Le vote électronique. En quoi le logiciel libre n’est pas la solution ? Conférence de Benoît Sibaud

Présentation

Lors de l’Ubuntu Party de novembre 2011, l’ancien Président de l’April, Benoît Sibaud a donné une conférence sur le vote électronique.
Son objectif était de montrer en quoi le Logiciel Libre n’était pas la solution ?

  • Titre : Le vote électronique. En quoi le logiciel libre n’est pas la solution ? Conférence de Benoît Sibaud
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  • Lieu : Cité des sciences et de l’industrie de la villette
  • Date : 13 novembre 2011
  • Licence : cc-by-sa
  • Transcription

    Bonjour à tous. Donc Benoît Sibaud. Je vais vous parler de vote électronique et vous expliquer en quoi le logiciel libre n’est pas la solution.

    D’abord je vais vous parler un peu de moi, histoire de vous situer mon activité. J’ai agi pas mal pour le Logiciel Libre et je continue. J’ai été administrateur de l’association April pendant 10 ans, et je l’ai présidée pendant 5 ans. Ça fait 10 ans maintenant que je m’occupe du site linuxfr.org comme webmestre, et j’ai aussi participé à l’organisation des Rencontres Mondiales du Logiciel Libre, agit pour la reconnaissance au patrimoine mondial immatériel de l’Unesco du logiciel libre et écrit des chapitres dans 3 livres sur le Logiciel Libre.

    Professionnellement je suis un ingénieur en informatique dans un centre de R&D, et j’ai fait du développement informatique et maintenant je suis responsable d’intégration, donc je fais des tests de solutions informatiques. Ce qui peut servir, on verra tout à l’heure, pour les questions de tests des solutions de votes. Et je me suis intéressé au vote électronique via les libristes. L’affaire du 13ème bit belge en 2003 qui était passée sur une liste liée au logiciel libre et qui explique qu’il y a une erreur de 1024 (sic, 4096 en fait) votants dans un vote en Belgique. Et donc c’était une erreur informatique dans du vote électronique.

    Au début je trouvais ça intéressant, c’était un simple sujet d’intérêt et puis là où je réside, c’est-à-dire à Issy-les-Moulineaux, il y a eu en 2006 le choix de passer en 100% vote électronique sur toutes les élections institutionnelles et à partir de là je me suis intéressé plus fortement au sujet et j’ai essayé de montrer les limites et les problèmes que posait le vote électronique dans ce cadre-là. Et ensuite je me suis retrouvé à définir les positions de l’April sur le vote électronique et à participer en tant que membre de l’April au forum des droits sur Internet à un groupe de travail sur le vote électronique en 2007 et en 2008.

    Qu’est-ce qu’on entend par scrutin et dans quel cadre on va rencontrer les différents types de scrutins ? Je vais commencer par faire une introduction sur le vote en général puis sur le vote électronique ou vote par Internet ensuite et enfin venir sur les questions sur le Logiciel Libre, histoire qu’on partage une base commune sur ce sujet-là.

    Des scrutins, il y en a plein de types différents. On peut avoir des scrutins à main levée, vous avez là en haut à droite sur l’image un exemple de scrutin à main levée, une assemblée générale pour décider de la grève si je me rappelle bien. Vous avez en haut aussi un vote par correspondance. On peut choisir de voter par courrier postal : on met dans une enveloppe et on envoie à l’organisateur de l’élection. De manière générale, on peut avoir des votes par procuration où on délègue son vote à quelqu’un. On peut avoir des votes avec des bulletins papier, donc, de différents types d’ailleurs ; ça peut être des bulletins papier qui sont ouverts, on peut voir ce que vous votez, ou des bulletins papier qui sont secrets comme là dans l’urne, des enveloppes fermées contiennent des bulletins. Et puis on a 2 autres types de scrutins qui sont souvent regroupés sous le nom de vote électronique et qu’il faut dissocier. Il y en a un qui concerne le vote par ordinateur de vote, comme on a un exemple en bas à droite sur l’image. On a un terminal électronique qui sert à voter et qui est disponible dans un bureau de vote, donc les gens se rendent dans un bureau de vote et votent avec. Et les scrutins qui sont par Internet. On a un exemple en bas à gauche, où on a des gens qui votent sur des ordinateurs via un navigateur et qui se connectent quelque part et qui votent dans le cadre d’un scrutin dans l’Éducation nationale, si je me rappelle bien.

    Donc on a tous ces différents types de scrutins et on va voir que suivant les types de scrutin et dans quel cadre c’est organisé, les problématiques sont un petit peu différentes.

    Voila une chronologie passée et un petit peu future des élections qui m’ont concerné personnellement, sur lesquelles j’ai eu à me prononcer. Et on voit de manière générale, on voit qu’il existe différents types d’élections. Il y a bien entendu les élections institutionnelles, chaque fois que en tant que citoyen, quelque soit votre pays d’ailleurs, vous êtes invités à aller voter pour des municipales, des cantonales, des législatives, la présidentielle, les européennes, les élections régionales, etc. Il y a aussi des élections qui sont des élections professionnelles, représentants des délégués du personnel et autres, les prud’homales, ce genre d’élections. Pour les étudiants, les élections étudiantes pour choisir leurs représentants aussi. Les élections associatives au sein d’une association pour choisir qui sera le nouveau bureau, le nouveau président, le vote des bilans, moral et financier, etc. Des scrutins aussi dans le cadre des coopératives. Quand vous avez une entreprise qui a choisi comme forme d’être une coopérative, souvent ça veut dire que tout le monde va participer à la prise de décision et donc il faut trouver un moyen de définir, de prendre des décisions dans l’entreprise, donc il y a des scrutins dans ce cadre-là aussi. Vous avez des simples consultations ou des référendums on pourrait dire, pour demander l’avis d’une population donnée, quelle que soit cette population, que ça soit une population de citoyens d’un pays, une population dans un cadre professionnel, associatif, privé, familial, et ce que vous voulez. Et le dernier point concerne la question de la démocratie participative ou « liquid democracy » qui consiste à demander le plus souvent possible et directement aux gens concernés, souvent l’électeur citoyen, ce qu’il pense des différentes décisions à prendre et ce qu’il envisage comme choix politique à faire.

    Donc, il y a un vaste choix de scrutins qui sont possibles, et comme vous le voyez ici, il y a des scrutins pour ce qui me concerne moi, ce n’est pas forcément la même expérience pour vous puisque ça dépend de la ville où vous résidez notamment. On voit qu’il y a eu des scrutins qui sont mixtes c’est-à-dire un mélange de vote électronique et de vote papier et des scrutins qui sont uniquement par Internet comme l’élection des conseils de quartier. Il y a des élections qui sont uniquement par ordinateur de vote ; pour Issy-les-Moulineaux, c’est 100% vote électronique depuis les élections de 2007. Toutes les élections institutionnelles françaises pour moi sont en 100% vote électronique. Et de temps en temps il y a des scrutins papier. Le dernier scrutin papier auquel j’ai pu assister ce sont les élections professionnelles.

    Quelles sont les problématiques qui se posent dans le cas d’un scrutin qui est non électronique, quelle que soit la forme qu’il prend qui n’est pas électronique ?

    On a les problèmes classiques qui sont la logistique, l’organisation, mettre en place éventuellement des isoloirs, prévoir des urnes, avoir suffisamment de gens, voilà... que tout soit prêt à temps. Il y a des questions de coût, il y a des questions de temps. Il y a des choses auxquelles on ne pense pas forcément. C’est que quand vous sondez une population, vous invitez une population donnée à une élection, si la population est suffisamment large vous rencontrez des problèmes de compréhension du français, des problèmes de handicap, des problèmes de personnes âgées qui ont du mal à lire, qui ont du mal à voter, qui ont du mal à se déplacer etc. Vous avez un problème sérieux qui est la tentation de la fraude, l’homme étant ce qu’il est, dès qu’il y a un enjeu de pouvoir, un enjeu électif, un enjeu financier, et pour plein d’autres raisons, il y a la tentation de la fraude. Donc la tentation de la fraude est à envisager en fonction de la situation, de l’enjeu de l’élection. Mais toujours est-il qu’elle est très souvent présente. Même, il ne faut pas croire quand il n’y a pas d’enjeu ou que les enjeux sont faibles, les gens ne vont pas essayer de frauder. Par exemple, si vous pensez que dans le cadre des associations du Logiciel Libre il n’y a pas de fraude, ben vous avez tort, moi j’ai déjà vu des cas de fraude dans les associations du Libre où des gens ont truqué des listes électorales par exemple.

    On a les erreurs qui sont possibles, des erreurs à différents niveaux, ou de la fraude, ça peut être difficile à déterminer. Ça peut arriver à n’importe quel moment, pendant la campagne, pendant le scrutin, sur la liste électorale, pendant le dépouillement, à la publication des résultats. Il y a plein de cas possibles.

    On voit qu’une des problématiques, ce qui rend le vote et les scrutins si, entre guillemets, compliqués à contrôler, c’est que souvent le bulletin est secret. Parce qu’on considère que dans une démocratie on doit voter à bulletins secrets, et à partir du moment où le bulletin est secret et bien, on a une absence de preuve, c’est pas vraiment possible de montrer, que chacun puisse dire : « Ben oui, moi j’ai bien voté pour lui et du coup je veux retrouver mon vote à la fin et je veux vérifier ». Le fait que le bulletin soit secret rend la chose particulièrement compliquée. Contrairement à la plupart des autres choses de la vie, actions de la vie que vous pouvez faire, plein d’autres choses sont traçables. Par exemple vous allez au distributeur, vous retirez de l’argent : d’un côté vous avez mis votre carte et de l’autre côté vous avez de l’argent. Vous avez laissé des traces. Vous êtes filmés. Il y a plein de preuves qui peuvent servir à montrer que ça s’est passé correctement. Dans le cas du vote, c’est compliqué. Le fait que le bulletin soit secret, pose des problèmes à la fin, il faut contrôler tout le temps, il faut contrôler toute l’opération pour être bien sûr que ça se passe correctement. Du coup il y a une codification qui a été faite des opérations de vote et qui encadre tout, qui va encadrer les bulletins, la taille des bulletins, leur couleur,, la mise sous enveloppe, les urnes, comment on vote, même sur des scrutins qui ne sont pas papier d’ailleurs, on a une codification du vote qui est prévue pour toutes les élections et qui disent comment ça va se passer, comment on décide du gagnant, est-ce que c’est du scrutin par liste, par personne, est-ce qu’on a le droit de rayer des noms, etc. Et en plus on met des autorités de contrôle pour vérifier que tout va bien se passer, que tout s’est passé correctement, qu’il n’y a pas eu de gens qui ont fait pression, qu’il n’y a pas de gens qui ont essayé de tricher. Au maximum, on essaye de limiter ça.

    On va noter un premier problème qui est dû à la modernité, entre guillemets, aux progrès scientifique et technique. L’apparition des mobiles et des smartphones commence à poser des problèmes sur les scrutins papier. Parce que, à partir du moment où vous avez le moyen de filmer ou de prendre des photos, et voire plus parce que je rappelle qu’un smartphone sait faire d’autres choses, par exemple il peut faire micro, il peut faire pas mal d’autres choses, on peut commencer à montrer pour qui on a voté, du coup on peut être payé, on peut se faire acheter son vote. Il y a plein de problématiques qui apparaissent avec l’électronique embarquée, de manière générale. Rien n’est simple, mais malgré tout on constate qu’il y a des évolutions lentes. Ça peut être des évolutions qui sont liées à l’évolution de la base électorale concernée. Quel que soit le type de scrutin dans lequel on est, il y a en général ce type d’évolution qui arrive. Par exemple le vote des femmes arrive en 1944 en France. Dans les années 70, si je ne m’abuse, on a l’abaissement de la majorité à 18 ans par exemple qui change aussi la base électorale pour les élections institutionnelles.

    Des choses plus basiques auxquelles la plupart d’entre nous doivent sans doute penser que ça a toujours existé. C’est la notion de l’urne transparente. Eh bien non, l’urne transparente, c’est assez récent en France, l’urne transparente, ça date de 1988 (NdT : loi numéro 88-1262 du 30 décembre 1988, entrée en application au 1er janvier 1991). Avant on avait des urnes opaques et les urnes opaques on s’est aperçu que ça pouvait poser problème parce que des fois elles étaient remplies, elles étaient pré-remplies avant le début du scrutin.

    Dans les évolutions récentes, on peut noter les changements sur le financement des partis par exemple. Il y a plein de problèmes qui sont arrivés autour de cette question de financement.

    Et pour prendre des exemples encore plus récents, les dernières élections en Tunisie, les avant-dernières plus précisément, à l’époque de Ben Ali, se faisaient avec des enveloppes transparentes.À l’intérieur on mettait des bulletins de couleur et les enveloppes étaient transparentes. Vous votez pour qui vous voulez, mais tout le monde savait pour qui vous aviez voté. Avec les changements en Tunisie, le dernier scrutin a été fait avec des enveloppes opaques.

    Finalement on note que ça ne fonctionne pas si mal que ça. Il y a des problèmes de temps en temps. Voyez la capture du contentieux électoral, du conseiller constitutionnel. Bon, il y a un certain nombre de décisions qui sont prises, et qui en cas de protestation, qui disent si il y a eu ou pas fraude, si l’élection est invalidée ou pas, si il faut la recommencer etc. Il y a quelques cas régulièrement, mais ça se passe relativement bien.

    Maintenant qu’est-ce qui se passe dans le cadre d’un scrutin électronique ?

    Là on va parler d’un scrutin électronique, je vais aussi bien regrouper la question des ordinateurs de vote que la question du vote par Internet. En fait le vote par Internet comporte les mêmes problématiques que celui des ordinateurs de vote et il en ajoute encore d’autres. Donc c’est encore plus compliqué.

    Ces 2 types de scrutins électroniques comportent les mêmes problèmes que tous ceux que j’ai évoqués précédemment. Il n’y a aucune raison que le fait que ce soit électronique ne change quoi que ce soit aux problèmes de la logistique, du coût, du handicap, de la traduction multilingue ou de la compréhension des gens, etc. Ça ne change rien. Par contre vous ajoutez d’autres problèmes, des problèmes supplémentaires.

    D’abord, il y des choses qui sont relativement simples, qui sont les problématiques du code électoral peu adapté. Jusque là le code électoral a été plutôt prévu pour gérer les votes papier et maintenant il faut le modifier. Si c’est mal prévu dans le cas des votes institutionnels, je vous laisse supposer ce que ça donne dans le cas des votes associatifs ou autres qui encadrent beaucoup moins et qui ont beaucoup moins de bases réglementaires pour organiser une élection, qui en général s’appuient sur la façon de faire des élections institutionnelles.

    Qui dit électronique, dit on a des choses qui sont en obsolescence rapide et on a des déchets électroniques à gérer. Ça c’est un problème supplémentaire. C’est un problème relativement basique pour une collectivité, mais c’est un problème quand même.

    On a une dépendance au fournisseur qui va se créer. À partir du moment où vous faites du vote avec des terminaux électroniques, il faut que quelqu’un vous les fournisse. En l’occurrence en France par exemple, il n’y a que 3 fournisseurs d’ordinateurs de vote pour les élections institutionnelles et les trois sont étrangers : il y a un néerlandais, un espagnol et un américain. Donc vous avez une dépendance vis-à-vis de ces trois fournisseurs-là. Il n’y a que eux qui vous fournissent du matériel.

    Dans le cadre du vote par Internet, même problématique ; il y a quelqu’un qui vous fournit un serveur et qui compte les voix et vous êtes dépendant de ce fournisseur-là pour votre élection.

    Jusque là c’était des problèmes faciles, on va passer aux 2 vrais problèmes sérieux du vote électronique.

    Le terminal qui est là, l’ordinateur de vote, c’est le terminal qui est utilisé à Issy-les-Moulineaux.

    Le premier problème d’un scrutin électronique c’est qu’il est inexplicable. Ce qui est souvent la comparaison retenue, on va comparer à un scrutin papier ; le scrutin papier vous pouvez l’expliquer au lycée à des lycéens : comment ça se passe, quel est leur rôle, comment on procède pour voter, quels sont les contrôles qui sont mis en place, etc. Vous mettez un papier dans une enveloppe, l’enveloppe elle est opaque, on met dans une urne, l’urne elle est transparente, on a rempli dans l’isoloir, à la fin il y a un contrôle par des assesseurs. C’est assez facile à expliquer, on manipule du papier, c’est facile à expliquer. Dans le cadre d’un scrutin électronique il y a plein de problèmes qui arrivent liés à l’électronique. Là vous avez diverses illustrations. Faisons un exemple simple. Qui peut m’expliquer ce que fait le composant électronique qui est en haut à droite ? Bon bah comme ça, je pense qu’il n’y en a pas beaucoup dans la salle qui sont capables d’expliquer réellement en détails comment ça fonctionne. Même chose si on regarde le code source qui est en bas à droite. Même chose si je demande comment fonctionne l’accès à un réseau, ou comment on fait pour voter par Internet, quel est le cheminement qui est fait par votre bulletin sur un réseau, combien d’équipements intermédiaires, des routeurs vont avoir vu passer votre bulletin. Ou des choses qui en général quand on fait du vote électronique on a de la cryptographie qui apparaît ; qui dans la population peut m’expliquer comment fonctionne la cryptographie ? Qui comprend ce que veut dire le certificat de crypto qui est en bas à gauche ? Qui est capable d’expliquer la formule mathématique qui est au milieu et qui explique un des algos de chiffrement les plus connus ? Bref. Et je ne vous parle même pas du vote, enfin des expériences en Suisse où ils font du vote avec de la transmission quantique. Si il y en a un qui veut expliquer la physique au citoyen lambda, il va avoir du travail.

    Globalement on se retrouve à avoir un vote sur lequel le contrôle n’est théoriquement possible que par des spécialistes et encore en général un spécialiste d’un de ces sujets-là qui va expliquer en détail comment ça fonctionne, il est juste capable d’expliquer un de ces domaines et pas tous les domaines réunis. Ça donne un contrôle fait par une élite et encore c’est un contrôle théorique. On verra pourquoi tout à l’heure. Globalement ça veut dire que pour tous les autres qui participent à un scrutin électronique, ben en fait, il y a une boite noire, ils mettent leur bulletin dedans et ils espèrent que ça va bien se passer. Parfois ils ont le mythe de « l’ordinateur est infaillible » qui les aide à croire que tout va bien se passer, mais malgré tout on reste dans le cadre d’une boite noire. Et du coup comment est-ce qu’on obtient la confiance de l’électeur ou comment est-ce qu’on obtient une confiance qui est acceptable, parce que si il a juste confiance en disant c’est un ordinateur, ça marche bien. Ce n’est pas ce que je vais appeler une confiance acceptable, c’est valable quel que soit le type de scrutin spécialement pour les scrutins institutionnels.

    On a un 2ème problème qui est encore plus embêtant. Parce que jusque là on disait que peut être que les spécialistes ils peuvent faire quelque chose, mais non rien du tout. Non rien du tout. C’est impossible à contrôler un vote électrique. Pourquoi ? Parce qu’on dématérialise l’information et l’information dématérialisée, ça ne se voit pas, ça ne se contrôle pas, c’est impossible à suivre et on ne sait pas quel traitement on lui applique dessus.

    Globalement, vous êtes face à une boite noire. Des exemples : « On vous dit on va utiliser tel logiciel, tel matériel ». Très bien. Comment est-ce que vous savez que ce logiciel et ce matériel ils font ce qu’ils doivent faire ? C’est-à-dire, ils font exactement les opérations qui sont destinées au scrutin ? Comment est-ce que vous le savez ? Comment est-ce que vous le prouvez ? Comment est-ce que vous le montrez ? Comment vous savez ce que fait un logiciel qui tourne sur une machine à laquelle vous n’avez pas accès ? Et même quand vous avez accès comment vous savez qu’elle fait exactement ça ? Il n’y a pas vraiment de solution à ça.

    Comment vous savez que le logiciel et le matériel ils font exactement et uniquement ce qu’ils doivent faire ? Des logiciels qui ont des bugs on en croise souvent ; des logiciels qui sont faits pour faire du phishing et des choses malveillantes on en croise souvent. C’est assez difficile de montrer qu’ils font juste ce qu’ils doivent faire. Et le point le plus embêtant : comment vous savez que c’est ceux qui sont prévus qui tournent ? Quand vous allez dans un bureau de vote et qu’on vous dit tenez ça c’est le terminal de vote, comment vous savez quel est le matériel qu’il est censé contenir ? Comment vous savez qu’il fait tourner le logiciel qu’il est censé faire tourner ? C’est impossible à démontrer. Vous pourrez regarder un processeur autant que vous voulez, vous ne verrez pas quel est le logiciel qui tourne dessus.

    Ensuite on a à faire à des ordinateurs de vote. Et le terme est volontairement important. On est passé d’une terminologie de « machine à voter » qui étaient des machines électromécaniques, assez basiques, on va dire des engrenages pour le dire simplement, à un « ordinateur de vote ». Donc un ordinateur c’est un équipement numérique qui est capable de faire tout traitement de l’information qu’il est possible d’imaginer et qui a donc une généricité capable de faire plein de choses. À quoi ça sert un ordinateur de vote pour faire une élection où on doit juste faire des additions ? Vous voyez la problématique qui arrive : c’est que l’on a un équipement qui peut faire beaucoup plus de choses que ce qu’il ne devrait faire, qui est beaucoup trop puissant, riche, tout ce que vous voulez, par rapport à ce qu’il doit faire et du coup ça va poser des problèmes. Conséquence, on va avoir des pannes, on va avoir des bugs, on va avoir des possibilités de fraude et en plus dans certains cas on peut avoir des possibilités de déni de service. On peut très bien envisager que quelqu’un s’attaque à l’équipement ; par exemple l’équipement que vous voyez en bas à droite, là il y a un port infrarouge. Si vous avez un équipement qui fait de l’infrarouge, vous pouvez envisager d’attaquer ce terminal.

    Quand vous avez un site sur Internet qui fait du vote électronique, on peut envisager d’attaquer le site. Même si vous n’êtes pas concerné par l’élection, vous pouvez faire tomber un site. Un exemple : l’Estonie a décidé de faire du vote par Internet, et à un autre moment l’Estonie a déboulonné la statue de je ne sais quel général russe. Les conséquences des problèmes entre l’Estonie et la Russie et officiellement enfin officieusement disons, les Russes l’ont mal pris, ils ont attaqué l’Internet de l’Estonie globalement. Ils ont rayé l’Estonie de la carte d’Internet pendant un certain temps, pendant quelques jours, pendant 3 jours. Que se passait-il s’ils avaient leur élection ce jour-là ? Leur élection n’était pas possible parce qu’ils n’avaient pas l’accès à l’urne électronique, j’allais dire au site qui sert à enregistrer les votes.

    On constate que le scrutin électronique est complexe à réaliser et qu’il est impossible à contrôler et du coup comment on fait pour avoir la confiance de l’électeur là-dessus ? Même chose que précédemment. Soit on suppose qu’il a juste confiance, aveuglément. Soit on veut lui expliquer, ça va être extrêmement compliqué vu qu’on ne sait pas lui expliquer, que ce n’est pas possible de lui expliquer. On ne connaît pas de méthode pour le faire. Imaginez la problématique pour les assesseurs. L’assesseur il doit dire que tout se passe correctement. On lui dit : « Voyez il y a une boite noire, tout se passe correctement ». Est ce que vous pouvez dire que tout se passe correctement ? L’assesseur ne peut rien vous dire.

    Du coup ça fait des années qu’il y a des informaticiens, des scientifiques qui alertent sur les problématiques qui se posent. Il y a une situation lamentable en France sur les élections institutionnelles, les machines qui sont utilisées sont, enfin, c’est scandaleux d’utiliser ce type de machine pour faire ça. Pour donner des exemples de leur qualité voici des tickets d’ouverture et de fermeture des bureaux de vote, qui sont imprimés à Issy-les-Moulineaux. Vous constaterez que la machine n’est pas capable d’écrire en français, qu’il y a des mentions en anglais au milieu qui sont incompréhensibles et plein d’autres problèmes ; j’ai constaté des quantités et des quantités de problèmes sur ces machines. Techniquement c’est juste honteux de les utiliser pour faire des élections institutionnelles. Il y a eu des scandales aux États Unis, en Europe, dans différents pays sur le vote électronique. Il y a en a plein la presse. Chaque fabricant a eu son lot de failles de sécurité et autres. À tel point qu’il y en a un qui a changé de nom, son activité vote électronique a changé de nom pour pas que ça ne nuise pas à son image de marque en général. Des machines « Diebold » qui sont renommée en « Premier Élection », et donc il y a des annonces de failles très régulièrement.

    Ça ne veut pas dire que les choses n’évoluent pas, mais c’est super problématique tout de même. On est passé d’une situation où on avait des machines à voter ; il y a eu utilisation des machines à voter en France dans les années 60, je crois, et ça a été arrêté parce qu’il y a eu des fraudes dessus et ça a été transposé. Maintenant on fait du vote avec des ordinateurs de vote.

    Déjà le règlement technique qui a été établi, bah il est tout pourri, disons le simplement, il est tout pourri. Il ne précise quasiment rien sur les contraintes sur le logiciel, par contre il prévoit des trucs intéressants comme l’autonomie, une autonomie de 24 heures, la machine doit marcher quand on l’échappe d’un mètre de haut. Il ne dit rien sur comment elle doit fonctionner. Du coup elles fonctionnent n’importe comment les machines qui sont utilisées actuellement.

    Il y a eu des tentatives de débat, mais c’est très compliqué parce que d’abord on a pris des décisions et ensuite on a lancé le débat. Faire un débat a posteriori c’est toujours plus difficile. On voit par exemple que le Forum des droits sur Internet a fait une recommandation sur le vote électronique et j’ai participé au sein du groupe de travail pour donner la position de l’April. L’April a claqué la porte avant la publication de la recommandation parce qu’on n’était pas d’accord avec. D’où le fait que vous constatez au milieu de la recommandation, j’ai mis, ils ont intégré une position minoritaire de l’April expliquant la position de l’April sur le vote électronique. On peut voir aussi que ceux qui suivent vraiment la question du vote électronique, en l’occurrence ordinateurs-de-vote.org, ils ont sorti un communiqué de presse pour critiquer cette recommandation. Et on peut voir aussi que quelques temps après, le Ministère de l’Intérieur a du rechanger des choses sur les machines à voter, conseiller aux maires d’arrêter de s’équiper, etc. et au final la situation elle avance lentement, mal et les problèmes ne sont toujours pas réglés, d’autant que la situation n’avance que quand il y a des élections. Donc en période où il n’y a pas d’élection, personne ne fait rien. Ça avance lentement. Et vous imaginez si ça pose problème quand c’est encadré, organisé dans le cadre d’élections institutionnelles, quand c’est libre et que vous utilisez la machine que vous voulez qui a été faite par le constructeur qui a décidé qu’il se lançait dans le vote électronique, et bien, c’est encore moins bon.

    Le vrai problème c’est que pour faire du vote électronique, on cherche à avoir une sorte de e-tabouret à 3 pieds et que en fait il n’existe pas réellement, pas en vote électronique. On a besoin d’avoir 3 choses pour que ça corresponde à ce qu’on considère comme étant un scrutin démocratique. J’entends par scrutin démocratique ce qu’on entend en général pour une élection institutionnelle, mais ça va être valable pour tous les types de scrutins que vous voulez, dans n’importe quel cadre. En général on considère qu’il faut le secret du vote. Pourquoi ? Parce que si vous faites un scrutin où on voit les votes de tout le monde on peut supposer que quand vous aller faire à main levée il y aura des pressions et que les gens, enfin il peut y avoir des pressions et que d’autre part les gens ne votent pas pareil quand ils le font à bulletins secrets ou à bulletins ouverts. Si je prends un exemple très simple. Si je demande ici : « Qu’est-ce que vous pensez de cette présentation ? » et que je vous demande de le faire à main levée, je pense que je n’aurai pas le même résultat que si je le fais avec des bulletins secrets. Parce que vu que je vous regarde vous allez avoir du mal à me dire : « C’était nul ».

    Un autre problème c’est que ça soit explicable à tous. On a vu, ça va être compliqué, dès que ça devient électrique et dématérialisé on n’arrive pas à l’expliquer à tous. Ça c’est un vrai problème.

    Et, le dernier point, c’est la vérifiabilité. C’est embêtant parce que on ne sait pas vérifier l’élection quand tout est réuni. En fait quand on va avoir tous ces critères-là et bien on ne sait pas faire. C’est embêtant.

    Maintenant ajoutons le Logiciel Libre dans l’histoire.

    Des Logiciels Libres pour gérer du vote électronique ou du vote par Internet ou des scrutins, des consultations, des ce que vous voulez, il y en a plein, il y a beaucoup de logiciels libres qui existent pour faire ça. J’ai listé ceux que je connais, mais c’est totalement non exhaustif. Ceux que j’ai trouvés, il y a en a qui sont actifs, d’autres qui sont plutôt disparus. On voit qu’il y a plein de logiciels qui peuvent gérer du vote électronique, on voit même qu’il s’est créé une fondation pour du vote électronique open source qui fait des terminaux, qui veut faire des ordinateurs de vote y compris la partie matérielle. En l’occurrence, les équipements qu’on montre là sont ceux qui ont équipé Issy-les-Moulineaux, donc ceux qui ne marchent pas.

    Il y a beaucoup de logiciels qui existent. Il faut voir aussi que c’est un sujet qui intéresse beaucoup les libristes que ça soit en tant qu’auteurs d’interrogations sur le sujet ou parce qu’ils sont amenés à fréquenter fréquemment des gens qui travaillent sur le sujet du vote électronique. Par exemple, j’ai pris quelques extraits. On peut voir que sur le vote de français de l’Étranger, il y avait 2 experts sur 3 qui étaient des gens qui sont liés au Logiciel Libre : François Pellegrini qui est très actif sur la question des brevets logiciels et Bernard Lang qui était, je crois, administrateur de l’Aful. Je suis intervenu pour faire des conférences aussi. David Monniaux avait donné ses positions. En Belgique c’est pareil il y a des gens qui sont actifs sur ce sujet-là. Il y a eu des interventions dans le cadre des Rencontres Mondiales du Logiciel Libre. Donc c’est un sujet qui intéresse les libristes.

    Prenons des exemples du vote électronique géré par des libristes. On prend le premier exemple, le vote par Internet, ce que j’ai appelé le vote par Internet pour geeks chez Debian. Pour pouvoir voter chez Debian, il faut comprendre comment fonctionne leur logiciel de vote et si on voulait contrôler l’intégralité du scrutin, il faut comprendre l’informatique, le courrier électronique, la cryptographie et 3 autres trucs. Donc en gros c’est un scrutin qui est fait pour des geeks et des développeurs. Si vous arrivez à comprendre ce qui est en bas, c’est que vous avez à peu près les pré-requis pour pouvoir participer. Et de fait, ils font des scrutins à bulletin ouvert. Il y a les résultats de 2 scrutins chez eux. En bas à gauche on voit les bulletins de vote de tout le monde, de toutes les personnes qui ont participé et la série de chiffres le 6 5 5 4 2 3 1, c’est l’ordre dans lequel ils notent les bulletins, donc ils ont un système de vote qui permet de prioriser, de classer les choix. Et on voit, là en l’occurrence, celui que je viens de citer c’est le bulletin de vote de Steve Mac... et donc son bulletin est public.

    À coté on a un vote pour l’élection du grand chef chez Debian et c’est pareil, on voit les bulletins, l’identité des personnes est masquée. Ça devient encore plus compliqué de savoir si le scrutin est correct. Le seul qui peut vérifier son bulletin, c’est l’électeur lui-même. Ça pose d’autres problèmes.

    Ce scrutin-là ne correspond pas aux critères qu’on a défini précédemment du tabouret à 3 pieds qui n’existe pas. Un exemple. Un autre exemple concerne le vote mixte pour geeks de l’April. Alors là on a un scrutin qui est moitié par vote à main levée et pour une autre partie en vote par Internet. Donc la dernière fois ils utilisaient un logiciel qui s’appelle poll’o. Il y a eu d’autres logiciels qui ont été utilisés auparavant. Si on veut pouvoir contrôler cette partie-là, la partie vote par Internet, il faut pareil, toujours, comprendre le principe du logiciel, l’informatique en général, les réseaux, la cryptographie, etc. Donc c’est inabordable pour la plupart des gens. En plus, on a un mélange de bulletins fermés pour ceux qui votent par Internet et de votes à main levée donc à bulletins ouverts globalement.

    Bref, ça pose un certain nombre de problèmes et il y a d’ailleurs une discussion en cours sur ce sujet-là pour savoir comment faire pour essayer d’améliorer les choses. On voit en l’occurrence en bas dans les résultats d’un scrutin qu’il y a je ne sais pas 95% des gens qui votent en ligne, donc le poids du vote électronique est particulièrement fort dans ce cadre-là. De fait la question c’est : dans les solutions possibles, il y a l’abandon du vote électronique, effectivement, mais ça pose d’autres problèmes. Et il y a aussi la question comment on fait pour placer le curseur entre je veux un vote secret et je veux contrôler ce qui se passe ? Il y a eu une position de l’April sur le vote électronique et donc voici un des extraits qui dit « Le vote électronique est problématique lorsque l’anonymat doit être préservé. Dans le cas où le vote à main levée est acceptable, le vote électronique est possible. Les administrateurs du système peuvent donc savoir ce que chacun a voté. Les votants doivent donc avoir confiance en eux. 

    D’où la question où est-ce qu’on veut placer le curseur ? En tout les cas le vote il n’est jamais 100% secret.

    J’ai mis la bannière candidats.fr, parce que dans le cadre de la campagne candidats.fr il avait été diffusé pour les candidats aux présidentielles des questions sur le vote électronique aussi. Donc il y a des choses qui sont faites pour faire avancer les choses.

    Quels sont donc les apports du Logiciel Libre sur le vote électronique ou le vote par Internet. On retrouve les avantages classiques du Logiciel Libre. D’une part, on peut espérer, enfin on amène, en donnant accès au code source, on amène plus de transparence et donc potentiellement un peu plus de confiance aux électeurs concernés, quels qu’ils soient. On peut espérer de la revue par les pairs et donc des gens qui soient compétents techniquement vont regarder comment ça fonctionne, etc. et donc améliorer la sécurité. On peut espérer une mutualisation, ce qui est non négligeable, parce que jusque là chacun utilise sa solution dans son coin. À partir du moment où la solution est à base de Logiciels Libres on peut espérer que les élections des différents pays, des différentes associations des différents entreprises, des différents tout ce que vous voulez puissent utiliser les mêmes logiciels, le ou les mêmes logiciels et donc qu’ils aient mutualisé une partie du coût de développement. On peut évidemment avoir plus d’indépendance vis-à-vis des vendeurs, ce qui ne serait pas si mal après tout. Pour donner un exemple de la problématique que ça pose, aux États Unis les 2 principaux vendeurs de solutions de vote électronique qui se partagent 90 % du marché, à la tête d’une des boîtes il y a le frère du vice-président de l’autre boîte. C’est un peu embêtant comme situation.

    Là le logiciel libre aurait un intérêt particulier.

    On peut espérer aussi des évolutions rapides et le fait que ça soit du logiciel libre va permettre des corrections et que ça évolue assez rapidement. On peut espérer avoir des traductions dans toutes les langues, ça c’est assez intéressant si vous voulez faire des scrutins institutionnels dans chaque pays où on est obligé, le scrutin est censé être fait dans la langue du pays, même si on a montré que à Issy-les-Moulineaux on n’est pas obligé d’écrire en français pour des élections. Et ça peut amener du support de nouveaux matériels et de nouveaux logiciels, donc il y a un certain nombre d’avantages. D’ailleurs il faudrait se poser la même question que pour le matériel ouvert. Après tout ça sert à rien d’ouvrir le logiciel si le matériel on sait pas comment il fonctionne. Donc il faudra à peu près se poser les mêmes questions à propos du matériel ouvert et savoir comment fonctionne le matériel de vote.

    Sauf que, sauf que en fait ça règle pas les problèmes qu’on a vu précédemment. Ok, il y a des avantages, mais ça ne rend pas le scrutin électronique plus facile à expliquer, c’est pas parce qu’il y a du logiciel libre que ça devient plus simple, qu’il n’y a plus de dématérialisation, qu’il ne faut pas expliquer comment est transportée l’information, comment elle est manipulée etc.

    Un autre point : logiciel libre ou matériel ouvert, ça ne veut pas dire qu’il est prouvé qu’il fonctionne correctement ou seulement même qu’il est prouvable qu’il fonctionne correctement. En gros, on peut prouver, on peut faire la preuve de codes sur des logiciels mais ce n’est pas parce qu il est prouvé qu’il est libre, c’est pas parce qu’il est libre qu’il est prouvé. Ce sont deux critères indépendants. Et en plus la question de la preuve : en général, il faudrait se poser la question de la preuve sur une version donnée. On sait qu’elle fait bien juste ce qu’elle doit faire et qu’elle fait correctement ce qu’elle doit faire.

    Alors là on arrive à la problématique de la certification. On doit certifier, si on doit certifier du logiciel libre ou du matériel ouvert ou ce que vous voulez pour un contexte d’élection, c’est-à-dire qu’à un moment on prend une version, elle est figée. Ça veut dire que les avantages de pouvoir faire évaluer rapidement etc. on ne les a plus vraiment et qu’en plus il faut repayer les coûts de certification à chaque fois, et ça peut revenir assez cher. Il y a a toujours ce problème-là qui se pose. Finalement ça donne pas plus de contrôle citoyen possible. Peut-être que ça va être le bon logiciel qui tourne et peut être que ça va être le bon matériel qui fonctionne et peut être qu’ils vont fonctionner correctement. En tant que citoyen vous n’êtes guère plus avancé surtout si vous n’êtes pas spécialiste.

    De fait l’utilisation de logiciel libre n’est pas suffisante pour rendre le vote électronique acceptable. On peut considérer que ça améliore un petit peu les choses, mais ça ne rend pas le vote électronique pour autant à l’épreuve de toutes les problématiques qui se posent, et c’est un vrai problème. D’autant que il a déjà été choisi qu’il y ait du vote électronique sur les scrutins officiels. En fait on est face à un problème, qui actuellement en tout cas, on ne va présager de l’avenir, actuellement il n’a pas de solution. Et on ne connaît pas, et il n’y a pas de solution à un problème qui regroupe à la fois le secret du vote, la possibilité pour tout un chacun de le vérifier et le fait que ce soit explicable simplement à tous. Si on choisit de supprimer l’un des pieds du tabouret, ça devient assez simple. Vous enlevez le secret du vote, ben ça revient à faire du vote à main levée. Faire du vote à main levée, tout le monde garde la main levée, on compte, on peut vérifier, il n’y a aucun souci tout le monde peut vérifier que ça se passe correctement. Facile.

    Vous demandez à ce qu’on ne vérifie rien, ben du coup, pareil, même chose. Si on arrête de vérifier il y a plein de trucs qui deviennent assez simples électroniquement à faire.

    Que ça ne soit pas explicable à tous, ben c’est la situation actuelle. On peut pas vérifier, c’est pas explicable, ben voilà vous pouvez garder le secret du vote, personne ne peut vérifier que ça se passe correctement . Vous avez la situation actuelle. En fait, les trois ensembles, on ne sait pas les faire, mais si on en prend seulement 2 sur 3 on sait faire facilement. C’est ça le vrai problème, personne ne connaît de solution actuellement à ce problème là et on ne va pas présager de l’avenir mais c’est quand même pas gagné, parce que la dématérialisation fait que ça rend les choses vraiment compliquées. Faire des choses simples, après pour expliquer aux gens fait que ça risque d’être très compliqué.

    D’où l’illustration que j’ai choisie d’avoir un e-tabouret « dahu » ça risque d’être quelque chose qu’on rencontrera pas souvent.

    Certes il y a des arguments en faveur du vote électronique. Il faut quand même noter, il y a quand même des avantages à faire des scrutins électroniques. Outre la simplicité possible, le fait de pouvoir consulter plein de gens, de fait ça fait moderne, ça peut avoir des avantages de rafraîchir, de moderniser la démocratie, à condition que ça reste démocratique. On a de nouveaux types de scrutins qui sont possibles. Le vote que je vous ai présenté tout à l’heure, le vote par Debian où on classe, on numérote et on ordonne les propositions. C’est un type de scrutin qui n’est possible à faire quasiment qu’en électronique. Car si vous imaginez que vous avez une liste que vous avez 12 propositions vous allez les ordonner, et après au dépouillement il va falloir noter qui a mis quoi quelle proposition ou quelle autre etc.le faire à la main ça va être..., les résultats des élections on les aura un mois après. Ce type de scrutin n’est possible que par voie électronique. Et ça pourrait être intéressant d’utiliser de nouveaux types de scrutins.

    Petit bémol dessus, il y a une personne, un scientifique me semble-t-il qui a essayé de définir les critères d’une élection parfaite. En mettant tout ce que l’on considérerait on va dire, on va regarder les critères, ça paraît assez normal et assez logique qu’on demande ça dans le cadre d’une élection, un scrutin parfait.

    En fait il a démontré que ce n’est pas possible de les obtenir tous en même temps. En fait un scrutin parfait ça n’existe pas. De fait le type de scrutin que vous choisissez pour une élection influence le résultat de l’élection. On peut le voir dans les débats, les débats en France sur le choix d’avoir un scrutin à la proportionnelle ou un scrutin différent, on va le voir, si vous choisissez une méthode de Condorcet, vous n’avez pas les mêmes résultats que si vous faites un vote majorité absolue. Si vous faites un scrutin à 2 tours vous n’avez pas les mêmes résultats que si vous faites un scrutin à un tour. Bref le type de scrutin influe sur le résultat.

    Le vote électronique permet de nouveaux types de scrutins mais ça veut dire qu’on va légèrement influer sur les résultats. Le gros avantage du vote électronique, que ça soit pour du vote institutionnel, des élections, pour faire un référendum, une consultation etc. c’est que ça permet de les faire régulièrement et d’avoir une fréquence élevée de consultation des gens, voire de tendre vers le Graal envisagé par certains d’une démocratie directe où on demande aux gens tout le temps leur avis sur toutes les thématiques. Donc voilà, plus de démocratie représentative, on supprime les représentants du peuple et on considère qu’on pose directement les questions au peuple en question, quel que soit le peuple, que ce soit des gens dans une association, une entreprise ou les citoyens d’un pays. Donc il y a quand même un certain nombre d’arguments en faveur du vote électronique. Et donc qu’est-ce qu’on fait maintenant ? On voit qu’il y a des avantages, on voit qu’il y a de gros inconvénients et qu’en plus on ne connaît pas de solution au problème qui est posé.

    Il y a plusieurs approches. Celle qui est majoritairement retenue,on va dire dans la sphère politique actuelle, en tous cas dans la sphère au pouvoir actuellement, c’est de dire : « Ben si il n’y pas de solution, c’est qu’il n’y a pas de problème ». Le proverbe Shadock. On va continuer comme on fait maintenant et puis on verra si ça pose problème. Sauf que ce qu’on a dit précédemment c’est que justement s’il y a problème on ne peut pas le savoir, on ne le voit pas, ça ne se voit pas. Si quelqu’un fraude sur une élection électronique et que ce n’est pas trop un manche, ça se verra pas. Personne ne peut dire que personne n’a jamais triché sur des élections électroniques qui ont déjà eu lieu. Le problème c’est que comme c’est invérifiable et incontrôlable, on ne peut ni prouver que ça se passe bien ni prouver que ça se passe mal.

    Une autre possibilité c’est l’abandon du vote électronique, que ça soit de manière temporaire ou permanente. On peut très bien envisager un gel de la question du vote électronique en disant ben, attendons de trouver une solution et on y reviendra plus tard quand on aura trouvé une solution. Ou l’abandonner en disant on l’arrête, on continue de faire comme on faisait et voilà. Soit la troisième solution : mauvais problème, changement de problème. Dans ce cas-là, il faut dire Ok, ce problème-là il n’a pas de solution, ou pas de solution actuellement, donc qu’est-ce qu’on accepte de perdre ? Sur quoi on rogne ? Qu’est-ce que vous préférez perdre ? Vous préférez ne pas pouvoir contrôler l’élection ? Vous préférez que le fonctionnement soit inexplicable et que vous votiez sans comprendre comment ça marche ? Ou vous préférez que tout le monde sache pour qui vous avez voté ? Ou alors vous pensez qu’il faut déplacer peut être les 3 curseurs, trouver des solutions intermédiaires, etc.

    Ça c’est un vrai débat ouvert. En fait, il n’y a pas de solution à ce problème-là non plus. Quand est-ce qu’on fait ça ? Dans quel cadre ? Est-ce que c’est acceptable au final de dire tant pis, on va tous voter avec des bulletins ouverts et on considérera puisque on ne sait pas faire mieux et bien il n’y a qu’à faire comme ça. Ok ! Mais est-ce que c’est acceptable ?

    Est-ce qu’on peut dire, revenons à la base de la démocratie. À la base les citoyens, les électeurs en l’occurrence, se réunissent et décident de fournir, de mettre en place un système pour prendre des décisions. En fait la vraie solution au problème elle risque d’être là. Je ne vois pas tellement d’autre solution que de demander aux gens ce qu’ils acceptent de faire. Après tout, la démocratie c’est les gens et si les gens ils décident qu’ils acceptent telle ou telle chose, faut un peu s’y plier, c’est le principe de la démocratie.

    Ils peuvent accepter des trucs que certains vont juger inacceptables. Par exemple ils vont dire : « Ok maintenant tous les votes sont à bulletin ouvert, c’est décidé ». Si une majorité de gens décidait que ça doit être fait comme ça, pourquoi pas, c’est le principe de la démocratie. Et si une majorité des gens l’acceptait dans un cadre donné, par exemple on peut se dire, il y a une élection associative, après tout on s’en fout un peu de vérifier le scrutin et de savoir si ça marche correctement, voilà si la majorité des adhérents d’une asso dit je m’en fous de pouvoir contrôler moi-même le résultat d’une élection, et je pense que ça va bien se passer donc c’est pas grave, si la majorité est d’accord pour ça, alors pourquoi pas ? C’est une assemblée générale, elle est plénipotentiaire. Si elle décide que, elle accepte que ça se passe comme ça, pourquoi pas !

    Du coup, il n’y a pas de réponse universelle à avoir sur cette thématique-là, et la seule chose à faire, la seule chose qu’il serait nécessaire et c’est mon regret sur les élections institutionnelles, c’est qu’on fasse les débats après avoir mis les solutions en place, la seule solution qu’il y ait c’est d’avoir un débat avec les électeurs concernés et de leur demander s’ils sont prêts ou non – parce qu’ils pourraient refuser - d’avoir un certain nombre de ce que je qualifierai de reculs démocratiques en perdant par exemple le secret du vote, un certain nombre de reculs démocratiques en échange d’autres avantages comme être consultés régulièrement ou être consultés différemment.

    Donc la vraie conclusion, c’est ça. Actuellement, en tout cas, on n’a pas de solution sur la problématique du vote électronique. Le logiciel libre n’est pas un critère suffisant pour garantir que tout va bien se passer. La seule solution qu’on ait, et c’est dommage, elle n’est pas aussi parfaite, idéale qu’on pourrait le souhaiter, c’est de débattre avec les gens qui sont concernés et de leur demander ce qu’ils sont prêts à accepter. Ça veut dire que avant de mettre en place une solution de vote électronique, il faudrait demander aux gens s’ils acceptent qu’il y ait une solution qui soit mise en place à condition qu’on leur ait expliqué la problématique et qu’on leur ait mis devant tous les arguments et tous les éléments qu’ils doivent connaître et qu’ils décident ce qu’ils sont prêts à accepter, à quoi ils sont prêts à renoncer et ce qu’ils sont prêts enfin, comment ils envisagent la suite.

    Voila l’espèce de fausse réponse que je peux vous donner aujourd’hui sur la question du vote électronique et je le redis, le logiciel libre n’est pas un critère. Avoir du logiciel libre dans une élection et même du matériel ouvert n’est pas un critère suffisant pour offrir une élection satisfaisante par rapport à nos critères actuels de fonctionnement démocratique.

    Je vous remercie. Des questions ?

    Je vais vous demander d’attendre le micro pour la partie questions. Est-ce qu’on a un micro quelque part ? Oui mais c’est pour l’enregistrement audio. Je vais meubler en attendant. La présentation sera disponible, elle est publiée sous plusieurs licences libres et donc elle sera accessible. Vous avez mon adresse de contact si vous souhaitez discuter du sujet, faire des remarques ou autre. Et à la fin de la présentation il y a la liste des crédits pour les différentes images utilisées.

    Public : Bonjour ! J’aurais voulu savoir, et l’évolution du vote électronique en France c’est quoi ?

    Benoît : Dans le cadre institutionnel ?

    Public : Oui ! Çà augmente ? Çà...

    Benoît : Alors là où ça augmente ? Enfin il y a une régression dans le cadre institutionnel en fait. Le pic du vote électronique dans le cadre institutionnel ça a été, sans doute, la présidentielle de 2007, en France. Il y avait 1,5 millions d’électeurs je crois en vote électronique et il y avait 80 villes qui étaient concernées. Qui se répartissaient de manière très inégale d’ailleurs, enfin qui se répartissaient les 3 fabricants de matériel qu’on a évoqués : il y en a un qui a 75% du marché en France, ou un peu plus 80%, et les 2 autres qui se répartissent le reste. Il y a eu plein de problèmes. Il y a eu les remontées des autres pays, où on a vu des failles de sécurité, des problèmes d’organisation, des critiques d’universitaires, d’informaticiens, etc.

    Actuellement le ministère de l’Intérieur a donné des consignes aux mairies en suggérant fortement à celles qui n’étaient pas équipées de ne pas s’équiper et en gros en disant de ne pas en acheter pour le moment. De toutes façons on va changer les critères, parce que les critères sont un peu pourris. On va changer les critères, ne vous équipez pas maintenant. Ce qui fait qu’il y a des communes qui ont arrêté d’utiliser des ordinateurs de vote, et donc le nombre est plutôt en décroissance pour les élections institutionnelles. En parallèle les élections professionnelles et notamment, enfin professionnelles et étudiantes, elles se sont mises fortement à utiliser des scrutins électroniques. Récemment il y a eu le gros flop des élections dans l’Éducation nationale.

    Ils ont fait un scrutin par Internet, la participation était divisée par 2 ou 3, il y a eu des bugs, des problèmes d’interopérabilité, plein de soucis, donc voilà. Dans ce cadre-là ça a été mis en place. Ça été mis en place pour les élections étudiantes. Il y avait un test à Paris, je crois, sur les prud’homales.

    En dehors de la partie institutionnelle le vote électronique est en train de se développer et un peu n’importe comment. Pourquoi ? Parce que dans le cadre institutionnel il y a un minimum d’encadrement, il y a le conseil constitutionnel, il y a les textes etc. Et puis il y a beaucoup de gens qui sont là pour râler aussi, je pense, alors que dans d’autres cadres il n’y a pas vraiment de contrôle. D’autres exemples, les conseils d’administration des grosses entreprises, ils peuvent avoir des scrutins électroniques.

    Il y avait eu un scandale, il y a quelques années, il y avait eu du piratage des terminaux de vote dans une entreprise, enfin il y avait un vote qui avait été truqué. De temps en temps ça fait un peu l’actualité mais n’empêche que le vote électronique se développe petit à petit, insidieusement.

    Public : Je vais vous demander, moi je pensais plutôt au cadre institutionnel, mais là il y a plein de cadres, pour enfin, au niveau du, pour faire en sorte qu’il y ait un référendum justement, pour que tout le monde donne son avis par rapport à ce genre de vote. Comment on fait pour amener cette idée-là, à ce que ça soit organisé, à ce qu’on puisse donner notre avis en fait.

    Benoît : Actuellement ce qui s’est passé, ça s’est passé sans consultation directe des électeurs, parce que c’est l’actuel président de la République, qui était alors ministre de l’Intérieur qui a converti, fait convertir, le code électoral qui parlait des machines à voter électromécaniques etc. en législation permettant l’utilisation des ordinateurs de vote et à partir de là, les mairies ont été enfin, le ministère de l’Intérieur a publié des critères techniques pour dire comment ça devait fonctionner. En vrai, on a pris les machines qui étaient fournies par les fabricants et on a dit qu’elles respectaient les critères et puis c’était parti et après chaque maire faisait ce qu’il voulait dans son coin et choisissait de s’équiper ou pas.

    Ensuite les gens ont commencé à râler, les partis politiques ont commencé à s’en mêler aussi, puisque après tout c’est l’enjeu du scrutin ça les concerne aussi directement. Il y en a pas mal qui ont commencé à prendre des positions et à s’exprimer ; quasiment tous sauf un se sont opposés sur la question du vote électronique. Malgré tout, déjà il y a des communes de tous partis politiques qui ont des équipements, enfin qui utilisent des ordinateurs de vote, ça ça pose un vrai problème. Et puis en plus dans un certain nombre de cas, lors de l’organisation de leurs primaires internes ou de scrutins internes eux aussi ils ont parfois recours à des questions de vote électronique et ça pose problème aussi. La situation est un peu compliquée.

    Et de fait le citoyen jusque là ne peut pas grand chose à part essayer de pousser auprès des partis politiques et autres, il y a peu de chance qu’on ait un référendum sur le sujet, sur ce sujet-là précis, ça m’étonnerait fortement. Globalement un certain nombre de gens sont actifs sur la question du vote électronique, et souvent ça se règle en contentieux électoral, ils font des recours devant le conseil d’État, devant le conseil constitutionnel, devant les tribunaux administratifs, enfin voilà... en espérant qu’au bout d’un moment les gens vont comprendre qu’il y a un vrai souci et que ça va donner, qu’il y aura de vrais changements. On peut voir aussi qu’il y a eu des problèmes sur les élections précédentes. Il n’y a aucun changement qui est prévu ou qui a été réellement fait en préparation des prochaines élections. Donc ça sera le même problème pour les prochaines élections.

    Question inaudible

    Benoît : Je vais d’abord répondre à la question, à celle là et puis après...

    Public : Quel est le coût d’une organisation du vote électronique par rapport au vote classique, papier ?

    Benoît : C’est une question compliquée et ça dépend pas mal des solutions qui sont choisies. J’ai vu passer des chiffres en Belgique montrant que ça coûtait beaucoup plus cher en électronique. J’ai vu passer des chiffres en France disant que ça coûtait aussi plus cher, et parfois il y a des mairies qui annoncent que ça leur revient moins cher. Personne n’a agrégé réellement les chiffres de ce point de vue-là. On aurait pu espérer que le Forum des droits sur Internet fasse ce travail -à mais en fait il n’y a pas vraiment ce type de résultat dans la recommandation et donc on ne sait pas trop.

    Ça dépend fortement de la solution technique qui est retenue, et ça dépend aussi de la façon d’organiser l’élection. Par exemple sur Issy-les-Moulineaux, il y a une partie du budget qui a été non négligeable, qui a coûté assez cher, qui est l’envoi des professions de foi aux électeurs. D’habitude l’envoi des professions de foi aux électeurs est pris en charge par l’État et l’État finance çà pour toutes les mairies ; c’est ce que fait l’État pour toutes les mairies qui votent en papier. Dans le cadre du vote électronique, c’est pas la même chose qu’on envoie aux gens, au lieu de leur envoyer les professions de foi, les bulletins, il n’y pas de bulletin dans le cadre du vote électronique. À la place on leur envoie une copie d’écran de l’interface qu’ils vont avoir à utiliser. Et ça l’État a décidé que c’était à la charge de la collectivité municipale, donc c’est la mairie qui paye ça. Pour Issy-les-Moulineaux c’est 40 000 enveloppes timbrées, envoyées... pour chaque tour et rien que cette partie-là on voit que ça coûte minimum 40 000 euros par tour.
    Rien que cette partie-là, ça a engendré un coût non négligeable. En fait il y a un autre point qui fait que c’est difficile à calculer, c’est que ça dépend fortement de la durée d’utilisation des machines, si on utilise longtemps d’un point de vue strictement coût, ça aurait tendance à les amortir, or jusque là, certes il y en a quelques-unes qui tombent en panne, mais il y en a encore plein qui sont encore fonctionnelles et pour le moment je ne pense pas qu’il y a de chiffre qui soit significatif en terme de durée de vie des machines.

    Public : Oui, bonjour. Moi je voulais simplement savoir si il y avait un exemple à l’Étranger qui pourrait nous montrer que ça fonctionne.

    Benoît : Des exemples qui montrent que ça fonctionne ? La plupart du temps, le résultat paraît plausible. Donc ça montre que ça... enfin que ça fonctionne c’est un bien grand mot. Le mieux qu’on puisse dire c’est que le résultat, il est plausible. Puisque on ne peut pas, comme je le disais tout à l’heure, on ne peut pas vérifier si le résultat est correct ou pas. Or quand vous avez un scrutin qui est serré à 51% contre 49% et qu’on vous dit : « Voilà ça c’est le résultat » comment vous savez que c’est bien ça que les gens ont voté. En fait, le résultat il paraît plausible. Si ça se trouve ce n’était pas 51 49, c’était 49 51. On ne sait pas.

    Les seuls cas où on voit vraiment qu’il y a un souci, c’est quand l’erreur est évidente. Par exemple avec des scrutins électroniques, on a vu des résultats où il y avait plus de votants que d’électeurs. Ça c’est embêtant. On a vu des résultats où il y en a qui avaient zéro voix alors qu’ils avaient voté pour eux. Au moins eux. On a vu des scrutins où les résultats étaient aberrants. On a vu l’erreur des 1024, le 13ème bit en Belgique où il y a une erreur, à la fin on s’en aperçoit. De temps en temps on voit des erreurs. De temps en temps on a vu limite des fraudes où il y a des candidats fantômes qui apparaissent, des choses comme ça. Là on voit qu’il y a vraiment une erreur.

    Maintenant si l’erreur est discrète, que ça soit parce que le bug ne fait pas beaucoup de dégât ou parce que quelqu’un a fraudé intelligemment, ben ça ne se voit pas. Et une problématique, actuellement, sur un scrutin électronique, la seule possibilité de contrôle que vous avez, c’est, j’adore cette fonction, c’est la possibilité de recompter. Il y a une machine, elle vous dit le résultat c’est 49 51. Il y a un bouton qui dit : « Voulez-vous recompter ? - « Ah oui, j’ai bien envie de recompter ! » Vous appuyez sur le bouton et la machine vous dit : « Le résultat c’est 49 51. Vous voulez recompter ? » Cette fonctionnalité je la trouve vraiment excellente. C’est bien parce que dans le code électoral on a mis cette fonction, mais on ne voit vraiment pas à quoi elle sert en fait. La machine vous imprime le résultat que vous voulez. À la fin elle vous sort un petit ticket. Elle vous dit : « Voilà ! Le résultat c’est 49 51 ».

    La même machine, moi, elle m’a sorti une heure et une date où les heures c’était 65135, les minutes aussi, les secondes aussi, l’année aussi, le jour aussi, le mois aussi. À partir de là, je me suis dit elle peut vraiment sortir n’importe quoi la machine si on lui demande gentiment.

    Public : On a déjà le même problème avec les autres formes plus anciennes de votes. On a des gens qui sont morts qui votent en Corse. On a plein de choses. Est-ce qu’il ne faut pas accepter une part de..., disons de doute ?

    Benoît : On peut se dire ça, effectivement. Si les gens l’acceptent pourquoi pas ! Notez bien que sur la possibilité de truquer les listes électorales, scrutin électronique ou papier, même topo. On peut truquer les listes électorales pareil, ça ne change strictement rien la forme de scrutin. Les machines à voter électromécaniques en France, elles ont disparu à cause de la fraude en Corse. Elles avaient été mises en place pour contrer la fraude en Corse. Ils avaient décidé que comme ça, ça éviterait qu’il y ait du bourrage d’urne.

    Sauf que les limitations techniques du matériel faisaient qu’elles ne pouvaient pas gérer plus de X candidats. Les gens qui voulaient frauder se sont arrangés pour qu’il y ait X + 1 candidats dans chaque lieu de vote.

    C’est une des limitations des machines électromécaniques. Malheureusement, c’est vrai, c’est vrai pour les scrutins électroniques aussi. On pourrait trouver ce type de limitation. Oui il y a des problèmes avec le vote papier ; enfin peu mais ça arrive. Oui il y a des problèmes avec le vote électronique, il y en a même souvent et ils ont une autre ampleur, la possibilité de nuire à toute l’élection et pas juste à un bureau de vote. Et les seules façons de faire avancer le débat, et bien c’est qu’il y ait un débat. Là-dessus je ne peux pas offrir de meilleure réponse.

    Si il n’y a pas d’autre question, on va conclure surtout qu’il y a bientôt la prochaine conférence qui arrive.

    Pas d’autre question. Je vous remercie de votre attention.

    Applaudissements.

    Avertissement : Transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant⋅e⋅s mais rendant le discours fluide. Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.