Emission symbiose du 2 mai 2010 thème : Accessibilité

Émission de radio Symbiose du 2 mai 2010 de 14h à 15h30

Thème du Jour : L’Accessibilité

Animateurs : Emmanuel Charpentier et Luc Fievet

Invités : Armony Altinier, Christelle Thomas, et Sébastien Delorme.

Les fichiers audio sont disponibles ici : Accessibilité et logiciels libres : émission radio du 2 mai

Transcription de l’émission

Luc Fievet : Bonjour, bonjour, c’est Symbiose.
Aujourd’hui on va parler Accessibilité. Donc avec Manu on a fait des choses dans sa cuisine (petit rire). À savoir : enregistrer les nouvelles du libre... Donc on vous passe tout ça et après ça on retrouve nos invités.

Les nouvelles du Libre

Luc Fievet : Donc les nouvelles du libre, en différé de la cuisine de Manu.

ACTA

Donc on va commencer d’entrée de jeu par l’ACTA qui a été publié.
Emmanuel Charpentier : Et oui, publiée par la commission européenne grâce à l’insistance du parlement, c’est une version de travail qui ne liste pas les positions des pays.
Chose amusante, une version pirate avait été publiée peu avant par la Quadrature du Net. Elle listait quelles propositions avaient été faites par quels pays et on semble s’orienter vers deux situations :
*la retranscription du droit des États-Unis. Notamment le DMCA : le Digital Millenium CopyRight Act,
*et une position supposée plus libérale qui prévoit des exceptions comme la copie privée. Là, c’est l’Europe, le Canada, qui mettent en avant ce genre de situations.
Luc Fievet : Donc la version plus libérale comprend la France, avec HADOPI, ce qui laisse rêveur.
Emmanuel Charpentier : Oui, n’est-ce pas. On va voir vers où on va. En tous cas, au moins, le voile a été levé sur l’ACTA.

La Neuf box

Donc ensuite, la Neuf box qui est le Logiciel Libre.
Luc Fievet : Oui, alors, la Neuf Box. La Box c’est cette petite boîte que l’on a chez soi, qui permet d’accéder à Internet, d’avoir la télé et autres joyeusetés comme le téléphone. Et assez souvent, elles comprennent du Logiciel Libre. Donc Neuf avait déjà donné accès au code source de sa boîte mais c’est un code source dont on ne pouvait pas faire grand chose, et là ils viennent de donner les moyens, enfin, le code et les moyens de mettre sa boîte à jour, ce qui veut dire que les hackers, informaticiens, etc, vont commencer à pouvoir bidouiller le code de leur boî-boîte.
Alors c’est intéressant par rapport à Free. Alors déjà Free a annoncé la nouvelle à tout le monde, ce qui est rigolo. Et Free a un procès aux fesses parce qu’elle déploie du Logiciel Libre et qu’elle donne pas le code. On en avait parlé il y a très longtemps, parce que ce truc-là est parti y a un petit paquet de temps. Et, prochaine étape du procès le 27 mai, donc on va en savoir plus bientôt.

Un pack Logiciel Libre pour les petites entreprises.

Autre petite nouvelle intéressante, un pack Logiciel Libre pour les petites entreprises.
Emmanuel Charpentier : Donc, là, c’est la chambre des métiers et artisants de la Somme qui vient de lancer un Pack de logiciels libres à destination des petites entreprises, notamment des artisans. Donc, cela comporte différents logiciels, des suites logicielles, donc vraiment de gestion interne, des ERP. À tester, on va voir un petit peu ce qu’il en ressort à court terme.
Luc Fievet : Voilà, donc super intéressant parce que pour les petites, les gens qui montent leur petite boîte dans leur coin, etc, cela leur évite de se faire coincer par des éditeurs propriétaires et de devoir débourser des milliers d’euros pour se mettre dans la légalité. Là, ils auront du logiciel qui marche bien, gratuitement.

l’I-Phone.

Emmanuel Charpentier : Alors le sujet préféré de notre ami (sourire) : l’I-Phone.
Donc là, cette fois-ci, il s’agit de l’i-phone, une petite gue-guerre tenue, en ce moment, entre Steve Jobs et Adobe, l’éditeur de Flash. Car, tout simplement, l’éditeur de Flash n’est pas accepté sur les I-phone.
Luc Fievet : Ni sur l’I-Pad, c’est.... Voilà... Tu dis « Adobii » je préfère dire « Adaube » parce que je heu... enfin bref... Et donc c’est assez rigolo, parce qu’en fait, ils sont en train de se fritter par lettres et grandes déclarations interposées et l’un accuse l’autre (et réciproquement) de ne pas être assez ouvert. Ce qui est assez marrant parce que c’est un peu comme la peste et le choléra, la paille et la poutre, et ce genre de choses... Donc voilà, c’est assez marrant, il y a plein d’autres choses qui se passent de ce côté-là. ADOBE a du soucis à se faire parce que Microsoft a bien envie de lui casser les pattes également parce que Flash est très important pour la lecture des vidéos sur Internet et donc Microsoft a annoncé qu’ils adoptaient un nouveau format vidéo qui est H264. Ce qui est super sérieux et qui permet de regarder la vidéo directement dans le navigateur en HTML5, sans passer par un lecteur Flash. Donc Flash commence à avoir un peu de plomb dans l’aile ou, en tous cas, du soucis à se faire pour son avenir. Voilà, c’est plutôt favorable au Logiciel Libre et à la normalisation, tant qu’à faire si on peut ne pas passer par un lecteur Flash, tant mieux.
En tous cas c’est assez rigolo de voir Apple faire des leçons d’ouverture à Adobe, et réciproquement.
Voilà, tant qu’on y est.. voilà, c’est la tradition de « tapons sur l’I-phone », parce que... il faut ce qu’il faut, vous avez peut-être entendu parler de ce dessinateur, Mark Fiore, qui fait du dessin-critique et ce genre de choses, et dans les conditions d’utilisation de l’Apple-Store, il ne faut pas se moquer de personne, personnalité publique et politique. Donc, Apple a commencé par lui dire... heu... enfin à refuser son application qui permettait de voir ce truc-là. Il s’avère que ce gars-là a obtenu le Prix Pulitzer pour son travail. Donc ça a fait un petit peu tâche et ça a mis la pression à Apple qui a dû l’accepter.
En tous cas c’est intéressant de voir comment Apple propose un monde bien net où on ne dit de mal de personne etc et où on a le droit de s’exprimer que quand on est célèbre et reconnu.

Contrefaçons, la vraie expo qui parle du Faux

Toujours dans le domaine de la censure, quelque chose d’un peu plus proche de chez nous... Vous avez peut-être vu dans le métro, il y a une campagne pour une exposition à la Cité des Sciences et de l’Industrie de la Villette qui s’appelle : "Contrefaçons, la vraie expo qui parle du Faux"
Et donc ça, c’est un truc qui est fait en collaboration avec l’INPI : Institut National de Propriété Industrielle.
Emmanuel Charpentier : Oui, donc le principal sponsor, celui qui donne de l’argent à priori, il a tout simplement demandé à ce que soit enlevé toute mention des logiciels libres, soit-disant pour faire de l’élagage, pour éviter que le passant ne soit embêté par ces idées-là de partage. Ça suscite beaucoup d’étonnement dans la communauté. Là, c’est Isabelle Vodjdani qui avait écrit des textes pour cette exposition qui ont été tout simplement enlevés.
C’est un petit peu dommage parce que la Cité des sciences, par ailleurs, contribue énormément au Logiciel Libre, notamment à la fin du mois, le 29 et 30 mai prochain, où l’on va essayer de tous se réunir à l’Ubuntu Party qui se déroule à la Cité des Sciences et de l’Industrie.
Luc Fievet : Oui, puisque la nouvelle version d’Ubuntu est sortie cette semaine.

Conférence sur L’Art Libre : Renouveau de l’Art

Toujours dans les annonces on a également, plus proche le 7 mai, la conférence sur L’Art Libre : Renouveau de l’Art, donc à Science Po Paris. Il y a aura projection de Printemps Soluble, le film, dernier film libre du collectif Cassandre, une présentation de l’Art Libre par Antoine Moreau, et après ça, les intervenants de Libre accès qui viendront parler de l’Art Libre. Donc le 7 mai, 19h15, à Science Po Paris.


Sujet du Jour : l’Accessibilité

Luc Fievet
 : Voilà, c’étaient donc les nouvelles du libre. On va pouvoir entamer le sujet du jour, sur l’Accessibilité. Alors, Manu, tu as monté un salon IRC, c’est un truc pour les initiés...
Emmanuel Charpentier
 : Exactement, ceux qui sont initiés, ceux qui ont un ordinateur sous la main, ils peuvent venir, hors du moment exact de l’émission, puisque je suis connecté d’une manière générale sur ce salon, qui s’appelle Symbiose : S Y M B I O S E sur le serveur Freenode qui est un des grands classiques des serveurs IRC.
Luc Fievet
 : On peut aussi, c’est quelque chose qu’on fait rarement, voire jamais, mais également rappeler le numéro, du studio, vous pouvez appeler pendant les morceaux de musique, sinon on ne pourra pas décrocher 01.43.71.89.40. Voilà.
Emmanuel Charpentier
 : Donc n’hésitez pas, vraiment, si vous avez quoi que ce soit, on a mal prononcé quelque chose, si on a sorti trop de sigles, il faut venir nous voir, il faut nous taper dessus, il faut nous en parler. Donc, nous sommes ici pour discuter d’accessibilité, l’accessibilité dans le monde du libre, exactement. Alors, je suis en compagnie d’Armony Altinier, de Christelle Thomas et de Sébastien Delorme, qui vont se présenter chacun, s’ils veulent bien... Armony, si tu veux commencer...
Armony Altinier
 : Oui... donc bonjour, je m’appelle Armony Altinier et je suis spécialisée dans l’accessibilité, du Web plus spécialement et j’anime un groupe de travail au sein de l’April qui s’appelle Accessibilité et Logiciels Libres, ça tombe bien. Et donc on a créé ce groupe de travail en décembre dernier, le 3 décembre exactement et voilà... Il y a des petits messages qui passent donc je suis un petit peu perturbée... (rire) Je me présenterai peut-être plus dans le cours... au fil des discussions.
Emmanuel Charpentier
 : D’accord. Très Bien.
Christelle Thomas
 : Christelle Thomas, bonjour, moi j’ai rien à voir particulièrement avec l’accessibilité, à part que je fais partie du groupe accessibilité de l’April. Autrement je ne suis pas du tout professionnelle dans le sujet.
Armony Altinier
 : Et c’est tant mieux.
Christelle Thomas
 : Voilà.

(rires)

Sébastien Delorme
 : Et moi, Sébastien Delorme, je suis expert en accessibilité au sein d’une société privée qui fait du conseil en accessibilité numérique et en prise en compte du handicap. Je connais un peu moins le milieu du Logiciel Libre. Dans le quotidien j’accompagne, j’aide des entreprises à s’intéresser à l’accessibilité numérique, comment ça se prend en compte, qui cela va concerner, comment on le met en œuvre etc etc.
Emmanuel Charpentier
 : D’accord. Moi c’est Emmanuel Charpentier, informaticien de mon état et adhérent du monde du libre depuis une dizaine d’années. Ça fait pas de mal de se représenter un petit peu. Donc pour commencer, qu’est-ce que c’est que l’accessibilité, c’est un grand mot, c’est un long mot, à quoi ça correspond et qui est-ce que cela touche ? (Consultation des personnes présentes) Armony, peut-être ?
Armony Altinier
 : Alors l’accessibilité c’est une bonne question : il faut d’abord commencer par le définir. Il y a deux définitions qui sont généralement connues :

*il y a l’accessibilité au sens d’universalité, mais qui n’est pas vraiment le sujet qu’on traite en tout cas au sein du groupe de travail April qui est de rendre le Web, mais c’est valable de manière générale, accessible à tous quelque soit la langue, la culture, l’infrastructure réseau etc et l’handicap physique ou mental.
*Et puis à partir de là il y a une définition plus précise qui a été mise en place par l’initiative pour l’accessibilité du Web au sein du W3C qui est un consortium qui régit les standards de l’accessibilité, enfin les standard du Web de manière générale et qui eux ont défini ça de manière plus précises pour les personnes en handicap. Il y a tout un tas de normes après qui se sont mises en place et qui sont pour rendre les sites web accessibles aux personnes handicapées mais qui sont applicables aussi plus largement pour les logiciels et donc il y a pas mal de choses qui sont faites dans ce sens là.

Emmanuel Charpentier
 : Et toi Christelle, c’est... c’est quoi pour toi l’accessibilité ?
Christelle Thomas
 : Pour moi l’accessibilité c’est la possibilité de rendre, surtout les informations quand on parle de Web, les informations accessibles. Que tout le monde puisse en profiter, qu’en fin de compte, une personne ne soit pas bloquée par un site Internet, pour avoir le contenu de ce site Internet, ne soit pas bloquée dans son utilisation sur un ordinateur parce qu’il y a un logiciel qui fait qu’elle ne peut pas s’en servir. Voilà, en fin de compte, qu’on puisse se servir de tout.
Sébastien Delorme
 : Voilà et puis juste pour reprendre un petit peu ce qu’Armony a déjà pu préciser, moi j’ai l’habitude, de parler d’accessibilité, quand je parle d’accessibilité de généraliser l’accessibilité au sens large. On entend souvent parler de l’accessibilité, de l’aménagement urbain, des routes, des trottoirs, des portes dans les bâtiments. Donc sur le numérique c’est à peu près la même chose. On a des normes, comme on a des normes pour les largeurs de porte pour que les gens par exemple en fauteuil puissent facilement passer, on a des trottoirs bateau dans les rues pour que les gens en fauteuil puisse traverser sans avoir à sauter, à passer une marche. C’est quelque chose qui est, on va dire, nécessaire pour eux, pour pouvoir circuler au quotidien dans la rue et c’est quelque chose qui est un confort pour d’autres, quand on a une poussette et qu’on se promène dans la rue on est aussi..., on trouve cela agréable d’avoir des trottoirs bateau.

L’accessibilité numérique ça va être la même chose, c’est indispensable pour certains d’entre nous : les gens qui sont mal-voyants, les gens qui sont sourds. Ça va être aussi un confort pour beaucoup d’entre nous par contre, le fait d’avoir par exemple des sous-titres sur une vidéo, si on regarde une vidéo en anglais. Nous, francophones, on a souvent plus de facilités quand on a la version écrite en dessous. C’est un confort pour tous. Et c’est vraiment une nécessité par contre pour certains.

Emmanuel Charpentier
 : Ça veut dire que enfin là, ce qu’on entend, moi ça me concerne pas plus que cela en fait. Moi je suis bien portant, j’ai mes deux jambes, mes deux yeux...
Armony Altinier
 : Au contraire (rires), ça concerne tout le monde ce que vient de préciser Sébastien. Mais l’accessibilité c’est pas dédié à des experts ou à des personnes en situation de handicap uniquement. Ces règles ont été faites parce que c’est indispensable pour ces personnes là, mais ça profite à tout le monde. Il faut savoir déjà que c’est, une composante de qualité. C’est-à-dire que si l’on fait, alors c’est pas parce qu’on fait un site accessible qu’il sera forcément de qualité ou un outil accessible qu’il sera forcément de qualité. Mais s’il n’est pas accessible, il ne sera pas de qualité. Donc voilà, il y a en fait des critères au niveau de l’accessibilité qui améliorent aussi globalement la qualité. L’accessibilité c’est penser son site, alors je prends l’exemple du web, pour ces utilisateurs.
Emmanuel Charpentier
 : Oui il faut avouer que le Web ça va être un des sujets...
Armony Altinier
 : C’est plus facile...
Emmanuel Charpentier
 : ...les plus importants...
Armony Altinier
 : Ben, c’est un peu un biais que j’ai mais c’est valable pour tout.... Mais, c’est par déformation professionnelle. Mais l’accessibilité, c’est en fait prendre en compte ces utilisateurs dont certains sont en situation de handicap. Quand on se met dans cette démarche là, on se met dans une démarche ergonomique. Enfin, c’est aussi, la démarche c’est un peu, c’est la même. C’est penser son site ou son outil pour ses utilisateurs. Pour que ce soit plus facile pour eux d’y accéder tout simplement.
Emmanuel Charpentier
 : Quelque part, ça veut dire que l’accessibilité va concerner, je ne sais pas : ma mère, par exemple, pour accéder aux logiciels que je fais et qui sont souvent mal compris, un petit peu difficiles d’accès peut être...
Armony Altinier
 : Exactement, ça c’est intéressant alors aussi, avec tout le respect pour ta mère, mais avec les personnes âgées, enfin avec l’âge, le handicap aussi touche de plus en plus de personnes, sans pour autant qu’elles soient handicapées. Il y a une étude qui a été réalisée en août 2009, et une personne sur 5 considère avoir des difficultés dans la vie quotidienne. Une personne sur 10 se considère en situation de handicap. Donc en fait, cela touche beaucoup de monde. Rien que dans le Val d’Oise, il y a 80 000 sourds. Donc c’est pas du tout enfin un épiphénomène. Et puis cela peut arriver en plus, on parle de la nouvelle définition, donc c’est la loi 2005 qui l’a instaurée, c’est une grande loi sur le handicap, donc il y a qu’un article qui concerne l’accessibilité numérique dedans, l’article 47. Donc cette loi du 11 février 2005, elle instaure en fait la définition de situations de handicap et ça c’est intéressant parce qu’on peut tous être en situation de handicap à un moment ou à un autre : je me foule le poignet, je suis sur mon ordinateur, et ben je ne peux pas utiliser la souris : bon c’est quand même pratique de naviguer au clavier. Pour cela encore faut-il que les outils aient été conçus pour que cela marche. Donc tu vois, cela peut te concerner toi aussi.
Emmanuel Charpentier
 : Effectivement, j’ai souvenir de m’être luxé une épaule et d’avoir eu des difficultés mais quand même, cela me paraît un petit peu restreint. Je sais pas, c’est du politiquement correct, c’est du saupoudrage parfois, non ?
Christelle Thomas
 : Quand on fait un site Internet, on vérifie souvent qu’il soit accessible pour plusieurs navigateurs : on pense à ceux qui sont sous Firefox, sur Internet Explorer, Netscape, peu importe... Pourquoi ne pas vérifier, aussi, qu’ils soient accessibles aux personnes qui vont faire tout avec des liens, donc avec.... links, c’est ça...?
Armony Altinier
 : Oui
Christelle Thomas
 : Ou avec des navigateurs en mode texte. On le fait déjà pour des personnes qui sont bien portantes, on va dire entre parenthèses... Pourquoi ne pas élargir un tout petit peu notre façon de faire ?
Armony Altinier
 : Au delà de cela je vais être politiquement pas correcte mais, ça te pose problème, de prendre en compte les personnes handicapées ? Enfin, je veux dire... Pourquoi ? C’est des gens comme nous... Quoi ? Pourquoi on penserait de notre cible, quand on fait un outil, que ce soit un outil logiciel, libre, ou un site web, on le fait pour une personne, cette personne là, ça peut être une cible, je sais pas, les jeunes. Ben, parmi ces jeunes, il y a aussi des personnes handicapées, pourquoi les oublier ? Donc si c’est d’un point de vue commercial, on se prive d’une grande partie de gens, si c’est d’un point de vue humain tout simplement aussi, pourquoi ne pas les prendre en compte ? Et puis, encore une fois, les personnes âgées, il y en a de plus en plus et avec l’âge les limitations, enfin voilà, sont grandissantes. Donc ça touche tout le monde.
Emmanuel Charpentier
 : Vous allez me parler de solidarité, d’égalité ?
Christelle Thomas
 : Même sans parler de cela, quand on fait un contenu, par exemple, sur Internet, on le fait pour qu’il soit publié. Pour qu’il y ait un maximum de personnes qui le voient. On le fait pas, enfin rarement pour soi. Pourquoi s’enlever une grosse partie de la population parce qu’on a pas voulu réfléchir deux minutes à ce que la navigation se fasse facilement au clavier, parce que chaque image sera détaillée. Quand on fait un site Internet, que de photos par exemple...
Emmanuel Charpentier
 : Hum.
Christelle Thomas
 : Soit on met les photos telles quelles : les gens ils vont dire : ouais bon, je sais pas trop pourquoi tu as pris la photo, c’était sûrement intéressant, cela t’a sûrement parlé, mais moi cela me parle pas... Si en dessous on dit, ben voilà : moi quand j’ai vu cette photo, cela m’a fait penser à ça, il y a cet élément dans la photo qui me paraît intéressante et tout ça... Déjà une personne voyante quand elle va la voir elle va faire : « Ah ouais effectivement cette photo elle est intéressante... » et la personne qui est mal voyante même si elle voit pas la photo elle va comprendre pourquoi on a fait cette photo, et ça va donner du contenu au site qu’on a fait.
Emmanuel Charpentier
 : D’accord, effectivement.... oui, ça c’est les petits captions, les petits résumés qu’on va retrouver dans les photos, qu’on peut mettre sous forme de ALT, en HTML, des choses de ce genre là...
Armony Altinier
 : Je croyais qu’on ne devait pas utiliser d’acronymes.

rires

Emmanuel Charpentier
 : Effectivement, effectivement, mais là, c’est ...
Armony Altinier
 : C’est à dire des alternatives textuelles qu’on peut mettre dans le code pour effectivement remplacer un contenu non textuel : un visuel, une image, une vidéo. Donc il y a des tas de choses au niveau technique effectivement.
Christelle Thomas
 : En plus c’est tout simple à faire. À mettre en place, ça ne demande pas de compétence particulière, quoi.
Armony Altinier
 : Alors il y a plein de choses qui sont très simples. D’un point de vue commercial (peut-être que Sébastien pourra nous dire comment il vend cela auprès des entreprises), mais d’un point de vue commercial, moi quelque chose que je vends aussi très bien... c’est que c’est beaucoup plus facile à maintenir : si on utilise tous des standards et qu’on fait les choses correctement, c’est beaucoup plus facile. Donc c’est un investissement peut-être au départ, mais c’est plus facile à maintenir dans le temps parce que on a utilisé tous les même standards. Donc on revient aussi pour moi, quand on a créé ce groupe « accessibilité et logiciels libres », c’était justement parce qu’il y avait aussi, un lien entre les deux. Des standards ouverts ça me paraît indispensable pour une accessibilité réelle, pour tous.
Luc Fievet
 : Alors, pendant les nouvelles du libre, tout à l’heure, on a parlé de Flash ... Je pense qu’il est temps de mettre le sujet sur le tapis.
Armony Altinier
 : Ah ah ah, c’est marrant. On arrête pas de m’en parler en ce moment.
Emmanuel Charpentier
 : Ah c’est le sujet du jour, moi aussi qui regarde beaucoup les news, j’avoue que ça transparaît un peu partout. Et pareil, en tant qu’informaticien, le Flash m’embête beaucoup depuis des années. Mais bon, c’est d’un point de vue technique, je ne peux pas utiliser d’outil texte, parce que je travaille souvent en mode texte et là ... lynx ou w3m qui sont des petits outils antédiluviens mais ne fonctionnent pas du tout avec Flash en l’occurrence.
Armony Altinier
 : Exactement....
Luc Fievet
 : Alors Flash, ça permet de faire des sites super dynamiques, c’est hyper joli...
Armony Altinier
 : Mais ça sert à rien Flash.
Luc Fievet
 : Mais...
Emmanuel Charpentier
 : Ah.... Moi on m’a montré un très joli petit jeu il y a pas longtemps... Vous savez les petits jeux qu’on utilise au travail pour passer le temps... et qui ont l’air, quand même professionnels ? Comment vous pouvez, je sais pas, enfin c’est indispensable...
Armony Altinier
 : Pour certaines choses, Flash reste indispensable... Mais de moins en moins, et on peut rendre Flash accessible... enfin si on a besoin pour un lecteur vidéo par exemple. Moi je sais pas faire sans. Il y a effectivement HTML5 mais c’est pas encore vraiment sorti
Emmanuel Charpentier
 : Ça c’est la dernière norme d’HTML qui est en train de sortir et qui fait parler d’elle.
Armony Altinier
 : Elle est en train de sortir depuis longtemps mais (rires) je sais pas quand elle sortira. Mais bon qui sera un casse-tête, je pense, niveau accessibilité aussi. Donc il y a des choses qu’on peut pas faire sans Flash. Après, faire un site tout en Flash, ce ne sera absolument pas accessible, enfin si on le fait entièrement en Flash ou alors faut une version alternative en HTML donc ça n’a aucun sens : c’est beaucoup plus cher etc. Après il y a des moyens de rendre Flash accessible effectivement. Mais dans une démarche réelle d’accessibilité, on ne peut pas faire un site tout en Flash. Alors ça, ça n’a pas de sens. Et sachant que toi, tu disais que quand tu es en mode texte, t’as pas accès aux sites en Flash, heu oui, logique. Bon les personnes qui n’ont pas accès aux visuels, ben ce sera la même chose... Mais l’aveugle le plus célèbre du monde s’appelle Google, puisque les moteurs de recherche, eux ils indexent les mots. Donc au niveau référencement, ça a aussi une portée de penser son site accessible et là je sens que cela t’intéresse davantage.
Emmanuel Charpentier
 : Tout à fait.

Rires

Emmanuel Charpentier
 : Et donc en entreprise Flash est tout de même indispensable pour faire des choses jolies, des petits détails, le pixel près, les choses comme ça.... Je me tourne vers toi Sébastien parce que je pense peut-être que t’as rencontré ces cas-là dans ton milieu ?
Sébastien Delorme
 : Oui, on rencontre souvent ce cas là, heu... Flash on peut le rendre accessible... enfin après il y a des limites d’utilisation. Donc c’est vrai que si l’on fait un site complet en Flash, comme le dit Armony, de toutes façons on va avoir des limites techniques qui font qu’on peut pas rendre un site Flash accessible. Donc là c’est quelque chose qu’on présente aux clients. Enfin moi les gens avec qui je travaille sont des personnes qui sont intéressées par l’accessibilité donc c’est un argument qui marche bien pour justement limiter justement les sites en full Flash. Après, si c’est des utilisations assez ponctuelles : pour des animations, pour des lecteurs vidéos, pour des jeux, on peut très très bien rendre des petits jeux vidéos accessibles. J’avais vu il y a pas très très longtemps un petit jeu... un petit jeu américain où on touche, on clic sur des cartes... elles se retournent et quand on a deux cartes identiques, elles restent découvertes. Un petit jeu comme cela qui était complètement accessible : quelqu’un qui était non-voyant pouvait y jouer parce qu’il était vocalisé, quelqu’un qui était mal voyant aussi parce que l’on peut changer les couleurs, et cetera, et cetera...
Emmanuel Charpentier
 : Effectivement, mais malgré tout, c’est comme un petit peu le combat des navigateurs, moi j’ai travaillé pendant longtemps : on « oubliait » les navigateurs autres que Internet Explorer, parce que « voilà, vous comprenez, 20% de la population, on ne va pas dépenser de l’argent pour ces 20% de la population, qui ne sont pas nos clients vu qu’à la base, on ne fait rien pour eux. » Comment on....
Armony Altinier
 : L’impression, l’impression que j’ai c’est que ça change. Alors, heu... enfin j’ai aussi ma société, donc je vois aussi au niveau privé des gens qui pour le coup ne sont pas du tout intéressés à la base par l’accessibilité. Mais j’ai l’impression que il y a une prise de conscience aussi de la part des clients et de ceux qui font faire des sites, qui se sont peut être fait avoir une fois ou deux. Qui ont de plus en plus chez eux : Firefox, au bureau : Internet Explorer, chez leurs voisins ils sont sous Mac avec Safari,... Enfin, donc du coup, ils ont plusieurs navigateurs et j’ai l’impression, alors enfin je sais pas si c’est mon impression personnelle, mais qu’il y a quand même un changement dans l’approche vis à vis du web et des outils...
Emmanuel Charpentier
 : Ça c’est peut-être parce que justement il y a les navigateurs alternatifs qui sont en train de reprendre du poil de la bête et de revenir sur le marché.
Armony Altinier
 : Exactement.
Emmanuel Charpentier
 : Donc j’avoue que pour les standards, et la standardisation du Web, il n’y a rien de tel. Maintenant.... effectivement... Donc on va peut-être passer une petite musique ?
Luc Fievet
 : Oui, alors la musique du jour, c’est donc un musicien qui fait de la musique libre de longue date, très prolifique. De la musique un peu « lourde » qui s’appelle David TMX. J’ai fait une sélection des morceaux plus légers. C’est assez rigolo, il y a de l’humour et tout ça... C’est sous licence Creative Commons nc-sa on le trouve sur Jamendo notamment. Vous tapez David TMX et ça se trouve sans problème, voilà. On écoute un premier morceau.
Morceau « Comme un mur » de David TMX
Luc Fievet
 : Voilà donc c’était David TMX. Nous sommes sur radio libertaire : 89.4. Et nous avons une brochette de trois invités pour parler accessibilité. Donc Manu, à toi de jouer.
Emmanuel Charpentier
 : Donc je représente tout le monde rapidement : Armony Altinier, Christelle Thomas, et Sébastien Delorme. Donc nous discutions accessibilité et logiciels libre. Et pour le coup, bon, là ça me fait un peu mal au cœur, mais j’ai parfois entendu dire que le Logiciel Libre n’était pas forcément super accessibles par tout le monde, y compris, bah, non seulement par ma mère, mais plein de gens que je connais, des amis proches,... qui me disent que c’est un peu trop compliqué, que c’est difficile d’installer, ça prend trop de temps, c’est trop risqué. Qu’est-ce que vous leur répondez et qu’est-ce qu’il faut faire comme effort ?
Sébastien Delorme
 : Il y a plusieurs points de réponse en fait, dans la question. Tout ce qui est en fait difficultés d’installation, difficultés pour s’y retrouver, c’est plus de l’ergonomie en fait ... La notion d’accessibilité elle est vraiment plus technique. C’est est-ce que potentiellement, on est capable d’utiliser un logiciel. Alors après si un logiciel est inutilisable par tout le monde, on pourrait dire qu’il est accessible en fait : il a le même niveau d’inutilisabilité par tout le monde. L’idée c’est vraiment : on a un logiciel, on a des fonctions, il faut que tout le monde puisse les utiliser. Avec... pas forcément le même degré de confort... Après le fait de l’utiliser simplement ... ou avec facilité que ce soit un outil intuitif, ça c’est plus de l’ergonomie. Après sur la notion d’accessibilité même des logiciels libres et commerciaux, il y a effectivement des degrés qui sont différents. Par exemple, OpenOffice, on a beaucoup de mauvais retours d’accessibilité sur OpenOffice... Avec Jaws... sur certaines situations bien particulières. Alors Jaws c’est un lecteur d’écran, on en a pas parlé encore. C’est un système propriétaire qui permet de lire les informations qui normalement sont restituées à l’écran, pour faire simple et de les retourner sous forme vocale. Donc c’est une synthèse vocale qui est couplée à un lecteur d’écran, ou braille, donc c’est des petites tablettes physiques qui viennent se mettre à côté du clavier, pour pouvoir lire en braille ce qui se est normalement affiché à l’écran. Donc Jaws, c’est quasiment... on va dire que c’est le lecteur d’écran le plus utilisé en France. Il y a un autre concurrent qui est propriétaire et il y a une autre version qui est open source et dont on peut parler, c’est NVDA.... qui commence à être bien utilisé dans la communauté de personnes mal voyantes et non voyantes...
Emmanuel Charpentier
 : NVDA ca veut dire quelque chose en particulier ?
Christelle Thomas (?)
 : Sans doute...
Sébastien Delorme
 : Le N je sais plus, le V c’est Virtual, le D c’est Desktop, le A c’est accessible. Et donc Jaws est vraiment très très difficile à utiliser avec Open Office, à l’inverse de Word ou de la suite Office. J’avais eu un retour comme ça d’une personne qui travaille dans les services de la Douane où ils sont justement passés sur Open Office. Lui, à Jaws, il est encore obligé d’utiliser Office, Microsoft Office, parce qu’il arrive pas à utiliser correctement la suite OpenOffice.
Emmanuel Charpentier
 : Et il a des problèmes justement... il a des handicaps ?
Sébastien Delorme
 : Il a des problèmes : Il est non voyant donc utilise Jaws avec une synthèse vocale. Et il arrive pas à utiliser correctement OpenOffice. Donc c’est des problèmes qui sont vraiment techniques, c’est pas du tout lié à l’ergonomie du logiciel.
Armony Altinier
 : C’est aussi lié à la licence... enfin.... et à la volonté de Jaws ou pas d’être accessible avec OpenOffice. Là je mets un bémol.... Ce que tu dis est vrai... Open Office peut être accessible, par exemple avec NVDA qui est un Logiciel Libre. Enfin, Sylvain Grille qui est président du comité A.V.H. qui est l’Association Valentin Haüy qui est une association de personnes aveugles dans l’Eure je crois, est totalement non voyant, et utilise NVDA et OpenOffice. Donc c’est possible, c’est accessible, il a fait des tutoriels là-dessus. Je suis pas en train de dire... je suis d’accord sur le fait de dire... qu’un logiciel propriétaire ou un Logiciel Libre, au niveau de l’accessibilité, on retrouve un peu les mêmes problèmes. C’est à dire que bon... c’est pas un problème natif des logiciels libres, c’est pas vrai. C’est pas plus... moins accessibles... ou les propriétaires sont plus accessibles : c’est pas vrai. Il y a les mêmes problèmes et ça dépend. Là où je suis plus optimiste pour le libre, c’est que par le fait que c’est libre et qu’il y a des communautés d’entraide et des évolutions d’une version à l’autre qui sont possibles... je suis assez optimiste sur l’évolution de l’accessibilité très rapidement dans le libre. Parce qu’il y a une mutualisation contrairement par exemple au code source fermé des logiciels propriétaire où il n’y a pas d’amélioration possible en dehors de l’entreprise qui gère, qui édite le logiciel. Pour ce qui est des logiciels libres, il y a une mutualisation, il y a des retours des utilisateurs, et le groupe de travail en l’occurrence de l’April, ça a aussi cet objectif. Et je pense que le succès de ce groupe de travail, qui a été quand même assez rapide, il y a beaucoup de gens qui sont venus, c’est tout nouveau pourtant... montre qu’il y avait une vraie attente dans le libre où il y manquait en fait peut être un endroit où se retrouver. Donc là on se retrouve un peu sur la liste. Le but du groupe ce n’est pas de faire les choses à la place, ce n’est pas de créer des logiciels accessibles, c’est plutôt de mettre en contact, de sensibiliser. Et il y a des choses à... Il y a Christelle qui est là pour Ubuntu.FR... Il y a des choses dont elle va pouvoir nous parler... Ce que j’aimerais dire aussi c’est qu’il y a un vrai problème quand on dit que Jaws... donc on parle de ça, alors juste pour préciser : l’accessibilité c’est pas uniquement pour les non voyants, contrairement à ce qu’on dit parfois, c’est quelque chose dont on parle beaucoup parce que ça illustre bien ce que c’est... le problème c’est que ce sont des technologies d’assistance, c’est comme ça qu’on appelle les technologies qu’on vient greffer pour suppléer à un handicap particulier. Donc là par exemple Jaws c’est pour suppléer à la vue... qu’il va restituer. Ils sont remboursés, enfin ils sont fournis, par les Maisons Départementales des Personnes Handicapés, qui dépendent des Conseils Généraux et il se trouve qu’ils ne fournissent que ça... Donc évidement quand on a... c’est des logiciels qui ne sont vraiment pas faciles à utiliser, il y a un vrai apprentissage dessus. Donc quand on a un logiciel qui nous est payé avec l’argent public, la formation qui va avec qui nous est payé avec l’argent public et heu.. qu’on ne connait pas d’autre alternative, on vient de perdre la vue... enfin voilà tout ce qu’on veut c’est pouvoir utiliser son logiciel... Et il se trouve que Jaws ne marche qu’avec des logiciels Microsoft. Est-ce que c’est étonnant ? Enfin, voilà évidemment c’est très difficile pour le libre d’exister à côté. À côté de ça il y a des logiciels donc qui existent comme NVDA sous l’environnement Microsoft Windows mais Orca aussi sous Linux, ou Gnome, heu...
Emmanuel Charpentier
 : Qui transforment du texte en son...
Armony Altinier
 : Voilà. Voilà c’est la même chose, c’est les équivalents, mais qui sont évidemment, enfin voilà, moins utilisés, donc peut-être aussi moins performants, parce qu’il y a moins de retours, mais il y a un vrai potentiel et je pense qu’à partir du moment où on arrivera peut être aussi... donc ça c’est une des actions que j’aimerais mener à l’avenir avec l’April : c’est de sensibiliser les MDPH : les Maisons Départementales des Personnes Handicapés pour leur dire : « laissez le choix aux gens de choisir leurs logiciels et de choisir leurs formations ». Donc pour l’instant il y a aucun choix qui est donné, donc c’est pas étonnant, il y a un vrai monopole et c’est un vrai problème.
Christelle Thomas
 : Moi je dirais qu’un logiciel c’est pas qu’il soit propriétaire ou libre qui fait qu’il est accessible, c’est la volonté de la personne qui le conçoit : si la personne qui le conçoit s’en fiche complètement qu’il soit accessible, il peut être propriétaire ou libre ça ne changera rien au problème. C’est vraiment comment il a été conçu, est-ce qu’on a pensé à le rendre accessible.
Emmanuel Charpentier
 : À priori il y a un avantage au fait d’être libre c’est que d’autres personnes pourront venir changer la recette de cuisine et pourront intervenir dans l’arrière-salle et faire des mises à jours, forker et faire une production divergente de ce produit là et le faire évoluer vers de l’accessibilité.
Christelle Thomas
 : Ou faire une version divergente ou la personne qui l’a conçu initialement se dit « ah ben oui effectivement ça n’apporte que du plus à ce que j’ai prévu, donc je vais l’inclure dans le tronc principal ». Mais en fin de compte, oui, ça va être ça. Moi je vais l’utiliser je me dis « oh ben c’est dommage, j’ai une tante qui est aveugle elle peut pas l’utiliser alors qu’il est super, ce logiciel. » J’ai quelques connaissances, je vais utiliser mes connaissances pour qu’elle puisse l’utiliser, voilà. Alors que si c’est propriétaire on va pas pouvoir dire « je peux pas lire le code donc je pourrais pas l’améliorer pour ma tante » donc pour personne d’autre non plus. C’est l’avantage du Logiciel Libre, que le code source soit libre.
Sébastien Delorme
 : Il y a des évolutions qui sont aussi vraiment très très rapides, comme on a parlé de NVDA et JAWS. Moi j’avais testé NVDA il y a quelques années, c’était vraiment pas au point, c’était très peu utilisable, on pouvait vocaliser très très peu de choses. Aujourd’hui on est arrivé à un produit qui est vraiment de bonne qualité. Moi je le vois quotidiennement : il y a beaucoup de gens qui commencent à l’utiliser. À l’inverse, JAWS : c’est effectivement une solution commerciale. Pour information, cela coûte à peu près 2 000 € une licence en France de JAWS. Parce qu’on a aussi un distributeur, un pôle une distribution, enfin c’est assez fermé. 2 000 € qu’il faut mettre à jour à peu près tous les ans ou tous les deux ans, quand il y a une nouvelle version. Donc on a beaucoup d’utilisateurs qui sont sur des solutions commerciales, des vieilles versions aussi, donc avec moins de fonctionnalités. Donc qui pourront pas lire du flash, même s’il est accessible parce qu’ils ont une très vieille version de JAWS et parce que les mises à jour sont faramineuses. Là où le libre a vraiment un intérêt c’est, pour les utilisateurs, on le voit avec NVDA, mais ça peut être avec d’autres types de produits : ça peut être la reconnaissance vocale pour pouvoir piloter l’ordinateur à la voix, ça peut être des systèmes de pilotage au regard ou en bougeant le visage pour piloter une souris avec la webcam. La même chose aujourd’hui, c’est, il y a des choses qui sont assez avancées en open-source et qui peuvent maintenant, dès aujourd’hui, être utilisées par beaucoup d’utilisateurs et les versions concurrentes commerciales sont excessivement chères. C’est la loi de l’offre et de la demande aussi, cela concerne pas forcément beaucoup beaucoup d’utilisateurs quoi que... Et du coup c’est des prix qui sont vraiment très très élevés.
Armony Altinier
 : Un autre avantage du libre pour l’accessibilité, c’est que le handicap c’est... alors il y a des grandes catégories qui sont : handicap moteur, handicap visuel, auditif, ou mental, cognitif... voilà il y a quatre....
Emmanuel Charpentier
 : Oui ça correspond, j’ai cru voir des logos avec quatre petite images, un œil, une oreille, un fauteuil il me semble... et puis...
Armony Altinier
 : Oui, exactement et un visage qui est un peu dédoublé pour tout ce qui est handicap mental ou cognitif, et les maladies invalidantes... Voilà, donc ça touche beaucoup de choses. Quand on parle de maladies invalidantes, chose dont on parle beaucoup moins c’est que, à la suite d’un cancer, par exemple il y a souvent des handicaps qui restent après. Des choses dont on ne parle pas. Parce que bon, c’est des choses un peu tabous encore. Mais à la suite de longues maladies, il y a souvent, et malheureusement cela touche beaucoup de monde, des handicaps qui surviennent …
Christelle Thomas
 : Des anévrismes aussi ou on a souvent une paralysie... qui peut arriver à tout le monde malheureusement.
Armony Altinier
 : Et l’avantage du Logiciel Libre pour ça, c’est qu’en fait il y a à la fois ces grandes catégories de handicap et en réalité, chaque personne a sa façon de le vivre aussi …. et ça peut être des choses très circonscrites, enfin très ponctuelles et avec le libre on peut vraiment adapter à chaque situation particulière et il y a beaucoup de gens qui font cela en fait : « Tiens mon copain il a une maladie et bah je vais lui développer une petit truc pour qu’il puisse au moins regarder des vidéos ». On a eu un exemple sur la liste dont je ne me rappelle plus du nom : un développeur qui a fait comme ça un logiciel pour quelqu’un qui était en fin de vie et qui ne pouvait plus utiliser, je crois, que deux doigts et qui c’était un navigateur qui lui permettait au moins d’activer les vidéo car sinon c’était très ennuyeux évidemment. Donc il pouvait au moins tout seul regarder les vidéos. Et cela il l’a fait en libre et c’est des choses, voilà des briques logicielles qui peuvent être réutilisées dans d’autres cas. C’est des choses que commercialement ... qu’il n’y aura pas forcément de logiciels propriétaires qui seront fait pour cela.
Christelle Thomas
 : Et puis chacun sa façon de faire. On trouve tout à fait normal d’essayer plusieurs logiciels pour trouver celui qui nous convient. Sauf qu’à 2 000€ la licence, on ne va pas essayer plusieurs logiciels pour voir celui qui nous convient.
Emmanuel Charpentier
 : Surtout si c’est remboursé par la Sécu et par des organismes officiels qui ne doivent pas donner le choix j’imagine.
Christelle Thomas
 : Voilà... l’avantage du libre, quand il est gratuit, parce que le libre n’est pas forcément gratuit, c’est que justement on peut se dire : « ah bah j’ai essayé celui là, celui là me plaît un peu plus donc je vais garder celui là » , ou ben « les deux ensemble apportent des fonctionnalités supplémentaires, vont ensemble » et de pouvoir choisir le logiciel qui nous convient pour notre utilisation...
Emmanuel Charpentier
 : Donc effectivement. Oui... l’ouverture du choix va permettre des.... Est-ce que vous avez entendu parlé du projet Shtooka ?
Christelle Thomas
 : Oui
Armony Altinier
 : Oui oui oui, moi je les ai rencontrés....
Emmanuel Charpentier
 : Il y a des gens qui travaillent avec... sur l’accessibilité justement c’est quelque chose qu’il touchent. Est-ce que vous pouvez présenter, enfin, si vous vous rappelez, je crois qu’il y a déjà des....
Luc Fievet
 : Oui, on avait fait une émissions sur Shtooka, oui.
Emmanuel Charpentier
 : Voilà, exactement, donc est-ce que vous avez.... réussi à réutiliser des choses ?
Armony Altinier
 : Alors c’est un projet en cours qu’on a en commun. Enfin, qui a été juste un peu ouvert... donc Shtooka.... pour rappeler peut-être : c’est un projet où ils font des enregistrements sonores dans différentes langues pour l’apprentissage au départ de différentes langues. On s’était évidemment ... donc évidemment en licence libre. C’est une espèce de grande librairie... enfin grande bibliothèque pardon... de sons et d’expressions.
Emmanuel Charpentier
 : Oui, cela ressemble à de grands efforts comme Wikipédia ou OpenStreetMap où beaucoup de gens dans beaucoup de pays, ensemble, essaient de constituer une bibliothèque en l’occurrence de sons.
Armony Altinier
 : Voilà, exactement. Oui c’est cela, de sons. Donc c’était vraiment à la base d’un point de vue éducatif. Et puis bon, quand on a eu connaissance de ça, on a essayé de les rencontrer. On s’est rencontré et donc l’idée c’est éventuellement.... donc là il va falloir être aidés de linguistes.... Alors il y a une linguiste dans le groupe de travail qui s’est rapprochée d’eux pour voir éventuellement pour une synthèse vocale libre... Française. Donc là c’est quelque chose qui n’existe pas, c’est un vrai manque... je pense pour développer des choses par la suite... donc eux ils sont tout à fait prêts et très motivés pour le faire et nous aider là dedans. Après il se trouve qu’il font... enfin c’est tout récent donc il faut encore trouver les modalités, s’organiser.... Donc c’est quelque chose qui viendra je pense dans les mois à venir. Ça prendra un peu de temps, parce que qu’il faut pour le coup numériser des « diphones » : donc c’est la plus petite unité... la syllabe quoi, au niveau de la syllabe.... Donc il faut savoir lesquelles il faut numériser... après il faut savoir comment on les exploite. Donc on va travailler là-dessus mais donc il y a un rapprochement effectivement et il y a pas mal d’idées qu’on a eu en commun.
Emmanuel Charpentier
 : Oui j’imagine que les logiciels de génération de son... pour utiliser ces bibliothèques là... arriver à reproduire derrière... Moi j’avais assisté à des conférences aux RMLL, aux « Rencontres mondiales du Logiciel Libre »... Donc les prochaines se déroulent à Bordeaux début juillet.... J’éspère qu’il y aura quelques un de nos auditeurs qui nous rejoindront là-bas.... Est-ce que vous allez... Est-ce qu’il y a des conférences qui vont se dérouler là-dessus cette année...? Est-ce que vous même vous allez faire des présentations...?
Armony Altinier
 : Alors, il se trouve que pour la première fois cette année il y a deux thématiques transversales... Donc en fait les Rencontres Mondiales du Logiciel Libre sont organisées... il y a plusieurs thématiques : donc Éducation, Culture, Politique Publique je crois, enfin je sais plus, Entreprises, et il y avait toujours une thématique « Accessibilité-Handicap » et là pour la première fois cette année, en plus, il y a une thématique transversale... Et il y en a deux : il y en a une sur le développement durable et une sur l’accessibilité et le handicap. Ce qui fait qu’on aura des conférences sur l’accessibilité dans tous les autres thèmes... donc heu... et en plus on garde aussi le thème « Accessibilité-Handicap » donc il y a vraiment une mise en valeur cette année à Bordeaux, c’est du 6 au 12 juillet...heu... de la thématique « Accessibilité-Handicap ».
Christelle Thomas
 : On aura un stand.
Armony Altinier
 : Il y aura un stand oui.
Christelle Thomas
 : En plus...
Armony Altinier
 : Il y aura plein de conférenciers très intéressants. Je coordonne en fait cette thématique « Accessibilité-Handicap » avec Samuel Thibault, on est en train de finaliser le programme et ça s’annonce très intéressant.
Emmanuel Charpentier
 : J’avais assisté, il me semble, il y a deux ans à Mont-de-Marsan à une présentation de clavier virtuel qui permettait effectivement de manière assez originale de sélectionner des mots et de compléter des mots un petit peu à la manière d’un téléphone portable en fait et je me demande dans quelle mesure tout cela ne se recoupe pas : le téléphone portable, c’est un moyen, on découvre des moyens de rentrer des mots, éventuellement de les consulter, de les lire et souvent on a des problèmes qui sont clairement des problèmes qu’on retrouverait sur un ordinateur, qui sont des problèmes d’accessibilité : on a une loupe qui va apparaître, on va permettre de placer un curseur à certains endroits, on va compléter des mots, il va nous proposer des complétions ; ça quelque part, ce sont des choses, c’est de l’aide qu’on retrouve et qui touche 100% des personnes utilisant ces téléphones.
Armony Altinier
 : Hum (approbatif)
Emmanuel Charpentier
 : Est-ce que là, enfin, là c’est des bonnes choses, est-ce que vous pensez qu’il y a des choses qui vont revenir sur les ordinateurs classiques ou des choses qui vont rester dans son coin, toutes ces sélections de mots, ces claviers, ces façons de rentrer du texte...
Armony Altinier
 : Ça se généralise je pense. Enfin après, il y a des bonnes choses dans les nouvelles technologies qui permettent une meilleure mobilité et une accessibilité pour tous. Il y a aussi un problème parfois, Je pense aux dernières choses avec Apple : tout ce qui est tactile, clairement c’est pas idéal pour l’accessibilité : si on ne voit pas son écran on aura du mal à sélectionner, voilà ce qu’il faut. Bon après c’est un mouvement, c’est comme d’habitude, hein : il y a des hauts et des bas. Mais globalement je pense qu’il y a une plus grande prise de conscience de l’accessibilité. Je suis assez récente on va dire quand même dans le milieu, donc je m’étais renseignée auprès d’autres gens qui sont là depuis longtemps et c’est quand même un sentiment qu’ils ont que les choses s’accélèrent depuis peu de temps.

On parlait des fameuses normes d’accessibilités donc qui sont éditées là en décembre. Le 11 décembre 2008, il y a eut une deuxième version de ces normes, il y en avait pas eu depuis 10 ans. Donc voilà, ouai ! Ca y est. Donc ce qui prouve qu’il y a des choses qui avancent, c’est encore en cours de "versionnage", donc il va y avoir des améliorations....

Emmanuel Charpentier
 : Cette norme a un nom ? Pour qu’on puisse la repérer, la voir passer ?
Armony Altinier
 : On appelle ça « Wecag » donc c’est (elle épelle ) W-C-A-G donc ’’Web Content Accessibility Guidelines’’. Donc voilà, mais bon, ça ne sert à rien de les lire en l’état parce que ce n’est pas très facile à lire quand même. Pour ceux qui nous écouteraient et qui seraient développeurs, il peuvent lire plus agréablement, plus facilement le référentiel d’applications. En utilisant ce référentiel qui s’appelle Accessiweb, on respecte aussi les normes internationales. Donc, c’est en fait il y a une loi et il y a le décret d’application. Donc là les lois ce seraient un peu les « Wecag » et la façon de l’appliquer concrètement, ce serait Accessiweb. Il suffit de taper “Accessiweb 2” dans un moteur de recherche et on doit trouver le lien, que je ne connais pas par cœur.
Emmanuel Charpentier
 : Cette loi, elle a quoi comme conséquences sur la majorité des sites webs ou sur les outils informatiques ? Est-ce que ça s’applique qu’aux administrations ? Est-ce que tout le monde a nécessité d’implémenter des choses liées à l’accessibilité ? Est-ce que ça devrait être une réflexion d’ensemble ou bien est-ce que c’est quelque chose d’assez pointue ?
Sébastien Delorme
 : Alors aujourd’hui la loi enfin, c’était un parallèle...

Armony Altinier

 : C’était un parallèle voilà....
Sébastien Delorme : ...c’était un parallèle pour illustrer le référentiel mais pour en revenir à la loi du 11 février 2005, c’est une loi qui concerne toutes les administrations, les entreprises publiques, qui ont pour obligation de rendre accessible leurs sites... tous les services publiques en ligne. Donc les sites Web des ministères, des collectivités publiques, des bibliothèques, des écoles et cetera...
C’est une loi qui date de 2005, le décret d’application est beaucoup plus récent : il date de l’année dernière. On a trois... enfin toutes les collectivités ont trois ans pour se mettre aux normes. Donc c’est quelque chose qui s’est lancé progressivement et aujourd’hui qui commence tout doucement à rentrer dans les mœurs auprès des entreprises publiques et des collectivités. Je connais moi ce milieu là en fait... moi je travaille surtout avec les entreprises privées donc je vais faire le parallèle avec les entreprises privées mais c’est à peu près la même chose. Depuis un ou deux ans, les grosses entreprises françaises s’intéressent vraiment à l’accessibilité, alors chacune pour des raisons un peu diverses : ça va être de l’image de marque, à l’ouverture à un plus large public de services commerciaux en ligne. Parfois c’est aussi des volontés un peu plus fortes qui sont des volontés internes : parce qu’on y croit vraiment, on a quelqu’un dans l’entreprise qui croit vraiment à l’accessibilité, qui veut ouvrir toute l’information, au maximum de personnes. Que ce soit vers l’extérieur ou l’intérieur, parce qu’il y a aussi des obligations légales en terme de recrutement de personnes handicapées. Si aujourd’hui on veut recruter des personnes handicapées, quand on est une entreprise et que son Intranet, ses outils, les outils des collaborateurs, sont pas accessibles, il y a un gros problème. Donc vraiment je ressens ça aujourd’hui : les entreprises s’y intéressent de plus en plus : parce que aussi c’est plus normalisé, on sait comment faire techniquement, il y a pas besoin de se poser 50 000 questions sur comment on va faire, comment on s’y prend. Il y a des normes, il y a des personnes qui sont compétentes aujourd’hui. Et donc vraiment on ressent une grosse avancée et une prise en compte de plus en plus forte de l’accessibilité.

Christelle Thomas
 : Il y a eu beaucoup, il y a cinq-six ans, d’entreprises plutôt commerciales ou semi-publiques qui avaient lancé des contacts par Webcam pour des personnes sourdes et muettes, en langage des signes, pour qu’elle puissent communiquer. En fin de compte, au lieu d’avoir un interprète par point de vente ou quoi que ce soit ils venaient sur le point de vente, il y avait un ordinateur et ils pouvaient communiquer avec une personne.
Emmanuel Charpentier
 : Ce sont tous les avantages du visiophone qu’on nous avait venté depuis des décades et qui finalement arrive.
Christelle Thomas
 : Là ça avait été mais là oui, il y a cinq-six ans il y avait c’était un … pour beaucoup un coup de pub de dire : « ben voilà, vous êtes sourds et muets mais vous pouvez aussi accéder à nos services ». Il y a eu les assurances qui avaient fait cela, il y avait tout ce qui es téléphones....
Armony Altinier
 : ça c’est assez vrai au niveau de l’image de marque des entreprises, ou... ce qui est d’ailleurs intéressant, c’est qu’au niveau labellisation, au niveau européen, c’est des entreprises privées qui sont labellisés et pas les collectivités publiques ou des choses comme ça donc je trouve ça intéressant qu’il y en a qui prennent les devants parce que ça entre aussi dans le cadre développement durable, etcétéra. Pour les collectivités, par contre, et pour tout ce qui est services publiques en ligne, c’est une obligation. Et depuis le 14 mai 2009, ils ont trois ans pour les collectivités territoriales : donc jusqu’en 2012, et seulement 2 ans pour les services de l’Etat. Ça a vraiment déclenché,... : je travaille plus avec le secteur public. Et tout à coup il y a un espèce de vent de panique : « Mince, on est obligés de faire cela ».

Donc déjà ils découvrent, donc ça a apporté, oui une prise de conscience et ils on découvert que ben « on peut rendre son site accessible » : qu’est-ce que ça veut dire ? Enfin... : c’est à dire rendre accessible à qui, à quoi, on fait comment...? Donc il y a une espèce de vent de panique en ce moment, tous ceux qui refont leur site en ce moment, ils se disent « Mince », donc ils rajoutent une ligne vaguement dans le cahier des charges : « en fait il faudra respecter la loi » sans trop savoir ce que cela veut dire. Il y a un vrai problème je crois de professionnalisation qui va se poser : on est pas assez nombreux. Donc il y a un problème d’accessibilité, là encore je vais faire un parallèle avec l’ergonomie, mais il y a pas besoin d’être ergonome pour faire de l’ergonomie. Bon après c’est un métier aussi en soit, il y a besoin de gens très f... enfin il faut des études supérieures, enfin voilà très formés sur l’ergonomie. Et tout le monde doit pouvoir prendre quelques grands principes. Je pense que pour l’accessibilité il faudrait que ce soit la même chose,c’est à dire qu’il faudrait que dans toutes les cursus de base d’informatique, il y ait un peu d’accessibilité pour qu’ils aient au moins conscience que cela existe... voilà. Ce qui n’empêche pas qu’il manquera aussi... ah il en existe... quand même... alors je ne peux pas... on ne peut pas faire une émission sur l’accessibilité sans citer l’association BrailleNet qui fait un gros travail justement, qui a lancé l’initiative Accessiweb en 2005... je crois. Enfin au moment de la loi : 2004 2005 je pense.

Sébastien Delorme
 : Un peu avant même je pense...
Armony Altinier
 : Un peu avant, et donc qui eux ont voulu justement former des experts pour être capables de comprendre parce que bon, j’ai fait un peu de droit aussi dans mes études et je trouve que c’est un peu à la frontière entre la technique et l’application de « Norme » et donc ça laisse une large part à l’interprétation ces normes, il y a souvent des vastes débats d’experts lors des séminaires. Donc il y a un problème aussi de professionnalisation et de savoir... aujourd’hui c’est tellement en vogue de faire de l’accessibilité dès qu’on répond à un cahier de charges pour une administration tout le monde dit : « oui, moi je fais de l’accessibilité. » Et il y a un vrai problème...
Christelle Thomas
 : Parfois c’est en gros sur le site, mais bon c’est pas pour ça que ce soit plus accessible hein. En général c’est écrit voilà : Accessible et puis quand on regarde, non...
Armony Altinier
 : Disons qu... il y a les bons et les mauvais aspects. Le bon aspect de tout ça c’est que bon, ça veut dire qu’il y a une prise de conscience et que les gens veulent bien faire. Après le vrai problème c’est qu’il y a une problème de formation. Et donc il va falloir je pense à la fois former les administrations, à savoir déceler... ce qui est réellement de l’accessibilité de ce qui ne l’est pas... Donc il y a des formations qui sont commandées de plus en plus par l’ADEME par exemple : l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie. Enfin voilà, qui font vraiment qui sont confrontés, tous nos prestataires nous disent qu’ils vont faire de l’accessibilité mais comment je sais si c’est vrai ? Comment je le contrôle ? Donc il y a … toute la chaine de production Web, y compris - parce qu’il suffit pas de faire un site accessible, il faut qu’il le soit dans le temps - donc tous les contributeurs qui ne sont pas du tout techniciens, qui vont mettre à jour le site : eux aussi doivent être formés. Donc il y a toute la chaine qu’il faut sensibiliser, former. Je pense qu’on en est vraiment aux prémices. Mais il y avait une étude très intéressante qui avait été commandée par l’union européenne et qui calculait en fait le nombre de sites accessibles dans l’union européenne et par pays et qui le comparait avec les pays qui ont fait une loi pour imposer au service public ou privé dans certains pays, l’accessibilité. Et on voit qu’il y a en fait une corrélation : plus... quand il y a une loi, les sites en général sont plus accessibles. Donc ce n’est pas vain plus à un impact sur la sensibilisation et la prise de conscience de l’accessibilité.
Emmanuel Charpentier
 : Bon ... Effectivement. on va poursuivre après une autre musique de David TMX. Luc ?
Luc Fievet
 : Et bien allons-y.
Morceau de David TMX : « Fais pas ci »
Emmanuel Charpentier
 : Re-bonjour. Donc Emmanuel Charpentier à l’antenne. Symbiose aujourd’hui : l’Accessibilité et le Logiciel Libre donc avec Sébastien, Christelle et Armony. Donc nous avons déjà discuté pas mal, pour expliquer un petit peu les enjeux qui cela touchait, essentiellement cela touche, aller on va dire 20% de la population de manière forte, mais 100% de la population sur la vie et de manière générale. Ça peut toucher aussi bien parce qu’on va avoir un handicap fort ou léger à un moment donné ou simplement parce qu’on est dans des circonstances ou l’accessibilité est importante. Donc on pense à la fameuse poussette : je crois que c’est une règle qui permet de calculer si un trottoir est accessible. Donc c’est quoi votre bonne règle à vous, votre méthode pour dire ce site Web, cet outil, il est vraiment accessible ?

Rires

Sébastien Delorme
 : Alors ça va être comme... pour répondre en deux mots à cette question...
Emmanuel Charpentier
 : Juste une poussette, un petit concept qui permettra à quelqu’un de dire...
Sébastien Delorme
 : Oui, si on prend aussi... on a les largeurs de trottoirs, les largeurs de murs, et cetera, et cetera... Non sur l’accessibilité ce qu’il faut... le grand concept... si on peut trouver 3 ou 4 grands principes, on va avoir tout ce qui est structuration sémantique, le fait que sur un site Web on ne soit pas capable d’identifier les titres uniquement avec la couleur ou la taille, mais qu’on ait de la sémantique derrière chaque chose, pour que les outils qui vont analyser les pages sachent ce qui est un titre, ce qui est un paragraphe, ce qui est une citation... quand on a une liste, quand on a un formulaire et cetera et cetera... Donc là, il y a plein de règles sur la bonne utilisation du code HTML pour des pages Web.
Emmanuel Charpentier
 : Cette sémantique, il y a trop de syllabes pour moi... il faut que tu m’expliques un petit peu.

Rires

Sébastien Delorme
 : Donc sémantique... Alors pour parler, par exemple d’HTML sur du Web, on a un système de balises pour coder des pages. Chaque balise a un sens particulier. On a une balise qui s’appelle par exemple “paragraphe” ce qui veut dire que le contenu qui est dans cette balise est un paragraphe. On a une balise “titre”, le contenu est un titre ou un sous-titre. Et cetera et cetera. Donc en fait on va pouvoir apporter un sens derrière chaque contenu qui est présent dans le site, pour par exemple qu’une synthèse vocale puisse me dire qu’à ce moment-là on lit un lien, ou on lit un titre, ou on lit une image et que cette image c’est telle alternative. Et cetera Et cetera.
Emmanuel Charpentier
 : Dans OpenOffice ou dans Word, si je comprends bien, c’est l’équivalent du “Style” c’est-à-dire, on va pas juste dire “je mets ce mot en gras” , nan, on va dire “ce mot-là c’est un mot important”.
Sébastien Delorme
 : Voilà ce mot-là : c’est un mot important, il est en gras car il est important. Ou alors on va avoir dans un autre document de traitement de texte un 1.1quelque chose : et bien cela c’est un titre. Nous on le voit parce qu’il est peut-être en rouge et tout le reste est en bleu, mais quelqu’un qui n’aura pas la vue et qui va le vocaliser ou qui va le lire en braille, il a besoin de savoir que cette information est un titre. Donc on a de la sémantique : c’est apporter du sens à chaque contenu. Donc ça marche aussi bien sur du traitement de texte, sur du site Web, sur tous les éléments sur lesquels on peut apporter de la sémantique.
Emmanuel Charpentier
 : Est-ce que c’est un peu plus difficile à faire ou finalement est-ce qu’on s’y retrouve, c’est plus standard ? Ça permet de plus facilement travailler avec d’autres sur des “briques” avec de la sémantique, c’est de la métadonnée, c’est de la donnée sur de la donnée.
Sébastien Delorme
 : C’est de la métadonnée. Finalement, une fois qu’on connaît les règles et qu’on connaît chaque balise, chaque information à apporter, ça ne prend pas plus de temps. Effectivement ça va en prendre plus si on a à refaire tout... quelque chose qui est déjà construit et où on doit modifier ou rajouter chaque balise, apporter de la sémantique dans chaque élément. Mais quand on part d’une page vide, le fait de prendre en compte cet élément-là, ce n’est pas plus long, pas plus compliqué. Ça c’est un des principaux points dans d’autres points qu’on peut lister, ça va être apporter des équivalents textuels à tout ce qui n’est pas textuel par défaut : des images, des vidéos. Avoir des transcripts derrière chaque vidéo pour qu’on puisse les “lire” quand on est sourd ; pouvoir “lire” le contenu des images avec des petites alternatives quand on est malvoyant, par exemple. Ou quand on navigue en bas débit, que les images sont lentes à charger, avoir au moins du texte chargé avant. C’est pour la notion d’alternative en fait : tout ce qui est média, tout ce qui est visuel, apporter une alternative textuelle.
Emmanuel Charpentier
 : Accéder par plusieurs moyens au même type d’information.
Sébastien Delorme
 : Voilà, tout à fait.
Emmanuel Charpentier
 : La transcription va être importante dans ce sens-là pour tout ce qui est vidéo, son. J’espère que d’ailleurs l’émission d’aujourd’hui sera retranscrite sous format texte. Je connais quelques personnes qui font ce genre de choses. Donc on va les pousser pour qu’au moins cette émission devienne un peu plus accessible. Sans oublier, donc là, je reviens là-dessus mais les moteurs de recherches, ils ne peuvent pas, aujourd’hui en tout cas, indexer et pouvoir facilement retrouver le contenu d’une émission radio - son- , ou d’une émission de télé - vidéo. Et bien ils n’ont pas les briques qui permettent de le faire, à un moment donné, il faut pouvoir le mettre sous forme d’un texte : c’est le texte qui a le plus de valeur aujourd’hui sur Internet, sur nos outils...
Sébastien Delorme
 : Voilà, tout à fait...
Christelle Thomas
 : Pour tout le monde. Même si on est ni aveugle, ni sourd ni quoi que ce soit, que quelque part on va bien, si on a une information en plein milieu d’une vidéo, comment on va pouvoir retrouver le passage qui nous plaisait&nbsp ? Sur une heure et demie par exemple, ça va être un petit peu difficile. A moins de le ré-écouter entièrement. Alors que s’il y a une transcription on va pouvoir le retrouver facilement. Donc c’est utile pour tout le monde en fin de compte.
Sébastien Delorme
 : Il y a plein d’évolutions qui ont été faites sur l’accessibilité des vidéos ces dernières années. Tous les grands du Web, les “Google” avec leur Youtube et compagnie, s’intéressent très fortement à l’accessibilité des vidéos. Peut-être pas directement pour l’accessibilité même mais plus pour les problèmes de référencement. Mais derrière, cela a un impact très fort pour les gens qui en ont besoin.
Emmanuel Charpentier
 : De traduction, j’ai testé il y a pas longtemps, et j’ai vu d’étranges sous-titres, traduits en français, mais alors à la volé... et bon, il y a du travail. Je peux vous le dire...
Sébastien Delorme
 : Voilà, il y a du travail mais voilà maintenant on a des technologies qui savent retranscrire du texte à la volée alors forcément il faut retoucher à la main derrière. Mais bon le gain de temps, il est assez énorme. Par exemple, aujourd’hui les chaînes de télé qui sont obligées de sous-titrer les vidéos de leurs émissions le font avec une personne qui intervient derrière à la main. Donc on entend un contenu audio, on le répète, et en fait on a une reconnaissance vocale qui est travaillée avec la voix de la personne qui fait ce travail-là. Donc elle le répète, ça l’écrit automatiquement. Et on le retouche à la main. Donc au minimum, pour retranscrire 24h de vidéo, il faut passer 24heures. Donc la re-transcritpion automatique sur n’importe quelle voix, sur n’importe quel contenu audio, c’est un enjeu assez fort pour pouvoir aujourd’hui sous-titrer, transcrire des vidéos à faibles coûts, et puis aussi pour pouvoir les référencer.

Il y a des études qui ont été faites il y a pas très très longtemps : cnet, je ne sais pas si vous connaissez, c’est un site de news américain, qui parle de techno, d’informatique, qui s’est mis à transcrire toutes ses vidéos sur l’espace de quelques mois, je crois que c’est 3-4 mois, ils ont constaté 30% d’arrivées depuis Google en plus. Parce que tout leur contenu vidéo était d’un seul coup référencé et on pouvait les retrouver via les moteurs de recherche.
Il y aussi France 24 qui a mis son player-H haute définition qui est en ligne, qui retranscrit automatiquement les vidéos.
On est capable aujourd’hui de faire des recherches sur les contenus d’une vidéo, donc on saisit un petit texte et il va nous retrouver le texte, à quel moment il apparaît dans la vidéo, il va nous faire commencer la vidéo à cet endroit. Donc toutes ces avancées qui sont à la base de la retranscription, c’est hyper important du coup pour tous les gens qui vont être sourds, malentendants et puis on peut trouver, imaginer plein de nouvelles fonctionnalités qui sont hyper intéressantes pour tout le reste de la population.
Emmanuel Charpentier : Effectivement, j’avoue que oui, oui, moi je pense à la traduction mais l’optimisation pour les engins de recherche, “surchengine optimisation” où là je sais que c’est un enjeu majeur de pouvoir faire en sorte que le site que vous faites, eh bien il peut être trouvé facilement, il va être le premier, il va arriver tout en haut de la page sur... pas seulement Google, hein, mais en grande partie, il faut avouer, effectivement je sais que c’est considérable.
Moi j’ai un sujet qui me parait important, c’est comment un développeur de Logiciel Libre, lui, il arrive à faire des choses accessibles, ergonomiques, : des choses qui soient pratiques d’accès parce que bon, on en ressort pas ; le Logiciel Libre c’est souvent fait par des barbus pour des barbus. C’est pas des barbus islamiques hein, c’est des barbus qui peuvent être intégristes mais c’est pas les mêmes, c’est les geeks, les informaticiens en général, majoritairement hommes, de 20 à 30-40 ans, qui font beaucoup de choses, qui sont prolifiques mais parfois, ils font des choses pour eux-même. Il faut avouer ce qui est : il font des choses pour la petite population des geeks. C’est un pourcentage assez ridicule de la population globale, mais ils font des choses pour eux...
Comment on fait pour les rendre plus accessibles au reste de la population ? Est-ce que vous, vous avez des conseils à donner, est-ce que vous pouvez les orienter, les aider....?
Armony Altinier : Si déjà ils sont dans la démarche de se dire : on fait plus les choses pour soi-même, mais pour les autres, ils sont déjà dans une bonne voie je pense. Parce que s’ils veulent juste s’occuper d’eux même, ils s’en fichent que ce soit accessible, effectivement...
Après, il y a peu de littérature encore pour l’instant sur l’accessibilité du web en français. Donc c’est un vrai problème qui pourrait être remédié bientôt il parait. Il y a pas mal de choses sur Internet. Après, pour l’ergonomie il y a des livres qui existent. Je pense à celui d’Amélie Boucher chez Eyrolles sur l’ergonomie web qui est très bien fait, très facile à comprendre, avec plein d’exemples illustrés. Pour l’instant, il n’y a rien en français, même en anglais, sur l’accessibilité du web pour aider ces développeurs.
strong>Emmanuel Charpentier

 :Il y a des règles d’ergonomie, on va dire. Je ne sais plus qui les a écrit, peut-être Apple ou des gens de ce type là ; des règles d’ergonomie pour bien faire des interfaces. Est-ce que ça s’applique, est-ce que ce sont des choses qui sont pertinentes dans ce métier ?

Armony Altinier
 : L’accessibilité, j’ai tendance à penser, ce n’est pas une règle mais mon avis, que c’est une partie de l’ergonomie. Dans le sens où l’ergonomie c’est penser son site pour ses utilisateurs. On fait un site ou un logiciel pour un utilisateur, un public en particulier. Et parmi ce public il y en a certains qui ont plusieurs caractéristiques, il y en a qui sont jeunes, qui sont vieux et il y en a qui sont en situation de handicap. L’accessibilité c’est une partie. Il y a des règles spécifiques ; au niveau technique, c’est plus technique. Les règles d’ergonomie, il y en a plein...
Emmanuel Charpentier
 : Je pense au HIG qui sont dans le Logiciel Libre (Human Interfaces Guidelines, Guide des interfaces humaines).
Armony Altinier
 : Si on doit prendre l’équivalent pour l’accessibilité, c’est les WCAG dont je parlais tout à l’heure (c’est le Web Content Accessibility Guidelines).

Donc là on peut se reporter... une partie de l’ergonomie. Donc là, on peut vraiment se reporter. Quelqu’un qui veut vraiment faire quelque chose de bien , il va sur le site AccessiWeb : le référentiel AccessiWeb. Il y a 130 critères donc voilà, c’est hop une liste et il y a à chaque fois des tests pour vérifier si on respecte ce critère ou pas. Donc c’est quand même quelque chose de très pratique. Bon qui est technique et qui est pour les développeurs hein...mais..

Emmanuel Charpentier
 : Mais bon là c’est à eux aussi qu’on parle...
Armony Altinier
 : Mais bien sûr, c’est important. Et donc, il y a vraiment.... enfin c’est assez pédagogique je trouve. Il va y avoir une mise à jour du guide AccessiWeb sur lequel.... Enfin c’est en cours d’être travaillé parce que les normes sont nouvelles. Donc il y a AccessiWeb 2, avant il y avait AccessiWeb 1.1 mais du coup, ils sont obligés de tout remettre à jour, donc le guide n’est pas encore à jour mais il y aura plein d’exemples techniques de code, comment faire etc. Pour l’instant il y a déjà le référentiel Accessiweb sur lequel tout le monde peut aller, allez voir, allez lire. Il y a une explication, c’est pédagogique, il y a un glossaire qui est associé, qui explique aussi les termes un peu techniques. Donc voilà, moi je...
Christelle Thomas
 : Mais pas forcément pour les, vraiment les gros développeurs qui ont fait des études là-dessus... Il y a par exemple, mettre une alternative texte des choses comme ça, il y a des choses très simples que tout le monde peut faire...
Emmanuel Charpentier
 : Les producteurs de contenus, quelqu’un qui fait un wiki par exemple, peut...
Christelle Thomas
 : Quelqu’un qui a juste un petit bouquin d’HTML dans son coin, il peut déjà apprendre deux trois chose en fin de compte. C’est prendre conscience de ce qu’il y a à faire, mettre un contenu bien structuré, séparer le contenu du contenant. En fin de compte des petites bases simples, comme quand on veut faire un beau texte, on différencie le style du contenu.
Emmanuel Charpentier
 : Le fond et la forme, c’est ce qu’on disait tout à l’heure...
Christelle Thomas
 : Et en fin de compte ça, ça fait partie de l’AccessiWeb. Moi je ne suis pas du tout professionelle là-dedans et je l’ai lu et il y a des trucs qui sont tout simples.
Armony Altinier
 : Alors quand on parle de référentiel comme ça il y a aussi un référentiel pour les documents bureautiques. Donc là qui peut être plus pour les contributeurs aussi ou comment rédiger, qui sont aussi édités par AccessiWeb où ils ont extrait en fait du référentiel les 130 critères, des critères pertinents pour les rédacteurs. Et donc bon, il y a des choses comme ça. Pour l’instant c’est vraiment....Enfin quelqu’un qui se pose la question : comment je fais pour en savoir plus, ou pour voir. Mon conseil ce serait vraiment d’aller là.
Sébastien Delorme
 : Ouais, pour synthétiser, il y a effectivement le référentiel AccessiWeb, c’est très orienté Web, c’est vraiment pour les gens qui font des sites, des Intranets, des choses comme ça, du Web. AccessiWeb publie aussi du coup un référentiel sur les documents bureautiques. Ils ont aussi fait des guides qui sont “Comment on fait un document sous Openoffice accessible, un document sous Microsoft Word Accessible...”
Armony Altinier
 : Il l’ont fait sous Openoffice ?
Sébastien Delorme
 : Il l’ont fait sous Openoffice, oui. Tout à fait. Après pour tout ce qui est logiciel, effectivement on est beaucoup moins documenté, pour ce qui est en France ou à l’étranger. Pour ceux qui n’ont pas peur de lire des choses qui sont difficiles à lire, les américains ont fait un gros travail sur la section 508. La section 508 issue de la loi américaine pour l’accessibilité numérique dans laquelle on retrouve plein de critères sur l’accessibilité. Ça va du Web au logiciel, en passant à tout ce qui est matériel aussi. Le fait qu’on ait, je ne sais pas si vous avez remarqué mais le petit point en relief sur la touche 5 de son téléphone, ça c’est issu de la section 508.
Emmanuel Charpentier
 : Ah je pensais que c’était pour moi pour que j’aille plus vite quand je tape au clavier.

Rires

Sébastien Delorme
 : C’est pour pouvoir identifier quand on a pas la vue, la touche numéro 5, et savoir où est le 5 et du coup savoir où sont les 8 autres numéros qui sont normalement autour.
Emmanuel Charpentier
 : Ça permet de replacer, pour ceux qui nous écoutent, vous pouvez replacer plus facilement les doigts sur un clavier, en repérant sous l’index une petite excroissance indispensable.
Sébastien Delorme
 : Oui. Ça c’est dans la section 508. Il y a des choses aussi pour le logiciel dans la section 508 qu’on peut lire. On peut aussi s’inspirer des référentiels web quand on fait du logiciel, quand on nous dit que sur le Web tout doit fonctionner avec le clavier, sans la souris. Sur un logiciel, c’est aussi la même chose, il faut pouvoir l’utiliser entièrement au clavier.
Armony Altinier
 : Les grands principes c’est les mêmes. C’est pour cela que même si on développe du logiciel, les grands principes sont les mêmes : il faut que ce soit compréhensible, que ce soit.. que les personnes puissent interagir avec, que ce soit accessible à la souris, au clavier, qu’il y ait une alternative textuelle aux éléments non textuels.
Emmanuel Charpentier
 : Oui, là on y revient. Il faut vraiment a.voir, à chaque fois des alternatives
Armony Altinier
 : Voilà, du moment qu’il y a ces alternatives.
Emmanuel Charpentier
 : Et qu’est ce que vous recommanderiez à quelqu’un qui est soi-même en position de handicap. Enfin, je suppose que c’est un peu du politiquement correct, j’ai l’impression des fois : enfin à quelqu’un d’handicapé, temporairement ou de manière permanente ? Et à côté de cela, quelqu’un qui connaîtrait dans son entourage, quelqu’un qui a un ami, quelqu’un de sa famille, qui voudrait l’aider, lui permettre d’avoir des outils qui soient plus aisés à manipuler. J’ai cru comprendre qu’il y avait NVDA, ORCA, est-ce que c’est facile d’installer une distribution, une Ubuntu, elle vient de sortir il y a un jour, deux jours. Est-ce que c’est aisé à installer, à mettre en place pour quelqu’un qui est handicapé ?
Christelle Thomas
 : Justement par exemple, pour Ubuntu, maintenant on peut faire avec une tablette braille. Dès le début on nous propose des aides pour l’accessibilité, des lecteurs d’écrans. On peut choisir aussi ça, de dire : « Eh bien j’ai besoin d’un lecteur d’écran » et pouvoir faire l’installation un petit peu tout seul. C’est de plus en plus pensé. Pas encore assez mais de plus en plus pensé. Après il y a bien sur le site de l’April sur la partie accessibilité, où on essaie de répertorier des logiciels libres pour l’accessibilité, des aides... Et puis on peut aussi poser la question aussi : est-ce que cela existe ?
Armony Altinier
 : Je me doutais un peu de la question à un moment ou à un autre. Donc j’en ai noté quatre. On avait parlé de NVDA ou d’ORCA, qui sont des logiciels de lecture d’écran, donc qui vocalisent ce qu’il y a à l’écran.
Emmanuel Charpentier
 : Donc là c’est clairement pour les aveugles j’imagine.
Armony Altinier
 : Voilà, aveugles ou mal voyants. Il y a un logiciel qui s’appelle “Donner la parole” qui est un Logiciel Libre qui permet de permettre le contact et qui va vocaliser pour quelqu’un qui ne peut pas parler, avec différents types de clavier, en LSF, en “Langue des Signes Françaises”...
Emmanuel Charpentier
 : Ah oui...
Armony Altinier
 : ...avec différentes touches. Il y a un autre logiciel qui s’appelle ChewingWords, qui est un logiciel français pourtant...

Emmanuel Charpentier : ChewingWords, qu’on traduirait : “Les mots à mâcher”....
Armony Altinier : Voilà, c’est cela : “le mâcheur de mots” et qui est édité par Aristide Grange et qui est en fait un logiciel qui a un clavier numérique et qui se réorganise à chaque fois pour deviner intuitivement le mot d’après. Pour faciliter la saisie, apprendre la lecture aux personnes dyslexiques par exemple, dont on a pas parlé et qui peut être un vrai handicap.
Et puis pour le dernier, histoire d’avoir le panorama, il y a aussi pour le handicap moteur, un logiciel qui est très utilisé dans l’éducation “Tout en clic” qui permet en fait à des élèves qui ne peuvent pas utiliser le stylo ou le clavier comme leurs camarades, de pouvoir tout faire avec la souris.

Emmanuel Charpentier
 : Et c’est un petit peu à cela que je pensais aussi quand je parlais du téléphone portable parce que j’ai l’impression que ce concept de “Tout en clic” est clairement orienté pour pouvoir l’utiliser au doigt, avec une petit touche...
Christelle Thomas
 : “Tout en clic” on peut faire des découpages, des coloriages, tout avec une souris.Il y a même un compas, il y a une règle, on peut mesurer, tout avec une souris.
Emmanuel Charpentier
 : Voilà ça va être très bien pour quelqu’un qui aura quelques doigts, il faut la main quand même j’imagine...
Armony Altinier
 : Pour le handicap moteur très clairement...
Christelle Thomas
 : Donc ça veut dire...
Armony Altinier Donc
 : ...pour quelqu’un qui ne peut pas écrire normalement mais qui sait se servir d’une souris. Je connais quelqu’un, par exemple qui est tétraplégique et qui ne peut se servir que d’un doigt et qui peut faire plein de choses quand même...
Emmanuel Charpentier
 : Un homme comme Hawkins par exemple, il utilise ce genre d’outil ?
Armony Altinier
 : Ben c’est un logiciel d’éducation pour les enfants donc je ne suis pas sure qu’il l’utilise mais c’est le même principe oui...
Emmanuel Charpentier
 : C’est le même principe oui. Mais bon j’ai l’impression qu’on lui a développer ses propres outils pour lui donc effectivement j’espère que certaines personnes vont pouvoir se mettre ensemble et à la manière d’autres projets, contribuer à améliorer ces choses-là.

Dernière question, sous quelle licence voudriez-vous que cette émission et que vos propos soient diffusés ? Parce que c’est un vieux sujet que j’ai avec Luc, rires qui n’a pas délimité exactement les termes de la licence, c’est-à-dire, “sous quelle forme cette émission peut être reprise par d’autres, rediffusée et éventuellement modifiée” ?

Armony Altinier
 : Ben nous, notre choix est clair, je pense, autour de la table, le plus librement possible : donc une Creative Commons by SA ou Art Libre ou même une GPL.
Emmanuel Charpentier
 : Domaine public sinon ?
Armony Altinier
 : Ben nous, oui... enfin je pense qu’on est tous d’accord pour que ce soit....
Sébastien Delorme
 : On s’est concerté, on est tous d’accord...
Emmanuel Charpentier
 : Maintenant, dernière question, Luc ?
Luc Fievet
 : Sachant que la musique est sous Creative Commons, NCSA, donc...
Emmanuel Charpentier
 : On ne peut plus libre pour le coup...
Armony Altinier
 NC donc ?
Emmanuel Charpentier
 : NC, bah là...
Luc Fievet
 : Non commerciale. Musique de David TMX est donc sous une licence non commerciale, donc on a pas le droit de faire une utilisation commerciale de la musique mais en revanche on a le droit de la modifier.
Armony Altinier
 : Donc c’est pas totalement libre...?
Emmanuel Charpentier
 : Non mais effectivement c’est un vieux débat... Le côté diffuser quelque chose et penser que quelqu’un d’autre va en profiter commercialement est un petit peu compliqué. Moi j’ai tendance à penser que c’est le mot commerce, faire commerce avec autrui qui est important mais bon....
Luc Fievet
 : C’est un vieux débat... Je pense que si on se lance là-dedans... maintenant rires, je pense que Chants&Contrechants ne va pas être très content.
Emmanuel Charpentier
 : Non, non, effectivement, donc Armony, Sébastien, Christelle, on se reverra bientôt j’espère...
Armony Altinier
 : Si je peux juste dire un mot...
Emmanuel Charpentier
 : Oui ?
Armony Altinier
 : Dire que tous ceux qui seraient intéressés par le sujet peuvent rejoindre le groupe de travail Accessibilité-Logiciel Libre de l’April. C’est un groupe de travail de l’April mais ouvert aussi aux non-membres de l’April. C’est pas un groupe de travail technique, donc on peut parler de tous ces sujets. Donc comme le disait Christelle qui n’est pas du tout technicienne, participer très activement dans le groupe. Et donc pour cela il suffit de rejoindre la liste de discussion accessibilité@april.org. Et on aura bientôt un portail : libre-eaccessible.org.
Emmanuel Charpentier
 : D’accord donc très bien, on vous reverra donc à l’Ubuntu Party, aux Rencontres Mondiales du Logiciel Libre donc où je serais volontiers.
Armony Altinier
 : Oui il y aura plein de démonstrations.
Emmanuel Charpentier
 : oui, exactement, ce sera important.
Luc Fievet
 : Très bien, merci beaucoup.
Armony Altinier, Christelle Thomas , Sébastien Delorme
 : Merci à vous.
Luc Fievet
 : Ce fut un grand plaisir... Donc on se retrouve le mois prochain.
Morceau de David TMX : Headbanger

Avertissement : Transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant⋅e⋅s mais rendant le discours fluide. Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.