les personnes, aujourd’hui, sont habituées à aller sur le Web, à voir des jolies pages avec une jolie mise en forme, avec beaucoup d’images, et c’est vrai que la version actuelle du pad de l’April peut être vue comme un peu brute, on va dire un peu tristounette. Si on veut attirer de nouvelles personnes contributrices, il faut agir aussi là-dessus.

Grace à l’aide de personnes du groupe de travail Sensibilisation, mais pas que, j’ai sollicité d’autres membres actifs et actives de l’April qui m’ont donné des billes, de possibles outils alternatifs, notamment CodiMD et CryptPad. Les deux sont des éditeurs de texte collaboratif. Grâce à ces retours j’ai créé un comparatif pour avoir les idées un peu plus claires. Je pense que finalement la solution la plus simple sera celle de garder Etherpad. Une version plus récente d’Etherpad est récemment sortie ce qui permettra, normalement, une meilleure navigation, notamment parce qu’il y aura la possibilité de mettre des liens hypertextes et j’espère aussi des ancres.

Il est peut-être utile d’expliquer ce qu’est une ancre.
Frédéric Couchet : Vas-y.
Isabella Vanni : C’est un truc génial, je vais vous expliquer, c’est très simple, c’est juste le mot qui est spécifique. Vous pouvez mettre des liens hypertextes, c’est-à-dire que sur une page web vous pouvez intégrer un lien dans un texte de façon à ce que, quand vous cliquez dessus, une autre page web s’ouvre. L’ancre, en fait ça marche à peu près de la même façon, sauf qu’au lieu de mettre le lien à une autre page web, vous mettez le lien à un lieu précis dans la même page. En gros, l’ancre c’est comme si je mettais un marque-page dans un document et après je mets un lien qui me permet, si je clique dessus, d’arriver directement dans le lieu que j’avais indiqué précédemment. Tout ça pour dire que ça permet vraiment de faciliter énormément la navigation.

J’espère qu’il y aura aussi la possibilité d’ajouter une table des matières. Je n’ai pas encore vu si la nouvelle version d’Etherpad la contient déjà par défaut.

Ce qui est vraiment intéressant avec Etherpad, c’est que c’est un logiciel qui est très utilisé, qui plaît beaucoup, du coup il y a énormément de personnes qui contribuent. J’ai vu qu’il y a plus de 270 plugins, c’est-à-dire de fonctionnalités complémentaires qu’on peut, en fait, installer pour ajouter des fonctionnalités, donc pour personnaliser, on va dire pour augmenter les performances de son pad. Du coup j’espère qu’il y aura la table des matières intégrée dans la nouvelle version ou bien qu’on pourra l’ajouter par le biais d’un plugin.

J’ai beaucoup parlé. Peut-être que tu as une question pour moi.
Frédéric Couchet : Je n’ai pas de question parce que ça me paraît très clair. Je vais juste préciser que le lien pour les références de ton comparatif est sur le site april.org et sur le site causecommune.fm. Je vais aussi préciser, on en a déjà parlé la semaine dernière mais on en reparlera la semaine prochaine dans les émissions « Au cœur de l’April », notre organisation concernant les émissions Libre à vous ! se fait de façon publique justement sur des blocs-notes. Il y a deux bloc-notes principaux, je viens de vérifier, ils font chacun 1200 lignes. Il y en a un uniquement sur les musiques et l’autre sur l’organisation générale. En plus on a des pages wiki où on formalise un peu plus la documentation.

On espère effectivement, comme tu viens de dire, qu’avec la nouvelle version d’Etherpad, avec une table des matières et avec des ancres, c’est-à-dire la possibilité de faire de liens d’un endroit à l’autre dans la même page, ça permettra effectivement de faciliter la contribution parce que, ce qui est le plus important évidemment pour nous, c’est de faciliter la contribution de personnes extérieures, ne serait-ce que, par exemple, pour proposer des musiques libres.

Dernier point : les personnes qui voudraient tester le pad actuel peuvent aller sur le site chapril.org, dont on a parlé tout à l’heure, notre site qui propose des services libres et loyaux dont un bloc-notes.

Est-ce que tu souhaites ajouter quelque chose ?
Isabella Vanni : Non. Je pense qu’on a tout dit. Je serais ravie que cette recherche que j’ai faite pour le groupe Sensibilisation puisse servir à d’autres projets au sein de l’April.
Frédéric Couchet : Super. On va préciser que toute personne est la bienvenue au sein du groupe Sensibilisation de l’April. Vous allez sur april.org et vous pouvez rejoindre la liste de discussion.

C’était la chronique de ma collègue Isabella Vanni qui est coordinatrice vie associative et responsable projets à l’April.

Bonne fin de journée Isabella.
Isabella Vanni : Merci. Bonne fin de journée à vous aussi.
Frédéric Couchet : Nous approchons de la fin de l’émission, nous allons terminer par quelques annonces. Je regarde le temps qui me reste. On y va.
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Annonces

Frédéric Couchet : D’abord un rappel aux membres de l’April. Nous organisons notre AG, assemblée générale décentralisée, ce samedi 27 juin 2020 à 14 heures. Toutes les informations utiles sont disponibles dans votre espace membre. Évidemment, suite à la condition sanitaire en France en mars 2020 nous n’avons pas pu organiser notre assemblée générale donc elle a lieu ce samedi mais en mode décentralisé.

La fin de la saison 3 de Libre à vous ! approche ; avant la pause estivale nous sommes en période de bilan, de préparation de la saison 4. N’hésitez pas à contribuer. On vient juste de parler de bloc-notes. Vous pouvez aller voir sur le bloc-notes de 1200 lignes, mais vous n’allez peut-être pas vouloir contribuer ! N’hésitez pas à nous envoyer tout simplement un courriel ou à nous contacter sur le salon web de la radio. On a besoin de vos retours. Expliquez-nous ce qui vous plaît dans l’émission, les sujets, les chroniques, les points de vigilance, les points d’amélioration, des suggestions pour la saison 4 de manière à ce qu’on puisse démarrer la saison 4 en septembre en beauté avec vos contributions.

Jeudi soir, jeudi 25 juin 2020, Isabella anime une réunion à distance du groupe Sensibilisation. Toutes les informations sont sur april.org et toute personne peut participer, qu’elle soit membre ou pas de l’April.

Ça se sont des annonces un peu April, émission de radio.

Deux actus importantes récemment autour d’Internet.

La première c’est la loi contre la cyberhaine portée avec brio – Ah ! Ah ! Ah !, on rit, il faudrait des fois un jingle rire – par Lætitia Avia qui a été très largement censurée par le Conseil constitutionnel. Le Conseil a en effet déclaré contraire à la Constitution la quasi-intégralité de la loi de lutte contre la haine en ligne. Et au-delà de sa décision, le Conseil constitutionnel refuse le principe d’une censure sans juge dans un délai imposé d’une heure ou de 24 heures comme le prévoyait la loi. Si vous voulez en savoir plus vous allez sur le site de La Quadrature du Net, laquadrature.net et sur le site de Next INpact, nextinpact.com, où il y a un excellent article de Marc Rees.

Toujours au niveau numérique, le Health Data Hub, la plateforme d’exploitation des données de santé des patients et patientes français, on avait parlé des problèmes posés par cette plateforme dans l’émission Libre à vous ! du 28 janvier 2020, suite à un dépôt en référé-liberté par un collectif d’organisations, le Conseil d’État ordonne au Health Data Hub de se mettre en conformité avec la CNIL, la Commission nationale informatique et libertés, et d’informer les personnes que leurs données peuvent être transférées aux États-Unis. Plus de détails sur le site du CNLL, cnll.fr, il y a un communiqué de presse et je crois qu’il y a le lien vers la décision du Conseil d’État.

Pour tous les autres évènements vous allez sur le site de l’Agenda du Libre, agendadulibre.org.
Notre émission se termine. Je remercie les personnes qui ont participé à l’émission : Véronique Bonnet, Isabelle Carrère, Joyce Markoll, Isabella Vanni.

Aux manettes de la régie aujourd’hui William Agasvari qui anime les émissions Et pour cause et Cyberculture sur la radio. Merci également à Sylvain Kuntzmann, Antoine, Olivier Grieco qui s’occupent de la post-production des podcasts.

Merci également à Quentin Gibeaux qui fait de la découpe des podcasts.
Vous retrouverez sur le site web, april.org et sur le site causecommune.fm, une page avec toutes les références utiles.
Nous vous remercions d’avoir écouté l’émission. Si vous avez aimé cette émission n’hésitez pas à en parler le plus possible autour de vous et faites connaître également la radio Cause Commune, la voix des possibles.

La prochaine émission aura lieu en direct mardi 30 juin 2020. Notre sujet principal portera sur l’April avec la deuxième partie de « Au cœur de l’April » : des personnes actives au sein de l’association parleront de nos actions, de notre fonctionnement pour vous expliquer comment fonctionne l’April.
Nous vous souhaitons de passer une agréable fin de journée. On se retrouve en direct mardi 30 juin et d’ici là portez-vous bien.
Générique de fin d’émission : Wesh Tone par Realaze.

Avertissement : Transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant⋅e⋅s mais rendant le discours fluide. Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.